L’argent et les duchés... Visiblement elle savait comment ça marchait souvent par ici, mais ça ne l’étonnait pas, en général un voyageur errant en ces terres l'apprenait vite, les autochtones par ici donnaient après tout souvent plus de valeurs à des sous concrets dans les mains qu’en des concepts abstraits pour eux comme les idéologies ou la religion. Oh, après ça ne voulait pas dire qu’il n’y avait pas beaucoup du duchéens religieux ou spirituels d’une façon ou d’une autre, mais ces derniers étaient en général étonnamment matérialistes et terres à terres la plupart du temps. D’où cela venait-il, de traits culturels particulier ? De tendances historiques dures ? Ou bien d’un dédain progressif qui avait finit par s’installer pour les choses n’apportant pas un confort ou avantage concret en ce monde ? Difficile à dire.

« D’accord, dans ce cas faisons ainsi, commençons par une des tavernes ou auberges du coin je suppose. » Et au pire si ça ne donnait rien, ils iraient demander à de plus hautes instances locales, quitte à devoir faire passer un peu d’argent de bourses en bourses, après tout ce genre de choses pouvaient pas mal accélérer aussi les procédures administratives en ces terres, alors autant ne pas s’en priver…

Quoiqu’il en soit, trouver un établissement local ne fut guère difficile, il devait y en avoir plusieurs dans cette villes après tout, certains plus fréquentés par les voyageurs, tandis que d’autres profitaient davantage de la population locale. Les deux voyageurs purent quoiqu’il en soit y entrer sans se faire trop remarquer et aviser diverses personnes qui ressemblaient soit à des locaux, soit à des voyageurs au vu de leur habillement et… La tavernière qui semblait être une solide matrone sympathique, mais du genre capable de mettre dehors un poivrot quelconque sans trop de mal.

« Je vous laisse aviser pour trouver quelqu’un qui pourrait nous éclairer ou bien comment nous y mettre. Vous avez l’air après tout de vous y connaître assez. » Glissa quoiqu’il en soit Amset d’un ton neutre à Vittoria, ce pendant qu’il en profita pour aller chercher à boire pour lui, probablement du vin.

Une fois entrée dans l’auberge, elle observa les lieux avec détail. Le Naga qui l’accompagnait semblait d’accord avec cette initiative, et la moniale poursuivit dans son idée de soutirer des informations de quelconque individu pouvant le lui fournir, alors que le Naga quant à lui se dirige directement au comptoir pour commander une boisson.

Il y avait là une multitude de personnalités, représentative des Duchés et de son côté hétéroclyte quand il s’agit de se faire de l’argent. Le coin était probablement un repère à mercenaires en attente de se voir une mission accordée, ou un butin à récupérer. Quoi qu’il en soit, chacun ici était un client potentiel pour chaque autre personne, et vice versa, et c’était ainsi que fonctionnait les duchés. C’est donc dans cette masse de mercenaires que la moniale, sous le regard intéressé de quelques uns -sûrement plus pour sa bourse que pour son apparence déjà masquée-, qu’elle s’avança à son tour vers le comptoir. Elle interpella le barman afin de lui demander une boisson à base de baies. Lorsque l’attention de ce dernier fut capté, la moniale lui présenta la somme pour le verre, puis un petit supplément en retrait bien gardé sous sa main jalouse, le tout sans le quitter des yeux.

Je recherche quelqu’un. Soit tu sais des choses et on en discute à l’arrière boutique, soit tu passes ton chemin.

Elle marqua une petite pause, avant d’entreprendre de donner quelques détails afin de rassurer le tavernier si oui ou non il lui serait utile.

J’ai besoin de connaître en détail l’histoire de ces lieux, et de ses propriétaires au fil des âges. La personne que je recherche est certainement âgée de trois cent ans si elle n’est morte, et je veux retrouver sa descendance. Alors, le nom des propriétaires et les potentielles histoires qui y courent, avec leur famille, m’intéresserait.

Sans quitter son regard du tavernier, elle se montrait impassible. Pour sûr, elle promettait par ce supplément sous sa main une paie convenable contre des informations, mais ne libèrerait pas cette somme si elle n’est pas satisfaite des réponses qu’elle récolterait.

Le barman à qui la moniale expliqua de quel endroit elle parlait pour éviter qu’il confonde avec la ville en elle-même, leva légèrement un sourcil étonné, mais ne semblait pas spécialement contrarié. Sans doute qu’il se disait qu’elle devait chercher la dite personne pour des raisons qui ne le regardait pas, cela fonctionnait ainsi après tous dans les duchés, surtout quand vous n’aviez aucun lien affectueux quelconque par rapport à la personne sur laquelle on vous demandait des informations. Quoiqu’il en soit, lui qui contrairement à la propriétaire était un demi orc visiblement bien bâtit, finit par dire de son ton légèrement rugueux.

« Hum, bon j’avouerai que j’étais pas né à l’époque, mais en effet la famille qu’était propriétaire de cette exploitation traîne encore dans les environs. Des demis elfes, bon ils ont finit par revendre leur domaine y a plus d’un siècle pour diverses raisons, mais… Ils sont toujours en ville et se sont lancés dans un autre commerce, les armes. C’est un commerce rentable, par contre on dit qu’ils vendent pas leurs armes qu’à des gens des duchés si vous voyez ce que je veux dire, mais bon les affaires sont les affaires. » Oui, après tout il fallait bien produire des armes de qualité pour les vendre à des compagnies mercenaires de passage ou dont les besoins en approvisionnements constants exigeaient plus qu’une forge de village. Un commerce qui n’était pas très propre en soit, mais dans les duchés pas tant de gens que cela seraient choqués par ce dernier, après tout il était vu comme honorable de vendre ses services guerriers pour de l’argent, alors à ce compte là…

« Après pour les rencontrer je saurais pas trop comment vous aider, cette famille traîne pas trop dans les auberges et tavernes de la ville, quoique et, mais c’est pas qui je crois ? » Dit le semi orc en désignant du regard Amset avant d’ajouter amusé. « C’est votre ami ? Je crois qu’ils seraient possiblement intéressés par le fait de le rencontrer, c’est un duelliste qu’a déjà une certaine notoriété dans les duchés, une bonne personne pour faire vendre la qualité de vos produits si vous voyez ce que je veux dire... » Sur ce l’orc sembla demander du regard s’il pouvait avoir ou non ses pièces.

La moniale avait réussi à faire parler le tavernier en l’appâtant avec quelques pièces. Ce n’était pas plus mal, la vampire sembla satisfaite des réponses du tavernier au fur et à mesure qu’il donna des détails, alors qu’elle pris le temps de détailler ce dernier. Un semi orc, de toute évidence, qui bossait dans une taverne prise par bien des clients. Pour sûr, la moniale avait vu juste ; ce gars là en savait des choses.

Ce n’est que lorsque l’orc eut fini de distribuer tout ce qu’il savait que la moniale poussa les quelques pièces sur le comptoir à la destination du tavernier. Elle le laissa les empocher avant de tourner le nez vers Amset quelques instants. Il est vrai que, sous les conseils de l’orc, sa réputation pouvait lui être utile. Ce n’est qu’après cette réflexion qu’elle se retourna pour faire face au donneur d’informations, croisant son regard pour le saluer d’un hochement de tête.

Merci beaucoup, l’ami. Que les affaires soient bonnes.

Elle s’en détourna pour s’avancer plus vers le centre de la taverne, afin de rejoindre son coéquipier Naga. Elle lui adressa son regard afin de capter son attention, avant de l’entraîner à part. Une fois fait, elle étire un léger sourire, exposant l’avancée des choses.

La demeure a appartenu à une famille de demis elfes, qui l’a vendue y a un siècle. Mais ils sont toujours en ville, et font du commerce d’armes, apparemment. Je pense que vous me seriez utile, votre notoriété et votre réputation pourrait me faciliter la tâche, si vous acceptez de prétendre à acquérir une arme de qualité auprès de ces commerçants. Une fois débusqués, nous pourrons nous renseigner, pour sûr. Qu’en dites vous ? Je paierais l’arme et la donnerais à quelqu’un en ayant le plus besoin, si vous n’en avez pas besoin.

Amset était en train de boire du vin du coup en attendant que Vittoria ait finit et venait à peine de finir son premier verre quand celle-ci revint. Ce breuvage à la texture rouge proche du sang était après tout assez courant dans les Duchés du Sud, pour ne pas dire que c’était la boisson phare de ce pays concernant les alcools, même si loin d’être la seule. Certains vins se vendant à des prix obscènes d’ailleurs, plus cher que l’or des fois, des vins des fois réservés à l’exportation, après tout les duchéens étaient toujours les premiers quand il s’agissait de s’enrichir toujours plus.

Et lorsque la moniale revint, celle-ci lui expliqua la situation et aussi son plan. Des forgerons, une arme ? Ce ne serait peut-être pas une mauvaise idée, de plus il avait en effet besoin d’une nouvelle arme, de qualité si possible, il pourrait donc sans doute y gagner au change en plus de rendre service à son amie.

« Hum, cela m’intéresse, de plus j’ai en effet envie d’acquérir une nouvelle épée, pour élargir mon champ de possibilités en combat, donc l’idée de procéder ainsi ne me dérange pas, par contre comment suis je sensé prendre contact avec eux ? Je suppose que je dois aller m’énoncer à leur maison familiale, ou leur forge s’ils en ont une en ville. » Et sans doute qu’elle devait être grosse, car des marchands d’armes ne devaient sans doute pas se concentrer de forger une ou deux épées par semaine, il était probable qu’ils fassent plutôt travailler des dizaines d’ouvriers et employaient des outils magiques assez avancés pour accélérer la cadence sans trop nuire à la qualité. Sauf peut-être pour la lame que demanderait Amset, là il était probable que ce soit leur meilleur forgeron qui s’y atèle de façon artisanale, mais que la lame coûte un bras par contre. Quoiqu’il en soit il conclut pensivement, heureusement n’avait-il commandé qu’un verre. Verre qu’il avait sans doute payé à la réception d’ailleurs, pour pouvoir repartir sans tarder.

« Je pense que nous pouvons y aller sur ceci, si tout est bon. »

La moniale était confiante. Elle n’était certainement pas arrivée au bout de sa quête, et elle n’avait aucune idée de combien de temps elle prendrait, mais elle comptait bien poursuivre, et les éléments qui s’ajoutèrent petit à petit ne furent que réconfortants à ce sujet. Ce ne fut pas en tout cas des nouvelles qui allaient décourager la moniale, bien au contraire, et c’est au dires de son compagnon Naga qu’elle esquissa un sourire de satisfaction. Elle tenait là une piste viable et qui ne nécessiterait pas trop de difficultés pour la suivre. Juste un bel appat, et un alibi. C’était tout ce qu’elle avait et qui était nécessaire.

C’est donc en faisant face au serpent que, lui répondant, la moniale se détourna pour prendre route en dehors de la taverne.

Eh bien, nous allons voir pour les trouver. Cela ne devrais pas bien être compliqué en effet, surtout si vous souhaitez en effet quérir une lame. Bien, alors, suivez moi, je vais me renseigner et essayer de vous y mener.

Sur ces mots, la vampire s’engagea dans la ville à la recherche d’informations. Pour sûr, elle observera les plus grandes rues pour déterminer ce qu’il pouvait s’y trouver. Des insignes publicitaires, des attroupements, une forge ou bien un établissement en vantant le corps de métier. Elle avait un indice sur les personnes qu’elle devait trouver, et usa de son observation pour pouvoir les pister et mener le Naga jusqu’à eux. Sinon, la moniale fera en sorte d’interroger les potentielles personnes pouvant lui fournir cette information, sur qui sont ces gens là, où peuvent il être et comment les retrouver. Du moins, le tout sans espérer éveiller les soupçons, du moins c’est ce que tenta de faire la moniale, comme une simple demande de direction, savoir où se trouvait le meilleur forgeron du coin -tout en filtrant ses mots pour ne pas permettre de doutes quant à la personne qu’elle rechercher et ne pas se laisser mener à un quelconque forgeron dont le client serait satisfait-, afin de lui permettre de poursuivre dans sa quête et espérer y trouver des réponses.

Après que Amset ait hoché la tête et daigné suivre la moniale, celle-ci n’eut pas grand mal à apprendre où se rendre, après tout dans ce genre de petite ville tout le monde se connaissant, surtout quand ce tout le monde était une famille d’assez riches commerçants, après tout on n’oubliait jamais l’importance sociale de la richesse en ces terres. Qui certes, n’était guère quelque chose d’unique au duché… Mais encore plus présent ici qu’ailleurs.

Enfin, pour cela elle dû demander à des passants, il n’y avait pas vraiment d’insignes publicitaires dans un pays comme les duchés, quant aux attroupements, ils étaient plus rares concernant une forge que pour bien d’autres commerces. Après tout, le produit dans une forge était cher et nécessitait souvent des heures au minimum, mais souvent bien plus pour êtres fabriqués, c’était donc sur une commande. Après concernant une boutique d’armes, peut-être, mais on allait pas acheter des armes comme on achète du pain.

Et personne n’eut de gros soupçons en soit sur la moniale quand elle demanda pour avoir les meilleurs forgerons des environs à disposition, même si pour sa part elle n’avait pas vraiment l’air très intéressée par les armes de qualité. Son compagnon naga lui semblant plutôt de ce genre et leur réputation taiseux faisant évidemment que les laisser faire parler un sang chaud à leur place ne paraissait pas si saugrenue que ça pour beaucoup

Il se retrouvèrent ainsi devant une grande forge, ayant plus des airs en vérité de petite manufacture métallurgique au vu de sa taille que d’une forge. Sans doute pour pouvoir produire en quantité au passage. Et qui semblait à peine être ouverte au vu du fait qu’il y a avait tout juste quelques employés à l’intérieur, humains, nains et orcs et une demi elfe qui supervisait les choses avec un certain sérieux, mais mettait aussi la main à la patte…

Quoiqu’il en soit avant qu’ils y aillent, Amset demanda pensif à la moniale. « Je demande un service et pendant ce temps vous en profitez pour poser quelques questions ? Subtilement ? Ou vous y allez franchement ? Je ne sais pas après tout si c’est spécialement gênant comme sujet pour quelqu’un de cette famille de parler de son ancien domaine. » On ne lui avait pas encore parlé après tout d’un passé honteux ou tragique à ce sujet...

Trouver la forge ne fut pas d’une grande difficulté, et ce fut après avoir eu sa localisation que la moniale s’y dirigea pour se planter face à la bâtisse et la regarder telle qu’elle est. De toute évidence, c’était un bâtiment conçu pour produire en nombre, très probablement qui fait la richesse des propriétaires.

Quoi qu’il en soit, Vittoria adhéra à la proposition de Amset, lui répondant rapidement alors qu’ils s’approchèrent de la batisse.

Je vais faire une demande directe, après que tu ais fait ta demande. Je ne pense pas qu’il y ai de problème spécifique, alors, nous verrons bien. Tant qu’on a affaire au propriétaire des lieux.

C’est donc à une attente que la moniale se confronta, laissant le Naga demander son service. Suite à ça, elle aurait souhaité parler au propriétaire des lieux, peut-être était-il disponible en ce moment. Quoi qu’il en soit, elle avait préparé ses quelques phrases pour l’interroger simplement, qu’elle répéta quelques fois dans son esprit.

Bonjour, je suis Vittoria Benedetti, et je m’intéresse à l’histoire de certaines demeures en ce monde. Les recherches que j’ai menées sur celle qui m’intéresse m’ont menée à votre famille, qui est la seule encore vivante à avoir possédé ce domaine il y a un peu plus d’un siècle. Voyez vous de quoi je parle ? Une exploitation de coton au milieu d’une forêt de sapin. Je souhaiterai avoir des informations sur son vécu avant que vous en soyez propriétaires, à peu près trois cent ans avant cela.

Elle marqua une pause, laissant cette phrase se former dans son esprit, alors qu’elle avise la demi-elfe donnant les instructions. Peut-être est-ce celle ci qui pourra lui répondre ? Quoi qu’il en soit, elle patienta, prête à parler au moment venu de cette demeure qu'elle recherche activement.

Alors qu’Amset demandait son service et qu’on le menait d’un air à la fois respectueux envers la personnalité qu’il représentant et intéressé par les possibles richesses que cette histoire pourrait rapporter à la manufacture, Vittoria put donc entrer en contact avec l’un des membres de la famille gérant cette manufacture, qui écouta celle-ci tout d’abord de l’air de l’homme polit qui écoutait, mais qui en même temps travaillait car sa journée de travail allait débuter. Travail qu’il cessa un temps, pour répondre à la vampire d’un air étonné.

« Eh bien, il n’y a pas de raison techniquement que je vous empêche de le savoir, mais c’est étonnant de voir une parfaite inconnue s’intéresser à une modeste plantation de coton, du moins quand ça en était une. Est-ce que un de vos ancêtres y travaillait ? Cela m’étonne que votre lignée ne soit pas passée à autre chose depuis le temps, en général les humains du commun n’ont pas tendance à avoir une mémoire généalogique qui remonte au-delà du dernier siècle et encore... » Peut-être une famille extrêmement soucieuse de la mémoire généalogique ? Difficile à dire… Mais oui, Vittoria ressemblant clairement à une humaine, on pouvait s’étonner de la chose, les humains après tout était un peuple à la durée de vie courte en comparaison d’autres pour qui trois siècles était tout de suite une durée de temps plus tangible.

Quoiqu’il en soit Vittoria ne s’était pas prise un refus direct ou net, ce qui signifiait que le sujet était possible à aborder avec ces gens là. Peut-être car ça faisait si longtemps qu’ils considéraient le sujet comme d’une importance minime ? Ou bien, qu’il n’y avait aucune honte chez eux au sujet de cette ferme, il n’y avait pas eut de pratiques là bas particulièrement immonde selon les standards duchéens ? Il arrivait même aux esclaves après tout d’être assez bien traités des fois sur ces terres, selon les maîtres...

Une fois que la demande du Naga fut transmise, Vittoria fut menée par le propriétaire des lieux qui était sans aucun doutes la personne pouvant répondre à sa question. Alors, elle l’avisa, le regardant dans les yeux, en lui adressant cette phrase qu’elle avait préparée. Peut-être avec quelques différences dans l’intonation et quelques mots peu importants, mais au moins elle a été dite.

S’en suivit la réponse de l’elfe qui semblait particulièrement étonné de la requête, mais surtout de l’individu qui la prononça. Après tout, il semblait l’avoir prise pour une humaine, et ce ne fut pas si idiot que ça étant donné que différencier un humain d’un vampire était une tâche complexe selon les gens, surtout les inexpérimentés. Quoi qu’il en soit, le sujet tourna autour de : pourquoi ?

Mes parents étaient propriétaires de ces lieux, il y a de cela trois-cent ans. Je n’ai que de vagues souvenirs de cette vie passée, et retrouver cet endroit était comme tenter de retrouver une aiguille dans une botte de foin. Disons que je me suis lancée dans une quête à l’information ne tenant qu’à quelques suppositions et souvenirs peu fiables, mais la moindre information ne pourra me permettre que de confirmer ou révoquer ces hypothèses qui me trottent dans l’esprit. C’est pour cela que je suis aujourd’hui devant vous, et souhaiterai vous quémander votre aide pour m’aider à savoir d’où je viens.

Son ton n’était ni dur, ni agressif. Simplement informatif et désireux d’avancer dans sa quête. Bien que son visage était impartial, comme à son habitude, son regard ne trahissait pas ; elle était déterminée à aller au bout de ses objectifs et avancer pas après pas, quoi qu’elle puisse récolter sur le chemin, la moindre information ne pouvant que l’aider à en savoir davantage sur son origine et son histoire avant sa transformation.

Le demi elfe regarda la vampire d’un air pensif, surtout quand il entendit qu’elle parlait de « ses parents », en somme ces derniers étaient encore en vie il y a trois cent ans de cela ? Sans doute se demandait-il si c’était la vérité, quel genre de créature lui faisait face... Mais bon en soit, tellement d’hypothèses à ce sujet étaient valables, que la conclusion facile n’était pas forcément que ce soit une vampire. Quoiqu’il en soit, il ajouta donc curieux.

« Il vous faudrait sans doute consulter les archives de ma famille pour cela, c’est disons le genre d’information que moi-même je ne connais pas en détail, mais elles y sont certainement retranscrites. Par contre, normalement nous ne laissons pas les inconnus y accéder. Mais étant donné la nature de votre quête, je suis prêt à demander à ce qu’on vous y laisse partiellement l’accès, surtout que vous venez accompagnée d’un client. Par contre... »

Il finit par poser une question peut-être fâcheuse, selon les souvenirs de Vittoria de son passé, le genre qui allait peut-être demander une certaine réflexion ou même allait appeler aux quelques progrès qu’elle avait déjà possiblement fait à ce sujet.

« Leur famille se nommait Benedetti, vous êtes sûr ? Je suppose que votre nom de famille doit correspondre à celui des anciens propriétaires du domaine. Et il va falloir aussi m’expliquer si jamais ces derniers étaient humains, comment vous avez fait pour être encore en vie aujourd’hui ? Je sais reconnaître une hybride et vous n’en êtes pas une visiblement. »

Après tout même si ce n’était pas le genre d’information secrète ou dangereuse à révéler pour eux que celle des anciens propriétaires de ce domaine agricole montagnard, il pouvait quand même se poser quelques questions curieuses sur son interlocutrice qui en effet ne paraissait pas être, soyons sincère, une simple humaine. Dans le cas où cela était vrai du moins.

La vampire se confronta donc au propriétaire des lieux -bien que ce ne soit pas spécifiquement une confrontation, mais plus l’action de se tenir face à et recevoir les paroles qu’il prononça- afin de comprendre ce qu’il lui dit, donc. Il avait des informations, et se montrait coopératif quant à la possibilité d’accéder à ces archives. Alors il posa à la vampire une première, certes légitime, afin de s’assurer que son nom était bel et bien celui des dits propriétaires. Alors, prenant un temps de réflexion qu’elle prit soin de signifier de quelques paroles, elle ferma les yeux silencieusement.

Les souvenirs dévoilés par le grand Tyran lui revinrent en mémoire, et elle revit le domaine. Le domaine, avec ses plantations, dans un état lamentable avec les propriétaires sur le point de partir. Puis, la petite fille, achetée par un homme en bure au visage masqué par sa capuche. C’était là, le détail qui retentit dans son esprit. L’homme s’adressa aux propriétaires en quelques mots, les interrogeant.

Comment s’appelle-t-elle ? avait-t-il dit.

On lui avait répondit Vittoria. Et lorsqu’il demanda le nom de famille de ces propriétaires là, c’était Benedetti.

Alors, elle rouvrit les yeux. Elle répondit sans plus attendre avec ces nouveaux élements.

C’est cela. Leur nom était Benedetti, j’en suis certaine.

Puis lorsque vint la deuxième question curieuse du demi elfe concernant la nature de la moniale, elle lui répondit sans réticence.

Je me suis réveillée sous cette apparence dans un monastère à Ikhyld il y a de cela trois-cent ans. Je suis un vampire dans cette vie, et n’avait aucune attache avec ma vie passée. Pas de souvenirs, pas de parents, pas d’histoire. Jusqu’à peu, j’ai recouvert une infime partie de ma mémoire. Infime mais suffisante pour me lancer dans cette quête qui est de savoir qui je suis et d’où viens-je. Ces souvenirs mentionnent un lieu comme celui que vous possédiez, alors que je n’était qu’une enfant, achetée par un homme en bure, avec ces deux individus dans l’encadrement de la porte, après que tout dans la maison fut vidé. Rien ne pouvait me dire spécifiquement que c’étaient mes parents, mais durant ces souvenirs je l’ai ressenti avec force que c’était le cas.

Elle loua silence par la suite, laissant le demi elfe apprécier son histoire.

Le demi elfe lança un regard perçant à la moniale lorsque celle-ci commença à raconter son histoire, notamment le fait qu’elle était une vampire. Pas que c’était un statut précaire dans les duchés, mais il y avait tout de même une dose de méfiance plus ou moins modérée répandue au sujet de ces derniers, dans cette superficie de territoires désunis. Quoiqu’il en soit en dehors de cela il écouta jusqu’au bout la mondiale, ce pour finir par dire d’un air pensif en semblant examiner des outils de forge.

« Une vampire à la recherche de son passé humain ? Je me demande bien ce que vous espérez obtenir après tout ce temps en redécouvrant le passé, mais chacun fait ce qu’il désire après tout, n’est-ce pas ? Mais soit, je comprend mieux, pas besoin de me montrer vos crocs pour prouver votre nature. » Alors qu’il semblait réfléchir à comment il allait lancer le rythme du travail prochainement, il ajouta pensif.

« Après le travail, vous m’accompagnerez, je vous amènerai voir les archives familiales, mais vous tâcherez de suivre mes instructions à la lettre, ça évitera tout quiproquo ou vexation de la part du reste de ma famille, d’accord ? » Ce avant de finir par demander l’air le plus sérieux du monde.

« Et votre ami ? Il compte vraiment acheter quelque chose ? Ou c’était juste une excuse pour venir me parler ? » Preuve qu’il avait probablement un peu de jugeote aussi, ou qu’il ne croyait pas à des coïncidences aussi grosses et fort pratiques.

Quoiqu’il en soit si Vittoria visait à en apprendre plus sur son passé, ça semblait bien avancer en ce sens. Mais après, est-ce qu’elle apprendrait la satisferait ou cela se révélerait assez décevant ? Il était encore trop tôt pour le savoir malheureusement...

Je pense que vous comprendrez que n’avoir comme uniques souvenirs de son… “Enfance” un réveil flou et brutal dans une geôle d’un monastère, et que les moines y habitant ont tout fait pour que je prenne un départ en de bonnes circonstances avec la bienveillance d’une mère et ce sans que je ne les reconnaisse ni sache exactement qui je suis pour eux me laisse croire qu’une partie de moi même est manquante, et est éparse parmi les histoires nombreuses que ce monde pût avoir.

La moniale s’arrêta là, énonçant les faits sans spécifiquement se montrer agressive, simplement directe et neutre de ton. Quoi qu’il en soit, il accepta d’accéder à sa demande et lui donna des instructions concernant l’horaire et la marche à suivre. Pour sûr, elle devrait attendre, et le temps n’était pas quelque chose qu’elle manquait. Alors, elle hocha lentement de la tête tout en reprenant.

Bien, je vous attendrai à la sortie de votre travail. Et n’ayez crainte, je suis sage des années que je cumule, je saurais me porter docile et ne pas semer le trouble comme vous le craignez.
Quant à mon ami, je ne me serais pas permise d’user d’un leurre pour vous atteindre, ce ne serait que vous manquer de respect et l’accès à ces informations repose avant tout sur la confiance que vous me portez. J’ai usé de cette opportunité pour pouvoir prendre contact avec vous, mais en aucun cas elle n’est illusoire ; mon ami souhaiterait bien évidemment une lame digne de votre expertise.

La moniale se tenait droite comme à son habitude, indiquant le Naga à ses côtés rapidement comme pour illustrer ses propos, avant de revenir au demi elfe. Voilà une opportunité bien marquée pour la vampire, et une affaire qui se trouvait être fonctionnelle. Elle laissa alors le Naga faire pour passer sa commande de la manière que le gérant souhaite le faire, attendant patiemment la fin de journée, probablement en allant se promener avec le Naga en ville, après tout ce n’était que le matin, et ils avaient une journée à tuer.

Le demi elfe prit donc congé de la vampire jusqu’à la fin de sa journée de travail, ce qui allait demander un peu de temps et patience. Et pour sa part Amset qui avait visiblement finit de discuter de sa commande peu après revint vers la vampire. Ce dernier voyant qu’elle n’était pas sortit de cette boutique, que ce soit à la demande du propriétaire ou par elle-même, supposa d’ailleurs que c’était bon signe. Il prit néanmoins la peine de demander d’un ton mélangeant la neutralité naga et le sympathique.

« Je suppose que vous avez obtenu ce que vous voulez d’une certaine façon ? Cela a été difficile ou assez simple ? » On ne savait jamais après tout avec les duchéens, même s’il se serait attendu à ce que dans le pire des cas, ce soit payant…

Quoiqu’il en soit, pour sa part il avait sans doute dû trouver satisfaction car les gens de l’atelier s’étaient remis au travail sans marmonner ou les regarder salement. Même si il était certain qu’il n’aurait pas le fruit de la commande qu’il venait de faire dans la journée. Après tout la forge demandait du temps, surtout pour des produits n’ayant pas une qualité standardisé et qui étaient en plus personnalisés.

D’ailleurs il se permit d’ajouter avec réflexion à l’égard de la vampire. Du moins si elle confiait qu’elle devrait attendre jusqu’à la fin de journée de travail de la manufacture.

« Je suppose qu’il faudrait un peu occuper notre journée, ce serait après tout étrange pour tout le monde que nous attendions ici jusqu’à la soirée ? Avez-vous une idée de comment passer le temps dans une petite ville comme celle-ci ? » Après tout, même une vampire devait savoir comment occuper ses journées, n’est-ce pas ? Sinon l’éternité pouvait devenir bien longue.

La vampire était satisfaite. Elle se détourna lorsque le demi elfe prit congé afin de s’en aller, et se retrouva face au Naga qui semblait en avoir terminé avec sa commande. La vampire, au visage toujours aussi neutre, avait un regard qui pouvait bien trahir sa satisfaction, et ce qui se confirma peu après de ses paroles tout en se dirigeant vers la sortie du bâtiment.

Cela s’est passé à merveilles. Le gérant a été très coopératif, bien que sceptique au début mais c’est normal j’imagine. Il me donne rendez vous ici ce soir, pour me mener aux archives familiales. Il attends bien sûr de moi que je reste sage et ne sème pas la zizanie, ce à quoi je saurais me tenir aisément me semble-t-il. Quoi qu’il en soit, il semblait apaisé de savoir que vous souhaitiez réellement commander une lame, cela suffit à couvrir les habituels frais d’information, je vous doit au moins ça.

Une fois dehors, elle se dirigea dans une ruelle de son pas calme et tranquille, veillant à ne pas laisser le Naga trop en arrière afin qu’il ne se sente pas à l’écart. Elle tourna le nez vers lui ensuite, acquiesçant simplement à ses dires alors que ses traits se détendirent pour laisser transparaître des bribes de joie.

Eh bien, nous avons déjà une ville à visiter. Même si elle n’est probablement pas des plus touristiques, il est intéressant de voir ce que l’on peut y trouver, non ? Ensuite, lorsque viendra l’heure de manger pour vous, nous trouverons un endroit où s’asseoir et commander un repas. Je pense qu’une fois là bas nous pourrons élaborer le reste de notre journée, ne pensez vous pas ?

La moniale était d’humeur joviale et loquace, ce qui ne manquait pas de se faire remarquer à son petit sourire ou à son ton engagé. Elle guetta la réponse du Naga avec intérêt, marchant tout à ses côtés pendant ce temps.

« J’espère que cette lame sera de la qualité dont ils m’ont promis, mais je doute qu’en vérité ils tentent d’escroquer un duelliste confirmé comme moi, cela et ça leur ferait de la mauvaise publicité. » Après tout dans une terre où la concurrence s’épanouissait autant que les Duchés du Sud on essayait de garder une assez bonne image si possible même si évidemment ça n’empêchait pas de temps en temps de faire des entourloupes. Après, Amset avait sans doute eut un prix amoindrit étant donné qu’user de cette nouvelle lame ferait un peu de publicité à cette petite corporation de forgerons et ce n’était franchement pas plus mal.

« En effet nous pourrions faire tout cela et nous allons sans doute le faire. » Glissa Amset sinon avec assentiment et calme à ce sujet, de toute façon il avait vu pire comme emploi du temps et certainement qu’un naga comme lui pouvait se contenter de moins, du moins si le cliché de peuple peu jouasse que l’on leur attribuait s’avérait juste, ce qui par nature était évidemment douteux.

Mais il avait aussi une autre idée en tête pour passer du temps, une idée qu’il exposa avec un naturel somme toute déconcertant.

« Nous pourrions notamment si cela vous intéresse louer une chambre d’auberge pour l’après midi par exemple. » Sans en dire davantage, sans doute laissait-il la moniale deviner le sous entendu là-dedans et faire savoir si cela l’intéressait ou non. Après tout ce genre de choses avec un naga pouvait paraître étrange à beaucoup, attirantes pour d’autres. Quoiqu’il en soit ça ne semblait pas le déranger de proposer cela à un compagnon de voyage, ou plutôt une compagne dans ce cas.

Quoiqu’il en soit il laissa donc la moniale mener la danse quant à la visite de la ville, il ne voyageait pas depuis aussi longtemps que cette dernière après tout, fort probablement du moins.

Je leur souhaite de garder parole et tenir à leur réputation, sinon de toutes manières leur affaire sera en danger dans le cas contraire. En tous cas, ils avaient l’air bien motivés de travailler pour vous, et je n’ai pas de doutes sur la qualité de leur travail, en espérant que vous en soyez suffisamment satisfait.

Elle continua ses pas en direction des ruelles de la ville pour en entamer la visite après avoir eu l’aval du Naga qui adhéra aux propositions de la moniale. Le duo marchait tranquillement côte à côte donc dans la ruelle qu’ils entamaient, la vampire ne manquant pas d’observer les bâtisses et échoppes en tout genre qu’ils pouvaient trouver. La vie qui s’y déroule, les marchands, les enfants, tout ce qui faisait d’une ville un lieu abritant des êtres vivants. Puis, Amset énonça une proposition en quelques mots simples et naturels, sans complexe, auquel la moniale éleva en premier lieu un sourcil, pour tourner le regard rapidement vers son compagnon, néanmoins non perturbée par ce qu’il se fut dit.

Eh bien, nous pourrions, oui. Si vous tâchez d’être convainquant pour une vampire au masque de glace comme moi, ce serait une opportunité à ne pas manquer.

Le masque, il était déjà à moitié tombé. Sur ces espiègles paroles, la vampire étira un sourire en coin, le regard mutin et joueur, curieuse de voir la réaction du Naga en jouant aux difficiles et le tester un peu, comme une enfant le ferait pour s’amuser à faire languir son camarade qui attend impatiemment qu’on lui donne ce qu’il désire.

Oui, de toute évidence, la partie sérieuse de la journée était passée et le sera jusqu’au soir même, alors la moniale est taquine et joueuse, laissant son rôle de moniale impassible sur le côté pour un visage joyeux ; léger dans l’expression, fort dans le regard.

Amset ne se faisait donc pas vraiment d’inquiétude sur la lame qui allait entrer en sa possession et qui ferait probablement plus duchéenne que celle qu’il maniait actuellement. De toute façon contrairement à son bouclier, son épée n’était pas un véritable artefact, donc il y avait encore une bonne raison de varier souvent celle qu’il maniait, alors que pour un artefact, sauf dans des cas très spécifiques pour lesquels l’objet non artefact avait été conçu, ça ne servait pas à grand-chose.

Quoiqu’il en soit si la ville était petite, elle proposait tout de même une certaine variété au niveau des commerces. Probablement pas de ceux où l’on trouvait les bien les plus rares, au niveau militaire, quoique la manufacture d’arme permettait sans doute au pire d’aller faire des commandes d’armes blanches, mais sinon il y avait quand même des produits de luxes divers qui s’y vendaient et beaucoup de biens typiquement duchéens. Mais était-ce étonnant ? En ces contrées il y avait forcément des marchands entreprenants pour venir vendre leurs marchandises jusqu’ici.

« Eh bien, nous sommes tous les deux voyageurs et je suppose avons une conception assez légère de ce que pourrait être une relation amicale ou certaines normes, et votre genre de femme forte et libre d’esprit ne me déplaît point... Après, j’ai envie de dire, il est bien assez rare de voir un naga faire ce genre de propositions déjà, je doute que vous voyez ça de sitôt à nouveau. » En somme, il ne demandait pas non plus d’engagement, ils étaient amis et il ne demandait pas une mise en couple ou ce genre de choses. Il proposait juste une façon de s’amuser entre deux amis, il conclut quoiqu’il en soit.

« Après si vous désirez être traitée comme une princesse devant être courtisée par un chevalier pourquoi pas ? Dois-je vous offrir des bijoux ? Un dîner galants ? Des poèmes d’amours ? Je ne sais pas si mes vers sont de qualité par contre, je vous préviens. » Il plaisantait évidemment, il n’allait pas s’amuser à ce genre de choses. Disons que ça n’entrait de toute façon pas dans la façon de faire naga habituelle. Ces derniers après tout n’étaient pas du genre extrêmement expressifs en général sur leurs sentiments.

Le Naga argumenta sa défense adroitement, et la moniale amusée lui lança quelques regards intermittents entre deux ruelles. Elle ne se démonta pas davantage, rebondissant sur la réaction de son compagnon avec un certain amusement, pour ensuite répondre.

Ah oui ? Eh bien, si mon genre ne vous déplaît point alors… D’autant plus si c’est une proposition de la plus grande rareté ! Après, vous savez, j’ai un très bon ami maître transformiste, si vous voyez… Mais vous avez raison, je n’ai jamais eu l’occasion de m’amuser avec véritable Naga, découvrir ces plaisirs ne seront que les bienvenus pour assouvir ma curiosité, en plus de passer le temps de manière non déplaisante. La seule chose que je crains, au vu de votre impartialité des plus totales -ce que je comprend bien soyez en sûrs- ; êtes vous frigide mon bon Amset ?

La moniale avait fait un bon dans ses taquineries, et accompagna ses paroles d’un rire certes légers mais énorme au vu du caractère de la vampire, qui sembla se découvrir sous un autre jour. Elle repris par la suite.

Non pas que je vous en plaigne, mais comprenez que rester plat et aussi impartial que votre expression faciale n’est pas des plus recherchés. A moins que ce ne soit là la spécialité Naga ?

Elle marqua un temps pour l’observer, sur le ton de la plaisanterie bien évidemment, tout comme ses yeux de soufre plissés et transmettant une joie intense. Pour sûr, loin de loin l’idée de se moquer de son compagnon ou le faire sentir malaisé par ses paroles, ce à quoi elle ajouta.

Oh, ne vous dérangez point, je ne vous demanderez pas tant d’efforts de votre part. Vous l’avez peut-être remarqué, mais la sobriété est quelque chose qui me sied. Quoi que, j’aimerais écouter vos vers une fois, peut-être me cachez vous un talent insoupçonné autre que la maîtrise du glaive et du bouclier ?

« Si vous étiez naga vous comprendriez sans doute bien mieux mon attitude et mes manières d’être d’un simple regard, mais que dire ? Certains trouvent le contact des écailles sur la peau très agréable, pour le reste, je suppose que je ne peux pas demander à quelqu’un d’origine humaine de forcément apprécier autre chose que ses congénères, au final c’est une histoire de goût. » Oui, après tout souvent il n’y avait pas d’excentricités pour d’autres que la sienne ou moins dans les préférences amoureuses de la population.

C’était sans doute là un mécanisme de survie supposa t-il, pour assurer qu’une espèce se perpétue, même s’il laissait assez de possibilités aux excentricités au final et aux façons de faire différentes. Après cela dépendait aussi des sociétés, il y avait probablement plus de chances que ce genre d’excentricités justement, existent dans une société ouverte et multiculturelles que l’inverse stricte. Les duchés l’étant justement, Eïlynster aussi même si dans ce dernier cas le naga n’avait pas prit soin de faire part de sa véritable nationalité. Après tout, peu d’enfants du mur s’amusaient à faire cela à l’étranger.

« Il vaut mieux pour vous éviter ce genre de choses, après tout nous devons sans doute avoir tous les deux une façon assez égalitaire de considérer les rapports entre les deux sexes, ce qui voudrait dire que je pourrais vous demander quelque chose du genre en retour. Et quelque chose me dit que pour votre part ce n’est pas votre passe temps favoris que de faire des vers ou du chant. » Il aurait pu avouer en ça être travailleurs de gemmes, mais ce n’était pas vraiment un métier qu’il exerçait en dehors d’Eïlynster et en plus ça sonnerait assez étrange comme passe temps. Après tout il y avait plus économique comme manière de s’occuper que de tailler et parfaire des bijoux.

« Quand à l’ami transformiste, je suppose que vous avez su nouer beaucoup d’amitiés depuis le temps, donc cela ne m’étonne pas vraiment, ce même si vous semblez particulièrement apprécier voyager en solitaire. » Glissa t-il sinon avec amusement.

La vampire laissa son partenaire avancer un certain argumentaire et point de vue sur le sujet. Certes oui, la manière de s’attirer entre les espèces différaient et qu’il était logique en un sens que ne pas apprécier les manières de l’autre. Sûrement par raison culturelle, ou biologique, mais la moniale n’y prêtait que peu d’attention au final, et n’abordait le sujet que pour en rire simplement et taquiner son partenaire

Elle reposa à nouveau son regard amusé sur lui, les paroles du Naga incitant la moniale à lui répondre, ce qu’elle fit sans trop tarder.

Oui, vous avez bien raison. Une certaine histoire de goût, très probablement. Mais bon, même s’il ne semble pas y paraître comme ça, je suis très curieuse, et j’aime découvrir bien des choses avec mes amis.

Elle reprit par la suite avec tranquillité, toujours peu complexée par le sujet abordé.

Eh bien ! Payer pour quelques vers, vous avez bien raison. Je vais plutôt m’abstenir, et en rester à ce que nous en convenons. Et vous touchez juste, il est vrai que je ne me suis guère essayée aux vers et chants, et je doute que cela me sied à vrai dire. Je maîtrise mieux le bâton que les paroles, qu’en pensez vous ?

Elle rit doucement, son fidèle bâton dans sa main faisant office de bâton de marche. Elle marqua un léger silence, puis repris au sujet de ses amitiés.

Mhh. Je ne suis pas connue de par les continents et n’ait pas une flopée de prétendants à mes côtés, mais j’ai su me lier d’amitié à plusieurs personnes de par mes voyages. Ils ne sont guère nombreux, et certains s’effacent avec le temps, mais je passe généralement assez de bon temps avec eux pour ne jamais le regretter. Je suis une solitaire, mais je ne suis pas tombée dans la bêtise de m’isoler et ne pas m’entourer de proches.

Elle pris un temps de réflexion, avant d’ajouter.

En réalité, j’ai déjà traversé ce genre de période. J’avais un très bon ami, ce dit ami transformiste d’ailleurs, que je connais depuis deux siècles. Mais je n’avais que lui, et quand je ne le voyais pas je n’avais personne d’autre. Je savais me débrouiller seule, mais j’étais seule, pour sûr. C’est une brave femme du désert, que j’ai rencontré il y a à peine quelques années, qui m’a donné de sages conseils. Elle m’a permis en quelques sortes de m’ouvrir à autrui, et de simplement être moi même au lieu de se fermer à tout contact. C’est devenu par ailleurs une amie très proche, bien que nous ne nous voyons guère souvent.

« Et moi mieux l’épée que la poésie, je suppose que c’est là un point commun entre nous. » Ce avant de glisser avec amusement tout de même, décidant de faire une petite confession même s’il ne dit alors pas toute la vérité. « Ma mère était tailleuses de gemmes je dois vous avouer, et j’aurais dû faire son métier si j’avais suivis sa voie. Néanmoins, avant de prendre mon propre chemin, elle m’avait apprit son art, alors qui sait ? Il m’arrive encore des fois de tailler des pierres précieuses brutes que je trouve pour les revendre, si vous voulez je pourrais vous en montrer quelques-unes. » Une compétence assez rare et étrange chez un guerrier, mais il est vrai que les gemmes et bijoux pouvaient avoir une certaine beauté. Sur ce le naga reprit pensivement.

« Je suppose qu’il est bien pour une vampire de temps en temps se faire de nouveaux amis, de plus vous avez tout le temps nécessaire ainsi pour connaître les gens étant donné que vous n’avez pas forcément d’obligations urgentes ou de temps très limité devant vous. Souvent des voyageurs comme vous d’ailleurs ? Ceux qui deviennent vos amis ? Ou je me trompe ? » Cela lui semblait en tout cas le plus probable, sur ce il conclut avec une pointe d’amusement reptilien.

« Seriez-vous par hasard une jeune vampire ? Parce que de ce que j’entends vous avez encore beaucoup à apprendre dans certains domaines. De toute façon, c’est un avantage je suppose d’avoir le temps d’apprendre justement… Et du coup, vous parliez du désert, c’est une nagate qui vous a appris cela ou une Akkatonienne ou quelqu’un d’un des clans nomades ? » Après tout le désert était devenu assez varié en population ces deux derniers siècles avec l’arrivée des impériaux, mais il est vrai qu’avant il n’y avait pas que des nagas qui y vivaient, même si les autres peuples le faisaient surtout sur la forme de clans nomades plus ou moins modestes qui voyageaient parmi les dunes.

Aux confessions du Naga, Vittoria ne put s’empêcher de pencher légèrement la tête comme pour rapprocher l’oreille et s’assurer qu’elle soit la seule à entendre ce secret dévoilé. Elle sourit tendrement par la suite, semblant apprécier l’aveu ainsi exprimé.

Oh ? La taille de gemme donc ? Je dois avouer ne pas du tout m’y connaître, et voir ce que vous savez faire dans ce domaine est une proposition que j’accepte volontiers. Moi qui suis curieuse, je ne doute pas que votre savoir saura me satisfaire.

La vampire avait cet attrait de ne manquer en aucun cas d’apprendre de nouvelles choses. Même si ce ne fut que par des explications orales et non par une véritable formation pour pouvoir exercer le savoir en question. Bien au contraire, même si c’était une solitaire, elle donnait plutôt cher pour ces moments de partage où sa curiosité ne manquait pas d’être assouvie. Parler avec ses amis et partager avec eux des savoirs et connaissances avait cet attrait de ne jamais lui déplaire, et même de mieux connaître et tisser des liens avec les dits amis.

Oui, j’ai appris à l’apprécier et ne pas m’en passer. Je pense que si j’avais joué ma solitaire quelques années de plus, je serait tout sauf épanouie. Même s’il me reste, pour sûr, encore du chemin à faire, j’ai cette sensation de plénitude en moi contrairement à certaines années. Comme quoi, il me reste bien des choses à apprendre.

Elle en parlait avec naturel et avait de toute évidence laissé son masque tomber sans problèmes. C’était là le visage d’une jeune femme simplement heureuse de passer du temps avec un ami qui devient à chaque seconde plus proche d’elle.

Eh bien, je pense qu’on peut le qualifier ainsi, oui. Je dois avoir environ deux-cent cinquante ans, plus ou moins l’âge que j’avais quand ça m’est arrivé. Même si c’est deux générations humaines, j’ai connu une longue période où peu d’évolution de ma personnalité ont été remarquées.

A vrai dire, je pense que cela doit faire à peine dix ans que j’en apprend vraiment sur ma vie. Malgré la perte de mes souvenirs, et ma formation de moniale qui, même après ma transformation, me reste avec cette pensée d’équilibre de soi et de maîtrise du corps, je pense que je suis toujours restée la jeune femme que j’étais, certes formée à se maîtriser mentalement et physiquement, mais toujours en manque d’expérience. Regardez mon apparence, elle est restée intacte durant toutes ces années, je doute que je ne fus bien vieille lorsque j’ai été mordue.

Elle marqua une pause avant de reprendre.

Donc oui, je pense que vous avez raison, malgré toutes ces années je suis toujours jeune, et il me vient l’idée de ne plus me laisser envahir par ce masque de glace que je porte chaque jour et vivre ma jeunesse dans de rares mais exceptionnels moments en compagnie d’amis proches, comme maintenant. Je suis véritablement heureuse en cet instant !

Concernant cette amie du désert, c’est la matrone d’un clan nomade. De bien braves gens qui vouent leurs pensées à la lune et à la nuit. Ils ont vu en moi un individu faisant partie intégrante de la nuit, et m’ont nommée fille de la lune, tout comme chaque membre de ce clan, mais nommer ainsi une étrangère signifie beaucoup pour eux. En échange, je me suis intéressée à leurs croyances et leur vision de cette importance qu'à l’astre nocturne et les voiles sombres de la nuit. De longs et passionnants échanges.

« Tailler une gemme est un art compliqué, après je suppose qu’un vampire ne manque guère de temps pour s’adonner à de nouvelles passions, mais disons que pour quelqu’un comme moi qui apprécie la dextérité et précisions du geste, ça aurait pu être un métier agréable. Et au pire, cela peut toujours se vendre pour quelques pièces les fois où je prend le temps d’en tailler une ou deux sans vrai matériel. » En vérité il était un vrai tailleur de gemmes à Eïlynster, mais c’est là quelque chose qu’il était trop tôt pour l'avouer, mais disons qu’une mi confession de sa part était déjà bien. De plus il faisait en effet dans l’originalité pour le coup.

« Je suppose, qu’il est compréhensible qu’on se cherche un temps, surtout quand on à l’origine on a perdu toute trace de son passé, ma foi, l’avantage c’est qu’il n’est jamais vraiment trop tard dans votre cas, même si évidemment faire ce genre de choses au plus vite est généralement préférable. » Trait d’humour quant au fait que c’était probablement moins inquiétant qu’une crise de la cinquantaine chez un humain vieillissant par exemple.

« Jeune pour une vampire je ne saurais pas dire, mais vous n’avez pas dépasser en durée d’existence celle d’un elfe, d’un nain ou d’un demi elfe, donc je suppose que ça va plutôt en ce sens. » Dit-il sinon avec un amusement reptilien concernant l’âge de la moniale. En effet, deux cent cinquante ans ça restait plutôt jeune à ses yeux pour une vampire, pas totalement non plus, mais tout de même…

« Si votre corps ne changera probablement jamais, du moins pas par les marques du temps, votre esprit lui change et continuera à changer, mûrir. Quoiqu’il en soit, je suppose que votre formation de moniale vous a permit d’assez rapidement vous faire à votre condition ou du moins de ne pas trop paniquer... » Ajouta t-il sinon avec réflexion toujours, avant de reprendre assez touché par les propos de la moniale, mais en abordant d’abord le sujet des amis du désert de cette dernière.

« Beaucoup de peuples vivant dans le désert de l’Ouest ont une certaine forme de spiritualité tournée vers les astres. Ironiquement les miens qui sont la peuplade principale des lieux à l’origine pas vraiment ou peu, beaucoup vénèrent l’astre solaire, mais beaucoup aussi préfèrent s’éloigner des questions spirituelles pour d’anciennes raisons… C’est mon cas. » Puis sur ce il se permit de prendre une des mains de la moniale dans la sienne avant d’ajouter amusé.

« Que diriez-vous de poursuivre cette conversation un peu plus en privé ? Je suppose que les confessions dans la rue, sonnent moins intimes. » Cela et puis ce serait plus agréable.