Les réponses du Naga aux paroles de la moniale étaient en quelques sortes satisfaisantes. Elles avaient cet attrait de ne pas être avares de détails, dotées d’une certaine réflexion et juste assez dévoilées pour laisser le temps d’en découvrir davantage. Un Naga qui avait donc une manière de parler qui plaisait à la vampire et lui donnait envie d’en apprendre davantage à son sujet, et ce de manière naturelle.

Et ses arguments étaient parlants. Parlants et fluides dans la manière de les comprendre sans qu’il n’y ait besoin de se triturer l’esprit afin d’en comprendre le sens. C’est donc à cela que la moniale compris que, oui en effet, elle était jeune. Très probablement pas pour l’humaine qu’elle fut mais que, comparé aux nains, elfes et demi-elfes, elle n’était pas très vieille.

Et elle acquiesça au fait que son esprit changera face au temps, contrairement à son corps. C’était quelque chose dont elle se rendait compte petit à petit et dont elle n’avait pas terminé de remarquer. Pour sûr, avec la vie éternelle, on change forcément de pensée un jour ou l’autre, que ce soit de manière violente ou maîtrisée. Elle avait sûrement cette chance d’hériter d’un tel apprentissage de la part des moines qui lui permit de ne pas se soucier de certains points de son esprit et avoir une rigueur désormais naturelle dans la manière de recevoir les imprévus de la vie.

C’est alors que, après avoir répondu au sujet des peuples du désert et que la moniale eut prit le temps de mémoriser les informations ainsi dévoilées, elle sentit sa main prise par les doigts délicats du Naga. Elle tourna vers lui son tendre regard de soufre à laquel s’ajoute un doux sourire.

Volontiers, vous avez bien raison. Allons nous donner ces impressions de confessions intimes, c’en serait davantage meilleur haha. Et si ce n’est guère un sujet délicat pour vous nous pourrions parler de ces anciennes raisons dont vous faites la mention. Quoi qu’il en soit, je suis ravie d’échanger avec vous.

Sans quitter la main du Naga, elle redirigea sans attendre son itinéraire vers l’auberge la plus proche pour y réserver une chambre, à moins qu’Amset n’ait d’autres suggestions sur la route.

Amset adressa donc un sourire serpentin et fin à la vampire alors qu’ils se dirigeaient vers l’auberge et une fois qu’ils eurent loués une chambre, ils en profitèrent une fois entrés dans celle-ci pour continuer à discuter un peu avant de penser à d’autres affaires, Discussion pendant laquelle il glissa avec amusement.

« Je crois que vous êtes au courant qu’il y a fort longtemps de cela les nagas avaient un empire dans le désert de l’Ouest dominé par eux et ce qui s’apparentait pour nous à des dieux ? Nos créateurs et maîtres d’après les mythes. Nous nous sommes soulevés contre eux et nous les avons vaincus, mais tués ? Pas vraiment, quoiqu’il en soit... Depuis cette époque beaucoup de nagas se sont soient tournés vers des formes de spiritualités plus vagues ou symboliques comme le culte solaire par exemple ou ont juste pris leur distance avec la religion en général. Après, cela fait bien longtemps et ça dépend des individus, mais comment un peuple qui s’est soulevé contre ses dieux et craint leur possible retour, pourrait s’imaginer s’attendre à beaucoup de choses bénéfiques du divin en général ? » Oui, au final ce n’était pas tant de la spiritualité donc que se méfiaient les nagas, mais du concept de divinités mêmes, comme le seigneur de la souffrance Teïderien par exemple.

Un dieu n’étant alors de ce point de vue là qu’une sorte de maître abstrait et bien lointain qu’on sert sans forcément que ça en vaille la peine… Quoiqu’il en soit il finit par reprendre plus légèrement alors qu’ils s’étaient assis sur le lit pour discuter un peu.

« Enfin, assez parlé de tragédies du passé, je pense que nous pourrions nous concentrer un peu sur le présent… Le passé est déjà passé et le futur viendra bien assez tôt après tout. »








[Hrp : On fera une ellipse du coup je pense^^.]

Une fois posés tranquillement dans la chambre de l’auberge, Vittoria et son compagnon discutèrent tranquillement au sujet de cette histoire importante qu’est le passé Naga. Des paroles qui intéressèrent la moniale de comprendre le point de vue de son compagnon qui a cette idée que croire en une divinité est désormais impossible après cette forte rébellion contre leurs divinités. Enfin, une part d’histoire certes passionnante pour satisfaire la curiosité de la moniale, mais aussi intéressante sur le retour que lui fit son compagnon, une part de la personnalité de celui et plus généralement un trait de la culture Naga moderne qui se dévoila à sa connaissance.

Mais quoi qu’il en soit, il n’était plus temps de s’attarder sur le passé, comme le précisa le partenaire Naga de la moniale. Alors, l’un avec l’autre, ils entamèrent l’après midi ensemble à passer le temps de manière à mieux se connaître en quelques sortes, et se lancer dans quelques jeux qui ne concernent qu’eux. Un moment que la moniale se fit un plaisir de partager avec son ami dans la joie et la bonne humeur.

Et même lorsque que l’action fut passée, cette dernière laissa place à un moment un peu plus calme où Vittoria laissera simplement les minutes passer pour se reposer paisiblement en attendant le soir -non sans émettre la proposition de mordre son ami pour lui voler de son sang, une petite habitude que la vampire apprécie partager après ce genre de jeux-

Une fois que le moment fut venu, son équipement harnaché et prête au départ, la moniale laissa le choix à son partenaire de rester ici ou de l’accompagner. Quoi que soit sa décision, Vittoria s’en alla retrouver le demi elfe à la fin de sa journée de travail de manière à enfin accéder à ces registres qu’il lui avait aimablement promit.

Les chosèrent alors dans un sens assez agréable quand ça commença et s’acheva, rien de spécialement exceptionnel, mais l’expérience était satisfaisante et Amset n’en demandait pas bien plus. Quoiqu’il en soit il laissa bien son amie prendre un peu de sang et quand ce fut fait il laissa cette dernière aller chercher ce qu’elle voulait trouver, pendant ce temps lui dit qu’ils n’auraient qu’à se revoir ici demain sans la journée, le temps qu’elle finisse ce qu’elle avait à faire, quant à lui il chercherait sans doute un peu de travail ou des informations intéressantes sur les environs, notamment sur le risque de croiser des Teïderiens quand ils sortiraient de cette ville, après tout en ces temps troublés il fallait faire attention…

Ainsi Vittoria se rendrait seul aux archives familiales dont lui avait parlé le demi elfe, un bâtiment de bonne taillé accolé à un grand manoir, sans doute la demeure familiale de cette famille bourgeoise est influente des environs, bâtit en brique et au toit d’ardoises à la légère teinte rougeâtre. Ce manoir était entouré par un jardin taillé à la duchéenne et d’un mur de briques doté d’un portail en acier qu’un garde mercenaire ouvrit à la vampire quand elle se présenta. L’elfe qu’il était la mena ensuite jusqu’aux archives avant de dire en se postant devant.

« Vous pouvez fouiller le temps que vous désirez tant que vous rangez tout et ne mettez rien en désordre. Sachez sinon que je vous fouillerai à la sortie, donc ne prenez aucun document sur vous, plutôt des notes. Et évitez je vous prie d’user de la magie pour cacher de tels documents si jamais vous en êtes capable. Simple mesures de précautions. » Et elle put alors entrer dans les archives, une sorte de bibliothèque où visiblement tout était rangé par années, sauf pour certains documents spéciaux. Vittoria se doutant que ce qu’elle cherchait n’était pas forcément de ce « spécial » là, il lui fallait donc consulter les documents de l’année l’intéressant...

Arrivée à destination pour retrouver le demi elfe en sa fin de journée, la moniale fut conduite à la demeure de ce dernier, une bien belle bâtisse en apparence. Un grand manoir raffiné dans sa subtilité et sa richesse, l’attirail parfait pour faire montre de son influence commerciale dans le coin.

Les archives étaient soigneusement rangées dans un bâtiment aux côtés du manoir, certainement conçu ou reconvertir très spécialement pour cette utilisation. Une fois dans le bâtiment, la moniale écouta attentivement les directives du demi-elfe dans l’optique de ne lui faire aucun faux bond, là n’étant pas son objectif. Alors, elle acquiesça humblement de la tête lorsqu’il fut sur le point de partir en lui assurant le respect de ses conditions.

Je vous suis bien reconnaissante d’accepter que je me trouve ici, loin de moi l’idée que de dérober ces documents. Je remettrai tout en place et ne repartirai qu’avec des notes.

Dès que la moniale fut seule, elle se mit au travail. Manteau sur le côté, manches retroussées, de quoi écrire et consigner le résultat de ses recherches avant de s’attaquer à la recherche des documents potentiellement intéressants. Tout résidait avant tout dans une certaine organisation, chose que la moniale n’avait pas l’habitude en terme de bureaucratie, mais il a fallu improviser. Alors, elle trouva une table probablement prévue à cet effet, et y déposa petit à petit les documents l’intéressant.

Elle chercha principalement tout ce qui concernait les propriétés de la famille. Toute autre partie des archives comme ce qui était marqué comme commerce, relevés de comptes ou registres ne l’intéressait pas. Elle ciblerait probablement ses recherches en se focalisant sur ce qui étaient les précédentes propriétés de cette famille influente, il y a de cela entre deux-cent et trois-cent ans. Une période large, mais elle se sentait capable d’éplucher trente dossiers avec trente demeures si nécessaire, tout en remettant chaque chose en place méticuleusement.

Le garde qui était purement de race elfique pour sa part, laissa donc entrer la moniale dans le bâtiment après ses explications, puis comme son supérieur avait dû lui en donner les directives, il resta à l’entrée pour surveiller les environs, mais surtout attendre que la vampire ait finit. Sachant que celle-ci allait sans doute prendre son temps, on pourrait presque se demander comment il comptait s’occuper pour ne pas juste poireauter extrêmement longtemps, mais cela c’était au final un détail bien superficiel.

Et dans les faits Vittoria se rendit comptait que ça allait prendre du temps en effet car elle trouva beaucoup de documents l’intéressant, que ce soit au sujet de la situation du domaine où elle avait grandit à l’époque où elle vivait, mais aussi une description un peu détaillée de ses différents occupants. Néanmoins, ça ne devait pas dépasser la dizaine de dossiers dans les faits, et quand elle put commencer à les consulter elle put assez vite tout de même apprendre certaines choses.

Alors, qu’est-ce que la vampire apprit sur la période ? Et possiblement sur ses parents étaient-ils d’anciens travailleurs libres du domaine ou des esclaves plus ou moins bien traités. Des domestiques ? Des gardes ? Les possibilités étaient nombreuses.

Et il est probable aussi qu’elle puisse en apprendre un peu sur elle-même sur son passé, mais quoi exactement. Auraient-ils retranscrits beaucoup de détails ou juste le strict nécessaire ? Est-ce qu’ils parleraient d’ailleurs de quelqu’un qui avait vécu dans les environs à l’époque et peut-être toujours en vie aujourd’hui ? Comme un jeune elfe notamment.

Tout cela, c’était aux lecture de Vittoria de le déterminer, ce pendant que son ami naga devait être sans doute occupé dans les environs à faire ce que tout bon mercenaire pouvait faire quand il ne se contentait pas de baisser du bon temps, chercher un travail plus ou moins rapide à accomplir...

Les recherches étaient longues. Très longues. De longues heures passèrent où, courbée à éplucher des dossiers et les trier minutieusement, Vittoria s’acharna à trouver ce qu’elle cherchait. Certes, elle n’en était pas affectée négativement, et prenait la chose avec un calme et une rigueur inflexibles qui lui permit de durer toute la nuit. D’ailleurs, la nuit ne lui faisait rien, bien au contraire. N’ayant pas besoin de dormir, et étant fille de la nuit, elle se sentait plus revigorée que jamais pour venir à bout de ce travail long et pénible.

Ce ne fut qu’après ces longues heures que, récoltant petit à petit les documents semblant intéressants, Vittoria finit par les croiser et en tirer l’essentiel. Elle avait bel et bien des informations concernant la demeure ancienne plantation de coton, une grande bâtisse ayant été érigée il y a de cela cinq-cent ans et qui a connu des générations de familles. Mais surtout, le plus intéressant, était le déclin soudain d’une famille, propriétaire d’une plantation de coton à cette demeure qui ont tout perdu du jour au lendemain. C’était là les notes d’un majordome, un carnet qui s’était retrouvé là en même temps que la maison fut rachetée. Une sorte de registre quotidien qui s’était vite transformé en journal intime, où chaque événement notable dans la maison était consigné.

Les propriétaires n’avaient pas de nom. Du moins, le majordome les nommait par “Monsieur” et “Madame”, dans son carnet, et les derniers passages du carnet étaient intéressants. Monsieur était un bon gérant, et s’occupait de tout ce qu’il fallait pour subvenir aux besoins de la maison ; ressources, nourriture, direction des travaux à effectuer, toutes les qualités d’un meneur localisées à la bonne utilisation de maintenir la maison vivante et en pleine santé. Madame, quant à elle, était la plus téméraire. Elle se chargeait de traquer la moindre affaire et d’investir dedans pour faire fructifier son argent et toujours plus étendre leur influence. En croisant avec d’autres sources, Vittoria se rendit compte que, malgré le fait que ce n’étaient en aucun cas des ducs, ces personnes là étaient plutôt puissantes et influentes, suffisamment pour se garder une certaine immunité à la vie hostile et compétitrice des Duchés.

Vittoria finit par trouver leur nom, en croisant la date des carnets du majordome et les registres ; la maison a été achetée en 1736 par Frosino et Andrea Benedetti. De toute évidence, ses parents. Ce qui se confirma avec un papier plus ou moins officiel qui attestait la naissance de leur unique fille, Vittoria Benedetti, en 1743. Elle pris soigneusement note, notamment le fait qu’elle avait en ce jour 257 ans, ainsi que sa date de naissance en complet. Plus jeune que ce qu’elle pensait, de toute évidence, et elle poursuivit sa lecture.

Le majordome, qui avait écrit depuis des années avant la naissance de Vittoria, avait finit par écrire à son sujet peu après sa naissance. Des descriptions quotidiennes sans importance d’une vie dans une maison pratiquant l’esclavage pour la production de coton, mais le plus intéressant vint plus tard, aux trois ans de la petite Vittoria. Andrea avait investi dans une affaire en or ; un magnifique navire destiné à faire rayonner l’influence de cette famille, en brandissant fièrement son nom et ses couleurs et briller de par ses expéditions lointaines et mémorables. Une énorme quantité d’argent, de ce qu’il en est rapporté, à la fois pour la fabrication du navire, son ravitaillement et l’entretien des équipages. Mais cette fructification ne dura pas davantage ; à peine la deuxième sortie d’essai effectuée, le navire se cassa les dents en pleine tempête, emportant avec lui le capital social du couple Benedetti.

Un véritable drame. Devenus pauvres du jour au lendemain, ils ne purent perdurer davantage et tentèrent de se sauver en urgence. Cela commença par la vente des meubles, des décorations et autres choses non indispensables à la vie quotidienne. Mais la dette étant si terrible qu’ils ne purent continuer à maintenir la maison, alors ils vendirent propriété, et esclaves. Parmi les esclaves, tel que décrit par le majordome, la petite Vittoria fut aussi mise à leur côtés pour être vendue, les jeunes de son âge coûtant cher, notamment pour certains établissements. Mais, lorsque l’esclavagiste était venu pour emporter sa marchandise, un voyageur vêtu d’une cape s’était présenté, et a acheté la petite fille pour la somme qu’attendait les vendeurs, et ce sans problèmes, même s’il était rare de voir des voyageurs débourser autant pour une si petite personne. Peut-être était-il patron d’un établissement, ou réellement solitaire, mais le majordome n’eut jamais entendu parlé de la jeune Vittoria, bien que le voyageur semblait particulièrement bienveillant.

Voilà donc l’histoire et la vérité dévoilée. Fille de deux humains duchéens qui avaient fait leur place à belle hauteur de la chaîne économique et qui du jour au lendemain se retrouvent détrônés. Prêts à tout donner pour se sauver, ils n’hésitèrent pas à vendre leur fille. On n’entendit plus parler d’eux. Peut-être avaient-ils réussit à s’en aller et se couler une vie tranquille avec la somme -modique mais suffisante- de leurs ventes. Quoi qu’il en soit, Vittoria ne ressenti rien à ce sujet. Elle savait, désormais, et sa famille l’avait vendue sans états d’âme (ou peut-être y en avait-il), mais elle se refusait de leur en vouloir. Après tout, elle était qui elle était, et eux avaient sûrement leurs raisons.

C’était donc en rangeant les derniers documents qu’elle boucla son investigation ici. Elle avait tout remis à sa place comme ce le fut la veille, et tout fut terminé aux premières lueurs du soleil. Ses notes s’étaient complétées de dernières informations cruciales ; la recherche du majordome qui s’avérait être un elfe du nom de Galather Adrel. S’il était encore vivant, Vittoria pouvait avoir de longues conversations avec lui, qui l’a connue toute petite, et qui avait vu ledit voyageur.

Lorsqu’elle sortit de la remise, elle salua le garde en se laissant volontiers fouiller en n’ayant bien évidemment rien emporté avec elle d’autre que son carnet de notes. Si elle eut croisé le demi elfe, elle l’aura bien évidemment remercié, et si ce dernier, à tout hasard, aurait été curieux de ce qu’elle y a trouvé, Vittoria n’aura aucun remords à lui en faire part autour d’un thé, par exemple.

Ainsi Vittoria était la descendante d’ancien bourgeois duchéen et non esclaves, simples domestiques ou gardes ? Cela pouvait être intéressant à savoir, peut-être même rassurant, même si le défaut avec la bourgeoisie duchéenne était que seul l’argent en effet maintenait leur pouvoir et influence et que se revendiquer des siècles plus tard de descendance bourgeoise avait généralement peu d’intérêts, sauf éventuellement quand on parlait des lignées les plus prestigieuses comme par exemple celle d’Ilfrido le conquérant.

Quoiqu’il en soit, sombre passé que voilà, même dans les duchés vendre ses enfants en esclavage était un acte assez grave ou du moins rare, néanmoins ça avait été la destinée de la jeune Vittoria et ce qui lui avait permit peut-être au moins de devenir ce qu’elle était aujourd’hui. Quant à la trace de ses parents, malheureusement elle ne la retrouvait pas ici, mais au moins elle connaissait vraiment ses origines. Quant aux demi elfes propriétaires actuels de la plantation, ceux-ci n’étaient donc mêlés ni de près, ni de loin à ces histoires. Telle était la vie après tout, les propriétaires de différents lieux pouvaient changer au fur et à mesure des aléas de l’existence.

Vittoria put donc partir d’ici, vaguement croiser le demi elfe alors que celui-ci partait travailler et remercier celui-ci qui lui souhaita bonne continuation, alors que pour sa part la moniale avait ainsi un nouvel objectif en tête. Retrouver le majordome ? Il est vrai que si celui-ci était un elfe, il était possible qu’il soit encore en vie même plus de deux cent ans après les faits, possible et probable, mais pas certains, après tout les elfes vivaient huit cent ans.

Quoiqu’il en soit, Vittoria retrouvera sans doute Amset là où ils avaient convenus de se revoir une fois ces histoires terminées. Ce dernier l’attendrait à une table de l’auberge alors qu’il avait commandé à boire pour eux deux, dont probablement du sang dans une coupe magique conçu pour l’empêcher de coaguler pour la vampire… Il demanda alors aimablement avant de boire une légère gorgée de vin.

« Alors, qu’est-ce que cela a donné ? »

Une fois le domaine quitté, la moniale se dirigea sans attendre à l’auberge, au petit matin. Elle retrouva sans mal son ami, assis à une table, avec une douce attention qui attendait la vampire. Elle s’y asseya et, avisant la coupe de sang, esquissa une rapide grimace avant de finalement adresser un visage de sincère reconnaissance au Naga. Elle s’empara de la coupe pour la vider en deux deux, avant de la déposer sur la table, plus revigorée que jamais.

J’ai trouvé pas mal de choses intéressantes. Tout d’abord, mon nom est bel et bien marqué dans les archives. Je suis la fille Frosino et Andrea Benedetti. Un couple qui avait une certaine influence à l’époque. Ils brillaient de leur génie à brasser de l’argent pour en gagner toujours plus, enfin. Les bourgeois Duchéens lambda. Propriétaires d’une plantation de coton, avec l’emploi d’esclaves, ils ont bel et bien habité cette demeure qui m’ont menée à cette famille de demi elfes.

Enfin. J’ai retrouvé aussi une sorte d’acte de naissance à mon nom, attestant que je suis bien leur fille. Et les carnets du majordome qu’il tenait quotidiennement en consignant tout ce qu’il passait dans la maison. Une erreur économique, ils avaient investit dans un navire qui a coulé peu après, toute leur fortune s’est envolée. Ils ont tout vendu, et quand je dis tout, ils ont aussi vendu leur propre fille. J’avais trois ans.

La moniale lui partagea ces informations en relisant ses notes en parallèle, d’un ton calme et détaché, comme relatant simplement des faits qui ne la concernait pas.

Apparemment, j’ai eu de la chance. Il est décrit qu’un homme, un voyageur apparemment, m’a achetée peu avant le départ de l’esclavagiste. Il a tenu à savoir mon nom, probablement pour emporter avec moi la seule chose que j’avais ; mon passé. Aucune nouvelles de mes parents, de toutes manières j’ai su ce que j’avais à savoir. Ils sont sûrement morts en se la coulant douce dans une demeure moins onéreuse mais avec suffisamment d’argent malgré cette perte pour faire de vieux os. Le prochain objectif reste à retrouver le majordome de la maison, un elfe. S’il est encore vivant à l’heure actuelle, ce qui est fort probable, il pourra m’être fort utile. Un certain… Galather Adrel

Elle ajouta les derniers mots en relisant ses notes, avant de relever la tête avec une dernière information, un sourire espiègle aux lèvres.

Ah, et, j’ai exactement deux-cent-cinquante-sept ans. Ca ne vous dérange pas que je me suis faite passée pour plus vieille que je ne suis ?

Amset comme toujours était assit sur le sol en quelque sorte, ou plutôt sur sa propre queue, après tout pour un naga employer une chaise ne serait pas très pratique, alors que s’enrouler sur soi-même et s’appuyer sur son propre corps était plutôt aisé pour un être serpentin comme lui. Quoiqu’il en soit, c’est de bonne grâce et d’un air à l’écoute même s’il semblait regarder un peu ailleurs qu’il écouta son amie parler de ses découvertes.

Une fille de bourgeois duchéens lambda ? En soit ça ne l’étonnait pas énormément et il supposait que ce n’était pas si mal à bien y réfléchir, même s’il se doutait que c’était bien loin derrière elle. Que ce soit parce qu’elle n’était plus une bourgeoise depuis qu’elle avait changée de vie au minimum et que des siècles passés en tant que vampire voyageuse à la richesse assez modeste n’avait pas de quoi l’avoir attachée aux bien matériels.

« Vous avez été vendue comme esclave ? Eh bien, je ne devrais pas juger quelque chose qui s’est passé il y a aussi longtemps, mais c’est assez méprisable de leur part d’en arriver au stade où ils vendent leurs propres enfants pour éponger leurs erreurs. » Oui, mais quoiqu’il en soit c’était arrivé il y a longtemps et il supposait que comme possible esclave, Vittoria devait avoir bien finit pour être encore en vie et visiblement en forme aujourd’hui. Après pour un Eïlynsterien comme lui il est vrai que le concept de l’esclavage duchéen avait toujours parut assez saugrenue. Sur ce, il reprit de cet air naga difficile à décrypter pour ceux ne connaissant pas bien sa race.

« Vous avez donc un nouvel objectif et visiblement une idée de quelqu’un encore en vie qui pourrait vous parler de tout cela ? Après, si vous aviez trois ans à l’époque, je ne sais pas si vous aviez eu le temps de beaucoup vous faire connaître, mais il est bien de vouloir suivre le fil du passé… Peut-être pourra t-il d’ailleurs vous parler de ce fameux voyageur qui vous a racheté. » Puis ceci dit, Amset qui semblait pensif, glissa avec une petite dose d’indulgence amusée.

« Chez les vampires, je suppose que l’âge est un concept abstrait n’est-ce pas ? Enfin, ça ne me dérange pas de toute façon, je ne vais pas être tatillon sur l’âge d’un membre de votre peuple après tout. » Déjà qu’il ne l’était pas énormément en général. Sur ce, il reprit avec un petit air de réflexion.

« Vous allez poursuivre dès maintenant votre quête ou comptez attendre un peu avant ? Est-ce que vous avez une idée d’où aller chercher ce majordome sinon ? » Après tout Orzian était vaste et les elfes pouvaient se trouver un peu partout à bien y réfléchir, sur ce continent qui était la terre natale de leur peuple.

Oui, c’est cela. Un acte déplorable, j’en suis bien consciente, mais c’est bien derrière moi. Il n’est guère judicieux de me laisser aller aux émotions pour de si lointains événements. Cependant, je suis tout de même rassurée d’enfin être récompensée de mes efforts, même s’il me reste des choses à apprendre. Je suis motivée à en savoir davantage, mon instinct d’enquêtrice très probablement.

Elle se joint à l’amusement du Naga volontiers, lui partageant ses nouvelles sans grand mal avant de reprendre.

Le majordome m’a décrit plusieurs fois dans ses carnets, je suppose que durant ces trois ans il a eut le temps de se souvenir de moi. Il ne me reconnaîtra très probablement pas, et cela m’importe peu. S’il est encore vivant, je souhaite simplement savoir tout ce qu’il s’est passé avant et éclaircir ce mystère, même s’il me faudra du temps pour cela. J’espère bien qu’il pourra me parler de ce dit voyageur, ou au moins avoir un indice sur ce qu’il a pu devenir. Enfin, je ne suis pas prête d’y arriver, et je n’ai pas de raisons de m’y précipiter. Je m’estime déjà heureuse d’avoir découvert une grande partie de ce qu’il y avait à découvrir.

La vampire marqua une pause. Elle laissa ses doigts parcourir distraitement la nervure du bois de la table avant de les rejoindre entre eux, croisant les mains sur le rebord. Elle croisa par la suite le regard du Naga, souriante avec tranquillité.

Oui, j’imagine bien que l’âge n’a guère plus d’importance lorsque l’on est immortel. Mais peut-être cela permet d’avoir un repère dans le temps, en tous cas je suis bien satisfaite de connaître enfin mon âge, plutôt que d’imaginer une estimation à mon sujet.

Elle ria légèrement à ce sujet.

Pour le moment, je manque d’indices. Il faudra effectuer une enquête plus approfondie concernant ce majordome un peu plus tard, et diversifier les pistes. N’en avoir qu’une n’est pas bon signe. Enfin, je pense qu’il est venu le temps d’accorder du temps à autre chose. Passer du temps avec vous m’est agréable, avez vous encore du temps à me donner ou êtes vous pris par quelconque autre activité plus importante sous peu ?

Elle souriait de manière bienveillante, simplement curieuse du quotidien de son ami.

En somme, l’enquête de Vittoria avançait bien, mais était loin d’être terminée. Soit, cela lui faisait après tout un but à suivre actuellement, pas qu’il doutait du fait qu’elle en avait bien d’autres, mais au moins elle savait quoi faire. Pour sa part par contre, il ne savait pas s’il pourrait rester bien longtemps avec elle pour l’aider, car même s’il ne l’avait pas dit, il restait Eïlynsterien et au vu des évènements actuels, il faudrait qu’il serve sa nation au mieux, surtout que personne ne connaissait encore vraiment les projets de Teïder ou plutôt de la sinistre créature qui servait de dieu à leurs éternels ennemis…

Quoiqu’il en soit, il était content pour elle et ne le cacha pas. « Qui sait ? Peut-être qu’apprendre au sujet de votre passé aura aussi son utilité, quoiqu’il en soit ça fera des questions en moins sans réponses. Quant à ce que je prévois de faire prochainement ? Eh bien pour aujourd’hui ou demain je n’ai pas de projet particulier, mais je devrais je pense bientôt reprendre la route de mon côté, jusqu’à la prochaine fois. Je m’inquiète disons de mon clan, comme ces derniers vivent dans le désert, les événements actuels ne sont pas pour me rassurer. » Une bonne excuse et qui n’était pas trop un mensonge. Enfin, en soit il n’était pas un naga venant du désert donc il n’avait point de clan venant de là-bas, mais il s’inquiétait en effet de l’avenir de sa race, même si sans doute le connaissant, un peu moins que celui de sa nation.

« Je suppose que les temps prochains vont s’avérer difficiles pour Orzian dans son ensemble, mais nous nous reverrons par la suite je n’en doute pas. J’espère quoiqu’il en soit que votre quête s’achèvera sous de bons auspices. Qui sait ? Peut-être serais-je là pour y assister. » Mais oui, en quelque sorte il avait à faire en attendant… Peut-être qu’elle aussi ?