18 Janvier de l'An 2000 de l'Âge d'Acier

Lui, l'empereur de la plus grande nation de ce monde, une nation ayant conquit deux continents entiers à la force des armes et qui actuellement donnait de quoi s'inquiéter aux nations Orzaniennes, se retrouvait à voyager seul dans les Duchés du Sud sans escorte et anonymement… Otmar était décidément un excentrique, mais bon des excentriques il y en avait déjà eu sur le trône de l'empire Akkatonien au cours des deux derniers millénaires, après tout quand on change d'empereur tous les 10 ans, même en sachant qu'ils sont élus, il y a des chances que certains de ces derniers détonnent un peu par leur caractère, même si heureusement avec un tel système, cette nation est au moins préservée des fous et psychopathes en puissance au niveau du trône impérial…

De toute manière, comme il le dirait, l'empire pouvait bien se passer de lui pendant quelques semaines ou un mois, après tout même s'il restait un personnage central de l'état, son pays savait très bien se débrouiller seul, l'assemblée du peuple était là pour veiller au grain après tout. Pour sa part il avait donc décidé de profiter d'une période de calme pour souffler un peu dans un pays qu'il connaissait assez bien pour y être souvent allé par le passé. Les Duchés du Sud, une nation qui ne correspondait pas vraiment à ses idéaux moraux en soit, mais au moins on y était assez libre et puis il serait temps de défendre ses idéaux et ceux de l'empire lorsqu'il serait de retour de son voyage de toute manière.

Cela et puis il valait mieux éviter qu'il se fasse remarquer, sinon l’ambassade Akkatonienne d'Inveïs, la cité dans laquelle il se trouvait n'aurait de cesse d'être sur son dos… Il prenait donc bien soin évidemment de ne pas trop montrer son visage assez connu dans l'empire, mais pas vraiment dans les Duchés pendant qu'il se baladait dans la cité, balade qu'il accomplissait sans objectif particulier autre que la promenade. En vérité il finit même par s'arrêter peu après être arrivé dans une grande avenue, avisant un banc, il s'assit dessus et… Regarda la scène qui suivait son cours dans l’avenue s'étendant devant lui, contemplant un spectacle, celui de la vie urbaine qui savait être fort fascinant et divertissant pour qui faisait attention aux moindres détails, surtout dans un pays aussi animé que les Duchés du Sud.

Et c'est ainsi contemplatif de tout cela, mais en essayant de ne pas trop s'en donner l'air qu'Otmar inconsciemment baissa légèrement sa vigilance, une chose qu'il ne tarderait pas à rectifier vite quand il s'en apercevrait, mais qui savait être contrariante dans les Duchés pour peu que la chance ne soit pas avec vous...

C’était la fin de l’après-midi et Lilyneska déambulait dans les rues du Duchés du Sud. Son ventre qui grondait lui rappelait qu’elle avait faim et lui semait de dérober quelque chose à l’un des marchands. Calmement, elle regardait les va-et-vient des passants et suivaient les interactions qu’ils avaient avec les commerçants. C’était à cette heure-ci que les vols à la tire étaient les plus efficaces et qu’ils avaient le plus de chance de réussite. Pour la simple et unique raison que c’était le moment où il y avait le plus de gens. Ces derniers étaient pressés de rentrer et ne voulaient pas s’éterniser, ils se concentraient sur leurs achats et non pas sur ce qui l’entouraient. Ils étaient en confiance, car le soleil brillait encore dans le ciel bien que faiblement. Ils se sentaient en sécurité. Ils avaient raison sur un point cependant : les voleurs pouvaient se faire remarquer plus facilement et il était plus aisé de les pourchasser également.

Le temps était légèrement frisquet. L’hybride s’emmitoufla dans sa cape grise qui ne laissait pas entrapercevoir grand-chose d’elle à l’exception de ses yeux azurés. La capuche était bien remontée sur sa tête. Hors de question que quiconque puisse voir ses oreilles félines! Son sac était bien caché et reposait en bandoulière contre sa hanche. Ses vêtements, si on pouvait les remarquer pendant sa démarche, se composait de bottes en cuir, d’un pantalon simple de couleur noire et d’une tunique indigo.

Tandis que Lily s’avançait dans la grande avenue ses sens aux aguets face aux opportunités, son attention fut attirée par éclat cuivré. S’arrêtant, elle s’aperçut qu’un homme d’un âge assez avancé était tranquillement assis sur un banc. Il détonnait avec le reste du décor! Calme et serein, il contemplait l’activité qui se déroulait devant lui. Qui était-il? Un voyageur, peut-être? Il n’était pas pauvre en tout cas ou ne semblait pas l’être, car la jeune femme avait aperçu une bague argenté à son doigt.

Toutefois, c’était l’élément cuivré qui obnubilait ses pensées. Se rapprocha gracieusement, elle se plaça derrière lui. C’était un bon signe, il continuait de remarquer droit devant lui. Que remarqua-t-il en premier : une mèche bleutée glisser près de son visage, ses doigts agiles se refermer sur son pistolet ou ses pas précipités s’éloigner de lui?

« Mais qu’est-ce que c’est que ce machin? » murmura-t-elle pour elle-même. Elle reprenait son souffle dans une petite allée non loin de l’avenue principale et croyait, à tort, que le vieil homme ne saurait la retrouver. Sa capuche était contre son épaule, baissée lors de sa course, et dévoilait ses traits félins. La curiosité était un bien mauvais défaut, mais Lily était intriguée par l’objet cuivré depuis qu’elle l’avait remarqué. Était-ce ce qu’on appelait un fusil? « Comment ça fonctionne? » À la voir manipuler le brombas, elle avait plus de chance de se le faire exploser à la figure.

Cette fois-ci, l’azur contre le cuivre, c’est la petite hybride qui baissa sa vigilance.

La première chose que remarqua Otmar, c'est les doigts qui se refermèrent sur son pistolet et qui retirèrent promptement ce dernier de sa ceinture bien avant qu'il ne puisse réagir à cela, par contre il ne manqua pas de rapidement sortir de son actuel état de contemplation pour tenter de courir après le voleur.

Voleur dont il arriva à ne pas perdre la trace par chance, mais au lieu de se précipiter vers ce dernier au risque qu'il lui échappe, Otmar préféra être discret et le suivit donc jusqu'à ce qu'il s'arrête et évidemment, comme avec toute technologie avancée entre les mains d'un mage de haut vol, le pistolet refusa totalement de fonctionner correctement entre les mains de Lilyneska et sans doute que cela aurait pu être dangereux pour elle d'ailleurs si elle avait eut plus le temps d'insister ou si elle avait été une mage encore plus puissante, mais Otmar en voyant que la femme aux airs de kitsune jouait avec son arme et que celle-ci se déréglait étrangement entre ses mains décida rapidement d'agir alors qu'elle baissa tout à coup sa garde. Il se glissa discrètement derrière elle et déposant doucement sa main sur son épaule, mais fermement, il dit calmement et sans animosité.

« Veuillez m'excuser jeune femme, mais je crois que ce que vous avez en main m'appartient. » Il aurait probablement pu agir plus brutalement ou sèchement, mais ce n'était pas son genre. Il était un homme civilisé après tout et n'aimait pas la violence inutile, surtout qu'elle l'avait juste volée… Bon un tel crime dans les Duchés du Sud pouvait être punit très gravement, ainsi qu'à Teïder certes, mais pour sa part il ne considérait pas cela comme un crime vraiment grave, surtout qu'elle devait probablement faire partie de cette frange de la population pauvre des Duchés, cela et puis elle avait l'air si jeune… Restait donc à voir comment elle allait réagir, mais il espérait bien régler tout ceci de la manière la plus pacifique et calme si possible, après tout la violence n'était jamais la meilleure solution aux problèmes, du moins selon lui.

Mais qu’est-ce qu’était que cet objet brillant? Lilyneska était toujours intéressée à savoir comment le pistolet fonctionnait, bien qu’elle ne connaissait pas réellement ce qu’il se passerait si elle arriverait. Elle avait un objet potentiellement très dangereux, cela elle le savait, mais elle ne réalisait pas à quel point cela pouvait être problématique entre ses mains. Il était si joli avec sa couleur cuivrée. Drôle à dire, mais la voleuse n’avait même pas idée de le revendre pour se faire des pièces d’or. Ce n’était pas la raison pour laquelle elle l’avait dérobé au vieil homme.

Elle était tellement concentrée sur le pistolet qu’elle ne remarqua pas Otmar se glisser dans son dos. « Ah ! » s’exclama-t-elle sous la surprise. L’objet lui avait glissé des mains et était tombé sur le sol. Vivement, elle s’était retournée vers l’homme pour se rendre compte qu’il s’agissait du propriétaire de l’objet cuivré. L’azur croisa les marrons de l’empereur et elle soutint son regard avec défiance, méfiance, mais surtout avec crainte. Rapidement, elle posa son pied sur le pistolet afin de l’empêcher de s’en emparer. « Ne me touchez pas. NE ME TOUCHEZ PAS! » hurla-t-elle vivement.    

Il était calme. Elle était la tempête. Certphaient. Non, elle ne laisserait pas cela arriver à nouveau! Une lueur ardente brillait dans ses yeux.

« Reculez! Je ne veux pas de votre machin, mais je ne vous laisserai pas l’utiliser contre moi. Pas maintenant et pas plus quand j’aurai le dos tourné. » l’avertit-elle. Le timbre de sa voix se voulait menaçant et sérieux. Il valait mieux pour Otmar qu’il évite tout geste brusque. Mais il était chanceux dans un sens. Elle aurait pu faire plus que le menacer : elle aurait pu allonger ses griffes et l’agresser. Mais pour l’instant, elle avait opté pour une approche plus pacifique. Merci aux traits sympathiques du vieil homme et à son approche non violente. Allait-on la prendre au sérieux malgré sa petitesse? Comment allait réagir Otmar?

Sans surprise, du moins pour lui, Otmar vit la jeune femme sursauter suite à son geste, réaction tout à fait normale en effet quand quelqu'un vous surprenait et dans les faits il s'était attendu à ce qu'elle fuie ou qu'elle tente de défendre plus ou moins timidement son larcin, mais visiblement ce n'était pas vraiment l'une de ces deux options qu'elle avait choisie.

Et dans les faits, Otmar dû réfléchir à la réaction de cette jeune kitsune ou hybride, du moins comme en témoignait les traits ô combien particuliers de cette jeune fille. C'était quand même amusant mine de rien, même s'il ne le démontra quand même pas avec un sourire amusé pour éviter qu'elle le prenne mal qu'une voleuse des Duchés toise ainsi l'empereur de la nation impérialiste qui faisait frisonner le continent actuellement. Pas que cela le dérangeait, mais dans les faits l'empereur d'Akkaton, même en sachant qu'actuellement c'était un homme sympathique comme Otmar, avait plus tendance à engendrer la crainte ou la respect de la part d'une bonne partie de la population des Duchés que l'inverse par exemple. Mais bon, c'était là les vertus de l'anonymat.

Dans tous les cas il ne manqua pas de lever doucement sa main en signe d'apaisement.

« Du calme, du calme, je ne vais pas vous toucher si c'est ce que vous voulez jeune fille. » Il recula d'un pas, mais pas plus et ajouta d'un air conciliant. « Allons, je ne vous veut aucun mal, je désire juste récupérer mon bien, cela et savoir pourquoi vous me l'avez pris, mais ce dernier désir n'est qu'une manifestation de ma curiosité dans les faits et n'a pas vraiment d'importance. » Il ne manqua pas juste après cela d'ajouter par un ton se voulant compatissant. « Si on vole ce n'est pas sans raison après tout, du moins la plupart du temps. Vous manquez d'argent pour vivre ? Si vous voulez je peux toujours vous donner quelques pièces, je n'en manque pas disons. » Son ton sonnait un peu paternel, mais c'était tout à fait normal, après tout il tâchait d'être bienveillant dans l'échange, autant car il n'avait aucune raison d'être malveillant à son égard que parce que c'était évidemment plus rassurant que d'être cassant et sec sans raison. Il finit d'ailleurs par conclure en demandant aimablement en se baissant légèrement pour être à son niveau.

« Comme vous nommez vous ? Pour ma part l'on m'appelle Otmar. » Aucune chance qu'elle fassee le lien avec qui il était vraiment avec juste cela, elle pouvait par contre deviner qu'il était d'origine Akkatonienne, car c'était évidemment un prénom typique de cet empire. D'ailleurs s'il disait son prénom, c'était plus par preuve de bonne foi qu'autre chose, cela et puis ça donnait un côté un petit personnel à l'échange qui disons permettrait peut-être d'assagir le tout.

Mais qui était cet Otmar? Il n’était pas des Duchés du Sud à en voir sa réaction. Peut-être que si...? L’azur continuait de le toiser sans le lâcher, guettant et analysant ses moindres gestes. Un Duchéen n’agirait pas comme lui. Ces derniers étaient des barbares, des malfrats sans honneur dont la seule pensée importante était de s’enrichir aux dépends des gens. En effet, Lily n’avait pas une très bonne opinion de la nation des Duchés du Sud, particulièrement en ce qui concerne la bourgeoisie. Mais l’homme, qui était définitivement aisé à en voir la qualité de ses vêtements, son apparence soignée et sa bague au doigt, semblait venir d’ailleurs. Une autre nation, peut-être? Comme cet arme de bronze qui n’était définitivement pas d’ici… Mais peut-être que tout cela faisait partie de son jeu dans le seul but de l’amadouer.

La jeune femme ne bougea pas tandis qu’il reculait doucement. « Reculez encore! » clama-t-elle avec une voix vigoureuse. Elle le laissa parler ensuite. Les traits de son visage ne démontrèrent pas de signes de culpabilité et elle se voulait froide et sérieuse. Elle n’était pas très douée pour cela. En réalité, elle semblait plus hésitante qu’autre chose et son cœur battait la chamade. « Ne bougez plus. » lui ordonna-t-elle. C’était la crainte qui se lisait dans ses yeux. Elle appréhendait le moment où le presque inconnu sortirait une arme pour le lui balancer au visage.  

Mais au lieu de cela, il se présentait… Quand allait-il montrer ses véritables intentions et devenir violent ? Plusieurs minutes s’écoulèrent sans qu’il ne se passa quoi que ce soit. «  Lily… » Murmura-t-elle. Les bonnes manières voulaient qu’on se présente après que quelqu’un l’ait fait. C’était sa mère qui le lui avait dit. Mais donner un nom, c’était plus que prononcer un simple mot. C’était la clé pour accéder à l’autre personne. C’était la première étape pour faire tomber les défenses d’autrui. À jouait-il? En tout cas, il ne risquait pas de reconnaitre une ancienne esclave avec son simple surnom. De toute façon, ses oreilles félines pouvaient déjà la trahir.

« Je ne vous crois pas. Pourquoi ne voudriez-vous pas me faire du mal? Tous les gens me veulent du mal. Tous les gens sont méchants et manipulateurs. » Dit-elle avec certitude. C’était sa conviction à elle. Son passé faisait en sorte qu’elle se méfiait des gens et ne croyait pas en leur bonté. « Je ne veux pas de votre pitié ni de vos manigances. Je ne veux pas de votre argent. Tout ce que je voulais, c’était voir ce que c’était. » Oui, la curiosité, c’était la réponse à l'une de ses questions. Lilyneska avait été curieuse quant au pistolet qu’elle ramassait à nouveau pour le prendre dans ses mains.

Otmar recula à nouveau d'un pas quand la jeune fille le lui ordonna, préférant faire ainsi et ce sans paraître nerveux ou réticent pour éviter de l'inquiéter, après tout elle avait peut-être peur et cela pouvait se comprendre. Dans les faits il pouvait même sentir qu'elle était hésitante, mais elle faisait de son mieux pour ne pas le paraître et il préféra donc obtempérer, cela et puis il ne voulait pas se donner des airs de menace potentielle, après tout il n'était pas ici pour ça. Dans tous les cas il ne fit pas de geste brusque lorsqu'elle lui dit de ne pas bouger et essaya plutôt d'instaurer un dialogue qui eut des résultats au bout de quelques minutes heureusement, même si bien maigres…

Dans tous les cas il se contenta de sourire simplement quand elle lui donna un début de nom et dans les faits lorsqu'elle lui fit part de son ressenti, il décida tout d'abord d'honorer un silence momentané, puis ajouta d'un ton qui se voulait apaisant.

« Je suis un étranger en ces terres et je ne compte pas y rester éternellement de toute manière, cela et puis à quoi bon ? Qu'est-ce que ça m'apporterait  de vous faire du mal jeune femme ? Cela et puis ça me mettrait peut-être en danger, de plus tu ne m'as pas l'air malveillante en soit. Tu ne penses sans doute pas à mal et je pense que nous nous porterons mieux tous les deux si les choses se finissent sans la moindre violence. » Puis il regarda le pistolet qu'elle avait ramassée et ajouta prudemment.

« Fais attention, je ne sais pas si tu es mage, mais si jamais tu l'es… Manipuler cette arme pourrait être dangereux pour toi, heureusement celle-ci n'est pas chargée... » Ceci dit, il ajouta calmement. « C'est un pistolet, dans l'empire on appelle ce modèle ci un brombas, une arme qui projette des projectiles à très haute vitesse, pour cela avec la gâchette on déclenche une explosion contrôlée qui projette la balle par la sortie du canon pour que celle-ci traverse de part en part une cible. » Il réfléchit et ajouta aimablement.

« J'ai autre chose à te montrer si tu le désires, une autre curiosité plus inoffensive que tu n'as probablement jamais vu encore. » Ceci dit il retira doucement son gant droit pour ne pas l'effrayer et ce pour dévoiler une main totalement… Métallique et doucement il en profita ensuite pour retrousser sa manche et ainsi dévoiler totalement la prothèse en acier trempée qui lui servait de bras droit, un ensemble fait d'un système d'engrenages et de pistons complexe, de quoi en effet attirer la curiosité de la jeune femme. Après tout c'était littéralement un bras fonctionnel non pas fais de chair, mais d'acier qu'il venait ainsi de lui dévoiler, l'équivalent d'une prouesse technologique pour les gens qui n'y étaient pas habitués et en voyait un pour la première fois.

L’homme qui souriait doucement n’était pas des Duchés du Sud. D’où venait-il et que venait-il faire ici? Acheter des esclaves ou des armes? Ou encore engager des mercenaires? L’endroit était réputé pour leur grand nombre et c’était l’idéal pour trouver quelqu’un qui voudrait faire une tâche précise en échange de quelques piécettes d’or. Plusieurs questions se dressèrent dans son esprit, autant sur lui et sur ses intentions que sur les raisons qui le poussaient à prendre le temps d’être gentil avec elle. Certes, elle avait son arme entre ses mains et ça devait être la raison principale. « Pourquoi manipuler ceci serait dangereux pour moi? » demanda-t-elle d’une voix sceptique. C’était la première fois que Lilyneska touchait à un pistolet et elle n’était pas familière avec la technologie non plus. Personne n’avait pris le temps de lui enseigner le concept de magie versus technologie. De plus, elle ne se considérait pas elle-même comme étant une puissante mage. Elle savait faire de la magie qui transformait son corps. Était-elle puissante? Elle gagnait ses combats jadis lorsqu’elle était esclave, c’est tout ce qu’elle pouvait avancer.

Si la surprendre était le but d’Otmar, il réussit son coup. À la vue de son bras mécanique, les azurs de la jeune hybride devinrent de grands ronds et ses oreilles pivotèrent sur sa tête, alerte. « Qu’est-ce qu’il a votre bras? » Tout comme le brombas, c’était la première fois qu’elle voyait une prothèse en acier attachée à un corps et qui bougeait comme si c’était un bras vivant. « Si vous n’êtes pas des Duchés du Sud, alors d’où venez-vous et pourquoi êtes-vous ici? Les rues sont dangereuses pour un voyageur seul et… je ne parle pas de moi. Otmar, je ne vous veux pas de mal. » C’était la vérité. C’était la curiosité et le vol qui lui paraissait facile qui l’avaient menée à agir ainsi.

Lily prit une grande respiration. La suite lui fallut beaucoup plus d’énergie et de force mentale qu’elle ne l’aurait cru. Lentement, elle s’avança vers le vieil homme. Son regard était rivé au sien. Son cœur battait fort. Elle était prête à prendre la poudre d’escampette d’une seconde à l’autre. Arrivée près de lui, elle lui tendit le pistolet à l’intérieur de sa paume gauche. « J’en ai assez de la violence. » lui dit-elle finalement. Mais parfois, elle était nécessaire pour survivre. L’ancienne esclave continuait de surveiller les moindres gestes d’Otmar, méfiante.

« Eh bien, car la magie est connue pour ne pas bien se marier avec les technologies trop complexes et inversement… Disons que l'arme pourrait exploser entre tes mains si elle était chargée et que tu tirais avec par exemple ou juste s'enrayer. Enfin pour ça, il faudrait que tu sois vraiment une mage très puissante et c'est rare. Surtout à ton âge. » Constata t-il pensif, il doutait donc qu'elle ait assez de magie pour cela, mais bon ce n'était que son avis, puis de toute manière il n'était pas pour l'idée de laisser des armes à feu dans les mains de jeunes êtres, on ne savait jamais après tout… Un accident pouvait si vite arriver.

Et d'ailleurs, il fut satisfait visiblement de voir que son idée de la surprendre en lui montrant sa prothèse avait plutôt bien fonctionnée, prothèse dont Otmar était plutôt fier d'ailleurs, même si évidemment il n'allait pas s'en vanter ici. « C'est une prothèse en métal remplaçant le membre d'origine que j'ai perdu. » Expliqua t-il donc simplement quand elle demanda ce qu'avait son bras et encore… Il y avait pire que lui dans ce domaine, c'était rare mais il existait déjà en Akkaton par exemple, des hommes qui avaient remplacer tout leur corps, sauf leur cerveau évidemment…

« Je viens de l'empire d'Akkaton. » Expliqua t-il ensuite sobrement, ce avant d'ajouter avec réflexion. « Je suis venu ici pour mon métier disons, ce dernier consiste pour tout t'avouer à étudier les peuples vivant sur le continent Orzanien, je suis un peu un érudit en quelque sorte... » Il n'allait pas dire qu'il était un empereur après tout, surtout qu'elle ne le croirait pas. Sur ce il resta ensuite silencieux lorsque la jeune hybride prit à son courage à deux mains et finit par lui tendre son pistolet.

Otmar récupéra donc doucement et lentement ce dernier, sans geste brusque, pour ensuite le remettre à son emplacement initial dans son étui… Ce avant ensuite de regarder la jeune femme dans les yeux et d'ajouter avec sérieux et calme. « De quelle violence parles-tu ? » Il reprit avec un léger sourire. « Des fois parler de choses qui nous ont marquées en mal et sans être jugé… Peut faire du bien disons, comme si nous nous libérions d'un poids, je sens que tu as eu un rude passé visiblement, le genre que ne devrait pas avoir une jeune fille comme toi... » Il sembla réfléchir puis ajouta avec une compassion apparente. « Mais en tout cas si tu veux parler, je suis là pour écouter et si jamais tu désires obtenir quelque chose de ma part, pourquoi pas ? Cela me ferait plaisir. » Il attendit donc qu'elle y réfléchisse, ce alors qu'il se comportait de manière peut-être un peu paternelle, mais bon en même temps on pouvait peut-être le comprendre au vu de la situation...

Lilyneska fixa le vieil homme longuement sans prononcer un seul mot. Quel âge pensait-il qu’elle avait? La question lui traversa l’esprit. Tous les gens pensaient toujours qu’elle était plus jeune qu’en réalité, merci à sa petite taille. Mais elle laissa passer. Il était beaucoup plus âgé qu’elle et c’était peut-être la seule et unique raison… Pour lui, il considérait peut-être tous les gens comme étant jeunes… ? Mais peu importe, elle n’avait pas l’intention de lui révéler plus d’informations sur elle-même que cela n’était nécessaire.

Ses azurs se concentrèrent plutôt sur son bras mécanique. Un bras fait entièrement en métal, mais quelle surprise! « Je peux… ? » Toucher était le mot manquant à sa phrase. Elle approcha sa main, mais se ravisa. Toucher un inconnu, mais quelle idée saugrenue! Qu’est-ce qui lui passait par la tête? Mais c’était plus fort qu’elle. Une partie d’elle-même désirait qu’Otmar lui donne son accord pour ainsi pouvoir étancher sa curiosité. Mais l’autre, elle ne l’aimait pas toujours pas. Elle lui disait de s’éloigner et de prendre ses jambes à son cou pendant qu’elle le pouvait encore. « N’avez-vous pas peur de vous promener seul, ici, dans les Duchés du Sud? » L’étranger lui semblait venir d’un autre monde, comme si la violence lui était une notion inconnue. Après lui avoir remis son pistolet, elle recula d’un pas, tiraillée entre cette partie qui voulait en savoir plus et l’autre qui voulait fuir.

« De quelle violence…?! » Lâcha-t-elle avec de grands yeux. « Elle est partout. Le danger guette. » C’est malheureux quand on y pense que la seule chose à laquelle l’hybride pensait continuellement était de survivre. Elle n’avait pas de projets futurs et ses plans s’arrêtaient à quelques heures à l’avance. Elle rêvait d’une vie différente, mais ne permettait pas à son esprit de rêvasser inutilement. « Je veux aller à Akkaton. » Murmura-t-elle. Malgré ses maigres connaissances, elle savait qu’il s’agissait d’une nation adjacente aux Duchés du Sud. Durant ses années d’enfermement, elle avait rêvé de s’évader et de partir vers d’autres contrées. Était-ce encore possible? « Je veux partir d’ici! »

Otmar hocha doucement de la tête quand elle demanda sans finir sa question si elle pouvait toucher son bras mécanique, après tout il comprenait parfaitement que la chose l'intriguait. De plus, ce n'était pas de toute manière comme si c'était vraiment son bras… Enfin si c'était son bras, mais bon c'était du métal froid et inerte uniquement actionné par une série d'engrenages et de pistons se trouvant à l'intérieur de celui-ci. Dans tous les cas il ne voyait aucun mal à ce qu'elle le touche, comme il ne voyait aucun mal à répondre à la question qu'elle lui posait concernant les Duchés.

« Je connais bien ces terres disons, assez pour savoir comment s'y débrouiller, cela et puis mon statut de citoyen de l'empire me confère une certaine forme de protection, du moins tant que je suis prudent et ne dépasse pas les bornes. » Après avoir dit cela, il regarda ensuite calmement la jeune hybride hésiter entre le fait sans doute de lui fausser compagnie ou de discuter avec lui comme il le proposait. Et finalement elle décida de rester, du moins encore un peu… Otmar écouta donc attentivement ce qu'elle avait à dire, après tout ce n'est pas tous les jours qu'elle devait s'ouvrir à quelqu'un ainsi, même si l'ouverture était partielle à bien regarder.

Et évidemment, il fut peiné de se rendre compte à quelle point la jeune fille avait dû subir une existence misérable et surtout… Qu'elle n'avait méritée en rien dans les faits, Otmar ne cacha donc pas la peine que cela lui inspirait, ni la surprise qui fut la sienne quand elle demanda à aller à Akkaton… Eh bien, comment devait-il réagir pensa t-il…

« Eh bien... » Commença t-il d'abord à dire pensif, puis concluant rapidement qu'il ne pouvait pas décemment lui refuser cela après tout, il finit donc par reprendre calmement. « Cela devrait être possible… Par contre il va falloir que tu me suives dans ce cas. Nous allons nous rendre à l'ambassade Akkatonienne, d'accord ? » Attendant la réaction et la réponse de la jeune femme, il ajouta avec le sourire. « Là-bas, ils pourrons te protéger et faire en sorte que tu sois menée en sécurité sur le territoire de l'empire si tu le désires. Pour cela il faudra par contre que je me porte garant pour toi, l'empire ne laisse pas n'importe qui entrer facilement sur son territoire disons. » Il ne restait donc que son accord à avoir et si elle le désirait ils pourraient se rendre à l'ambassade impérial et pour tout avouer, Otmar sentait qu'ils allait faire des surpris une fois arrivé là-bas, mais bon, ça se serait pour plus tard...

Lily avait posé ses doigts sur le bras d’Otmar d’un geste lent. Le métal était froid sous sa peau et elle faisait promener ses azurs entre le visage du vieil homme et son faux membre, passant d’un mode méfiant à celui d’être fascinée. C’était incroyable! Ça bougeait parfaitement comme si c’était vivant. À la fois, c’était merveilleux, mais également effrayant en pensant à tout ce que la science pouvait et pourrait faire. Elle se détacha par la suite afin de prendre une distance respectable, autant polie que sécuritaire.

Son visage se renfrogna aux mots prononcés par l’empereur. On aurait pu croire que l’hybride aurait sauté de joie en se faisant dire que cela devrait être possible d’aller à Akkaton et donc, de se libérer des Duchés du Sud. Mais les mots comme quoi elle devait le suivre étaient restés accrochés dans son esprit. Cela lui apporta des frissons qui passèrent de son échine jusqu’à la pointe de ses oreilles félines. Suivre quelqu’un… Ou être obligée de suivre… Dans son ancienne vie, cela n’annonçait jamais rien de bon.

Elle déglutit difficilement et recula d’un pas, incertaine. « Garant de moi…? Que voulez-vous dire? » demanda-t-elle doucement. Elle le fixa droit dans les yeux comme si cela lui permettrait de pouvoir lire dans son esprit. « Que voulez-vous de moi? » ajouta-t-elle d’une voix claire. Rien n’était gratuit dans la vie, c’est ce qu’elle croyait. Si quelqu’un offrait un service ou quelque chose, c’était pour avoir quelque chose en échange. Les gestes par pure bonté n’existaient pas dans la réalité que l’esclave s’était forgée.

Parlant de méchanceté, voilà qu’un humain pénétrait dans la petite allée où ils se trouvaient et vint les interrompre. « L’argent ou la vie! » clama-t-il. Il avait une longue cicatrice sur sa joue droite et son sourire mauvais dévoilait des dents manquantes. De l’autre côté de l’allée, un homme et une femme s’avancèrent avec la ferme intention de ne pas laisser quiconque passer.


(Je mets un peu d'action, ça ne te dérange pas?)

Otmar laissa la jeune hybride faire lorsque celle-ci voulu observer la prothèse de plus près, puis ne fut par surprit ensuite que cette dernière s'éloigne un peu de lui, sans doute près tout qu'elle le faisait par pure prudence après s'être ainsi approché de sa personne. Même si évidemment, il espérait que le fait qu'il n'en ait pas profité pour tenter quoi que ce soit de répréhensible avait été remarqué et jouait en sa faveur pour gagner sa confiance.

Surtout qu'elle sembla visiblement méfiante par rapport à la proposition qu'il lui avait fait, chose qui ne l'avait pas vraiment étonné pour tout avouer… Bon, restait maintenant à désamorcer doucement sa méfiance pensa t-il, sinon il risquait de devoir l'abandonner à son triste sort pensa t-il, ce qu'évidemment il ne voudrait pas se résoudre à faire… Certes c'était là se donner beaucoup de peine sans garantie de résultats à bien y réfléchir, mais quelqu'un au cœur bon comme lui ne pouvait se résoudre à l'inverse après tout.

« Je veux dire que je me porte garant de toi dans le sens que je promet aux autorités que tu ne compteras rien faire de répréhensible au sein de l'empire, par exemple tuer quelqu'un. Ce qui implique donc que je te fasses confiance en ce sens et que j'ai sans doute quelques problèmes si jamais tu fais quoi que ce soit d'illégal. » Tâcha t-il donc d'expliquer calmement et doucement, ce avant d'ajouter d'un ton conciliant quand elle lui demanda ce qu'il voulait d'elle. « Je veux juste t'aider. » Puis, avant qu'il ne puisse réfléchir à ce qu'il pourrait ajouter ou même ajouter quoi que ce soit, on vint les déranger. Un homme visiblement suspect pénétra dans l'allée où ils se trouvaient en demandant leur argent alors que deux de ses complices bloquaient l'accès à la ruelle.

Otmar en voyant cela, porta immédiatement sa main à son revolver et après avoir dégainé celui-ci, le braqua sur l'homme avant de dire. « Déguerpissez ou je vous abats, tous les trois. » D'une voix se voulant très convaincante et qui l'était, mais l'autre après avoir légèrement rit dit.

« Joli coup de bluff ! Cela aurait marché si je n'avais pas entendu que votre arme n'était pas chargée. Allons, soyez sage et vous vivrez, donnez moi votre pistolet par exemple et vous n'aurez pas de problème, cela et… Laissez nous un peu nous amuser avec la fille, après tout ce n'est pas la votre, qu'est-ce que vous en avez à faire ? » Otmar regarda la jeune femme alors que l'homme s'approchait, puis prit en main sa dague et dit d'un ton ferme en se mettant en garde.

« Dans ce cas-là, venez la chercher, mais pour cela il faudra me passer sur le corps. » L'autre marqua une réaction d'arrêt en entendant cela, puis après quelques secondes d'hésitation, fonça vers lui en dégainant lui aussi une dague… Otmar serra donc les dents et se prépare à le réceptionner, ce tout en se demandant si il allait devoir gérer à lui seul 2/3 personnes alors qu'il n'avait rien d'un guerrier… Mais bon, maintenant qu'il s'était engagé à la défendre, il ne pouvait plus vraiment reculer après tout.

C’était donc cela que se porter garant signifiait? Ce serait un contrat entre elle et lui comme quoi elle ne ferait rien de mal. Mais qu’est-ce qui était répréhensible? Il avait heureusement précisé en donnant un exemple : celui de ne pas tuer une personne. Si seulement il savait comment cette idée rebutait Lilyneska. « Je ne veux pas tuer… » Murmura-t-elle. Vouloir, mais pouvoir, c’était deux éléments différents toutefois. Qu’arrivait-il si c’était nécessaire, si survivre dépendait de tuer? Elle avait déjà blessé et tué par le passé. « Je ne veux plus tuer… » Reprit-elle. Elle avait goûté au sang, empli sa gorge de ce goût répugnant et si distinct. Son regard bleuté croisa celui du vieil homme sans vaciller. Mais il se posa rapidement sur les sombres individus qui venaient les interrompre.

« PERSONNE NE ME TOUCHERA! » Avait-elle hurlé. Tandis qu’elle fermait les yeux, elle sentait son rythme cardiaque augmenter. Elle entendit Otmar se préparer au combat tout comme les pas du premier ennemi s’avancer vers eux. Sa dague fendit l’air dans la direction de l’empereur. « Je vais goûter à votre sang! » furent ses derniers mots avant que des changements dans son corps s’opérèrent. Une épaisse fourrure blanche recouvrit son corps et de puissantes pattes remplacèrent ses membres. Aux côtés du vieil homme se trouvait désormais un énorme tigre qui rugit à pleins poumons. Il bondit sur le bandit qui tomba à la renverse puis fit volte-face pour charger les deux autres ennemis qui s’étaient approchés. Dès qu’il vit le gigantesque tigre approcher, l’homme prit ses jambes à son cou en laissant derrière lui sa collègue qui asséna un coup de dague dans le flanc de Lily. Ses crocs se refermèrent sur son bras et le tigre la poussa au sol sans toutefois la lâcher. Ils étaient de piètres adversaires : mal organisés et peu expérimentés. L’ancienne esclave avait eu des adversaires plus coriaces par le passé. La femme se mit à hurler de douleur et de peur.


(Désolée pour le délai ^^")

Otmar n'avait pas eu le temps de répondre à la jeune femme avant d'être dérangé quand celle-ci avait murmurée à son égard qu'elle ne voulait pas tuer, qu'elle ne voulait plus tuer. Lui faisant ainsi des confessions qui firent se poser maintes questions à l'empereur, mais des questions que ce dernier remit à plus tard étant donné qu'une bande de 3 brigands vint les déranger…

Et dans les faits, si le vieil homme s'était apprêté à défendre aussi bien sa personne que la jeune hybride, il n'aurait pas pu s'attendre à ce qui suivit… Alors que l'empereur esquiva l'attaque du bandit d'un pas de côté fait au dernier moment, la jeune femme laissa la place à un tigre imposant qui… Eut tôt fait de transformer une situation intenable pour Otmar en une partie de plaisir pour elle. Fichtre, la magie pouvait vraiment être intimidante des fois pensa ce dernier pour transformer une jeune femme semblant si fragile en être si féroce et puissant. Mais soit, il n'allait pas s'en plaindre… Enfin, ce serait une bien mauvaise manière de résumer ses pensées, surtout quand après que deux des bandits aient fuit, le tigre eut la femme du groupe à sa merci… Femme qui se mit à hurler de douleur et de peur.

« Arrête ! » Dit Otmar à voix haute en s'approchant de la tigresse doucement, sans se précipiter, ce avant d'ajouter d'un ton qui se voulait à la fois apaisant et un peu alerté par ce qu'il voyait. « Tu les as vaincus ! Rien ne sert de la tuer ou de la faire davantage souffrir, tu l'as toi-même dis, tu ne veux plus tuer. » Il continua à s'approcher, mais ne la toucha pas, néanmoins il était assez près d'elle maintenant, comme pour lui montrer qu'il n'avait pas peur d'elle et ne la voyait pas comme un monstre, ce avant d'ajouter calmement, mais avec douceur. « Tu vaux mieux qu'eux, ils ne valent pas la colère qu'ils viennent de t'inspirer. Tu n'as pas à t'abaisser à leur niveau… » Et sur ce il resta silencieux et attendit que l'hybride choisisse ce qui allait se passer ensuite, dans tous les cas il resta proche d'elle sans montrer la moindre crainte même s'il était évidente qu'une telle créature aussi proche de lui aurait pu le mettre en pièce. Ce car il voulait démontrer qu'à ses yeux elle n'était pas un monstre, mais aussi lui démontrer une certaine confiance en elle. Certes, il la connaissait à peine, mais il pensait qu'elle en avait besoin, cela et… Malgré la force de cette jeune femme, il avait bien sentit qu'elle ressentait une certaine détresse et il ne comptait pas l'y abandonner si cela lui était possible...

Ils avaient gagné, mais Lilyneska ne le réalisait pas. Le premier brigand était parti dès qu’il avait eu l’opportunité face à Otmar tout comme l’autre homme dès qu’il avait réalisé qu’il n’avait aucune chance. La malheureuse femme en était la preuve tandis que de grandes dents perforaient son bras. Elle hurlait comme jamais, impuissante au sol par l’animal qui la dominait totalement. L’hybride avait sa vie entre ses pattes.

L’odeur du sang lui parvenait parfaitement tout comme elle distinguait ce goût métallique dans sa bouche. Elle avait connu de nombreuses fois auparavant. Mais ce combat n’avait rien à voir avec ceux qu’elle avait fait. Son adversaire n’était pas de taille. Elle n’avait aucune chance. Mais une forte voix masculine chassa ses sombres pensées et la ramena dans le moment présent, celui où elle était le monstre.

L’empereur s’était doucement rapproché d’elle, avec toutes les précautions nécessaires pour s’éviter d’avoir un animal gigantesque se jeter sur lui. Il fut longuement fixé par les prunelles du tigre. Que pouvait-on y lire? Un mélange de colère, de surprise et de tristesse. Il retira finalement son corps de celui de la malfaitrice et continua de fixer Otmar. Du sang peignait sa fourrure blanche autour de sa mâchoire. La femme blessée se releva doucement, sans geste brusque, fit un signe de la tête au vieil homme en guise de remerciement et décampa, le bras longeant son corps. Il lui faudra des soins ou sinon elle risquait de le perdre. Peut-être se retrouverait-elle avec un bras métallique comme son « sauveur »? Mais cela, c’était une autre histoire. Concentrons-nous sur celle qui se déroulait dans cette ruelle.

« Otmar… » fut le premier mot qu’elle prononça. Ce n’était qu’un murmure, presque inaudible. La jeune femme avait repris sa forme initiale. Elle le fixa de ses azurs emplis de terreur. Elle détourna le regard. Puis, elle tourna les talons et s’enfuie. Pendant combien de temps avait-elle couru? Elle ne le savait plus, mais ses pas l’avaient menée dans une autre ruelle. Elle s’accroupit à côté d’une vieille charrette en ruines et essuya du revers de sa main le sang qui couvrait son visage. Des larmes apparurent sur ses joues et elle se mit à sangloter.

Otmar regarda calmement le tigre et ne manqua pas d'être soulagé intérieurement quand celui-ci retira finalement ses crocs du bras de la voleuse, en espérant que cela serve de leçon à cette dernière pensa t-il, car il était probable qu'elle n'ait pas à nouveau une telle chance à l'avenir… Enfin, pour sa part il était content en tout cas que tout cela se finisse sans trépas malheureux, il laissa lui aussi partir la brigande, puis regarda le tigre qui était souillé de sang sans pour autant avoir l'air horrifié…

Pauvre enfant pensa t-il peiné pour elle… Cela se voyait que ce n'était pas la première qu'elle faisait ainsi couler le sang. Et probablement comme elle l'avait dit, qu'elle avait déjà tuée par le passé et pas qu'une seule fois… Il n'était pas normal pensa t-il qu'une jeune enfant ait eut à vivre une telle existence, mais tel était ce monde, tragique par de nombreux aspects… Que pouvait-il bien y faire ? Tâcher de l'aider sans doute pensa t-il et cela commençait sans doute par ne pas la rejeter… On pouvait presque dire en quelque sorte que c'était un devoir qu'il avait décidé de se donner envers cette créature auparavant tigre qui reprenait maintenant forme humaine, ou presque du moins…

Et dans les faits c'est silencieusement qu'il la vit s'enfuir tout à coup et que se rendant compte de ce qu'il s'était passé, il se lança à sa suite… Il faillit bien la perdre il fallait le dire, surtout qu'il était arrivé à bout de souffle à proximité de la ruelle dans laquelle elle s'était arrêté. Par la peste ! Il n'arriverait pas à tenir une autre course pensa t-il, il n'était plus tout jeune après tout, même si soit disant bien conservé… Il prit en tout cas quelques instants pour reprendre un minimum de contenance et ne pas trop cracher ses poumons, puis s'engouffra dans la ruelle où elle se trouvait seule en train de sangloter, il la regarda quelques instants, puis reprit sans s'approcher d'elle, ne tenant pas à l'effrayer encore une fois.

« Tu n'es pas un monstre. » Dit-il d'un ton qui se voulait sérieux, mais doux aussi, un peu paternel dirait-on, ce avant de reprendre quand elle avait remarquée qu'il était toujours là et alors qu'il s'essuyait le front qui dégoulinait un peu de sueur.

« Et tu n'as pas à rester seule… Je serais là pour toi si tu le désires. » Il resta silencieux quelques instants en la regardant puis les yeux, puis conclut gravement. « Mais je ne suis pas de ceux qui t'obligeront à quoi que ce soit et ne veut pas le devenir… Je vais te laisser y réfléchir, si tu désires que les choses changent... Viens me voir à l'hôtel de l'enclume rouillée, je vais y loger ce soir et je t'y attendrais. Dans tous les cas que tu ne viennes ou pas, je te souhaites bonne continuation Lilyneska. C'est ta vie, ton choix et je te souhaite de point avoir de regret. » Sur ce il la laissa donc y réfléchir et partit comme il l'avait dit. Si elle désirait le revoir, elle aurait la journée pour y réfléchir, sinon… Eh bien il lui souhaitait en effet sincèrement tout le bonheur du monde.

Si, Lilyneska était un monstre. Son regard azuré baigné de larmes se posa sur le vieil homme qui était venu la rejoindre malgré ce qu’elle était. Comment pouvait-il dire qu’elle n’était pas un monstre? Il ne savait rien d’elle. Elle était un rejet de la société depuis même sa naissance, tandis que sa tête autrefois blanche apparaissait à Teïder. Ses oreilles félines lui avaient valu l’exode de sa patrie puis son rang en tant qu’esclave. Maintenant qu’elle s’était enfuie, que lui réservait la vie? Le sang ne la quitterait jamais, n’est-ce pas? Obligée à se battre pour autrui, puis désormais pour sa liberté? L’hybride ferait couler le sang... C’était en elle. C’était ce que ses geôliers avaient voulu qu’elle soit. Pouvait-elle se battre contre son destin?

Otmar était parti… Tout simplement. Elle le suivit du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse au bout de l’allée. La jeune femme se remit à sangloter de plus bel. Pour quelles raisons? Il y en avait plus qu’une et c’est le flot des émotions qui l’en obligea. Elle resta seule dans cette allée pendant des longues minutes, jusqu’à ce qu’aucune larme ne puisse s’échapper de ses yeux.

Elle finit par se relever et déambula nonchalamment à travers les rues de la ville. Sa capuche était bien évidemment sur sa tête. C’était son choix. Alors qu’elle réfléchissait, qu’elle repensait à sa rencontre avec Otmar, elle se permit d’apaiser les grognements de son ventre en volant quelques fruits d’un marchand et du pain d’un autre. Ni vu, ni connu. Était-ce ce qu’elle voulait faire pour le restant de sa vie?

La nuit était tombée lorsque Lily se rendit à l’hôtel de l’enclume rouillée. Quelques hommes entraient et sortaient de la petite bâtisse, mais cela semblait plutôt sécuritaire. Elle pouvait facilement entendre les chants et les rires de quelques buvards de l’endroit. Si elle entrait, où le trouverait-elle?

« Otmar? » Demanda-t-elle finalement en ouvrant la fenêtre. L’humaine féline avait grimpé à la façade du mur pour jeter un œil aux jambes. Elle avait cru voir une silhouette de la carrure d’Otmar ornée d’une tête blanche. « J’ai fait mon choix. » Poursuivit-elle en passant son corps à travers l’ouverture et en posant agilement ses pieds sur le sol.

Otmar se trouvait dans sa chambre d'hôtel à rédiger des notes disons, rien de bien inhabituel vu que c'était de banales observations ethnologiques sur la population Duchéenne, quand soudain une voix se fit entendre. Faisant que le vieil homme détourna son attention ce qu'il faisait pour voir qui était l'origine de cela. Et se rendre compte, sans réel étonnement, mais une certaine appréciation tout de même que la jeune Lilyneska avait décidée de venir.

« Bien, je suis heureux de te voir Lilyneska. » Il se leva et lui indiqua du regard des vêtements d'un style akkatonien faits pour une jeune femme qui étaient posés sur un petit lit, puis il dit calmement en lui indiquant la salle de bain comprise dans sa suite.

« Voici des vêtements dans le style de l'empire, si tu désires te changer, n'hésite pas à le faire. Je me disais après tout qu'il est toujours agréable d'avoir des vêtements propres et neufs. » Il le disait d'un ton sonnant un peu paternel, il ne manqua d'ailleurs d'ajouter en la laissant faire alors qu'il reportait à nouveau son attention sur ses travaux comme pour ne pas la déranger si elle voulait aller se changer pour mettre des vêtements plus propres.

« Il y a d'ailleurs comme tu le vois un deuxième lit que tu pourras utiliser pour dormir si tu le désires et de la nourriture devrait bientôt nous être amenée. Même si je n'étais pas sûr que tu viendrais dans les faits, je suis quand même partis du principe que ce serait le cas pour que tu puisse manger à ta faim ce soir. Si tu as a besoin de quoi que ce soit d'autres d'ailleurs, n'hésite pas à le demander… J'ai même des livres à disposition si tu as envie de te divertir un peu avant d'aller dormir. » Après tout il se faisait tard… Enfin, sur ce, suite à ces bonnes paroles il conclut avec un soupçon de curiosité, du moins après qu'elle ait eut le temps de digérer ce qu'il venait de dire juste avant…

« Bon ceci dit, me permettrais tu une simple question ? Tu n'es pas obligée d'y répondre bien entendu… La voici. Pourquoi ? » Pourquoi quoi ? Concernant le choix qu'elle avait fait bien entendu, car même s'il n'était pas mécontent qu'elle ait fait celui-ci disons, il était quand même curieux sur les raisons l'ayant poussées à cela. Surtout qu'il avait disons sa petite idée à ce sujet, il verrait donc bien assez vite si ses suppositions seraient confirmées...

C’était bien lui. Tout le stress que possédait les épaules de Lilyneska s’évanouit d’un coup et un léger sourire apparu sur ses lèvres, désormais soulagée de ne pas s’être trompée de chambre. Il ne lui posa pas la question de savoir pour quelle raison elle n’était pas passée par la porte et cela, sans qu’Otmar le sache, lui fit gagner quelques points sur l’échelle imaginaire de son estime et de sa confiance. L’hybride était paranoïaque et dans les ombres de sa méfiance, elle imaginait des monstres partout. L’entrée principale la mènerait dans un gouffre qui regorgeait de terreurs et de danger… Dans un pur endroit inconnu. La fenêtre, quant elle, lui offrait une voie de sortie rapide et la chambre, un endroit confiné d’où elle pouvait observer les va-et-vient des potentiels étrangers. Heureusement, il n’y avait que le vieil homme et il était seul.

« Bonsoir Otmar. » Prononça-t-elle en s’inclinant poliment face à lui. « Merci pour l’invitation » Poursuivit-elle doucement. L’azur se posa sur les vêtements que lui désigna l’empereur incognito. C’était gentil… Mais surtout, c’était bien pensé. Elle comprenait les raisons pour lesquelles il les lui proposait. Disons que ses habits actuels étaient vieux et sales, même troué son genou. Il n’y avait que sa cape et son sac qui étaient de qualité. « Merci. » Ajouta-t-elle à son attention. Elle s’était avancée pour prendre possession de ses futurs habits et se dirigea vers la salle de bain. Les mots « lit » et « nourriture » avaient résonné dans son esprit, mais elle n’a pas commenté et avait préféré garder le silence. Elle était pathétique, elle le savait. C’est ce qu’elle pensait, en tout cas. Mais elle voulait tout de même garder un peu de dignité.

« Cela fait longtemps que je n’ai pas touché à un livre. Je jetterai un œil après m’être changée. » Répondit-elle. Qu’avait-il comme livres? Elle avait hâte de savoir. Mais elle appréhendait aussi le moment. La lecture ne se perdait pas avec le temps, non? La preuve, c’est qu’elle savait toujours lire l’enseigne des boutiques. Mais un livre…?! C’est qu’il y a beaucoup de mots dans un bouquin. Et le vieil homme n’avait pas l’air d’être du genre à tenir des livres de niveau pour enfants. À voir. De toute façon, ce n’était pas un élément important de la soirée.

« Oui, bien sûr. » lui permit-elle. « Pourquoi? » Répéta-t-elle. Elle sourit à la question. Pourquoi… Pour quelles raisons était-elle ici? « Parce que je le veux… Et parce que je le peux. » Fut sa réponse. Vouloir et pouvoir étaient deux éléments différents. La preuve, c’est qu’elle avait longtemps voulu s’échapper lorsqu’elle était encore une esclave. Mais elle n’avait pu que récemment.

« Ne bougez pas de là, d’accord? Je vais en profiter pour me nettoyer par la même occasion. » Dit-elle en poussant la porte de la salle de bain. Elle n’y entra pas immédiatement. Son premier réflexe fut de balayer l’intérieur de la pièce de son regard, Les quelques bougies allumées lui indiquèrent qu’il n’y avait personne à l’intérieur et que tout semblait normal. Elle vit également la petite fenêtre au mur et son cœur en ressentit le soulagement. Lilyneska resta dans le pas de la porte anormalement longtemps avant d’entrer et de refermer la porte derrière elle. Elle déposa les vêtements sur la commode. TOC! Ce fut le bruit que fit la fenêtre lorsqu’elle l’ouvra. La brise était froide. On était en plein hiver, c’était plus logique qu’elle reste fermée. Mais sa paranoïa l’intima à créer une ouverture. Elle prit ensuite le temps de se laver à l’aide du bassin d’eau. Bien sûr, elle guettait à chaque instant le moindre brut qu'il pouvait y avoir dans la pièce adjacente. Elle revêtit ensuite ses nouveaux vêtements, pigeant à travers les différents choix. Otmar avait été clairvoyant en lui donnant plus que le nécessaire. Lorsqu’elle ressortit de la salle de bain, l’eau de sa chevelure bleutée encore mouillée perlait sur sa blouse beige. Par-dessus, elle avait une veste-robe en cuir. Elle avait aussi une jupe beige et un pantalon foncé moulant qui ne la contraindrait pas dans ses mouvements. Elle avait gardé ses mêmes bottes en cuir et portait la bretelle de son sac sur une de ses épaules. « Alors? » S’enquit-elle.

L’hybride s’installa sur un lit, celui qu’elle pensait être pour elle. « C’est à mon tour. Me permettez-vous une question? Que voyez-vous en moi? » Demanda-t-elle. C’était une question au sens large et c’était voulu ainsi.

Spoiler:

Elle semblait de bonne humeur pensa t-il en la voyant sourire légèrement, mais surtout en l'entendant parler avec une certaine douceur, il ne manqua pas d'ailleurs de répondre gentiment aux premières paroles de l'hybride.

« Non, non, pas besoin de me remercier pour cela, merci plutôt à toi d'être venu. Cela a dû être difficile après tout pour toi de faire ce choix. » Dans tous les cas, il se disait que les habits qu'il avait trouvé pour elle seraient mieux que les vieilles fripes qu'elle portait actuellement. Il était temps pensa t-il qu'elle ait une vie de jeune femme et non plus de voleuse ou d'esclave… Bon, il était trop tard malheureusement pour qu'elle puisse avoir l'enfance qu'elle n'avait jamais eu, mais ce n'est pas pour autant qu'elle n'avait pas le droit à une existence meilleure. Même si évidemment, concernant cela ils allaient d'abord essayer d'y aller étape par étape. Hors de question après tout de presser les choses, surtout qu'il supposait que la confiance qu'elle lui dédiait était encore assez fragile.

« Si lire te gêne, je peux toujours lire à ta place à voix haute. » Se contenta t-il sinon de répondre avec un léger amusement gentillet à son égard. Heureusement qu'il avait à sa disposition quelques livres qui pourraient plaire à un enfant. Pourquoi ? Disons qu'il était aller en acheter quelques-uns après l'avoir rencontré… Même si évidemment il allait se garder de le lui révéler, du moins actuellement, sinon elle allait finir par croire qu'il était capable de prédire l'avenir, ce qui avait été loin d'être le cas en vérité. Mais bon, de toute manière ça resterait mieux pour elle comme lecture, du moins plus accessible que les essais ethnologiques, philosophiques et de sociologies qu'il lisait fréquemment…

« Le choix de la liberté ? » Demanda t-il sinon quand elle lui répondit pourquoi elle était venu, mais c'était une question rhétorique comme le confirma ce qu'il dit ensuite un peu amusé. « Le choix du cœur, ma foi. Ma fibre sensible apprécie un tel concept. » En parlant ainsi il avait tout à coup l'air d'un vieux grand père bienveillant…

« Bien entendu. » Dit-il sinon avec un air conciliant quand elle lui dit qu'elle allait se changer dans la salle de bain, il la laissa donc faire et en profita pour terminer d'écrire ce qu'il avait à écrire, mais aussi pour planifier le moment où il allait se rendre à l’ambassade avec elle… Car disons que les gardes allaient sans doute être surpris de se retrouver en présence de leur empereur, mais aussi Lilyneska. Mais bon, ce ne serait sans doute pas le pire comme surprise. Et puis, il était empereur certes, mais disons que le concept d'empereur Akkatonien ce n'était pas celui de roi, mais de dirigeant élu démocratiquement élu pendant dix ans… Un dirigeant qui gouvernait un très vaste empire, mais loin d'un monarque absolu en somme.

« Je me suis toujours dis que ce doit être dur de faire sécher des cheveux longs, c'est pour cela peut-être que je les ais toujours gardés courts... » Ne manqua t-il pas sinon d'ajouter avec humour en voyant Lilyneska ressortir de la salle de bain, ce avant de reprendre plus sérieusement. « Cela te va très bien, on pourrait facilement te prendre pour une akkatonienne en te voyant, du moins si tu avais davantage l'accent impérial quand tu parles. » Acheva t-il toujours avec cette pointe d'humour… Puis, un peut surprit par la dernière question de la jeune femme, il finit par dire...

« Qu'est-ce que je vois en toi ? Difficile à dire, mais je vais tâcher d'y répondre... » Il se leva de sa chaise et s'assit sur le lit en face d'elle, puis reprit en la regardant calmement et avec une pointe de bienveillance.

« Je vois avant tout en toi une jeune femme qui a eu une vie difficile, qui a sans doute été rendue forte par cette vie difficile et qui semble d'ailleurs doter d'une grande puissance à sa manière, mais surtout si tu me le permet, une jeune femme qui n'a pas eu la vie qu'elle devrait avoir… Une jeune femme qui mérite mieux et... » Il sembla alors en proie à la réflexion et ajouta d'un air visiblement un peu gêné.

« Tu sais… Je suis né d'un père ethnologue et d'une mère venant d'une des tribus du nord… Et d'une certaine manière, on peut qualifier mon enfance d'heureuse, j'ai à la fois pu beaucoup voyager et être entouré de parents aimants et impliqués dans mon éducation. Tout cela a finit à la fois par me donner le goût de voyager, mais aussi permit de mener une vie que je ne regrette pas. Et si je ne pense pas pouvoir exactement te donner la même chose malheureusement, j'aimerai disons t'offrir des bases solides pour que tu te construises un futur heureux et sain... » Il la regarda dans les yeux, puis confessa calmement.

« Tu sais, quand je disais que je devrais me porter garant de toi… J'y ais réfléchis et je me disais donc que… Comment te l'avouer... Tu sais, certains hommes ne sont pas attirés par les femmes d'un point de vue, amoureux disons… Ces mêmes hommes n'ont donc que rarement d'enfants à eux et, je me disais… Tu sembles orpheline à ta manière, tandis que moi je, hum, je n'aurais probablement jamais d'enfants soyons sincères au vu de mes attirances… Je me demandais donc, si d'une certaine manière, tu accepterais d'être ma fille ? » Paraissant embarrassé par ce qu'il venait de dire, mais sincère, il finit par glisser comme s'il avait peur de l'avoir effrayé.

« Bien entendu, tu n'es pas obligée de faire un tel choix tout de suite, tu as le temps, je disais juste que… Si tu le désires, c'est une possibilité disons. Je tâcherai en tout cas de me comporter comme un bon père si tel est le cas… Même si je n'en encore jamais été un. » Il détourna alors le regard, comme s'il n'osait pas sur l'instant affronter le sien.

Otmar gagna un grand sourire suite à ses commentaires concernant son nouvel habillement. Elle l’avait trouvé joli personnellement et trouvait plutôt sympa ce style akkatonien. Tout en ne quittant pas le vieil homme des yeux, elle attrapa sa longue chevelure bleutée et commença à les tresser. Elle lui avait demandé ce qu’il voyait en elle et attendait patiemment la réponse. Elle voulait la vérité, même si cela pouvait être blessant. Qui était-elle pour lui? N’agissait-il que par pitié pour elle? Ou y avait-il autre chose? Ce qui était certain, ou presque car cette idée ne pouvait lui échapper si facilement, c’est qu’il ne lui voulait pas du mal ni la remettre en esclavage. Sauf si…? Sans s’en rendre compte, elle secoua la tête afin de chasser ses ombres.

Avec toute son attention, Lily écouta sa réponse. Pour lui, elle était donc une jeune femme ayant eu une vie difficile, qui l’avait forgée en ce qu’elle était devenue et qu’elle méritait mieux. Elle ne put qu’acquiescer d’un signe de tête. Sur ces mots, il n’y avait que de la vérité. Certes, il ne savait pas l’ampleur de ce qu’elle avait vécu, mais cela résumait bien sa situation. Vint ensuite le temps où ce fut Otmar qui se confia sur son passé. Elle n’avait aucune idée sur ce qu’était un ethnologue et bien que la question se refléta dans ses yeux, elle la laissa filer. Ce n’était pas important après tout.

« Vous avez eu de la chance... » C’était un murmure mélangé à de l’envie. Elle était heureuse pour lui. Elle ne pouvait même pas s’imaginer quelque chose d’aussi proche ou d’aussi joyeux pour sa part, même dans son imagination. Ne pas avoir été vendue… Être restée avec sa mère. Avoir trouvé son père. C’est ce à quoi elle aurait simplement désirée. Mais il était trop tard. Elle n’était plus une enfant.

« Ta… fille…? » Lilyneska avait balbutié et ses yeux étaient devenus tout ronds. Une boule s’était formée dans sa gorge. Elle le fixa longuement sans parler comme s’il disparaîtrait lorsqu’elle aurait cligné des yeux. « Je... » Finit-elle par dire. Elle ramena ses jambes contre elle et les serra. « Je n’ai jamais eu de père... »

Un autre long silence s’ensuivit. « Vous pensez que j’ai quel âge? C’est d’une jeune enfant que vous voudriez être le père? » Le questionna-t-elle. Elle savait qu'elle avait des allures de petites enfants avec sa carrure frêle et sa petite taille. Généralement, les gens qui adoptaient voulaient de jeunes enfants qu’ils pourraient modeler comme ils le désiraient. Elle avait d’ailleurs été vendue à un très jeune âge. « Je ne suis plus une enfant… Je n’ai pas eu votre chance. Voyez-vous, je suis née à Teïder... » Elle ne s’en rappelait plus elle-même, mais en vue de ce qui avait obligé sa mère à quitter cet endroit et à tout ce qu’elle avait appris à son sujet. Être née à Teïder, Otmar pourrait comprendre que cela en voulait dire long pour une hybride. « Ma mère, humaine, a déménagée dans les Duchés du Sud avec espoir de refaire sa vie. Elle a échoué et m’a vendue quand j'avais environ onze ans. Je n’ai aucune idée de ce qu’il advient d’elle et je m’en fiche! »  

Par le flot d’émotions, colère et tristesse, qui l’envahissait, elle se rentrait les ongles dans sa peau. « Elle disait m’aimer et elle m’a VENDUE! Pourquoi ne feriez-vous pas pareil? Je préfère être orpheline que de repasser à travers tout ça! » Elle avait haussé le ton. Ce n’était pas bon pour elle de repenser à son passé, elle préfèrait l’oublier. C’était difficile pour elle.

Otmar se contenta d'attendre et d'écouter silencieusement la réaction de Lilyneska à ses paroles. Se doutant du choc que ça devait être pour elle de se voir ainsi proposer cela, mais bien entendu il pensait bien faire, il espérait juste qu'elle le prendrait bien. Davantage au final pour elle que pour lui.

Et dans les faits, il ressentit de la peine pour cette enfant quand elle lui avoua qu'elle n'avait jamais eu de père, la pauvre pensa t-il… Sachant quelle ne devait pas avoir une vie facile, en plus de cela elle avait été esclave sinon… Est-ce qu'elle avait été abusée par son ancien maître pensa t-il ? Il ne préférait pas l'imaginer, c'est là le genre de chose qu'on condamne rapidement à mort dans l'empire et lui-même n'était pas forcément plus modéré que l'opinion akkatonienne habituelle sur la chose…

« Je ne veux pas être le père d'une jeune enfant. » Finit-il en tout cas par répondre avec une pointe de sérieux avant d'ajouter avec douceur. « Mais le tiens, du moins si tel est ton désir. » Il ne manqua pas alors de préciser sa pensée. « Tu as beaucoup vécue, je le sais, je le sens, tu as été marquée par la vie, tu dois déjà être une adulte à ta manière, mais… Es tu heureuse avec ce que tu as ? » Demanda t-il calmement, avant de reprendre ensuite avec sincérité. « Pour ma part je serais heureux d'avoir une fille qu'elle soit petite ou grande, une fille qui m'apprécie pour qui je suis et à qui je permettrais de démarrer une meilleure vie… Je serais heureux en quelque sorte de fonder une famille... » Il resta silencieux suite à cela, puis reprit avec gentillesse.

« Pourquoi je ne le ferais pas ? » Demanda t-il, puis il répondit la même douceur. « Je te promet que je ne le ferais pas, mais je peux te donner une excellente raison si tu le désires qui dépasse le simple argument affectif. » Il reprit alors avec un sérieux tranchant.

« L'empire Akkatonien haït l'esclavagisme et ne fait preuve d'aucune tendresse envers ceux le pratiquant quand celui-ci est un citoyen ou vend des citoyens, la mort est la juste condamnation aux yeux de la loi impériale pour ceux s'amusant à cela. Ce serait donc là m'exposer à un tel châtiment que de faire ainsi, ça et ça ruinerait tout ce que j'ai bâtit de mon vivant. » Il laissa quelques instants de silence filer, puis reprit avec plus de douceur.

« Akkaton n'est pas un paradis, aucun pays n'est parfait, mais nous avons des lois, beaucoup de lois qui sont censés protéger nos citoyens. Les akkatoniens sont souvent beaucoup de choses, impérialistes car ils pensent que l'empire devrait s'étendre pour englober l'ensemble du monde, ils sont moralisateurs car ils se considèrent supérieur d'un point de vue éthique aux non akkatoniens, ils sont aussi paternaliste sur les bords et pas toujours pour les bonnes raisons, mais dans l'empire la liberté de pensée, de parole et de vivre sa vie comme bon nous semble est un droit tant que nous respectons les lois. Là-bas personne ne te réduira en esclavage et tu pourras débuter une nouvelle vie comme bon te sembles. » Il resta silencieux une nouvelle fois, puis conclut en fermant les yeux.

« Mais, je ne t'obliges à rien, car c'est ta vie comme je te l'ais dis. Si tu ne veux pas être ma fille je ne t'y forcerais pas, car cela n'aurait aucune valeur morale si tu ne faisais pas toi-même ce choix… Sache juste que si tu acceptais, j'essayerai d'être un bon père à défaut d'en avoir déjà été un. » Termina t-il avec une pointe d'auto-dérision, ce avant de conclure avec sérieux. « Dans tous les cas, prend le temps qu'il te faut pour y réfléchir si tu en as besoin. C'est là une lourde décision quel que soit ton choix et je peux comprendre qu'elle peut t'effrayer, moi-même elle m'effraie un peu. » Ses paroles avaient-elles contribuées à la rassurer ? Il espérait, en tout cas il avait tâché d'être compréhensif et empathique, c'était sans doute plus que ce à quoi elle devait être habituée en ces terres où l'égoïsme est si répandu...

« C’est ma vie… Et si pour une fois je peux décider quelque chose… » Prononça-t-elle sans toutefois terminer sa phrase. Lilyneska ne savait pas trop où elle en voulait en venir. En fait, si, elle le savait, mais les mots lui échappaient. L’hybride n’avait jamais été maître de son destin, c’était son impression en tout cas. C’était les gens autour d’elle qui avaient pris les décisions pour elle et elle avait suivi le flot de la vie sans réellement intervenir. « On m’a détestée parce que je suis née, pour ce que je suis… » Mentionna-t-elle. Les citoyens de Teïder méprisaient les races hydrides. Les Myrr’del n’avaient même pas voulu lui donner la chance de la connaître. « On m’a vendue pour mes oreilles félines. J’ai été esclave pendant si longtemps… jusqu’à ce que je parvienne enfin à m’échapper. Ce n’est pas de ma faute si j’ai des oreilles de chat, si?! ». Elle s’était exclamée d’une voix forte en aplatissant ses oreilles sur son crâne à l’aide de ses deux mains. « Tout ce que j’aurais voulu, c’est que ma mère soit fière de moi. Je voulais apprendre plein de trucs. Découvrir le monde. Partir loin des Duchés. Vivre une vie normale. Être heureuse… »

Des larmes s’échappaient désormais de ses yeux. Être simplement heureuse, était-ce trop en demander? Au lieu, on lui avait bafouillé sa liberté. Sa vie était devenue un combat, littéralement et figurativement.

Ce qu’elle avait besoin en ce moment, c’était un câlin. Un peu de réconfort qui poserait un baume sur son petit cœur lésé après tant d’années de moments difficiles.  

« Si pour une fois je peux décider quelque chose, c’est que je veux prendre en main ma vie. Je veux partir d’ici, aller là où il n’y a pas d’esclavage. Je veux... rester à vos côtés.» murmura-t-elle. C'était un peu sa façon de lui dire qu'elle était d'accord pour qu'il soit son père. Toutefois, c'était difficile de le formuler officiellement.

Otmar écouta silencieusement et respectueusement l'hybride réfléchir et faire part de ce qu'elle avait sur le cœur. En effet, il pouvait être dur de faire un choix pensa t-il, du moins si important quand on était pas habitué à tenir en mains les rênes de sa propre vie. Cela et puis une vie passée dans le mépris et le rejet des autres n'avait évidemment pas de quoi avoir une influence saine sur vous… Oh oui, surtout qu'elle avait déjà tué par le passé, ce qui en disait bien long sur l'influence que ça avait eut sur elle. En vrai, il savait parfaitement que si elle l'avait voulu, elle aurait même pu le tuer, mais dans les faits il n'avait pas peur pour autant, après tout il percevait que ce n'était guère une mauvaise enfant.

Dans tous les cas, il resta parfaitement silencieux pendant qu'elle parla, se faisant surtout une oreille qui écoutait ses déboires, cela pouvait faire du bien après tout d'avoir quelqu'un qui vous écoutait sans juger et sans paraître ennuyé. En vérité c'était même là la base du métier de psychologue. Et si certes Otmar n'en était point un, il pouvait au moins essayer d'aider en ce sens déjà et ensuite…

Ensuite, que devait-il faire ? Voilà ce qu'il pensa aux dernières paroles de l'hybride… Oh, il avait deviné qu'elle venait d'accepter sa proposition, il était assez malin pour cela, mais… Maintenant qu'elle avait acceptée ? Que faire ? Hum… Cela, il finit par le décider au bout de quelques instants...

Il se releva alors doucement de son lit et s'assit prudemment à côté d'elle sur le lit dans lequel elle dormirait, il tenta alors calmement et doucement de l'étreindre comme un père étreindrait sa fille, doucement pour ne pas la brusquer et calmement pour montrer que tout allait bien. Une manière comme une autre de marquer un nouveau départ pour eux d'une certaine manière, ce avant d'ajouter solennel.

« Je te promet que tu pourras aussi bien voyager qu'avoir une vie normale, je ferais de mon mieux pour cela je te le promet… Je te promet aussi de t'acheter ce qui te plaît de temps en temps et de prendre du temps pour toi quand tu en auras besoin, en somme, tout ce qu'un père est censé faire pour sa fille. » Il laissa un temps de silence et de calme perdurer, puis après que l'étreinte ait duré un certain temps, assez de temps pour que ce ne soit pas trop long, mais fasse du bien à sa nouvelle fille, il ajouta avec un sourire paternel.

« Bon, je suppose qu'il serait bon de parler de la suite maintenant... » Il reprit alors calmement. « Nous allons nous rendre à l'ambassade Akkatonienne demain, là-bas j'arrangerai notre départ prochain vers l'empire. Je ne dis pas que cela se fera tout de suite, ça prendra sans doute quelques jours, mais d'ici là tu auras un cadre de vie plus sain dans l'ambassade, ensuite nous pourrons rentrer dans la province Orzanienne et là ta nouvelle vie commencera. Il faudra bien entendu que je t'adoptes officiellement par la suite, une procédure administrative assez ennuyeuse pour moi, mais qui se fera assez rapidement. » Il poursuivit alors après lui avoir laisser quelques instants pour assimiler cela.

« Ne t'étonnes pas d'ailleurs si les gardes de l'ambassade seront choqués quand ils me verront, comme tu l'apprendras assez vite, je suis disons un homme assez important qui est allé se balader par ici sans prévenir personne et sans gardes du corps pour me protéger… Rien de grave, disons que c'est une excentricité de ma part qui va faire qu'ils seront surpris de me voir, et… Que l'ambassadeur risque de ma taper sur les doigts, mais rien de bien inquiétant. » Il sourit de manière amusée comme pour sous entendre que c'était surtout drôle à son sens, ce avant de conclure avec amusement.

« Enfin, sur ce je te propose que nous réfléchissions au reste plus tard, après tout nous avons notre temps d'ici là… En attendant, puis-je savoir ce que le nouveau père que je suis pourrait faire pour sa fille ? » Bon, c'était peut-être un peu tard pour demander cela, quoique… Mais autant le faire. Et il tâcherait bien entendu de faire de son mieux dorénavant pour que leur famille soit heureuse.