20 Decrembeïs 2000 de l'Age d'Acier, la Cité de Jade.

Le couple déambule à travers les rues hivernales de la capitale ikhyldienne. Pour cette sortie, ils sont vêtus en civil. Il porte un beau costume qui rehausse son charme demi-elfe. Elle est plus légèrement vêtue et attire facilement le regard. Même ceux qui n'ont de goût pour les créatures serpentines reconnaissent que Sleeslith a un style agréable à regarder. Pour se rendre là où ils souhaitent, il leur faut sortir des grandes artères principales et s'avancer dans des rues plus étroites. Celles où les marchands tentent avec plus d'insistance de vous vendre leurs produits pendant qu'un voleur à la tire vous dépouille de votre bourse. Mais le couple n'est pas du genre à être dupe de ce genre de tours. Un examen studieux de leur démarche révèlera qu'ils sont tous deux militaires de carrière et certainement capables d'arrêter un voleur de bourses.

Les voilà enfin arrivés à l'entrée du bâtiment qui les intéresse. Bien que la pancarte annonce sans équivoque de quel genre d'établissement il s'agit et que la porte soit d'une qualité certaine, l'entrée elle-même est assez discrète. Elle vient se frôler langoureusement contre lui et il en profite pour passer sa main autour de sa taille. Il aime le contact de cette peau soyeuse et chaude et elle le sait. Elle se souvient de leur conversation lorsqu'il lui a annoncé qu'il l'invitait pour un séjour à l'étranger. Un peu ce que ferait n'importe quel couple suffisamment aisé pour s'offrir ce genre de voyages. Si seulement ils étaient un couple officiel, mais leur relation dure depuis un certain temps maintenant. Depuis suffisamment longtemps pour qu'ils aient pris l'habitude l'un de l'autre et pour passer pour un couple officiel.

Il tire sur la corde de la sonnette pour annoncer leur souhait d'entrer dans l'établissement. Un garde grand, musclé et chauve leur ouvre la porte et les dévisage méchamment. Il s'agit de ne pas laisser entrer n'importe qui mais la tenue du couple montre qu'ils sont ici pour se détendre et profiter d'un moment agréable. Alors le garde se fend d'un sourire qui se veut rassurant et les laisse passer. L'intérieur est incomparable et jamais Sleeslith ne se serait imaginée un endroit pareil. Une employée à moitié vêtue de soies transparentes ne cachant pas grand chose traverse le hall. Le mâle ne manqua pas cette occasion pour taquiner sa compagne. Sleeslith lui renvoie un regard désapprobateur bien qu'elle lui sourit quand même.

"Que désirez-vous?"
La voix provient de derrière eux, sur la droite. Ils se retournent pour voir un jeune homme maquillé et à peine vêtu. Cette fois-ci, c'est à Sleeslith de taquiner son amant en lui donnant un coup de coude.
"-Une table pour deux pour le spectacle, répond l'hybride male.
-Par ici.
-Madame Qin jouera ce soir?
-C'est prévu."

Le couple suit le jeune homme qui les mène dans la grande salle principale. Il y a déjà du monde. Apparemment les représentations de Madame Qin doivent être réputées, se dit Sleeslith. Elle laisse son amant choisir la table ainsi que les apéritifs à servir en attendant le spectacle. Il commande du vin elfique pour lui et des oeufs à la coque pour elle. Elle se contente d'enrouler sa longue queue autour de sa jambe et de reposer sa tête sur ses cuisses. Elle tient une de ses mains dans la sienne et s'amuse à la caresser affectueusement. L'atmosphère de la pièce est agréable. Les cuivres, les lourdes tapisseries de velours, les couleurs rouge et or qui se mélangent comme une peinture architecturale. Elle se sent bien.

L’ambiance dans la fumerie était à son comble, chaleureuse et patiente en attendant le début du spectacle. L’arrivée du couple s’était faite dans la bienvenue et la bonne humeur, tandis que les festivités dans ce monde presque isolé du monde extérieur allaient débuter. Les servants et servantes de l’établissement s’activaient pour servir les clients en boisson, nourriture, et en opium concernant les consommateurs déjà sur place dans leurs alcôves respectives. C’est après une dizaine de minutes après l’arrivée du couple que les lumières furent petit à petit réduites pour laisser une ambiance tamisée alors que la scène resplendit de mille feu. Sous les murmures du public qui se tut petit à petit, la représentation débuta avec l’entrée de musiciens torse nu et musiciennes joliment habillées, comprenant tambours, flûtes, bouzouki et instruments plus grave, le tout accompagné de danseuses habillées légèrement pour la beauté du spectacle, dansant et tournoyant sur le rythme entraînant des tambours et la gaieté des instruments.

Une petite mise en bouche suivie de quelques autres morceaux avec cette troupe, racontant une histoire pour certains, misant sur la représentation pour d’autres, passant de l’épopée épique à la ballade mélancolique. Après une bonne heure de spectacle, la troupe salua son public sous l’approbation évidente applaudissements et cris des spectateurs, un musicien prenant la parole pour revendiquer le nom de sa troupe et remercier la maison et Madame Qin de les avoir accueillis ce soir.

Ce groupe de musiciens clôtura alors leur représentation avec un dernier morceau, une mélodie rythmée et emprunte de force, alors que petit à petit ils se reculent pour s’installer dans le fond de la scène. Le morceau baisse petit à petit en intensité, répétant au final le même motif sans s’en lasser tel un roulement de tambour, laissant durer… Quand soudain, le rideau du fond de la scène s’écarta pour laisser le public admirer le clou du spectacle ; Madame Qin en personne, vêtue d’or et de bijoux, et presque rien d’autre que le nécessaire se mariant avec le luxe et l’élégance dont elle dégage, sa beauté surnaturelle emplissant les lieux. Sa coiffure arrangée, sa queue de Naga aux écailles roses affublée de bijoux elle aussi, et son regard vert hypnotisant son public. Elle glissa sur le sol avec élégance, portant son shamisen et son archet d’une main, sa main libre esquissant des gestes au rythme de sa démarche comme une danse sensuelle du poignet et des doigts libres, alors qu’un coussin est mis en place au centre de la scène, sur laquelle et s’installe en entrelaçant sa queue d’une manière aisée et complexe pour l’oeil d’un non averti.

Alors que la troupe s’arrêta de jouer une fois la Dame installée, se préparant à écouter, le silence tomba durant quelques courts instants avant que l’élégante demoiselle ne baisse son regard sur son instrument et se mit à en faire vibrer les cordes. Un morceau simple, sans autre instrument, le shamisen seulement, reprenant quelques sortes de morceaux traditionnels avec un peu de nouveauté ou d’originalité, transmettant toutes ses émotions dans ce morceau en solitaire pour son public.

Elle enchaîna quelques morceaux durant une vingtaine de minutes, et c’est une fois terminé qu’elle se leva, dans le silence le plus complet, et lorsqu’elle s’inclina humblement devant son public, celui-ci l’acclama avec grande joie. Sans trop tarder, elle rentra en coulisses alors que la troupe de musiciens clôtura définitivement la soirée avec un autre morceau à eux.

C’est durant ces derniers instants qu’un élégant et beau jeune homme servant dans les lieux s’approcha du couple et s’adressa à eux en s’inclinant légèrement, d’une voix douce et fluette.

Madame, Monsieur, Madame Qin souhaiterait vous inviter à la rencontrer en coulisses. Si vous voulez bien me suivre.

Blottie contre son amant, Sleeslith contemple le spectacle qui est à la hauteur de sa réputation. La musique est envoutante, les danseuses sont expertes. Les numéros s'enchainent sans lassitude. Elle reste concentrée sur les performances des artistes, du moins jusqu'à ce que sa friandise préférée lui soit servie.

Son regard s'illumine lorsque les oeufs à la coque lui sont apportés. Le mâle lui caresse tendrement la tête, elle en ronronnerait si elle était une chatte mais la sensation lui est tout aussi agréable. A l'aide d'une cuillère, elle casse la coquille de l'oeuf afin de le peler. C'est une opération délicate car il faut bien tenir l'oeuf. Pas trop fermement sinon il risque d'être écrasé entre les doigts et de vous éclabousser. Le blanc est encore fragile mais il est possible de poser l'oeuf dans la main afin d'enlever avec soin la coquille. Ensuite, elle le gobe entièrement et le garde dans sa bouche. Elle presse ses dents contre l'oeuf pour en percer le blanc et faire gicler le jaune dans sa gorge. A ce moment, le délice est si fin qu'elle en ferme les yeux de plaisir.

Enfin le clou de la soirée, la représentation tant attendue commence. Sleeslith observe et hausse un sourcil de surprise. Tout le monde lui a décrit les atours nagates de Madame Qin mais elle ne s'attendait à ce qu'elle ai des traits si fins et des oreilles pointues indiquant des origines elfiques. Une hybride nagate ici? C'est chose connue à Akkaton ou Eïlynster où les nagas sont nombreux mais ici, à Ikhyld? La surprise a lieu d'être. Machinalement, elle jette un coup d'oeil à son amant pour voir sa réaction. Celui-ci ne semble pas plus surpris que ça et pour cause, il connaît déjà bien le pouvoir de séduction des hybrides nagates. Néanmoins il ne reste pas insensible aux effets de scène et d'attraction de la patronne. Il glisse une main le long du bustier de soie de Sleeslith, tentant de la passer par en dessous. Elle l'aide en guidant sa main sur sa chair douce et chaude.

Elle écoute les mélodies jouées par Madame Qin. Elle se prête au jeu et se laisse bercer par les notes. Encore une fois, la qualité est au delà de ce qu'elle s'imaginait et elle laisse échapper un sourire d'appréciation. Alors que la patronne salue et remercie l'audience. Le couple se lève et se joint aux applaudissements. A ce moment, un jeune homme à l'apparence soignée les approche et leur indique que Madame Qin elle-même souhaiterait les rencontrer. Ils se regardent un bref moment puis ils opinent de concert et se mettent à suivre leur guide derrière les coulisses jusqu'au lieu de la rencontre.

Le jeune homme guida le couple en coulisses en passant par un couloir discret donnant sur plusieurs salons masqués de tentures. Il se dirigea vers le fond avant de finalement s’arrêter devant une porte modeste qu’il ouvrit, invitant le couple à rentrer.

Aussitôt la porte passée, les couleurs du salon privé resplendissaient comme un soleil caché dans cette nuit avancée. Des tentures aux couleurs vives bien entretenues fidèles à la décoration atypique de l’établissement, avec quelques meubles près des murs, et surtout un petit salon au centre de la pièce circulaire avec une table centrale et des coussins en nombre sur un canapé qui semblait des plus confortables.

C’était là que Madame Qin attendait le couple, installée dans le canapé à son aise, presque allongée sur le côté alors que sa queue de grande taille était enroulée comme elle le pouvait dans une position au final confortable. Vêtue de sa tenue vue auparavant sur la scène, des bijoux et dorures près du corps et presque rien d’autre, elle avait enfilé un châle rouge au tissu léger et transparent telle de la soie précieuse, de quoi se couvrir sans pour autant cacher la beauté de ses atouts. Il y avait largement la place pour les deux invités, ce à quoi la belle Nagate prit la parole.

Installez vous, je vous en prie. Vous devez sûrement connaître mon nom de réputation, mais vous pouvez m’appeler Kheizhidji.

Elle marqua un temps, son regard analytique prenant le temps de détailler l’un, puis l’autre, avant de finalement revenir sur la Nagate avec un sourire.

Il est rare de voir… Une semblable, ici, en Ikhyld. Je suis assez surprise, agréablement, c’est pour cela que je vous ai invitée à venir ici, pour apprendre à faire connaissance. Alors, qu’avez vous pensé du spectacle, de mon établissement ? Y avez vous bien été accueillis ?

Elle envoya son regard de l'un à l'autre à nouveau tout en conservant son large sourire, son regard grand ouvert ne quittant pas ses hôtes des yeux. C'en serait même effrayant de se rendre compte qu'elle ne cligne pas une fois des yeux, si ce n'est rarement.

Dans un premier temps, le couple entre et commence par regarder la pièce. Les colonnes, les sculptures, les décorations, les tissus tandis qu'ils avancent vers l'hôte. Ils attendent poliment l'invitation avant de s'assoir. L'homme fait ainsi et s'installe sur l'un des sièges curules mais Sleeslith, elle, s'avance droit vers Madame Qin. Sa longue queue glisse sensuellement, son allure est lente, son attitude est pacifique et amicale. Elle ne peut résister à la tentation de s'approcher de la femme hybride qui lui ressemble tant. Comme deux demi-soeurs issues d'un même oeuf. Leurs queues d'or, leurs peaux pales, leurs atouts attirants. L'une avec des traits humains plus en chair et l'autre avec des traits elfiques plus délicats. Cela n'aiguise que d'avantage la curiosité de Sleeslith.

Une fois à portée de contact de Kheizhidji, elle ondule doucement du torse en entendant une main pour lui toucher l'épaule. Un geste qui, en langage naga, signifie qu'elle remercie son hôte pour l'invitation. Elle attend et observe la réaction de Kheizhidji pour voir si elle comprend cette langue. Tout aussi naturellement, elle viendra s'assoir à côté de sa consoeur hybride. Elle tourne alors son regard vers son compagnon tandis qu'il répond aux questions de Kheizhidji.

"Alex", introduit-il, "et Sleeslith, ma concubine."
A ces mots, Sleeslith sourit tant pour confirmer qu'il parle bien d'elle que pour indiquer que cette relation lui convient.
"Je m'attendais un peu à trouver cette qualité de services à l'intérieur de votre établissement mais le spectacle. Le spectacle était vraiment d'une qualité remarquable. Je ne suis pas prêt de l'oublier de si tôt."
De son côté, Sleeslith ne dit rien. Qui s'y connaît en relations extra-conjugales, sait qu'une concubine de qualité laisse parler l'homme. Son influence s'exerce en dessous de son apparente docilité. Elle en profite pour observer plus attentivement les lieux ainsi que les coussins sur lesquels elle s'est assise pour se placer à côté de Kheizhidji.
"L'accueil a été agréable et précieux. A ce sujet, j'espère que nos tenues sont convenables?"
Le mâle pose d'avantage la question par courtoisie que par doute même si il y a une once d'inquiétude dans son ton.

La Nagate observait sans arrêt les deux invités avec un certain sourire figé sur les lèvres. Elle avait une attitude propre à sa réputation et gardait une de façade, certes qui pouvait mettre mal à l’aise, mais un visage figé avec ses yeux verts intrigants et insistants. Elle se voulait importante, forte, maîtresse de son domaine, et pour autant chaleureuse malgré son expression presque surnaturelle. Un contraste étonnant qui avait de quoi rendre cette Madame Qin unique, redoutée et désirée, comme si faire face à une figure aussi intimidante devenait un désir toujours plus insistant à réitérer… Du moins, c’était le cas pour son public et quelques clients en particulier.

Elle écouta l’homme avec attention, portant son regard fixe en sa direction, avant de lui répondre en un honnête hochement de tête, joignant les mains sur la base de sa queue serpentine.

Bien, je suis heureuse de savoir que mes ambitions sont respectées. Et ce serait un plaisir de vous compter parmi nos clients à l’avenir. Mais avant cela, peut-être puis-je vous proposer une dégustation de nos produits ? Je doute que vous ne soyez venus ici que pour le spectacle, et j’ai une idée de l’essence d’opium que j’ai à vous proposer. Il y a un petit salon, juste à côté, vous ne serez pas loin. Deux de mes meilleurs servants vous accompagneront, et je vous offre le service. En gage de bienvenue et pour vous laisser apprécier nos produits. Qu’en dites vous ?

Elle laissa Alex s’exprimer comme bon lui semblait, de toutes manières la belle et hypnotisante Kheizhidji allait s’arranger pour qu’il quitte les lieux et fissa, jouant de son physique avec légèreté et force de persuasion, propre à sa dignité et le pouvoir dont elle dispose en ces lieux. Deux servants, un naga et un elfe, habillés aussi joliment que la totalité des employées, vinrent finalement pour mener leur client poliment vers un salon, ayant préparé de quoi goûter les produits de la maison.

Une fois l’homme hors du salon privé de la Nagate, cette dernière dirigea son regard profond dans celui de Sleeslith, étirant un sourire moins mécanique et plus naturel en sa direction.

Bien, maintenant que nous sommes seules, nous pouvons parler entre femmes sans faire grande révérence. Que me vaut donc la visite d’une aussi… Séduisante semblable ? Vous semblez forte d’esprit, et intelligente. L’on se connaît à peine, mais vous me plaisez déjà.

Sleeslith est intriguée par les manières de Kheizhidji. Quelque chose semble indiquer qu'elle a quelque chose en tête mais elle ne sait. Elle se contente de l'observer faire et de surveiller que son amant est bien traité.

Puis elle voit Kheizhidji user de son charme pour pousser le mâle hybride hors de la pièce à travers une invitation généreuse. Elle commence à saisir un peu où veut en venir la patronne. Et la confirmation ne tarde pas lorsque deux serviteurs invitent son compagnon à les suivre. Evidemment il se lève et leur emboite le pas. Il jette un dernier coup d'oeil vers Sleeslith qui lui répond par un hochement de tête rassurant. Mais en vérité elle n'en sait rien. Tout se passe hors de son contrôle. Elle ne peut donc qu'espérer que ce n'est pas un piège.

Il lui faudra que la pièce soit vide de toute autre présence qu'elles deux pour avoir un signe sur les intentions de Kheizhidji derrière cette manigance. Ainsi donc elle souhaite lui parler en tête à tête et elle commence même par des compliments. Sleeslith reste silencieuse un moment, ce qui ne fait guère de grande différence puisqu'elle n'a pas encore dit un mot en présence de sa consoeur de sang. Elle hausse quand même un sourcil étonné avant de faire entendre finalement sa voix, presque aussi douce et attirante que celle de Kheizhidji.

"Je ne sais si je mérite autant de compliments mais je vous en remercie. La qualité de votre esprit est déjà prouvée."
Tandis qu'elle parle, elle laisse sa queue glisser et venir se coller contre celle de Kheizhidji. Elle est curieuse de voir à quel point leurs reflets dorés sont comparables.

"Le plaisir est mutuel", assure-t-elle à son hôte.
"Si je puis me permettre, je suis pantoise quand à notre similarité. Non seulement je ne m'attendais pas à rencontrer une consoeur si loin mais aux attraits aussi voisins? Encore moins."
Bien que Kheizhidji ai mentionné de laisser tomber les révérences, Sleeslith tente néanmoins de son mieux de se tenir aussi distinguée que sa consoeur de sang.

La patronne de l’établissement observa Sleeslith avec curiosité alors qu’elle s’exprima à son tour. Les queues des deux semies Nagates entrèrent en contact, l’une à l’autre se frottant doucement dans le mouvement avant de finalement s’immobiliser. Kheizhidji se redressa alors de son dossier pour se pencher légèrement vers l’avant, comme pour mieux converser avec son invitée et la voir de plus près.

Mes compliments se basent sur un jugement d’apparence et de ressenti, mais je vous assure que plus nous nous connaîtrons plus la vision que j’ai de vous se confirmera. Mais passons, je suis toute aussi surprise que vous. Une certaine curiosité, je dirais, qui m’a poussée à vous inviter ici, avec moi.

Elle marqua un temps, se saisissant de deux verres qu’elle retourna d’un mouvement de poignet et d’une bouteille d’alcool fort de très bonne facture, de toute évidence.

Prenez vos aises, je sais que vous êtes ici sur mon territoire, mais vous y êtes mon invitée, soyez en sûre. Votre mari doit sûrement apprécier la qualité de nos produits, si ce n’est se ravir le regard de nos employées. Vous prendrez un verre ?

Elle servit donc par la suite un quantité raisonnable d’alcool, pour son invitée si tel était son souhait, et ensuite pour elle. Elle reposa la bouteille avec une délicatesse innée avant de saisir son verre.

J’ai autant de questions que vous, et nous avons une soirée pour y répondre mutuellement. Qu’en pensez vous ? Cela me semble, personnellement, être un bon compromis. Vous dites aussi loin, qu’entendez vous par là, Sleeslith ?

Kheizhidji porta le verre à ses lèvres une fois que la Nagate se sera emparée du sien -ou pas- pour y boire une petite lichette avec appréciation. Elle releva rapidement son regard pour croiser celui de sa semblable, comme cherchant à maintenir une sorte de connection entre elle et sa consoeur, la proximité de leurs esprits et l’appréciation mutuelle semblant favoriser l’échange.

Sleeslith avait déjà commencé à prendre ses aises avant même d'y être invitée. Un peu trop familière? Pour une autre race peut-être, mais pour une hybride nagate qui parle la langue des nagas pas tant que ça puisque c'est un langage qui mélange expression orale et gestuelle. Pouvoir avoir un contact physique lui est donc nécessaire pour pouvoir communiquer corporellement certaines choses avec Kheizhidji. Et même si elle n'est pas aussi expérimentée que sa consoeur de sang pour manier les mots, elle a pu quand même deviner l'intérêt de celle-ci au point de se permettre ce rapprochement physique. Ce n'est pas non plus comme si le contact charnel avec Sleeslith était désagréable, bien au contraire et son amant pourrait vous en dire long à ce sujet.

Elle opine doucement lorsque Kheizhidji lui demande si elle souhaite un verre de cet alcool inconnu. Et elle continue de l'écouter, tant pour entendre ce qu'elle a à dire que pour se familiariser avec ses manières. Elle sourit lorsqu'elle appelle son amant son 'mari'. Il lui faudra rectifier ça mais pour le moment elle laisse la patronne des lieux parler.

A vrai dire, elle est un peu surprise par la dernière question. Elle s'imaginait qu'en tenant ce genre d'établissement, Kheizhidji avait déjà vu du monde venant des quatre coins de la terre et connaît suffisamment les royaumes sans avoir eu besoin de les visiter. Mais il lui faut d'abord parler de son 'mari'.

"Ce n'est pas mon mari", commence donc Sleeslith.
"Même s'il est vrai que notre relation dure depuis plus de 30 ans, c'est un homme loyal. Je suis l'exception qui confirme la règle."
Elle termine sa phrase avec un demi-sourire entendu et charmeur. Il n'y a qu'à poser les yeux sur Sleeslith pour comprendre comment et pourquoi il a pu craquer sur elle. Puis elle continue sur un ton doux, envoutant et presque apaisant.
"Nous venons tous deux d'Eïlynster et là-bas, les nagas se mêlent plus naturellement aux autres races. Je n'y suis ni la première ni la dernière de mon espèce dans ce royaume. Qu'en est-il de toi? D'où viens-tu?"
Encore une fois, Sleeslith fait preuve d'une familiarité certaine en tutoyant la patronne des Volutes Capiteuses. Et encore une fois, elle espère anticiper correctement en levant une autre distance entre elles.

Le sourire de l’hybride s’élargissa en voyant que son invitée prenait ses aises et n’avait pas de mal à entamer la discussion, ce qui était une très bonne chose. La Nagate légèrement vêtue ne se sentait pas dérangée de cette proximité avec sa consoeur, et sembla même répondre à ce genre de langage corporel. Les écailles rosées de sa queue brillaient en réaction aux luminaires, alors qu’elle reposa son verre. Elle acquiesça doucement, en signe de politesse.

Oui, je comprend. Désolée dans ce cas, je ne m’y méprendrait plus. Cela dit, je suis bien contente de savoir que mes semblables savent jouer de leurs charmes, comme moi je le fait, c’est un atout indéniable à ne pas gâcher.

Elle joignit ses mains dans sa réflexion avant de poursuivre, son regard dans le sien.

Eïlynster, donc. Cela explique plusieurs choses, en effet, c’est un plaisir, encore, de vous accueillir ici. Quant à moi… Je suis née ici, en Ikhyld. Ma mère est une elfe, elle était partie en voyage avec un groupe de voyageurs dans le désert Orzanien pour affaires, mais ce n’est pas important. Mon père était un Naga, originaire de tribu. Ma mère s’était arrêtée dans leur tribu, et mon père est parti avec eux, sa curiosité le poussait à voyager. Et c’est ainsi qu’ils se sont rencontrés, ils se sont aimés, malgré les passages de séparation, et ont finalement décidé de s’installer en Ikhyld. Une histoire simple, sans grande épopée, et pourtant… Une femme de ma stature n’a pas de père ni de mère, dans l’esprit général des gens qui m’adorent. Ils s’imaginent que je suis née, comme ça, aussi belle et mature que je le suis. Mais la vérité est différente et me convient bien.

J’ai été élevée ici, donc, dans un village non loin de la capitale, dans la tranquillité. Je voyage, de temps en temps, pour affaires. Mais je n’ai pas eu l’occasion de renouer avec certains peuples Nagas ou rencontrer d’autres personnes telles que toi. Des hybrides Naga, j’en ai vu passer, certes, mais tu es la première qui me soit ainsi accessible et qui m’attire suffisamment pour que je fasse le premier pas.

Alors que l’Eïlynsterienne réduisa la distance d’un cran supplémentaire, Kheizhidji en fit de même, glissant davantage en sa direction, avec précaution, alors que dans un simple réflexe, elle reposa délicatement sa main sur une part à portée de la queue serpentine de son interlocutrice.

Sleeslith ne manque pas de noter l'insistance du regard de Kheizhidji. En réponse, elle pose sa tête sur les cuisses serpentines de la patronne de l'établissement afin de lui confirmer en langage corporel qu'elle accepte sa demande d'amitié. Ses épais cheveux de jais s'étalent de part et d'autre de sa nouvelle amie, telle une mare d'encre. Une invitation silencieuse à y écrire une nouvelle histoire ou bien à garder un secret?

Un bref sursaut du bout de sa queue trahit son excitation d'entendre l'histoire de Kheizhidji tandis que celle-ci en parle avec aisance et naturel.

Dans un premier temps, elle est un peu confuse par la comparaison et a du mal à imaginer un mode de vie militaire utilisant ses charmes ici, comme elle le fait à Eïlynster mais qui sait? Peut-être qu'il y a plus de discipline et de rigueur derrière ces rideaux qu'il n'y parait? Sleeslith ne relèvera pas que la comparaison lui semble étrange mais notera la possibilité qu'il faut peut-être un charme de fer pour maintenir un tel lieu.

Sleeslith profite de la pause dans la conversation pour répondre sur certains points. Son regard suit instinctivement les gestes de sa nouvelle amie. Elle sent un contact. Son regard se tourne vers sa propre queue. Kheizhidji s'est glissée doucement pour se rapprocher d'elle. Elle y répond favorablement en commençant d'abord par dérouler sa longue et puissante queue et ensuite l'enrouler affectueusement autour de la patronne, comme une étreinte entre deux vieilles amies de longue date qui se rencontrent après des années d'absence et partagent la joie de se retrouver... sauf qu'elles sont demi-naga, c'est donc en invitant Kheizhidji à entrelacer sa queue avec la sienne qu'elle souhaite exprimer sa joie de découvrir une nouvelle amie.

"Les terres les plus complexes ne font pas nécessairement les champs les plus fertiles", commence-t-elle pour répondre au commentaire sur la simplicité de l'histoire de Kheizhidji. Un vieil adage du terroir que les militaires aiment citer pour se donner un air sage tout en restant terre à terre.
"C'est la curiosité de ma mère qui l'a poussée à suivre mon père."
Et les similarités entre les deux hybrides continuent de s'accumuler, comme un jeu de miroirs aux couleurs différentes.
"A l'époque mon père était de nature frileuse, il est toujours mais à l'époque ça le gênait. Il gardait sa tente toujours plus chaude que les autres et toujours seul pour ne pas se faire railler par ses camarades de bataillon. Ma mère n'a pu résister à la tentation de s'installer dans cette tente plus chaude. Mon père aime me raconter cette histoire car non seulement c'est le moment où il a rencontré ma mère mais aussi où il a cessé d'être gêné par sa nature frileuse puisqu'au final, ça lui a valu de découvrir son épouse et plus tard d'avoir une fille ensemble."
Elle parle sans gêne et sans retenue. Elle se tourne légèrement pour observer d'en bas son amie. Sa peau à peine plus vêtue que la patronne, sa bijouterie presque aussi multiple et ses formes féminines étalant leur charme naturel au creux du giron de Kheizhidji.

Elle n'a pas manqué de noter que son amie est passé au tutoiement, ce qui confirme l'intuition qu'elle avait eu et la rassure sur son geste anticipé.
"Je voyage peu. J'ai trop à faire en Eïlynster pour ça mais j'entends parler des nouvelles ici et là. Pas trop des histoires d'affaires commerciales. Plus souvent des sujets de conflits ou de dangers armés. Quand mon amant est disponible, il m'invite à visiter d'autres royaumes comme ici. Mais ça me va, je n'aime pas rester seule de toute façon."

Sleeslith se sent étrangement bien, non pas ce genre de bien-être qui provient d'un alcool fort mais quelque chose de plus profond, de plus spirituel. Tandis qu'elle parle, elle observe Kheizhidji et se demande jusqu'à quel point elles ont autant d'affinités communes.
"Je suis fille unique, et toi?"

C’était clair, le regard émeraude de la belle Nagate ne quittait pas celui de sa semblable. Dans leur rapprochement, cette dernière s’allongea paisiblement pour reposer sa tête contre les jambes de Kheizhidji, ce à quoi elle apposa sa main libre dans la longue chevelure de jai de Sleeslith. La nagate parée d’or caressa tendrement le cuir chevelu de la Lieutenante pendant l’expression de ses pensées, alors que sa main posée sur la queue de sa partenaire en fit de même, avec douceur et délicatesse. Soudain, Sleeslith se remua pour se dérouler et mieux s’enlacer toute contre la patronne de toute sa longueur, sa queue et la sienne s’emmêlant dans un silence intime. Kheizhidji laissa donc sa main glisser le long de la queue de sa partenaire durant le mouvement, sans la bouger de là, son autre main glissant le long du crâne de Sleeslith pour se glisser dans sa nuque avec tendresse, comme pour la maintenir contre elle avec attention.

Alors qu’elle eut finit de parler de ses parents, la Nagate argentée se repositionna pour croiser son regard avec celui de la rosée, chose à laquelle Kheizhidji répondit immédiatement, venant établir à nouveau de contact visuel si cher à leurs âmes. Elle prend un temps, avant de finalement répondre, simplement.

Je suis fille unique.

Elle n’ajouta pas grand chose, pas tout de suite. Elle était occupée à détailler le visage et les contours de sa consoeur en lui caressant les cheveux, dans un instant proche et fusionnel.

Et mes parents vieillissent, paisiblement, mon père est sur ses dernières années, ma mère veille sur lui, chaque jour.

Un autre temps, elle vient doucement resserrer son étreinte, sa queue contre celle de sa partenaire, rendant le noeud plus restreint et affectueux.

Moi aussi, j’entends parler des nouvelles. Même de beaucoup. Je suis patronne de fumerie la nuit, mais le jour je vend des informations. Mes employées écoutent, mémorisent, et des fois je trouve ce que mes clients… Spéciaux, cherchent, ou perdent. J’ai mes secrets, je les garde bien, et ceux de mes amis proches aussi. J’aime les écouter, soulager leur âme, les consoler, sans jamais les trahir. A l’inverse, je ne peux faire confiance en personne pour dévoiler les miens, alors je les garde, et vend les informations qui intéressent ceux qui sont prêts à payer.

Elle glissa ensuite sa main sur la joue de Sleeslith, ses doigts fins et délicats aux ongles joliment colorés effleurant le galbe de la joue de l’Argentée.

Quiconque entrerait à ce moment pourrait aisément jurer que ces deux-là ne se sont pas rencontrés il y a à peine quelques minutes, mais qu'elles se connaissent depuis des décennies à en juger par la complicité naturelle qui émane entre elles.

Sleeslith ne manifeste aucune résistance au contact physique de sa consoeur de sang avec laquelle elle a tant de points communs. Ce serait des plus contradictoires après toutes ces invitations à se rapprocher qu'elle se mette à en nier les actes. La conversation continue, accompagnée du doux et feutré cliquetis des diverses bijouteries de l'une ou de l'autre tandis qu'elles se blottissent ensemble.

Lorsque Kheizhidji passe sa main à travers les longs cheveux de la lieutenant pour la glisser vers son crâne, celle-ci lui esquisse un demi-sourire captivant, en retour. Une façon discrète et certaine de lui assurer que tout va bien. Non point qu'il y a de quoi en douter mais Sleeslith a simplement envie de communiquer sans retenue avec sa nouvelle amie. Puis à son tour, elle déplace une de ses mains vers le bas, vers sa propre queue, jusqu'à se poser sur celle de Kheizhidji qui s'y trouve déjà et s'y joindre. Les deux hybrides parlent donc avec leurs corps et leurs mots comme une sorte d'orchestre à plusieurs instruments même si l'une est clairement plus douée que l'autre. Cependant Sleeslith arrive à suivre le rythme de cette double conversation avec assez peu de difficultés.

Je suis fille unique.
A ce point, Sleeslith n'est même plus étonnée de découvrir un autre point commun avec Kheizhidji. En guise de réponse, elle se tourne légèrement pour exposer d'avantage son visage au regard de son amie qui semble si fascinée par celui-ci. Et elle fermera les yeux pour se concentrer sur ses autres sens. La fraicheur des peaux, le mouvement des contacts corporels, les parfums de son amie et dans la pièce, les éphémères bruits des bijouteries qui se balancent au rythme de leur gestuelle, le son de la voix, les intonations.

Elle écoute Kheizhidji se confier, lui livrer des informations sur les différents aspects de son métier. Les yeux toujours fermés, elle sent le contact de la main de son amie sur sa joue, elle accompagne le geste pour lui assurer silencieusement qu'elle partage les mêmes valeurs morales. Jamais elle ne trahirait quelqu'un qu'elle apprécie. Son silence est accompagné par celui de Kheizhidji.

Elle se décide de prendre la parole mais elle baisse le ton et passe sur le mode du chuchotement ce qui est aussi le premier secret qu'elle révèle à son sujet. Elle préfère les nuances, les demi-tons et peu le savent car son métier se prête peu à cette préférence auditive.
"J'ai peu de secrets. Je suis plutôt un livre ouvert", dit-elle à voix basse.
Inconsciemment, elle s'étale un peu plus au sein de son amie comme pour confirmer visuellement ce qu'elle dit.
"Mon métier est surtout sur le terrain, à sécuriser les routes, chasser les troubles, attraper les intrus, les escorter dehors si ils sont sans danger ou les amener devant un juge s'ils représentent une menace. Même si ca semble ordinaire, ce n'est pas de tout repos et c'est un travail nécessaire. Maintenir en permanence un état de paix en tout lieu. Voilà."
Elle concluera en ouvrant ses yeux pour observer la réaction de Kheizhidji. Elle a bien noté que son amie n'a personne à qui confier ses propres secrets et elle le regrette mais elle voit aussi bien que Kheizhidji n'est pas du genre à se laisser souffrir d'un manque quel qu'il soit.

"Qui est-ce qui s'occupe de tes tenues?", demande-t-elle tandis qu'elle tend une main vers le ventre de son amie pour toucher l'une des décorations dorées qui la parent. Ses doigts effleurent à peine la peau de son amie tandis qu'elle se saisit d'un des bijoux pendants pour le faire miroiter dans la lumière des lampes de la pièce.

Alors que Sleeslith ferma les yeux, Kheizhidji maintint ses douces caresses sur la joue de sa partenaire tandis que sa main sur ses écailles remonte le long de son maillage en effleurant le tranchant des écailles, comme une sorte de méditation sereine. Elle ne ferma pas les yeux, prenant le rôle de la veilleuse, accueillant son amie auprès d’elle et lui assurant sa sécurité durant son repos insouciant. Kheizhidji acquiesça doucement, sans commenter, les paroles de sa partenaire concernant ses occupations étant positives aux oreilles de la Nagate, il faut dire que ce genre de préoccupations sont loin d’être modestes, et d’une part les deux Nagates s’étaient imposées comme étant utiles pour la société, au lieu de se laisser immerger. Voilà là une force que les deux partageaient, elles étaient parmi les dirigeantes, celles qui, à leur échelle, avaient des responsabilités.

Elle mêla ses doigts aux mèches d’ébène qui traînaient non loin, son ton se faisant plus bas au rythme que celui de sa partenaire n’en devint qu’un murmure.

Je n’ai guère le temps de m’en occuper, je paie une costumière professionnelle, la qualité doit résider dans mes représentations. Mais elle taille mes tenues comme je l’entends, pour que je m’y sente à l’aise, que ça colle mieux au personnage qu’est Madame Qin, et qui n’est pas vraiment différent de moi.

Elle se tut ensuite, laissant le calme reprendre le dessus dans ce moment rapproché. Les sens ont de quoi être sollicités ; la pièce en elle-même dégage une sensation de chaleur, une légère odeur d’épices mêlées au tissage en laine des tentures, une odeur tout aussi spécifique. La Nagate en elle-même a un quelque chose naturel. Des senteurs orientales, correspondant à l’ambiance générale de la pièce, mêlées aux émanations de l’alcool partagé un peu plus tôt, le musc de sa peau suite à sa performance précédente et son châle de soie imprégné d’une odeur indescriptible, une alchimie propre à la Nagate qui constitue son parfum naturel.

Quant au toucher, les tendres échanges des deux Nagates suffit pour s’assurer de la douceur de leur peau, mutuellement, dans une tendre réunion.

Crois-tu au concept de l’âme soeur ?

Silence. L’ouïe était ici sollicitée par le doux bourdonnement des voix spontanées de l’une et de l’autre, alors que le silence ambiant était constitué des légers frottements des tissus durant les caresses, soie contre soie, peau contre peau.

Je ne m’y suis jamais vraiment attardée, je dois dire, quelque chose que l’on écoute, comme ça, sans se sentir vraiment concernée.

Elle leva sa main de la queue de la nagate pour la poser sur son avant bras libre, effleurant à nouveau la peau pour la caresser, glissant jusque le dos de sa main pour venir y glisser ses doigts entre les siens, mêlant sa main à la sienne dans un doux symbole d’union.

Mais aujourd’hui… Aujourd’hui, cela me semble évident.

Sleeslith se prélasse et s'étale lascivement sur les genoux serpentins de son amie. Bien qu'elle parle de sa vie, elle ne soucie plus de rien. Elle aimerait que ce moment se fige afin de pouvoir en savourer chaque nuance, chaque détail. Puis Kheizhidji pose une question cruciale et pas n'importe quelle question ni à n'importe qui. Au delà de leurs innombrables points communs qui justifie cette question, Sleeslith a définitivement un avis sur le concept de l'âme soeur en tant que mage de l'Ame.

Tandis que Kheizhidji tente d'avouer à demi-mots quelque chose de plus profond et qui semble la troubler, Sleeslith se retourne lentement pour prendre appui sur ses mains et se relever sans pour autant délacer sa queue de celle de son amie. Ses longs cheveux noirs décoiffés tombent et s'éparpillent sur son dos. Sa tiare d'or et de gemmes est légèrement décalée sur le côté. Elle étend un bras et le passe autour de la taille de Kheizhidji. Elle se penche en avant et tente d'attraper de son autre main des coussins à porter afin de les ramener à elle. Elle ne dit mot. Seuls les bruissements de ses mouvements et les mots murmurés par Kheizhidji résonnent dans la pièce

Alors que Kheizhidji finit d'expliquer son ressenti, Sleeslith tente de la tirer hors de son siège. Elle ne force pas mais elle suppose que Kheizhidji ne résistera pas. Elle amène celle-ci contre elle puis la pousse doucement sur les épaules pour lui indiquer qu'elle souhaite que son amie s'allonge sur les coussins. Elle ne dit toujours pas un mot. Son pouls est calme, ses gestes sont prévenants.

La question posée est de taille et Sleeslith ne peut y répondre si elles ne sont pas à égale hauteur, ce qui sera rapidement accompli si elles s'allongent ensemble. Elle observe Kheizhidji tandis que celle-ci s'allonge sur les coussins rassemblés à terre. Elle bouge légèrement sa queue. Cette nouvelle pause l'oblige à réviser la position de sa queue pour ne pas la coincer d'une manière inconfortable. Puis elle vient s'allonger contre Kheizhidji. Elle pose ses mains croisées sur le décolleté de celle-ci avant de venir y poser sa tête. Le menton sur ses mains, elle regarde dans les yeux de son amie. L'or se mélange à l'émeraude. La voilà maintenant dans une position très intime, telle une confidente de confiance.

Elle lève brièvement son menton pour dégager une main et la tendre vers le visage de son amie. Puis elle repose son menton sur sa deuxième main qui n'a pas bougé de place et répond finalement à l'interrogation qui préoccupe Kheizhidji.
"C'est quelque chose d'important quand ça arrive", dit-elle dans un chuchotement.
Elle joue de ses doigts sur le bout de nez de Kheizhidji.
"Qu'est-ce que cela représente pour toi, une âme soeur?"

L’Argentée ne répondit pas de sitôt. Pour seule réponse aux interrogations de la Rosée, Sleeslith entraîna doucement Kheizhidji vers elle pour ensuite l’inciter à adopter une position plus confortable, allongée. La patronne n’opposa aucune résistance et, sans quitter des yeux le regard de sa consoeur, elle s’allongea sur les coussins ainsi arrangés pour l’occasion. Elle laissa échapper un simple soupir, apaisée dans son âme et dans son coeur, puis observa sa partenaire s’allonger doucement sur elle, sa tête sur son buste, se fixant mutuellement. Les longues mèches tressées de la chevelure byzantine de la Nagate tombaient désormais lâchement sur les coussins, lui servant à s’allonger, de chaque côté de son corps, alors que Sleeslith a désormais pris le dessus. Une main s’approchant de son visage, elle ne quitte pas sa partenaire des yeux alors que son nez devient la tendre victime des doigts fins de la lieutenante.

Je ne sais pas, je ne me suis jamais posée la question.

Elle n’osa même pas lever une main, restant simplement allongée en position neutre, les bras le long du corps, relevant le regard vers le plafond l’espace d’un instant, dans ses pensées, durant ses paroles.

Je dirais que c’est comme si nous avions été destinées à vivre ensemble, à s’entraider et se soutenir, se compléter, et qu’on a été séparées dès la naissance sans rien savoir. Avant de se rencontrer, jamais je ne me sentais vide, ou qu’une partie de moi me manquait. Maintenant, c’est comme avoir mis le pied dans un monde plein de possibilités. Je me sens doublement inspirée, comme si nous étions deux, désormais, et pas qu’un.

Elle marqua un temps par la suite, revenant croiser son regard à celui de Sleeslith comme si cela faisait une éternité, venant finalement lever une main pour la loger dans le bas du dos nu de sa partenaire, remontant légèrement l’échine jusqu’à ses omoplates d’un doux effleurement des doigts.

Et toi, alors, qu’est-ce que ça représente ?

Lorsque Sleeslith sent la main de Kheizhidji se balader le long de son dos, elle glisse sa tête dans le cou de sa consoeur de sang et frotte doucement son nez derrière l'oreille de celle-ci. Puis elle pose une main sur le ventre de son amie, sa tête reposant dans le creux de l'autre. Elle prend une longue inspiration et observe pendant un moment celle qu'elle tient enserrée contre elle. Elle comprend sa confusion de son amie. A vrai dire, elle ne comprend pas plus ce qui lui arrive, ce qui leur arrive. Elle sent seulement qu'elle doit être avec Kheizhidji.

Dans un premier temps, elle ne répond pas à la question. Elle tourne sa tête, reposant au creux de sa main, vers le plafond, d'un air pensif. Son autre main n'a pas quitté le ventre de Kheizhidji. Sa voix continue à n'être pas plus que chuchotements intimes.
"Je n'ai jamais connu ça. Je ne suis pas sûre de ce que c'est. J'ai du mal à y voir clair pour le moment."
Sleeslith a certainement d'autres choses en tête en ce moment pour y voir clair.
"Tout ce que je sais, c'est que je ne veux pas te perdre."
Elle se tourne alors pour regarder Kheizhidji.

Son regard est maintenant embrumé par l'intensité des émotions qu'elle découvre. Sa vision est floue, elle a du mal à voir comment réagir son amie. Elle tente de dire quelque chose mais sa voix s'embrouille et elle n'arrive pas à articuler quoique ce soit de cohérent. Elle laisse alors tomber sa tête dans le cou de Kheizhidji. Elle respire doucement et ne dit plus rien. Elle se contente de s'enivrer des odeurs de sa consoeur de sang : les effluves de son corps, le parfum de sa peau, l'odeur de ses cheveux violets.
Son coeur bat en rythme avec celui de Kheizhidji.

L’une contre l’autre, peau contre peau, âmes entrelacées. Kheizhidji maintient sa partenaire contre elle, ne disant mot, l’écoutant simplement bouger, respirer, vivre cet instant incroyable. Les doigts délicats de la Nagate parcouraient lascivement le dos nu de sa consoeur, tandis que son autre main finit par quitter les écailles dorées de Sleeslith pour venir trouver à nouveau refuge dans le haut de sa nuque, ses doigts fins s’immiscent dans sa chevelure sombre.

Kheizhidji respirait profondément, comme dans une sorte de transe bénéfique, où chaque inspiration était un souffle de vie toujours plus revigorant, chaque sensation toujours plus intense. Elle regarda au plafond sans jamais manquer à ses intentions concernant la Nagate au creu de ses bras, caressant sa chevelure autant que son dos, leurs corps unis dans une position de tendresse et de profonde connection de sentiments. L’une et l’autre se comprenaient, se complétaient, elles avaient besoin de se retrouver, ne faire qu’un dans ce câlin riche en sens.

Kheizhidji laissa ses sens la guider, les odeurs de sa nagate d’or, sa respiration, le toucher de sa peau si délicate. Et le son de sa voix qui devint de plus en plus confuse. Alors, ainsi contre elle et se voulant réconfortante, Kheizhidji murmura tout bas.

Moi non plus. Ne nous perdons plus.

Des mots simples, avant que tout cela ne se mue dans un paisible silence. Kheizhidji et Sleeslith, l’une dans les bras de l’autre, toutes entremêlées mutuellement, la Nagate rosée ne dit plus rien alors que Sleeslith en fit de même, se contentant simplement d’exprimer ses émotions par le seul fait qu’elles soient là, en silence, ensemble. Le temps était hors de cette union, et ce temps de silence, de repos, de réunion spirituelle des deux côtés, a sûrement duré bien plus longtemps qu’on puisse l’imaginer.

Cependant, tout devait avoir une fin, et c’est après un long moment de silence qu’une employée, discrète et qui ne pose pas de questions, apparu dans le salon pour simplement annoncer de quelques mots.

Madame, votre hôte souhaite retrouver sa compagne.

Kheizhidji ne bougea pas spécifiquement, ayant confiance en ses employées. Il serait dommage de mettre un terme à cette union en un stupide réflexe. Kheizhidji resta calme, paisible, accueillant toujours volontiers la Nagate en ses bras.

Il se fait tard, offrez lui une chambre pour la nuit. Assurez lui que sa compagne et moi sommes en intenses discussions. Il se pourrait que nous en ayons pour toute la nuit.

L’employée s’inclina légèrement vers l’avant, acquiesçant, avant de partir annoncer la nouvelle -ou plus, si Sleeslith souhaite s’exprimer-.

Kheizhidji reprit plus consciemment les caresses sur la chevelure de sa consoeur, lui murmurant doucement en une question.

Que comptes-tu faire ?

Sleeslith s'étire paresseusement comme si elle venait de faire une bonne sieste réparatrice puis elle considère la question de Kheizhidji. Quoiqu'elle vienne de découvrir ici, elle ne peut pas abandonner son amant. Ce n'est pas dans ses habitudes. Ce ne serait pas elle. Elle n'a pas vraiment envie de se lever mais elle ne veut pas donner de fausses impressions à son amant non plus.

"Je vais aller lui souhaiter bonne nuit et lui assurer que tout va bien. Il n'a aucune raison de s'inquiéter mais il faut qu'il puisse le constater lui-même.", répond-elle à voix haute afin que l'employée puisse prévenir Alex qu'elle arrive avant que celle-ci ne reparte.

Sa nature apaisante et pacifique n'a pas changée même si elle sait que, désormais, elle ne peut plus être la même sans Kheizhidji. Mais elle ne s'imagine pas laisser son amant se poser des questions là où quelques mots, un moment suffiraient pour dissiper un silence suspicieux puisqu'il briserait les habitudes que le couple a pris.
Lentement, presque douloureusement, elle se redresse en poussant sur ses mains. Ses gestes semblent se dérouler dans un autre temps, sur un autre rythme plus profond. Elle se tourne vers Kheizhidji et lui offre un sourire rassurant.

"Je n'en ai pas pour longtemps. Tu peux venir si tu veux?"
Elle continue de se relever, déroulant sa queue de Kheizhidji. L'impression est étrange, comme si elle se décollait d'elle-même. Elle regarde autour d'elle. C'est la même pièce, rien n'a bougé mais tout est différent. Puis elle regarde sa tenue et se met à la réajuster, silencieusement. Le tintement de ses bracelets suit ses mouvements, comme une musique vestimentaire, tandis qu'elle remet en place ses atours. D'abord le bustier, en particulier les attaches dans le dos. Puis elle réaligne les perles et gemmes pendantes. Enfin c'est sa tiare qu'elle remet en place ou du moins elle essaye sans miroir.

Là voilà enfin prête pour rejoindre et rassurer son amant mais elle ne cesse d'observer la réaction de Kheizhidji pour voir ce qu'elle décide.

La Nagate à l’écaille d’or et de rose acquiesça doucement aux dires de sa partenaire tandis que cette dernière s’étirait. Un geste qu’imita Kheizhidji assez rapidement, en ayant de toute évidence besoin. Silencieusement, alors que l’employée s’en alla, Kheizhidji se détacha de Sleeslith avec une certaine difficulté, l’envie d’y rester étant encore forte. Mais il fallait s’y mettre, et elle finit par mettre fin à l’étreinte définitivement, après de longues secondes, en se démêlant de sa Nagate de coeur.

Oui, je t’accompagne. Je reste sur mon territoire, après tout, qu’il sache que tout se passe bien en ma présence.

Alors que Sleeslith commença à replacer ses vêtements, Kheizhidji réagit presque aussitôt pour lui prêter main forte, se glissant dans son dos pour accompagner les doigts délicats de sa partenaire dans leur entreprise et ainsi l’aider à bien remettre les attaches de son bustier en place. Puis elle se plaça en face d’elle pour l’observer, en détail, et l’aider à replacer ses bijoux sans un bruit.

Une fois fait, son regard détailla à nouveau le visage paisible de la Lieutenante, avant de descendre le long de l’épaule, du bras, pour finalement s’arrêter sur son poignet et sa main. Alors, dans un geste bref et impensé, la patronne de fumerie vient glisser sa main contre celle de Sleeslith, glissant ses doigts entre les siens, durant un court instant, suffisamment pour avoir un contact prolongé de quelques secondes avant de finalement se retirer, comme piquée de raison et de sagesse. Elle la laissa passer devant, reprenant un air plus professionnel ensuite.

Un point de vue qui était dû à ses années d’expérience ; en tant que patronne de fumerie, il fallait se faire imposer, montrer qui dirigeait et faire preuve de présence en ses lieux. Mais c’était aussi, et surtout, pour ne pas rester trop loin de la Nagate.

Sleeslith passe devant sauf qu'elle ne connaît pas les lieux. Elle suit donc les directions que lui donnent son amie pour naviguer jusqu'à sa chambre, celle de son amant et d'elle-même. En chemin elle observe un peu ici et là, à droite et à gauche. Tant pour apprécier la qualité des décors que pour se familiariser avec les lieux car elle aura à revenir ici. A ce sujet, il faudra aussi qu'elle soit présentée aux employés et qu'ils sachent que la porte doit toujours lui être ouverte. Mais pour le moment, son esprit est concentré sur son trajet au sein de l'établissement.

Dès qu'elles arrivent à la porte de la chambre, Sleeslith y entre sans frapper. Son amant est vêtu seulement d'un peignoir d'intérieur à moitié ouvert et d'une paire de balgha. L'ensemble est de couleur rouge et or. Il se tient dans l'ouverture de la fenêtre et profite des derniers rayons de soleil tandis qu'il semble observer sa tenue comme pour en détailler la moindre finition. Il entend la porte s'ouvrir et se retourne. Un vague flottement de ses longs cheveux poivres et sels attachés en tresses accompagne son geste. Son air est dur et suspicieux pendant une fraction de seconde avant qu'il ne se rende compte que ce n'est que Sleeslith, sa concubine. Celle-ci le regarde et lui sourit. Auréolé de la lumière du soir et encadré dans la fenêtre, elle trouve qu'il a l'air d'une de ces icones religieuses qui représentent les ancêtres de son pays. Son sourire s'élargit d'avantage alors qu'elle serpente en sa direction. Sa démarche est volontairement lascive et sereine.

Silencieusement il ouvre ses bras et elle vient se blottir contre son torse. Ces deux-là ont visiblement l'habitude l'un de l'autre. Elle renifle discrètement son amant avant d'engager la conversation avec lui. Il y a une odeur d'eau fraiche aromatisée sur la peau du mâle hybride.
"-Tu as pris un bain?, demande-t-elle sur un ton un tantinet charmeur
-Oui et tout seul", la réponse est tranchante et froide.
Elle sait qu'elle l'a abandonné pendant des heures et qu'elle a des explications à fournir maintenant mais elle ne se départit pas de son sourire pour autant. Silencieusement elle pointe vers Kheizhidji et attend. Alex suit le doigt mais ne semble pas comprendre quoi et comment pourrait-il? Il ne sait rien sur l'exceptionnalité qu'elles viennent de découvrir. Elle connaît l'homme et elle attend donc silencieusement tout en maintenant son sourire.

"Supposes que je ne comprends pas."
Il donne enfin le signal l'autorisant à expliquer ce qui se passe. Elle opine pour le remercier avant de répondre.
"-Ce n'est pas n'importe qui pour moi. Ni moi pour elle. Tu vois? Chaque âme est unique. C'est aussi pour ça que chaque âme a une chance de se compléter. Sauf que... certaines âmes ne sont pas uniques. Elles sont doubles...
-Tu parles de magie?, coupe Alex cherchant à être sûr de suivre.
-Non même si pour moi, c'est lié.
-Et donc quoi? Elle est... ton double?
-Oui !"

Sleeslith sautille et ondule sur sa queue tandis que son regard s'illumine d'une douceur innocente. Alex l'observe. Il s'interroge mais l'expression sur le visage de sa concubine ne ment pas. Elle ne lui a jamais menti sur quoique ce soit, d'ailleurs. Il hoche lentement la tête tandis qu'il tente de mesurer l'amplitude de l'information.
"-Elle et toi, vous êtes donc... doubles d'âme?
-On appelle ça Flamme Jumelle mais oui.
-Tout le monde en a une?, Alex semble maintenant curieux d'en savoir plus.
-Non, désolée. Et personne ne peut prédire ça non plus. Ca fait parti du hasard des âmes.
-Est-ce dangereux?
-Non, rassures-toi. Ce n'est dangereux ni pour elle, ni pour toi, ni pour moi."
Alex pousse un discret soupir de soulagement.

"Et maintenant quoi?", demande Alex en regardant alternativement Sleeslith et Kheizhidji.
La Lieutenant se tourne vers la Patronne, son sourire maintenu aux lèvres, et attend de voir ce que celle-ci a à répondre à la question de l'amant.

Kheizhidji attendait patiemment dans le cadre de la porte, son regard de pomme détaillant -tant bien que mal en tant que Nagate- dans l’obscurité la brève communion entre les deux amants. Elle resta silencieuse, humble, et pourtant présente, jusqu’à ce que l’homme, ainsi que Sleeslith, se tournèrent vers elle. Alors, elle décroisa les bras pour se reposer contre l’encadrement de la porte, y apposant une main, prenant le temps avant d’énoncer doucement.

Maintenant, la fumerie sera comme une seconde demeure pour vous, Sleeslith, et votre amant a la chance d’en bénéficier aussi tant qu’il est avec vous. Vous y trouverez asile, satiété et repos si tel est votre souhait. Nous avons encore plein de choses à nous dire, mais une soirée ne suffira pas. Et si je peux vous être utile en quoi que ce soit, je m’y dévouerai, naturellement. Enfin, si vous ne souhaitez pas vous reposer de si peu, on pourrait prolonger la soirée. Discuter, jouer, ou consommer les produits de la maison, bien que je regretterai de perdre mon esprit aussitôt. Je vous enseignerai ce que je sais, sur cette ville, sur son fonctionnement, mon travail. J’ai l’habitude de ne pas demander d’argent à mes amis, les services et les biens ayant plus de valeur à mes yeux que la monnaie. Mais pour vous, ma chère… Vous n’aurez aucune obligation.

Elle prit un temps, à nouveau, de toute évidence, réfléchissant à toute vitesse.

On pourrait aussi discuter à un moyen de rester en contact, mon coeur est dévoué à répondre à vos appels. Et je sens que ce sera difficile désormais de se sentir éloignée de vous. Mais nous avons encore du temps durant lequel profiter, alors je propose que l’on rattrappe le temps durant votre séjour en Ikhyld.

Elle la vouvoyait, très certainement à cause de la présence de l’amant. Kheizhidji restait stoïque, un masque de porcelaine sur le visage sans trahir ses émotions, dénotant probablement avec ses paroles émotives. Seul son regard, pour les plus alertes, semble trahir ses émotions. Il était évident pour Sleeslith que cette nouvelle rencontre a changé quelque chose à jamais chez la Nagate commerçante, une forte envie de ne faire qu’un avec cette Nagate et s’entraider pour aller de l’avant, ensemble.

Sleeslith observe la réaction de Kheizhidji d'un oeil un peu confus. Elle est d'abord un peu déçue de voir qu'elle se tient si éloignée, surtout après ces longues heures collées ensemble. Elle ne s'attendait pas à ce qu'elle reste sur le pas de la porte, comme une étrangère. Elle ne s'attendait pas à ce que Kheizhidji saute au cou d'Alex non plus. Mais quelque chose entre les deux. Ensuite c'est le ton de mondanité qu'elle réemploie qui confirme sa confusion de voir sa nouvelle amie garder des distances un peu trop défensives. Elle ne comprend pas très bien ce que cela veut dire. Elle s'attendait à une attitude plus naturelle voire peut-être plus proche de la sienne.

Sleeslith frotte le bout de son nez sur le torse nu de son amant et lui murmure "Ne bouges pas, s'il te plait". Il lui répond silencieusement par un regard à demi-curieux. Puis elle se détache de celui-ci et se met à serpenter en direction de Kheizhidji. Le silence s'impose pendant un moment. Pendant ce temps, Alex referme son peignoir d'intérieur sans dire mot. Il fait confiance en Sleeslith même si il ne connaît pas la suite des évènements. Elle non plus d'ailleurs, elle sent seulement qu'elle doit faire quelque chose.

Une fois devant son amie, elle tend une main vers celle-ci, agitant ses doigts pour attirer l'attention sur elle, et tente de lui prendre la main. Si elle ne fait face à aucune opposition, elle se mettra alors à tirer sa soeur d'âme hybride à l'intérieur de la place en lui souriant pour la rassurer. Elle se souvient que Kheizhidji lui a déjà parlé de son habitude de solitude et elle comprend un peu le fait qu'elle est besoin de remettre son masque de convenances usuelles pour se sentir en sécurité, en position de contrôle. Mais elle aimerait que Kheizhidji lui fasse confiance et entre dans la chambre avec elle. Elle va même jusqu'à lui murmurer "Viens, n'ai pas peur." Des mots peut-être inadéquates mais l'intention d'assurer son amie hybride que tout va bien y est.

"Un jeu, c'est une bonne idée. Ca nous donnera le temps de faire connaissance ensemble et de se détendre. Connais-tu le jeu des écuries ?", demande-t-elle à Kheizhidji.

Kheizhidji resta plantée là, dans l’encadrement de la porte, sans rien ajouter de particulier. Son visage restait inexpressif un moment tandis que Sleeslith était dans la chambre avec son amant. La Nagate aux écailles rosées ne remarqua même pas le regard de Sleeslith dans sa direction, simplement perdue dans ses pensées après ce temps de parole. Elle était consciente que son attitude n’était pas adéquate face à son amie, mais elle ne pouvait agir en ce sens. Comme un mécanisme inconscient qui la plongea dans un paralysie interne, entre la volonté d’en faire plus et l’obligation d’y rester.

Elle baissa les yeux au sol, une attitude probablement surprenante de la part d’une femme de sa stature, alors qu’une légère moue se forma sur son visage. Elle n’eut guère le temps de se laisser tourmenter qu’une agitation la sortit de ses pensées, relevant alors le regard pour croiser celui de sa consoeur. Elle lève la main, doucement, silencieusement, pour se laisser enlever par la ravissante Eïlynsterienne, sans un mot. Ne prêtant plus attention à l’amant dans la chambre, Kheizhidji se laissa transporter en laissant paraître une certaine confusion sur son visage de porcelaine, pointé d’une touche de tristesse. Cela ne dura pas longtemps, rapidement remplacé par un petit sourire aux mots rassurants de l’Argentée.

Elle serra sa main dans la sienne comme si elle risquait de ne plus jamais pouvoir la serrer, glissant sur le sol pour se rapprocher du centre de la chambre, attendant que la Nagate s’installe avant d’en faire de même. Elle avait totalement décroché, et était telle une enfant à se laisser porter et diriger sans se soucier des conséquences.

Elle acquiesça doucement aux paroles, murmurant un presque inaudible oui à la question de Sleeslith, ce à quoi Kheizhidji posa son triste regard sur l’amant, avant de le détourner comme par pudeur. Elle ignorait ce qu’il lui arrivait, mais il semblait qu’un masque était tombé et qu’elle était prise au dépourvu.

Alors que Sleeslith mène Kheizhidji jusqu'à la table basse, entourée de coussins d'assise, aux pieds du lit, elle resserre les émotions que son amie éprouve. Elle comprend qu'elle doit d'urgence répondre à une question. Pour elle, c'est une telle évidence qu'elle n'a pas imaginé que ce doute nécessitait une réponse immédiate. Elle est mage de l'âme après tout. Mais comment Kheizhidji pourrait-elle le savoir ou bien même le deviner? Cependant le trouble sur le visage de Kheizhidji, même furtif, est sans ambiguïté.

"Je n'ai besoin que d'une minute et de ton consentement pour que nous perdions jamais contact l'une avec l'autre."
Sleeslith répond à voix basse, son ton préféré lorsqu'elle n'a pas à hurler des ordres par dessus le vacarme d'un champ de bataille. Sa voix est mélodieuse et apaisante non seulement par nature mais aussi par intention pour assurer Kheizhidji que ce qu'elle annonce est sincère.
"Je suis aussi une mage de l'Ame", continue-t-elle pour préciser le procédé qu'elle va utiliser.
"Je peux nous lier télépathiquement et ce quelle que soit la distance entre nous. Il faudra juste convenir d'un signal émotionnel pour que je sente que tu souhaites établir une conversation mentale à distance. Pendant que tu réfléchis à ma proposition, je vais chercher le Jeu des Ecuries. Non, ne dis rien. Je vais essayer de deviner où tu le ranges. Après tout, je suis un peu toi et vice versa donc je devrais pouvoir deviner."

Elle conclut son discours avec un chaleureux sourire et regarde alternativement entre les coussins et Kheizhidji afin de l'aider à s'orienter. Pendant ce temps, Alex se dirige vers la penderie pour en sortir un pantalon d'intérieur en soie et assorti au peignoir. Un autre des linges mis à la disposition de l'établissement pour les clients. Alex enfile le pantalon. Il reste pieds nus mais le voilà maintenant plus décemment vêtu et frais de son récent bain.

Sleeslith se met donc à chercher où Kheizhidji peut donc bien ranger les jeux de société. Son regard se tourne d'abord vers le secrétaire, un choix évident. Peut-être trop évident? A vrai dire, c'est un meuble dans lequel on range avant tout le nécessaire d'écriture voire des livres mais pas forcément des jeux. Puis elle regarde autour d'elle. La penderie? Certainement pas. C'est un espace pour entreposer les habits et linges. Il reste donc la table de chevet. Elle observe et réfléchit. Elle se dirige vers la table de chevet et ouvre le tiroir. Rien.

"Tu cherches trop loin", lui répond Alex qui est suffisamment doué en déduction et analyse pour aider sa maitresse.
Elle réfléchit donc à nouveau en tenant compte de l'indice que lui propose Alex. Elle se met donc à serpenter vers le secrétaire, sa première déduction. Elle ouvre le premier tiroir. Rien. Le deuxième. Toujours rien. Vraiment? Pourtant c'est dans ce mobilier qu'elle aurait rangé les jeux, tant par commodité pour les clients que pour les employés. Troisième tiroir. Un coffret en bois. Elle l'ouvre et laisse aller un soupir de soulagement. Elle referme le coffret avant de se retourner et de le lever triomphalement au-dessus d'elle.

Le coffret du Jeu des Ecuries en mains, Sleeslith serpente gracieusement vers la table basse où est déjà assis son amant.