Le deuil... c'était là une émotion à laquelle on était forcément confronté, surtout quand comme Hatsuka votre naissance vous avait placé à mi-chemin entre le monde des Humains et celui des Elfes, qui, pour se côtoyer, s'aimer parfois, et même faire des enfants ensemble, comme dans son cas, étaient ancrées dans des temporalités différentes. Elle avait vu plusieurs membres de sa famille paternelle s'éteindre et, même si elle espérait de tout son être que ce serait le plus tard possible, elle savait que les jours de son père lui-même étaient comptés, par sa nature même. On l'avait habituée dès l'enfance, et plus encore en grandissant, à l'idée qu'elle verrait naître et mourir certains de ses parents, tout comme elle-même aurait une vie plus courte que certains autres, même si c'était là un problème tout différent, et un deuil qui les affecterait eux, et non elle-même. C'était là, en soit, une idée qu'il convenait de faire apprendre à ceux qui comme elle naissaient de deux races aux durées de vie bien dissemblables.

Pourtant, la première fois que le deuil l'avait vraiment frappée comme une masse, cela n'avait pas été pour des membres de sa famille paternelle, mais maternelle, avec la mort violente de l'une de ses tantes, de son époux et, croyait-elle, de sa fille. Une fille belle et intelligente, une douce cousine cultivée qui s'était occupée d'elle enfant, et dont la perte aussi brutale qu'imprévue – elle faisait typiquement partie des parents qui auraient dû largement lui survivre, et non l'inverse – avait été le premier deuil brutal qu'elle avait dû affronter. Cela l'avait rendue plus forte, d'une certaine manière, mais cela n'en restait pas moins une vieille blessure, qu'elle avait portée pendant des années, même si elle n'avait pas pu y faire grand chose.

Alors quand, après des décennies, elle avait appris que ladite cousine, la belle Iseul était toujours en vie et attaquait ceux qui, apparemment, étaient à l'origine de la mort de ses parents et de sa disparition, Hatsuka n'avait pas hésité et abandonné son chantier de fouille de l'époque pour se rendre à la Cité de Jade la revoir ! Hélas le temps d'arriver depuis le continent ikhyldien, l'Elfe avait gagné son procès, fait exécuté les coupables et avait disparu dans la nature sans un mot, mais en lui laissant une forte somme d'argent... ce détail avait mis Hatsuka en rage à l'époque, comme si pour elle l'argent pouvait avoir une quelconque importance à côté de revoir sa cousine bien-aimée, et elle avait voulu rejeter l'héritage, même si sa mère l'avait convaincue de l'accepter – ce qu'elle avait fait, mais en la laissant ensuite se débrouiller avec l'argent, bien que cela ait finalement été pour le mieux.

Hatsuka avait continué sa vie, mais elle n'avait pas oublié, et finalement, alors qu'elle était devenue Archimage et multipliait les connexions avec certains personnages politiques ikhyldiens, elle avait finalement réussi à obtenir le nouveau nom de sa cousine, qu'elle avait scellé judiciairement à la fin du procès : Tullia Parande Azul. Cela avait été un choc de découvrir en recherchant des informations qu'elle avait participé au financement de certaines de ses fouilles... visiblement, Iseul savait parfaitement où elle était et ce qu'elle faisait depuis des années, mais n'avait rien fait pour reprendre contact, alors que de son côté elle cherchait des informations à côté de ses autres occupations depuis toutes ces années, ce qui avait ravivé son ancienne colère.

La belle magicienne avait donc décidé de prendre le taureau par les cornes, et d'aller la voir elle-même. Elle voulait savoir pourquoi elle avait ainsi esquivé leurs retrouvailles pendant si longtemps, mais aussi crever l’abcès une bonne fois pour toute, et pouvoir continuer, avec ou sans sa cousine dans sa vie mais en étant au moins fixée ! Elle s'était donc présentée à la maison de commerce de « Tullia » et avait fermement exigé de la voir, sans se laisser éconduire par le petit personnel. Elle avait tant et si bien insisté qu'on avait été prendre consignes au près de la maîtresse des lieux et que, après une nouvelle attente, on l'avait enfin menée jusqu'à elle... à vrai dire Hatsuka ne savait pas exactement ce qu'elle aurait fait si sa cousine avait encore refusé de la voir, mais au moins elle n'aurait pas à trouver la réponse !

Ce fut d'un pas décidé que l'archéologue entra dans le salon que sa cousine avait choisi pour leurs retrouvailles. Elle portait son habituelle tenue de voyage et de chantier, avec haut léger, short pratique et veste de cuir, qui ne voilait toutefois en rien sa beauté, et elle même si elle pouvait faire preuve de raffinement en certaines occasions, elle ne semblait pas vraiment à sa place, de par son attitude autant que sa mise, dans l'ambiance presque feutrée dans laquelle elle fut accueillie, entre fumée de chicha et belle femme alanguie...

Une superbe femme qui était sa cousine, comme elle le réalisa avec un temps de retard, ayant du mal à faire coïncider cette courtisane à la beauté sensuelle et l'image qu'elle gardait de leur enfance... néanmoins elle la retrouvait bien, sinon dans l'attitude, du moins dans la finesse de ses traits et le timbre de sa voix, bien que celui-ci soit un peu plus rauque qu'elle n'aurait pu l'attendre. Ce fut sa voix, d'ailleurs, qui la tira de l'état de légère surprise qu'elle avait eut en découvrant la jeune femme, ses propos ramenant sur le visage de Tullia le regard magnifique mais en cet instant très conflictuel d'Hatsuka, entre joie intense et colère froide, mêlées d'un trouble profond. Ce fut néanmoins une certaine froideur qui domina dans sa voix quand elle lui répondit.

« Ça je m'en doutes, vu tous les efforts que tu as fais pour fuir ce moment, Iseul... ou dois-je dire Tullia, moi aussi, à présent ? »

Il y avait un clair reproche dans sa belle voix, mais était-ce en soit si étonnant ? En tous cas, elle ne fit pas mine d'accepter l'invitation à s'asseoir à ses côtés, un de ses pieds battant légèrement la mesure sur le tapis, même si celui-ci étouffait le bruit et que la belle Demi-Elfe faisait tout pour ne pas laisser éclater son irritation, nourrie par l'attitude bien trop détendue de sa cousine à ses yeux. Elle voulait comprendre, pas simplement se disputer dans le vent, et malgré toute sa colère une dose de joie se disputait la place en elle, d'avoir enfin la confirmation réelle, visuelle, que c'était bien elle. Pas une imposture compliquée et alambiquée ayant quelque motif incompréhensible de la damoiselle, mais réellement celle qui s'était occupée d'elle enfant...

« À ton avis, qu'est-ce qui peut bien m'amener ? Je suis venue voir si tu étais vraiment en vie pour commencer, heureuse de voir que c'est bien le cas ! Je suis venue voir pour quelle raison tu n'as non seulement jamais repris contact mais même carrément fuis celui-ci, puisque j'ai appris que tu savais parfaitement où j'étais ces dernières années, chaque fois que je suis passées à quelques kilomètres, voir même dans cette ville ! Je... »

La voix de la Demi-Elfe avait commencé à s’accélérer, mais elle s'interrompit brutalement, prit une grande inspiration et la relâcha, essayant de s'accrocher aux exercices de méditations appris jadis dans les monastères où elle avait affiné sa maîtrise de la magie. En relâchant son souffle, elle se calma sensiblement, et repris d'un ton plus calme et mesuré, laissant pour la première fois entendre au fond de sa voix la douleur que ce rejet lui avait inspiré, et qu'elle s'efforçait de masquer.

« Je suis venue pour avoir des réponses. Je pense que tu me dois au moins ça, tu ne crois pas ? Après ça, si tu me détestes vraiment et que tu veux que je disparaisse, je sortirai de ta vie, tu as ma parole. »

L'attitude de la belle Elfe, à la fois froide et faussement détachée, n'hésitant pas à lever les yeux au ciel comme si elle n'était encore qu'une enfant parlant de sujets insignifiants, fit grincer des dents à Hatsuka, mais elle s'efforça encore une fois de garder le contrôle sur ses émotions, comme elle l'avait appris dans les monastères élémentaires pendant sa longue formation de mage. Elle expira profondément et, un peu à contre cœur, accepta finalement de s'asseoir tout en répondant aux remarques d'Iseul, ou plutôt de Tullia, alors qu'elle prenait place, sans toutefois se laisser aller plus que strictement nécessaire dans les coussins pourtant moelleux du sofa de sa cousine.

« Tu lèves les yeux au ciel comme s'il était enfantin de parler de haine, mais j'avoue que je vois mal quelle autre émotion peut pousser quelqu'un a tourner totalement le dos à sa propre famille, jusqu'à tout faire pour éviter de rencontrer des gens qui tiennent à elle, ou s'inquiètent pour elle. »

Le reproche était évidemment clairement présent en fond dans la voix d'Hatsuka, même si elle avait parlé sans agressivité, plutôt en retenue. Pourtant, il ne fallait pas être maîtresse dans l'art de la conversation pour voir les émotions qui bouillonnaient toujours dans son beau regard d'améthyste. Elle laissa la belle Elfe servir le thé sans réagir, mais ne fit pas mine de seulement tendre la main vers sa tasse, n'étant clairement pas venue là pour fumer ou pour boire, fut-ce du thé, et ce en dépit de l'attitude clairement détendue – en apparence tout du moins – de celle qui voulait maintenant se faire appeler Tullia. Au lieu de cela, elle répondit à ses questions avec calme, bien qu'on puisse aisément sentir que ce n'était qu'un fragile vernis qu'elle maintenant au-dessus d'émotions bien plus bouillonnantes...

« On ne m'a rien raconté, j'ai lu les archives du procès... tu sais, celui où tu as négligé de m'appeler ? Enfin... contrairement à ce que tu semblais attendre, je n'ai pas sereinement accepté que tout ça était arrivé à ma cousine et qu'ensuite elle avait disparu à nouveau. J'ai lu tout ce qui n'était pas confidentiel, et la seule chose scellée était ton nom. J'ai donc su... toute l'histoire. »

La belle archéologue avait laissé sa voix faiblir en instant en évoquant « toute l'histoire », bien consciente, contrairement à ce que pouvait croire sa cousine, de la blessure que cela devait être pour elle... elle-même ressentait encore une pointe de douleur rien qu'à évoquer le récit qu'elle avait découvert de la mort de son oncle et de sa tante et du destin qui avait été celui de celle qui lui faisait face à présent, du moins ce qui en avait été livré publiquement.

« Je... je ne dirai certainement pas que je comprend, car je n'ai traversé aucune épreuve comparable, mais je dirais plutôt que je conçois que tout cela ait été une souffrance terrible... J'aurais volontiers témoigné en ta faveur, je t'aurai aidé de toutes les façons possibles, tu sais ? Mais quoiqu'il en soit, j'avoue ne pas voir en quoi cela entraîne le fait de couper les ponts avec ta propre famille, Is... je veux dire Tullia. »

Hatsuka faisait de sincères efforts pour comprendre, et aussi pour ne pas braquer volontairement sa cousine, en dépit des émotions conflictuelles qui passaient dans sa voix, et également dans ses yeux, comme le prouvait l'effort pour adopter le nom qu'elle avait choisi, en dépit de l'étrangeté de la chose pour elle, attendant les explications promises par la belle Elfe.

De nombreuses émotions contradictoires passaient dans l'esprit d'Hatsuka, et le moins que l'on puisse dire, c'était que la passivité affichée par sa cousine n'aidait guère à la calmer elle-même, tant elle ne pouvait s'imaginer comment, à sa place, elle serait bouleversée par la réapparition d'un proche après de si longues années, quelque soit la façon dont celui-ci aurait réapparu ! Malgré tout, elle l'écouta jusqu'au bout, désireuse de comprendre des décisions dont elle ne parvenait guère, par elle-même, à comprendre la raison. Elle eut pourtant un léger sourire devant l'avant-dernier argument de celle qui se faisait maintenant appeler Tullia, un sourire un peu triste, peut-être, et qui ne l'empêcha pas de la laisser finir, mais sur le sujet duquel elle ne manqua pas de rebondir.

« Je ne remettrai pas en cause ton ressentit mais... tu crois vraiment que c'est des liens avec une marchande duchéenne qui me mettraient en danger ? Tu sais, j'ai déjà exploré des ruines au beau milieu des marais teïderiens ou confrontés des sectaires de Césario, entre deux monstruosités élémentaires et un géant ou deux, et c'était seulement dans l'année écoulée, ahah ! Crois moi, ce n'est pas avoir une cousine dans les affaires qui va me mettre plus en danger, quelques soient les choses que tu échanges dans l'ombre ou dans la lumière. »

Hatsuka ignorait certes les vraies activités de sa cousine, et à ce stade ne les imaginait sûrement pas une seconde, mais elle avait une vie bien trop mouvementée pour croire une seule seconde que les relations de celle-ci, si occultes puissent-elles être, soient plus dangereux que ce qu'elle affrontait déjà sinon au quotidien du moins assez souvent.

« Quant à ton procès... tu aurais d'autant moins risqué de le perdre si j'avais été là pour témoigner, justement ! Et de toute façon, ne peux-tu pas concevoir que, au-delà de tes choix à toi, j'avais aussi le droit de faire les miens ? De décider si je voulais ou pas me mettre en danger, moi aussi ? Tu parles beaucoup de ton libre choix mais tu sais dans la vie nos choix impactent toujours les autres... tu as juste choisi à ma place, et à celle de toute notre famille, et, si vraiment tu l'as fais pour notre bien, est-ce si difficile à comprendre que j'aurais préféré que tu me laisses choisir par moi-même ? Et puis tu sais déjà à l'époque je n'étais pas sans ressources, ni sans relations. »

Une certaine lassitude s'était aussi emparée de la voix d'Hatsuka, au fur et à mesure qu'elle parlait, comme en miroir, et elle termina sur un léger soupir. Elle voyait bien que la belle Elfe avait érigé ses défenses, soit en réaction à sa venue, soit tout simplement depuis longtemps... après tout, il devait être plus facile de « continuer sa voie » en se convainquant soit-même qu'on avait fait le bon choix, ou même le seul choix possible, n'est-ce pas ? Mais quoi qu'en dise celle qui avait choisi le nom de Tullia, l'Hybride n'était clairement pas d'accord sur ce point...

« Et pour le reste... tu sais, quantité de gens se délocalisent d'un pays à l'autre, et je connais nombre d'Ikhyldiens qui se sont installés dans les Duchés sans couper les ponts avec leur famille pour autant ! Je veux bien croire que sur le moment ça t'ai semblé la meilleure solution, mais tu ne crois pas que tu dramatises la chose aujourd'hui ? Si de hauts officiers mercenaires ou même une Duchesse peuvent vivre dans les Duchés avec leur lot d'ennemis sans avoir besoin de planquer leur famille ikhyldienne sous le tapis, je ne vois pas pourquoi toi tu risquerais je ne sais quel problème parce qu'on m'a permis de te retrouver... »

Une fois encore, un léger sourire effleura les douces lèvres d'Hatsuka, même si c'était certainement un sourire quelque peu désabusé. Elle avait clairement l'impression qu'en dépit de son appel à la raison, sa cousine avait un peu trop tendance à dramatiser la situation pour se trouver de bonnes excuses, que ce soit consciemment ou non. Quoiqu'il en soit, elle fini par soupirer doucement, et hausser légèrement les épaules.

« Enfin, du moins je comprend les raisons qui t'ont poussé à agir, même si je ne suis pas convaincue qu'elles aient été aussi... « rationnelles » que tu veux bien le croire. Et que je reste persuadé que ce fut plus douloureux qu'utile, de notre côté du moins... »

Tullia, sous son nouveau nom, semblait du sien s'être épanouie, après tout... mais bon, on aurait pu en dire autant d'elle-même, au fond, malgré la douleur ressentie à l'époque. Mais Hatsuka n'avait aucun moyen de savoir si oui ou non la belle Elfe avait si bien vécu la chose à l'époque, et était consciente que vouloir croire le contraire aurait peut-être été tout sauf basé sur la raison de son côté à elle, pour le coup.

« Et quoiqu'il en soit, je suis une femme de parole... et maintenant ? Sachant que ma vie ne risque absolument rien, et que même si c'était le cas j'ai une foule d'amis et collègues qui me ramèneraient sans soucis... Veux-tu que je sortes de ta vie pour ne plus y revenir, Tullia ? »

La question faisait mal à poser, et la voix de l'archéologue, qui s'était largement apaisée tout en parlant, avait de nouveau laissé passé cet éclat de douleur en la posant, mais au moins cela était-il fait...

L'attitude ouvertement détendue de sa cousine – du moins en apparence, Hatsuka ne pouvant guère percer le masque imperturbable de la damoiselle et sa façon de tirer sur sa chicha ne faisant rien pour la faire paraître plus tendue, que du contraire – crispait quelque peu la belle archéologue, mais elle s'efforçait de ne pas le montrer, se contentant simplement d'attendre sa réponse... après tout, elle ne pouvait pas reconstruire une relation avec elle si elle était la seule à vouloir construire de nouvelles choses, justement ! Elle préféra ne pas relever la première remarque de celle qui se faisait maintenant appeler Tullia, car pour elle l'un des grands drames de sa vie, cette souffrance de savoir que sa cousine, bien qu'ayant survécu, désirait ne plus la voir, était loin d'être à classer dans la catégorie des choses à « sermonner », tout de même ! Cela lui donnait encore l'impression que la belle Elfe cherchait à minimiser le contre-coup de ses propres actes, mais encore une fois, le relever n'allait certainement pas être un élément positif...

Au lieu de cela, elle laissa celle qui avait choisi de se faire Duchéenne réfléchir, n'ayant guère d'éléments de plus à rajouter... même si cela lui faisait mal également de l'imaginer, elle ne pouvait pas forcer sa cousine à se lier à nouveau à elle, et si nécessaire, elle tiendrait parole en quittant la scène, et en faisant définitivement son deuil d'Iseul, en oubliant cette nouvelle identité qu'elle avait endossée, ou du moins en tentant de le faire. Cependant, bien qu'elle mette longtemps à se prononcer, celle qui se faisait maintenant appeler Tullia fini par acquiescer, en annonçant toutefois des conditions, avec une justification qui fit ostensiblement lever les yeux au ciel à Hatsuka.

« Très bien, très bien, donne moi tes conditions... même si je maintiens que nos vies ne sont absolument pas en danger parce que chacune d'entre nous renouerait avec une cousine. Mais je tiendrai tes conditions, et si malgré tout tu te fais tuer à cause de moi par je ne sais quelle circonstance improbable, je te ressusciterai, ça te va comme garantie ? »

Clairement, la belle archéologue n'était pas convaincue par l'argumentation alarmiste de sa cousine, et elle ne faisait rien pour le cacher, mais elle acceptait tout de même de jouer le jeu, si c'était ce qu'il fallait pour rassurer l'elfique damoiselle... qui souligna une des raisons potentielles de sa méfiance, à savoir... la perte de ses capacités magiques ? Hatsuka ne s'attendait certainement pas à cette information, et afficha un air légèrement surpris devant celle-ci, même si elle ne pensait pas pour autant que cela justifiait la méfiance presque paranoïaque que manifestait Tullia !

« Comment cela ça t'es impossible à présent ? Je me souviens pourtant que tu avais des dons pour la magie du vent, et tu ne m'as pas l'air d'avoir reçue des prothèses entre temps... »

Hatsuka connaissait bien entendu le fonctionnement de la thérianthropie, mais difficile d'imaginer spontanément que c'était ce qui était arrivée à sa cousine pendant le temps où elles s'étaient perdues de vue, tout du moins... enfin, elle soupira doucement en secouant la tête.

« Enfin... je suppose que ça fait partie de ce que tu me raconteras quand tu seras prête à te livrer... de toute façon, magie ou non tu m'as l'air d'avoir bien réussi, et dans les Duchés ça veut dire avoir les moyens de se défendre. Et au pire, tu gagneras une cousine dévouée prête à voler à ta rescousse ! »

Ne souhaitant pas plonger la belle Elfe dans de noirs souvenirs alors qu'elles étaient en pleines retrouvailles, l'Ikhyldienne avait fermement mis sa curiosité de côté, et conclu sur un sourire aussi ouvert que chaleureux, qu'elle espérait transmettre correctement son soutient autant que son affection pour la damoiselle aux cheveux de neige. Laquelle enchaîna sur une question qui fit hausser un sourcil légèrement surpris à Hatsuka, bien que pour de toutes autres raisons...

« Ce que... j'attends ? Hé bien de retrouver ma cousine, c'est déjà un bon début, non ? D'avoir l'occasion de discuter, de renouer une relation, de... je ne sais pas moi, faire des choses ensemble plus tard si on en a l'occasion, papoter quand on se croise, que sais-je encore ! Tu sais ce n'est pas comme si j'avais une armada de sœurs pour établir des points de comparaison ! »

Comme Tullia devait s'en souvenir, à moins qu'elle n'ait vraiment tout oublié de sa vie d'avant, ce qui même avec un effort conscient semblait difficile, la Demi-Elfe avait en effet deux frères – et aurait d'ailleurs quelque chose à dire à ce sujet à un moment ou à un autre à sa cousine, mais pour l'heure cela ne s'insérait guère dans la discussion – mais pas de sœur, ce qui expliquait peut-être d'ailleurs en partie pourquoi, enfant, elles s'étaient attachées l'une à l'autre... en tous cas, Hatsuka ne semblait guère même imaginer un « intérêt » au sens duchéen du terme à renouer avec la belle courtisane, n'en parlant pas car, de façon assez évidente, elle ne l'envisageait même pas !