28 Décembre de l’An 2000 de l’Âge d’Acier

Otmar au cours de sa carrière d’ethnologue et même celle de politicien qu’il a adopté ensuite, a eut l’occasion pendant son existence de rencontrer beaucoup de mondes. Certaines personnes l’ont marquées, d’autres moins, il a peu fréquenté certains êtres, d’autres plus. Que ce soit pendant son temps de travail qui consistait après tout à étudier d’autres sociétés et peuplades, même s’il aurait pu fondamentalement aussi faire un sujet d’étude sur les Akkatoniens eux-mêmes. Ou bien, en dehors de celui-ci quand il faisait en quelque sorte des heures supplémentaires purement pour satisfaire ses tendances d’homme sociable et cosmopolite.

Et parmi ces personnes qu’il avait rencontré il y avait une certaine hybride entre les nagas et les bipèdes, quel terme irait, lamia ? Qu’importe, pas la seule qu’il avait connut d’ailleurs, mais celle-ci sortait du lot clairement. Et il avait apprit que cette dame avait décidée d’établir en partie son entreprise dans l'empire d'Akkaton, notamment pour commencer, dans la forteresse de Nephtys, cité magique singulière dans le désert et… Bon endroit pour commencer à établir une fumerie, dans l’idée éventuelles par la suite supposait-il d’en exporter d’autre dans les cités technologistes alentours.

Après tout les Akkatoniens n’avaient pas forcément les mêmes habitudes que les Ikhyldiens et ils avaient sans doute plus tendance pour ceux se mettant aux drogues douces à employer le tabac ou l’alcool. Néanmoins, Nepthys était déjà bien tournée vers l’opium, pas que la majorité de sa population en fumait, mais il y avait une clientèle.

Peut-être qu’il y aurait moyen avec les visiteurs Akkatoniens de cette cité, que ce soit les fonctionnaires, les militaires, les touristes et autres voyageurs et marchands, de se faire un nom parmi eux pour avoir des opportunités ?

Peut-être, mais ça ça ne concernait pas Otmar, un Otmar qui se baladait seul, pas vraiment anonyme mais presque dans les rues de la cité, à une heure tardive. Pour arriver enfin face à l’établissement encore neuf, dans lequel il entra calmement avant d’observer l’intérieur d’un regard expert… Autant pour observer la décoration, que la clientèle et employés de slieux.

La nuit se montrait de plus en plus présente, et les lumières de la cité étaient déjà allumées pour éclairer le chemin des passants. La nouvelle activité dans la cité générait une attention toute particulière de ceux qui s’y trouvaient, autant par les rumeurs qui y circulent que par la devanture de la bâtisse qui se veut remarquée. La façade présente une entrée assez grande mais sobre, suffisante pour signifier l’activité commerciale sans atteindre la folie des grandeurs. Un panneau accroché à la façade annonce le nom de l’échoppe : “Les brumes fantasmatiques”

A son entrée, l’Empereur est accueilli par un jeune Naga au corps effilé et légèrement musclé, un apollon mis en valeur par sa tenue légère mais décente. Il étira un large sourire à sa venue, l’accueillant comme il accueillerait un client.

Bonjour Messire, bienvenue aux brumes fantasmatiques. Avez vous réservé, ou venez vous seul ? Suivez moi, je vais vous guider.

Après une potentielle réponse de l’empereur, le Naga le guidera dans l’intérieur du bâtiment. Chose étonnante, l’on pourrait croire que c’est plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur. Magie ambiante ou génie d’architecture ? Quoi qu’il en soit, le Naga guida le client au travers d’un cours couloir pour écarter les pans d’un rideau et le faire entrer comme dans un nouveau monde. Passé le rideau, Otmar se retrouva dans une grande salle circulaire, décorée de tentures et d'alcôves stylisées originalement où plusieurs clients se trouvaient là. Certains consommaient de l’opium, d’autres se contentaient simplement d’être là, profitant du spectacle qui se déroulait.

Si vous êtes seul, je peux vous conseiller de vous trouver une place et de profiiter du spectacle. C’est la propriétaire des lieux, Madame Qin, qui nous fait l’honneur de sa présence ce soir. Nous avons coutume de ne pas demander quelconque paiement à l’entrée, libre à vous de nous rémunérer si vous êtes satisfait.

Sur ce, le Naga laissa l’empereur seul, s’il n’eut besoin de rien d’autre. La fumée qui flottait haut dans l’établissement donnait une ambiance mystérieuse et fantasmagorique, laissant le centre de la salle loin des mauvaises odeurs -probablement un procédé pour permettre aux fumeurs et non fumeurs de cohabiter, ceux qui fument étant bien calés dans les alcoves- et dans le fond de la salle, une scène où se trouvait l’hypnotisante Nagate, seule, en train de jouer du shamisen en silence. Ses yeux étaient fermés, son expression concentrée, elle tenait l’instrument contre elle alors que, posée sur elle même de sa longue partie Nagate enroulée, elle faisait vibrer les cordes d’un rythme envoûtant, voulant rendre le spectacle unique, presque même concordant à l’ambiance mystérieuse et exotique des lieux.

Le spectacle durera bien vingt minutes depuis l’arrivée de l’empereur, avant de finalement en finir alors que la nuit est sûrement déjà bien tombée. Alors, la gérante des lieux ouvrit les yeux, ses yeux d’un vert cryptique, alors que l’assemblée lui fit savoir son contentement, et se retira. Ce n’est qu’après quelques minutes que le Naga de l’entrée fit son apparition auprès de l’empereur pour l’interpeller, toujours aussi souriant.

J’espère que le spectacle vous a plu. Je vais vous demander de vous suivre, Madame Qin m’a envoyé expressément pour vous mener jusqu’à son salon privé.

Ce n’était clairement pas la seule fumerie à Nepthys, mais c’était sans doute la première avec une base Ikhyldienne qui faisait sans doute un peu exotique. En soit c’est en cela sans doute que s’implanter ici n’était pas trop difficile, car la ville était favorable à ce genre de commerces qui n’était pas inconnu au départ aux nagas et autres peuplades du désert. Par contre, cela voudrait aussi dire qu’il faudrait faire certains efforts pour se démarquer durablement de la concurrence.

Quoiqu’il en soit, Otmar croise un naga. Un naga pur totalement serpentin ou un hybride ? Car dans le premier cas il pourrait même être nu que pas grand monde aurait quelque chose à y redire, après tous les nagas avaient bien peu de parties du corps à cacher et les vêtements qu’ils portaient étaient en général très légers voir inexistants. Qu’importe de toute façon il remercia le jeune homme et accepta l’offre de celui-ci qui le guide à l’intérieur.

Il fut alors introduit dans une salle où se trouvaient d’autres clients qui dans l’état où ils étaient ne firent pas trop attention à lui, sauf certains qui le reconnurent vaguement du regard, mais ne réagirent pas vraiment à cela.

« D’accord, merci à vous. » Dira quoiqu’il en soit au jeune homme qui l’invita donc à s’installer et expliqua que pour le spectacle ils payaient en quelque sort en pourboire, ce qui était un mode de paiement comme un autre supposait-il. Surtout qu’allez savoir, il avait le sentiment que ce n’était pas tant ce genre de « pourboires » qui représentaient les recettes principales, mais les consommateurs d’opiums et autres services

Et ils profita du spectacle comme bien d’autres, Otmar sachant apprécier ce genre de choses, avec l’élégance et le raffinement qui était sien. Un regard qui était digne et non insistant vers la chanteuse, des oreilles à l’affût de la musique et lui qui prenait un air à l’écoute. Il avait typiquement le regard d’un homme qui pourrait vous fixer sans que vous ne soyez intimidé ou mal à l’aise, même s’il ne fixait point, se contentant de regarder vaguement dans la direction de madame Qin qui comme toujours était resplendissante et avait d’ailleurs peu changée depuis tout ce temps…

Une dame qui désira le voir en privé lorsque le spectacle fut terminé, le jeune naga de l’entrée le faisant savoir. Otmar accepta de bonne grâce et munit de sa canne de marche, qui lui donnait plus un style, que nécessaire. Il suivit le naga jusqu’au salon où l’attendait sa vieille amie.

Voilà une soirée comme une autre à Nephtys pour la gérante maintenant connue à l’étranger. Elle avait réussi à implémenter sa fumerie en territoire Akkatonien, parmi les autres fumeries locales, et commencé à repérer les lieux. Son activité de renseignements est encore en cours de développement, prenant le temps de se tisser un réseau résistant et discret, en attendant de pouvoir contacter les bonnes personnes… Ah, Otmar, l’empereur d’Akkaton, elle y pensait bien. Elle comptait le voir lorsqu’elle aurait suffisamment géré la boutique pour qu’elle puisse se gérer toute seule. En parallèle, elle a tenu à ses engagements auprès de Xin, ayant réussi probablement à dégoter un ou deux Nagas maîtrisant la magie de l’âme, les convainquant de travailler pour Ikhyld… Et elle cherchait encore. Elle avait ajouté à cela un petit panier garni d’alcools et de produits de luxe typiquement Akkatoniens qu’elle eut le plaisir d’offrir à son ami Ministre.

Quoi qu’il en soit, ce soir elle représentait. Elle appréciait maintenir cette sensation de mystère et d’exotisme autour de ses bâtiments, et participait activement à faire connaître son nouveau bâtiment avant de repartir, ce qui inclus un investissement de temps important. Elle se présenta donc sur scène, armée de son shamisen, pour envoûter les âmes qui se trouvaient là. Elle jouait comme elle avait l’habitude de jouer, sa réputation la précédant, mais elle ne loupa pas un détail de ce qu’il se passait dans son établissement. Présent dans la salle, son ami était là. Il avait bien vieilli depuis leur dernière rencontre, mais il n’y avait aucun doutes : l’empereur était finalement venu vers elle. Parfait !

A la fin de son spectacle, Kheizhidji se hâta de préparer son salon privé et d’envoyer un employé chercher son invité. Elle s’appliqua au moindre détail, s’impliquant corps et âme pendant les quelques minutes qu’elle passa à préparer la salle. Il fallait le dire, la Nagate eut du mal à se contenir à cette idée, et était étrangement excitée par cette rencontre.

C’est alors, qu’enfin, il apparut. La Nagate se figea presque pendant une demi seconde, comme n’en croyant pas ses yeux, avant d’afficher un visage illuminé et sincère, un des rares moments où elle ne contrôle pas son expression faciale.

Otmar… Mon bel Otmar, que cela me fait plaisir de te revoir…! L’âge te rend toujours plus précieux. Même si je ne compte plus le nombre de lettres que l’on s’échange, il y a tant de chose à se dire. Veux tu passer la soirée avec moi ?

Otmar était comme à son habitude depuis quelques années, d’allure digne et plutôt soutenue, se donnant l’air, certes il n’était pas si âgé, d’un sage et aimable patriarche. Autant par la façon dont il se mouvait aidé de sa canne et attitude de gentleman, mais aussi… De la certaine forme de dignité dans l’âge qu’il commençait à avoir.

Quoiqu’il en soit, il ne cacha pas être fort aise de revoir sa vieille connaissance une fois dans le bureau privé de celle-ci. Comme il le témoigna par l’air calme, mais fort satisfait qu’il afficha. Après tout c’était lui qui faisait un peu la surprise, donc d’une certaine façon il avait put s’y préparer.

« Le plaisir est partagée cher amie. Il est vrai que l’âge me change, qu’il me bonifie ou avilit, je suppose que cela dépend de la perception de chacun. Quant à toi, tu n’as pas beaucoup changée, mais ce n’est pas plus mal, on peut difficilement faire mieux que la perfection après tout. » Sans doute flattait-il un peu en disant cela, mais après tout elle appréciait sans doute ce genre de compliments, tant qu’il les dispensait sans trop de profusion. Puis il reprit avec bonne humeur, après avoir prit la peine de déposer une baiser galant et chaste sur la main qu’elle lui tendit, si elle le fit, une façon galante de mettre en avant la dame dont on partageait la compagnie.

Avec les hommes avec qui il avait eut quelques affinités, dirons-nous qu’il avait quelques comportements différents, même si sans doute égaux en galanterie. Après tout Otmar restait un homme du monde à sa façon, le genre qui appréciait beaucoup la compagnie.

« En effet, si tu n’as rien d’urgent à faire en cette soirée, passer celle-ci avec toi me semble une agréable perspective. » Puis ceci fait, s’installant si elle l’y autorisait, il glisserait avec amusement. « Alors, il semblerait que tu désires te rapprocher un peu de tes racines ? » Il devait parler du fait qu’elle s’installe dans la province désertique Akkatonienne, englobant le même désert qui avait vu naître le peuple naga...

Recevoir son ami avant tout était une chose qui rendait Kheizhidji particulièrement heureuse et de bonne humeur. Avec lui, il n’y avait plus de barrières professionnelles ou d’attitude distante, avec lui elle était comme lui l’avait connue, dévouée et absolument adorable. Bien sûr, leur relation avait évolué, et elle le respectait avec une certaine distance, mais il n’y avait pas plus proche personne dans le coeur de Kheizhidji que l’empereur d’Akkaton. Par le passé ils étaient ensemble, et même si la Nagate se pense détachée émotionnellement, il faut bien avouer qu’elle en a bien pincé pour cet humain, et que c’est resté depuis…

Quoi qu’il en soit, elle lui proposa une boisson au choix parmi plusieurs bouteilles et le servit après son choix, qu’il soit alcoolisé ou non. Elle reprit donc sa place en face de lui, joignant ses mains entre elles avec un air satisfait et béat face à son ami, souriante au compliment.

Tes paroles sont toujours aussi justes et bien placées, tu as le don de me flatter alors que de pauvres mafieux se battent désespérément pour espérer obtenir de mes faveurs.

Elle lui tendit sa main volontiers, appréciant la courtoisie de l’Akkatonien et ses manières si belles. La Nagate ne le quittait pas de ses yeux verts pomme, reprenant la conversation par la suite.

J’ai la grande majorité de mon travail pour ce soir. Le spectacle et le succès de ces soirées faisaient partie de ces objectifs, et la paperasse attendra. C’est l’avantage d’être son propre patron, on arrange son temps pour accueillir les rares mais merveilleux invités sur ses heures. Depuis tout ce temps, je ne pouvais pas te refuser à mes côtés.

Puis vint le sujet de son affaire commerciale. Il y en avait des choses à dire ! Elle continua alors pour l’en informer.

Eh bien, on peut dire cela, oui. Les recrues Nagates sont prometteuses, et je dois dire que ça me manquait un peu à Ikhyld, haha. Plus sérieusement, c’est évidemment dans le cadre de mes affaires que je suis ici, et c’est plutôt une réussite. Après vingt ans d’ouverture de mon premier établissement, j’ouvre enfin le premier à l’étranger. Je comptais aussi te trouver, mais tu l’as fait avant moi… Pareil, dans le cadre des affaires, mais je suis gênée maintenant que tu es devant moi, parler négociations aussitôt dans la soirée serait des plus rustres.

Ils s’étaient connus à l’époque où Otmar était ethnologue et sans doute que cela avait pas mal joué sur leur relation actuelle. Après tout il n’y avait pas eut ces préoccupations politiques, mais d’autres différentes couplées à un certain instinct social et une grande xénophilie. L’empereur était après tout le genre d’homme qui appréciait la compagnie d’autrui et qui n’était guère repoussé par la différence, ça faisait évidemment qu’il avait beaucoup d’amis, dont certains avec qui il avait pu développer des relations fortes.

Et à la boisson qu’elle proposa, il demanda du thé, pas d’alcool pour aujourd’hui et puis boire du thé donnait l’excuse pour faire preuve d’une certaine classe en parallèle. Certes, le vin aussi, mais le souci du vin c’est que ça n’avait pas forcément la même image que l’Akkatonien raffiné buvant sa tasse de thé en bonne compagnie. Cela et soyons sincère, le charme d’Otmar dépendait en partie aussi de son attitude et sa manière d’être, les dames pouvaient apprécier après tout, un certain âge passé, ce genre d’attitude de gentilhomme gentleman retenu.

« Les pauvres mafieux sont comme ceux qui se contentent de regarder le tableau d’un maître, pendant dix secondes, puis s’en vont sans insister. Ils voient l’aspect superficiel, mais pas la beauté intérieure, la complexité de l’œuvre, l’histoire et les sens derrières. » Glissa Otmar amusé à ce sujet.

Quoiqu’il en soit, leurs retrouvailles étaient agréables et l’empereur était plutôt content. Cela faisait un temps qu’ils ne s’étaient pas vus en chair et en os après tout. Même s’il supposait que maintenant la chose pourrait être un peu plus fréquente si elle alternait entre les pays pour ses séjours.

« Ah… Ne me parle pas de la paperasse. » Dit-il du ton complice qui n’était guère reproche, mais qui permettrait d’appuyer ses propos suivants qu’il énonça avec amusement. « Tu serais étonnée du nombre de documents que dois lire le président d’une république, malgré le nombre conséquent que je délègue aussi. Je me demande si les dirigeants au pouvoir plus fermes en subissent moins ou davantage, mais qui gouverne, doit s’attendre à perdre pas mal de temps libre. » Avant de reprendre de fil en aiguille, à l’égard de la nagate.

« Alors, ne parlons pas de négociations. Du moins pas tout de suite… » Puis de reprendre avec bienveillance. « Si je n’avais pas eu toutes ces responsabilités, je t’aurais sans doute proposé quand tu aurais du temps pour toi, de prendre quelques jours pour découvrir en ma compagnie cette cité, ce n’est point la première fois que j’y ai été après tout. » Du Otmar tout craché, Araki lui-même pourrait témoigner des manières de l’empereur à l’époque où ils avaient été d’une grande proximité… Cette tendance qu’il avait à mettre en avant ses proches de telles façons, mais aussi de leur consacrer du temps, et de séduire d’une façon assez vieux jeu aussi. Dans le bon sens du terme.

La nagate elle même l’avait remarquée avec le temps, si elle avait pu avoir sur scène par exemple droit au regard de l’empereur qui contemplait sa performance, et actuellement à celui-ci qui lui renvoyait son regard. Elle n’avait quasiment jamais vu le regard de ce dernier dévier ailleurs ou être insistant sur certains attributs, sauf peut-être en partie dans l’intimité. Il avait toujours cette forme de retenue et tendance à laisser les autres mener en partie le jeu qui était plaisante. D’ailleurs, il se permit de glisser avec élégance.

« Mais à défaut de pouvoir t’offrir cela, je peux te laisser choisir le sujet de conversation, tu dois avoir tant de choses à dire après tout. »

La Nagate n’en était que plus flattée des paroles de l’Empereur. Il avait prit en âge et sagesse, et pourtant il restait toujours aussi charmant et charmeur, quoi que peut-être même encore plus habile de ses paroles et de sa séduction subtile si propre à lui. Tout ce dont avait besoin la Nagate et qui la faisait se sentir plus jeune de vingt ans…

Elle joignit même son rire à celui de l’empereur quand il s’agit de mentionner les galères de diriger sa boîte. Elle avait déjà un emploi du temps chargé pour diriger ses boutiques, alors pour diriger un pays… Elle ne l’imaginait même pas à quel point cela devait être conséquent. Il était vrai par la suite que parler négociations serait barbant, et d’un commun d’accord la Nagate préféra embrayer sur un autre sujet.

Eh bien, oui. Voyons, j’ai voyagé plusieurs fois pour apporter certaines ressources rares et faire de la reconnaissance, mais rien d’aussi fameux qu’un grand voyageur. J’ai rencontré des gens qui ont vite été oubliés et j’ai eu le plaisir durant toutes ces années de passer mes soirées après le travail à t’écrire toutes ces lettres que je t’ai envoyées. J’imagine que le temps t’échappe au vu de tes fonctions, mais je dois bien admettre une chose, je suis flattée de tes réponses toutes autant savoureuses que par le fait que tu ai pris le temps de me les faire. Dis moi alors, toi qui dirige un empire, n’as tu trouvé personne pour t’accompagner à la tête du pays ? J’ai cru entendre dire que bien des régimes avaient leur dirigeant et la personne qui l’accompagnait, que ce soit amant ou par lien spirituel. Je sais que ce n’est pas les premières choses qui te préoccupent, mais un homme si sage et si charmant que toi trouvera bien quelqu’un de sincère qui te siéra. Après tout, tu as bien réussi à me rendre amoureuse, haha. Une chose à l’heure actuelle qui serait impensable pour moi. Des années de bonheur… Enfin, tout ça pour dire que tu as un charme indéniable, et le panache de rendre la personne que tu choisiras heureuse.

Elle marqua un temps de pause, rêveuse, avant de reprendre, l’air d’avoir une nouvelle idée.

A moins que cette personne soit ta fille ? C’est vrai ça, tu es père maintenant, je suis tellement heureuse pour vous. En fait, je retire ce que j’ai dit. Tu n’as pas besoin de quelqu’un pour partager ta vie sentimentale, tu as déjà cette jeune femme que tu as adopté. Voilà une heureuse chose, elle est ton élue parmi les rares qui ont pu bénéficier de ce privilège. Je serai enthousiaste à l’idée de la rencontrer, un jour, voir de mes propres yeux ce qui te rend heureux. Et puis, si tu as besoin de certains services, nous sommes désormais plus proches pour en discuter.

La Nagate en était presque étourdie de toutes ces paroles, prenant une gorgée d’alcool -peut-être une chose qui la caractérisait en mal ; boire de l’eau n’était pas dans ses habitudes- avant de finalement reposer son attention sur son interlocuteur avec la joie d’en apprendre davantage à ses côtés.

Otmar avait toujours été un homme formidablement social et d’une certaine façon appréciant le contact de son prochain, tant que celui-ci n’était ni de caractère peu aimable, ni vindicatif. Il avait aussi bien fréquenté des milieux tribaux, que raffinés notamment et savait un peu s’adapter, mais il avait aussi toujours sut ce qui pouvait plaire aussi bien aux hommes qu’aux femmes.

Peut-être aussi que ses standards d’êtres séduits, elfes et nagas avaient exigés une certaine discipline et habileté de sa part. Après tout dans le premier cas, les elfes avaient des critères assez élevés et un humain triomphait rarement au niveau de la beauté physique, alors il fallait bien être attirant d’une autre façon. Quant aux nagas purs, eh bien ils n’avaient pas souvent des critères de beauté incluant les sans écailles comme lui. Là aussi la beauté de l’esprit et du caractère devait séduire. Bien évidemment, cela s’assortissait aussi d’une certaine dignité qu’il entretenait, à défaut d’être un modèle de beauté, il avait une bonne attitude de gentilhomme agréable et ouvert d’esprit...

« Haha tu me connais très chère, j’ai beaucoup d’amis proches avec qui j’entretiens des liens de longues durées, que l’aspect charnel de la relation soit resté ou non. Mais pas vraiment d’élu unique, certains philosophes de ma famille politique te diraient même que ce concept est discutable, après tout pourquoi partager son affection avec une seule personne ? Mais bon, je ne suis pas philosophe. » Glissera t-il sinon aimable, avant de reprendre avec réflexion. « Et puis, pour un président les préoccupations ne sont pas les mêmes. Je n’ai pas de dynastie à assurer et certains me reprocheraient si je mettais ma famille en avant, de détourner le débat sur mes soit disant qualité de mari ou père. » C’était cela après tout une république démocratique, tout le monde avait un avis et l’opposition n’était pas la dernière pour vous tacler. Mais bon, entre ça et une monarchie partant possiblement en guerre civile dès que le nouveau roi était d’une légitimité douteuse, le choix était vite fait. Même si avouons le, en Orzian la seule véritable monarchie et encore en dehors de petit pays obscures, c’était Teïder.

« Oui, Lilyneska me contente beaucoup, c’est une jeune enfant admirable qui a eut une vie assez difficile. Je ne saurais pas dire ce qui m’a inspiré à faire ça, probablement un mélange de compassion et l’envie d’avoir quand même une héritière, moi qui n’ait jamais fais d’enfants. » Pas qu’il n’ait jamais après eut des relations avec des dames, même si son amie elle même le savait. Otmar avait plus tendance à fricoter avec des hommes et évidemment, difficile de faire des enfants dans ce cas. Puis il reprit avec amusement.

« Mais ne t’inquiète point, j’aurais toujours une place et du temps pour mes amis comme toi et si tu désires la rencontrer, pourquoi pas ? De toute façon même si je ne t’en avais pas parlé, la presse t’en aurais informé. » Akkaton n’était pas le dernier pays pour ce genre de choses et en Ikhyld il n’était point difficile de s’informer indirectement sur ce qu’il se passait dans l’empire rival à cause de cela. Puis sur ce, il reprit amicalement.

« Et toi ? Toujours peu désireuse de fonder une famille ? Je suppose que ça te ferait perdre une partie du charme et mystère qui peut tant plaire, après rien n’empêche d’avoir des amants. Même si je suppose que peu ont ma qualités. » Ce un peu plaisantin avant de conclure.

« Je suppose que l’on peu me considérer comme hédoniste, toi aussi peut-être ? De toute façon, la vie vaudrait-elle d’être vécue si ce n’était pour être un peu savourée au passage ? Il serait triste que le but de l’existence soit de naître, se reproduire et mourir. » Et un peu inutile aussi, après tout quelle finalité à cela ? Juste survivre par le sang et à la fin ?

Une fois son verre terminé, la Nagate le reposa dans l’optique, sûrement, de le remplir plus tard. Elle abandonna cette idée en cet instant pour se concentrer sur son ami et en écouter les paroles, bien qu’elle était très capable de les écouter sans le regarder fixement. Quoi qu’il en soit, elle se replaça légèrement pour prendre de meilleures aises et répondit à l’empereur tout autant.

Je suis sûre que c’est une jeune femme merveilleuse. La vie difficile est formatrice, en quelques sortes, et il est très bon qu’elle se soit trouvée à tes côtés. En tous cas, il ne me manque que de la rencontrer pour mieux l’appréhender.

Elle était assez motivée à l’idée de rencontrer la fille de son ami. Lui qui était si seul malgré toutes ces amitiés qu’il s’était fait, il avait enfin un peu de famille. Une idée qui réchauffait le coeur de la Nagate, confiante quant à l’avenir de son ami et de sa fille. Quant au sujet d’une famille… Ha ! Voilà le paradoxe, cela la contentait chez les autres mais hors de question pour elle. Elle se permit de rire ironiquement à ce sujet avant d’expliquer.

Certainement pas. D’une part, en effet, cela briserait certains des mes charmes mystérieux qui fonctionnent toujours, et d’autre part j’y vois là comme une faille dans ma forteresse. J’ai des amis proches, comme toi ou autres hauts placés, mais personne n’ira kidnapper quelqu’un de si grande importance pour faire chanter une simple Nagate comme moi. Mais quand il s’agit d’enfants ou de compagnon… C’en devient dangereux. Peut-être un jour, quand je me serai retirée, que ma dynastie sera entre de bonnes mains… Mais il n’est pas question que je fonde une famille. Mes journées sont déjà bien occupées comme ça, haha.

Le lot des personnes de responsabilité, le travail prenant sur le temps familial.

Tu l’as dit, hédoniste. J’ai ce petit plaisir de le distribuer à mes clients et de jouer de l’instrument face à leur regard envieux. Ils me désirent mais ne m’auront jamais, cela fait partie du mystère. Telle une chimère, une créature fantastique à la frontière de la réalité et du mensonge. Quelque chose que l’on croit saisir sans pour autant se l’approprier...

Otmar sirota se permit pendant que son ami parlait, de prendre une gorgée de whisky comme celle-ci s’était mit à boire un peu. Ce n’est pas qu’il buvait souvent, mais après tout c’était une façon d’être solidaire.

« Sans doute, mais il y a vie difficile et vie difficile. Évite de lui en parler, mais disons qu’elle a passée plusieurs années comme esclave de combat dans une arène duchéenne. Ce n’est guère le genre de vie souhaitable pour quiconque. » Et qu’avait-elle appris de cela ? Sans doute à savoir se battre et tuer, mais bon…

« Tu pourrais même lui rendre un service si tu désires te rapprocher d’elle, mais nous en parlerons le moment venu. » Finit-il même par penser, se disant que lui-même essayant d’aider Lilyneska avec ces choses là, le soutien de la lamia ne serait guère un mal. Que du contraire. Sur ce il reprit avec un calme entrain.

« Tu as une vie encore bien longue devant toi je suppose, les nagas vivent longtemps, les elfes encore plus. Il paraît que le ministre des renseignements Ikhyldien a déjà 400 ans passé et est un éternel célibataire. Et pourtant… Il ne manque guère de charme. De toute façon je ne suis pas de ceux pensant qu’il faut se marier pour être heureux. » Ni qu’il y avait qu’une seule façon de faire… Après, trouver son propre chemin était toujours plus difficile que suivre les schémas préétablis par la société.

« Et sinon dis moi, d’autres aspirations actuellement ? En dehors du travail, des liens affectifs ? Des passions que je te connais déjà ou pas ? Ou bien des projets personnels qui ne sont pas forcément tournés vers la prospérité économique ? Après tout aussi chimère qu’on te pense, tu as une vie bien à toi, comme moi. » Finit-il sinon par demandé du ton de la conversation, ce avant de conclure amusé. « Comme tu le sais je fais toujours un peu de violon, je ne suis qu’un amateur éclairé mais personne ne se plaint de ma musique. » Oui, après tout il fallait beaucoup de pratique pour devenir un véritable virtuose, et donc y consacrer un temps qu’il ne voulait pas y consacrer, il y avait tant de choses à faire après tout...

La Nagate acquiesça, elle respectait les mises en garde de son ami et s’engageait à ne pas les enfreindre. Elle pourrait même rendre un service ? Intéressant, c’est son travail de rendre service. Mais il lui en parlerait plus tard, sûrement, alors elle passa à autre chose.

Elle sourit doucement à la mention de Xin et de son célibat éternel et de l’espérance de vie de bien des gens. Elle acquiesça à nouveau.

Oui, le Ministre des Renseignements est un éternel célibataire. Et très charmant, il faut le dire. Étant installée dans la Cité de Jade, j’ai à le rencontrer assez fréquemment. Surtout lors de représentations officielles et bal privés de noblesse. Je ne vaux pas plus qu’un simple citoyen, mais j’ai l’occasion de m’y retrouver par le biais de certains contacts. C’est bon pour la réputation et les affaires...

Elle n’en disait pas plus, gardant sa relation avec l’Elfe sous clef, tout comme ce qu’elle a apprit au sujet de sa situation amoureuse. Telle était la satisfaction de la Nagate ; garder jalousement le secrets des autres pour elle. Elle reprit une gorgée d’alcool avant de poursuivre.

Oh, tu sais, le travail me prend beaucoup de temps. Malgré cela, les maigres activités que je pratique comptent parmi la pratique du shamisen, qui fait partie de mon travail à proprement parler. Sinon, je prend le temps d’entretenir les vraies amitiés, à fumer et à boire.

Elle ria ironiquement à cette mention, son regard venant chercher celui de l’empereur.

Une des raisons parmi lesquelles mon travail est si conséquent, c’est que gérer mes fumeries et représenter ne sont pas mes seules activités. Je ne t’en ai jamais vraiment parlé, mais j’ai développé en Ikhyld un réseau de renseignements indépendant, à mon compte. Cela, avec mon extension d’activité en Akkaton, a tendance à prendre assez de temps et de ressources. Je voulais te parler car, lorsque ma fumerie sera bien installée en Akkaton, je commencerai à étendre mon réseau tout autant. Je sais que ce que j’ai à proposer intéressera l’Empire à long terme, et il est de coutume de mettre en place des accords profitables pour les deux partis. C’est là que je souhaitait en venir.

Elle maintint le regard avec l’homme face à elle, les cartes posées sur la table.

« Entretenir de vieilles amitiés, surtout quand on a beaucoup, est déjà un passe temps prenant à sa façon. » Acquiesça Otmar avec complicité. Combien lui-même s’était-il fait d’amis avec sa période d’ethnologue ? Un ami lui avait même sortit qu’il devait sans doute avoir des amis dans chaque tribu naga du grand désert... Ce qui était loin d’être vrai dans les faits, mais assez drôle comme exagération.

Il se demandait d’ailleurs s’il était apprécié par l’électorat naga ou un bon dirigeant à leurs yeux. Difficile à dire, en plus les votes étaient anonymes pour l’élection impériale et les nagas n’aimaient sans dout pas l’idée d’être dérangés par des sondages… Néanmoins, la pensée aurait été plutôt agréable.

« Ah tu viens donc faire ta marchande d’information aussi ? Soit, j’avouerai que je m’en doutais, de toute façon nous avons déjà les journalistes pour exposer au monde entier tout ce qu’ils débusquent, ce n’est pas comme si des espions plus discrets allaient me gêner. » La presse libre et indépendante… Une belle invention sans doute, mais Otmar comprenaient les empereurs qui râlaient à son sujet, pas qu’ils soutenaient pour autant leurs propos. Après tout c’était cela aussi la démocratie, avoir des gens vous surveillant et prêt à informer le peuple de ce qu’ils pouvaient apprendre.

Quoiqu’il en soit il ne semblait pas trop dérangé par l’idée, mais ne pas avoir non plus de fulgurance à ce sujet, sans doute que les renseignements d’états ce n’était pas trop son affaire, tout juste glisserait-il aimable. « Je te mentionnerai sans doute au ministère des renseignements si tu désires quelques clients du genre. » Mais visiblement ce n’était point sa passion. Sur ce il reprit aimablement.

« Essaye par contre de te faire discrète concernant tes affaires louches, même si je sais que tu es modérée. Si la population l’apprend et n’apprécie pas, aucun empereur par ici ne sauvera ton commerce. Ici ce n’est pas Ikhyld, il ne suffit pas juste du soutient tacite de quelques têtes dirigeantes, pour peu qu'un journaliste enquête. En plus, tu ne peux pas être sûr que le prochain empereur tolérera cela... » Après tout rien que le fait qu’Otmar accepte de fermer les yeux tant que c’était très raisonnable pourrait être prit pour de la corruption, alors qu’il ne toucherait rien. Cela et comme la tête dirigeante changeait tous les dix ans...

La nagate acuiesça doucement. Il est vrai que sa profession n’était pas forcément des plus respectables et elle ne souhaitait pas davantage s’attarder sur le sujet. Elle sembla d’accord avec son ami, ne l’embêtant pas davantage avec ça.

Oui, je comprend parfaitement. Ca grouille, même si en Ikhyld j’ai une certaine immunité et monopole… Tu as raison, en Akkaton ce ne sera pas pareil, comme chaque pays différent d’Ikhyld d’ailleurs. Je laisserai ton ministère me contacter, s’il faut faire quelque chose de mon côté je le ferai. Je ne voudrais pas risquer mes affaires pour un simple malentendu à l’étranger, ce serait dommage de ruiner ainsi ma réputation et mes talents. J’irai progressivement, à tâtons, de manière à ne pas se faire prendre de court par les concurrents et autres contrevenants. Il va falloir jouer des coudes, c’est sûr.

Elle resta pensive quelques instants, vidant le reste de son verre d’un trait. Elle s’installa plus nonchallemment dans le fond de ses coussins, cherchant un certain confort, presque s’allongeant sur le flanc sans quitter l’empereur des yeux.

Je suis douée pour diriger une dynastie commerciale mais certainement pas pour la politique et les gouvernements. Akkaton est un pays que j’ai du mal à comprendre, entre cette instabilité d’un dirigeant à l’autre, cette histoire de journalistes… Il est vrai que j’ai la vie plus facile en Ikhyld, la tâche me semble ardue. Peut-être que je devrais simplement tenir une fumerie sans développer plus que ça mon réseau d’informations, après tout il n’aura lieu que s’il y a des demandeurs. En attendant, je pense établir quelques routes commerciales entre mes boutiques, afin de générer de l’argent et de fournir mes boutiques de produits étrangers. Ca me coûte pour le moment, alors ça pourrait être une bonne stratégie. Y as-t-il quelconques obscures règles ou terrain glissant à s’avancer dans de telles entreprises ?

Elle soupira doucement, cependant sans quitter son sourire sincère.

Otmar doutait pour le monopole au niveau d'une grande cité, parce que sinon son amie serait beaucoup plus riche qu’actuellement, néanmoins il était content qu’elle ait compris le message. Faire preuve de prudence et ne pas trop tremper dans les affaires louches en Akkaton, au risque sinon de se retrouver la cible d’un politicien en recherche d’une popularité facile.

Cela et puis certes il l’aimait bien, mais comme il le soulignait il ne resterait pas au pouvoir éternellement, son mandat durerait dix ans et guère plus. Et même dans le cas où il serait encore au pouvoir, c’était une assemblée de citoyens majoritairement tirés au sort et non lui qui avait le dernier mots sur d’éventuelles décisions. Enfin bon, de toute façon il lui faisait confiance pour être assez prudente et ne pas se mettre trop en danger, ce ne serait pas non plus très difficile...

Quoiqu’il en soit, il but une autre gorgée de whisky, un alcool fort, donc il évitait évidemment de le boire d’une traite surtout que même si ce n’était pas la première fois qu’il en buvait, il n’était pas non plus le plus solide des gaillards. Puis il reprit avec réflexion.

« Il y a moyen de développer un réseau d’informations je suppose, avec tes clients par exemple, des amis nagas  ou des gens qui te devraient des services, enfin ce n’est pas moi le propriétaire de ta fumerie, mais on n’a pas forcément besoin de jouer sur les délinquants pour avoir des informateurs. » Surtout qu’il ne comprenait pas l’intérêt de se baser essentiellement sur eux car c’était des gens à problèmes, puis il reprit aux dernières paroles de son amie.

« Tu veux acheter une plantation locale pour ne pas avoir à importer ton pavot depuis Ikhyld ? C’est faisable. Avec l’irrigation, tirer des récoltes de ce sable à l’origine stérile n’est guère impossible. Cela te coûtera juste de l’argent. Sinon pour le commerce entre Ikhyld et Akkaton, ma foi il n’y a pas de risques particuliers… Après je suppose que par bateaux on peut faire passer quelques produits de nature mystérieuse en plus de ceux prévus à l’origine, en s’y prenant bien. » Il sous entendait que si elle voulait faire un peu de contrebande c’était envisageable, tant que c’était modéré ce serait difficile à remarquer et surtout ça éviterait d’attirer trop l’attention.

« J’avais entendu dire que certains seraient prêts à payer chers pour des artefacts magiques d’Ikhyld par exemple, mais cela leur coûte souvent cher d’obtenir ces derniers car il faut les importer depuis Ikhyld et l’acheter à prix d’or. » Une piste qu’elle pouvait exploiter en somme, si cela l’intéressait...

Son ami avait raison sur le fait qu’il fallait rester prudent et ne pas agir comme en Ikhyld. Cela modifiait certains plans dans l’esprit de la Nagate et en émergea d’autres plus judicieux dans son esprit. De quoi peaufiner son approche et mieux s’adapter au pays, car les moeurs et coutumes ne sont pas les mêmes. A cela, elle étira un sourire bienveillant et plein de gratitude vers l’homme qui lui donne ces si sages conseils.

J’ai beau être plus âgée, tes conseils me sont toujours gratifiants. Emplis de sagesse et de justesse, tu as raison sur plusieurs points. Je vais modifier mon approche avec Akkaton, abandonner cette histoire de mafias, je maîtrise mieux celles d’Ikhyld de toutes manières. Je pense bien simplement rallier des yeux et des oreilles, aussi civiles soit-elles, ce serait le plus simple. Quant aux plantations, ce sera certes coûteux mais ce sera bon pour mon image et pour le commerce, sur le long terme. Enfin, ça c’est une étude à effectuer au long terme, je n’y suis pas.

Elle tendit l’oreille par la suite concernant la contrebande. Son sourire se transforma de la gratitude à la malice, adressant un regard des plus enjoleurs à son interlocuteur.

En voilà une merveilleuse idée… A étudier, encore une fois, mais cela semble intéressant. J’imagine que certains contacts m’apprendront à gérer ce genre d’échanges, et si je touche le bon filon en rendant service aux populations ayant besoin de produits rares, c’est tout bénéfique pour moi.

Elle se releva de sa posture allongée pour glisser les mains dans sa chevelure, l’air désinvolte, avant de se servir de sa pipe à opium, de gestes légers et presque rythmés d’une musique inaudible.

C’est un réel plaisir de partager cet instant avec toi, Otmar. Si bien que me voilà déjà éméchée à me préparer à fumer. A moins que cela ne te dérange, tu me connais, j’ai la nature à me laisser aller en fin de soirée.

La contrebande n’était guère légale en Akkaton car l’état tenait à taxer tout produit vendu à ses citoyens. Mais d’un autre côté, autoriser implicitement un peu de celle-ci ne semblait pas trop dangereux à Otmar.

Après tout l’empire faisait deux continents et un peu plus en taille, il était l’une des rares nations technologistes du monde de plus et la plupart de ses citoyens consommaient donc des produits venant de l’empire ou fabriqués dans une autre province. Un pays aussi vaste n’était en vérité que peu sensible à la contrebande, elle ne pouvait qu’être élitiste et serait sans doute aisément ignorée dans la masse territoriale Akkatonienne.

C’est pour cela aussi qu’il conseillait plutôt de la contrebande de produits rares et chers, c’était plus discret et ça trouverait sans doute plus aisément preneur. L’empereur quant à lui ne s’inquiétait donc pas de ce genre de magouilles, c’était bien moins dangereux que d’autres.

« Diversifier tes réseaux est une bonne idée je suppose, de plus dans cette province désertique et surtout dans cette forteresse du désert tu auras sans doute moyen de te lier avec certains clans du désert nagas ou non assez ouverts sur l’extérieur. » Puis il reprit calmement.

« Il est difficile sauf à certains endroits de trouver des enchanteurs ou biens magiques dans l’empire. Et Ikhyld est connut comme un grand producteur de ces derniers. Rien qu’en achetant là bas, cher certes, mais raisonnablement. Et en revendant ici, il y a moyen de faire un bénéfice grâce aux curieux de toutes sortes ou ceux attirés par l’exotisme d’Ikhyld. Je suppose que tu peux écouler le stock en jouant de quelconques amitiés avec certains habitants de Nepthys ou clans nomades du désert. »

Puis sur ce, ils avaient visiblement assez discutés de sujets sérieux, pour le moment du moins car son amie aborda un autre thème.

« Cela ne te déranges point si je partage un peu d’opium avec toi ? Je ne suis pas un habitué, mais c’est loin d’être ma première fois comme tu le sais. » Glissera t-il alors avec un léger amusement, ce avant de glisser avec une dose de nostalgie.

« Je me rappelle de notre première rencontre. Toi aussi je suppose ? L’opium, aidé de belles performances artistiques, avaient rendus l’expérience inoubliable… Et tu n’as rien perdu de ton talent, au contraire. » Des compliments et une petite ouverture si elle voulait surenchérir dessus, en somme.

Les choses commençaient à devenir plus légères, et les sujets barbants rapidement balayés. Alors que Kheizhidji s’empara de sa pipe à opium, elle leva un regard amusé sur l’Empereur, souriant tendrement en sa direction. Il souhaitait partager de l’opium avec elle, et en temps normal elle aurait proposé à quelconque invité de prêter une pipe prévue à cet effet et de puiser dans des réserves d’opium qui l’étaient tout autant. Mais ce soir, et surtout cet invité, étaient uniques, et sans même se poser la question, Kheizhidji se déplaça de son imposante présence pour s’installer aux côtés de l’empereur, dans une proximité réservée aux amis proches, tout en transportant sa pipe à elle et son opium. Tout en préparant l’opium dans sa pipe, elle lui adressa de douces paroles.

Eh bien, je vois que ça t’as manqué. Ce serait avec plaisir, j’allume ça et on se tire quelques bouffées chacun.

Aussitôt dit, aussitôt fait. De ses gestes légers en cette fin de soirée, elle alluma sa pipe, en tira quelques bouffées pour l’initialiser correctement et profiter des premiers effets, avant de la donner volontiers à son partenaire. C’est alors qu’il mentionna leur rencontre, ce à quoi Kehizhidji revit ces délicieux souvenirs tout en répondant, le regard planté au plafond.

Oh que oui, je m’en souviens. Inoubliable, comme tu dis.

Elle ria de la manière des plus simples possibles, les souvenirs heureux la désinhibant davantage. Elle se tourna ensuite vers l’empereur, se permettant de glisser un bras derrière ses épaules afin de réduire la distance qui les séparaient et tendrement caresser sa joue.

Ah oui ? J’imagine que l’âge et l’expérience rendent mes performances plus vivantes, empreintes de vécu et de choses à raconter… Peut-être que, lorsque l’opium nous sera monté à la tête, il serait l’occasion de ratrapper certaines choses parmi ce temps perdu ? Ici tu es à l’abri de tous regards indiscrets et d’ennuis politiques, je t’en donne ma parole, alors… Tout ce qui pourrait te rappeler de bons souvenirs, profites en que je sois là à tes côtés.

Elle était flattée, pour sûr, et faisait montre d'une admiration sans failles pour cet homme qu'elle a aimé autrefois. Ils partageaient encore des choses, et loin de l'idée de Kheizhidji que tout soit "comme avant", simplement profiter de ces moments de complicité uniques et merveilleux, à l'instar de leur première rencontre.

« En effet je n’ai pas souvent l’occasion de partager un peu d’opium avec une amie ces temps-ci. » Glissa Otmar avec amusement, après tout il avait pas mal prit cette habitude par le passé au sein de quelques tribus du désert ou partager ce genre de choses était un signe d’amitié et de respect, ou du fait que les gens n’avaient pas une seule pipe pour chacun aussi. Quoiqu’il en soit il ne fut pas étonné que son amie accepte, c’était un signe de leur affection mutuelle. Après, il aurait aussi accepté sans doute d’utiliser son propre matériel, mais la symbolique aurait disons était différente.

« Je suis sûr que tu dis cela à tous les amis qui viennent te voir et se montrent un peu nostalgiques. » Glissa t-il sinon avec un léger humour quant au fait qu’elle se souvenait de leur première rencontre. Puis, son amie sans doute détendue par l’opium et d’humeur affectueuse mit son bras derrière son épaule, Otmar la laissa faire évidemment, la proximité n’était pas chose à le gêner, de plus il préférait quand c’était les autres qui prenaient cette initiative que lui.

Et visiblement celle-ci voulait partager certaines choses qu’il avait pratiqué avant avec lui. Eh bien, Otmar pensa sur l’instant qu’au fait que si certains de ses anciens amies et amis avaient arrêtés ça avec lui, d’autres continuaient encore en effet, il fallait croire qu’il avait toujours son charme. Il reprit quoiqu’il en soit avec amusement, puis une dose d’affection.

« Mes frasques n’intéressent que les journalistes faisant dans les ragots. Humour à part, pourquoi pas ? Mais nous avons encore un peu de temps, tu n’en es pas à ta première bouffée d’opium après tout. » Conclura t-il de bonne humeur en prenant une bouffée d’opium, avant de demander avec amusement.

« Je ne t’ai jamais demandé quand j'y pense, mais te rappelles tu de la première fois où tu en as fumé ? Je suppose que ça devait être amusant. Pour ma part ça devait être au sein d’une tribu naga… Je crois qu’il n’y avait pas que l’opium que j’ai consommé ce jour là, un ancien de la tribu avait voulut me montrer certaines expériences spirituelles. » Après tout pas mal de petits cultes, souvent tribaux utilisaient ce genre de substance, il était facile après tout de se mettre à penser que ça pouvait servir à des buts spirituels...

La Nagate ne quitta plus le visage de l’empereur des yeux. Elle lui prêta volontiers sa pipe, l’observant tirer dessus avec une certaine satisfaction, un large sourire sur les lèvres, avant de finalement la reprendre et la laisser en suspens un temps. Elle aurait tout le temps de renforcer les effets de la drogue avec une autre bouffée, et se contenta donc pour l’heure d’écouter son partenaire et de lui répondre. Elle haussa d’un sourcil avant de rapidement secouer la tête.

Noooon, non détrompes toi. Déjà, peu de mes amis sont nostalgiques car les moments que je leur partage ne sont jamais aussi intenses que ceux que j’ai vécu avec toi. Et puis, tu es unique. Alors, je pense bien ce que j’ai dit, même si je suis douée pour jouer des mots, les miens sont nus pour ton oreille.

Elle reposa ensuite sa tête sur son épaule, tranquillement allongée contre lui et accrochée à son cou, fermant les yeux un temps comme pour se reposer. Elle le laissa parler, l’écoutant en riant doucement, détendue.

Ca les journalistes… Une invention étrange typiquement Akkatonienne. Nous avons tout notre temps, en effet ! Hihi. Laissons le temps à la fumée de faire effet.

Elle releva son regard vers lui, se détachant un peu pour reprendre une position convenable à ses côtés, son lourd et imposant corps se mouvant pour prendre une meilleure position. Elle garda néanmoins un bras autour des épaules de son ami, glissant sa main libre dans sa propre chevelure, pensive.

Mhh… Ma première bouffée… C’était chez un ami, il avait du matériel à lui et achetait de l’opium à usage personnel. Enfin, ami à l’époque, ce n’était guère les grandes amitiés. Mais je le respectait à l’époque, je pense que sans lui je ne serait pas celle que je suis aujourd’hui. Même si ce n’était pas une personne spécifiquement fréquentable ni qui a donné de soi pour moi. Mais la fréquenter m’a permis de mettre un pied dans le monde de plaisir commercialisé. Et puis, pour tout te dire, cette première bouffée était ignoble.

Elle ria à nouveau en s’imaginant à nouveau la scène, comme quoi les débuts de carrière ne sont pas forcément marquants.

Otmar après sa première bouffée sembla se détendre un peu mais pas encore être vraiment dans les vapes, preuve sans doute que lui aussi n’était pas à sa première pipe d’opium, mais aussi qu’il devait avoir un peu d’endurance. Dans tous les cas cela semblait lui faire un peu de bien, même si en général il n’avait pas l’air spécialement tendu ou stressé, il faut bien le préciser. Il glissera d'ailleurs avec affection.

« Unique ? Sans doute, mais sache que c’est réciproque, je n’ai pas croisé deux dames comme toi. » Après il aurait pu sans doute sortir au cours de cette réponse aimable que tout le monde était unique, mais ce n’était pas dans le thème et ça aurait rendu ses paroles moins flatteuses. Après tout, pendant ce genre de discussion il fallait souvent jouer sur les mots et dire ce qui était plaisant.

Puis elle qu’elle posait sa tête sur son épaule, il offrit lui aussi son bras à la naga comme pour la soutenir un peu, ce avant de glissé avec amusement à ses paroles.

« C’est indéniablement plus agréable comme expérience que fumer du tabac. Je ne sais pas si tu as essayé, mais sauf si tu insistes, c’est juste agressif pour tes poumons ou ta gorge. » Il avait sans doute déjà fumé quelques cigarettes après tout, mais bon ça ne devait pas être une habitude le concernant.

Puis la laissant se mouvoir à ses côtés, il écouta avec curiosité son amie raconter sa première expérience de l’opium, intéressant… Dans le sens que ça paraissait presque banal, comme beaucoup de choses dans la vie en faîte. Banal, mais ça avait finalement eut de grande répercussions car cela avait donné des idées à la naga, prouvant bien qu’en gérénal notre vie est tout simplement forgée par nos expériences.

« Les premières expériences sont toujours compliquées n’est-ce pas ? Ce que ce soit dans les domaines plaisants ou laborieux, il faut croire qu’on ne commence jamais doué… Qui pourrait deviner que tu étais une novice autre fois ? Comme moi, en politique par exemple, maintenant si quelqu’un nous regarde, il se dira d’instinct que nous sommes comme ça depuis toujours. » Un fait intéressant, puis il conclut amusé.

« Dis moi, tu apprécies les étendues de sables aux allures infinies qui s’étendent autour de la ville ? Il y a j’ai l’impression une certaine beauté dans cela, peut-être que ça émeut une partie de toi aussi ? Pour ma part, cela me rappelle beaucoup de souvenirs. » Sans doute parlait-il de sa part naga comme elle était à moitié de cette race.

C’est ainsi calée contre son ami qu’elle reprit la conversation, écoutant l’empereur d’une oreille attentive et bienveillante. Elle apprécia les compliments de son partenaire, chose qu’elle avait toujours apprécié chez lui, de se sentir complimentée et appréciée. Certes, il y avait bien des gens qui bavaient sur sa beauté, mais cela ne l’atteignait pas. Vient un moment où il valait mieux en faire fi de ce genre de choses pour ne pas se sentir impliquée et mieux supporter sa vie de face publique. Alors là, passer un moment avec son ami en toute intimité et où elle recevait des compliments sincères et justes, c’était merveilleux.

Oui, j’imagine, je ne pense pas que je m’y essaierai vu ce que tu me décris… Les Akkatoniens ont décidément d’étranges coutumes.

Elle se permit de le glisser rapidement après la mention de la cigarette avant de répondre concernant la vision qu'ont les gens des célébrités.

Ah, ça, tu as bien raison… Il est difficile de s’imaginer ce que l’on a pas vu. C’est bien là une pensée commune, d’admirer les compétences de quelqu’un sans même se poser une seule fois la question d’où ça peut bien lui venir. Inconsciemment, on s’impose le fait que c’est inné, alors que c’est faux, haha. Beaucoup de travail, et d’expérience...

Elle reprit une bouffée après en avoir proposée une autre à son ami, tranquillement contre lui.

Le désert… Ce n’est pas la première fois que j’y met les pieds, je suis menée régulièrement à me déplacer dans tout le continent. Je dois dire que la première fois que j’ai rencontré le désert… Et même maintenant, c’est une sensation étrange, mais agréable. Je ne pense pas pouvoir me passer de la vue, même si je n’y suis pas née, il faut croire que mon côté Naga a une certaine nostalgie des terres sablonneuses.

Elle ria doucement à cela, avouant à l’occasion qu’elle avait une certaine nostalgie sans pour autant l’avoir connu.

« Chaque peuple a ses excentricités n’est-ce pas ? » Glissa Otmar avec amusement à ce sujet, sans pour autant préciser plus en détail, après tout tout le monde ne faisait pas attention à ce genre de choses, notamment là où ils vivent depuis toujours. Otmar sans doute devait par son ancienne profession, ethnologue, y être plus réceptif en vérité, mais aussi avoir été confronté de nombreuses à des peuplades diverses et variées dans tous les sens du terme.

« La compétence est comme une maison, il faut d’abord bâtir les fondations, puis ensuite les murs, le toits et peaufiner le reste. Il suffit de voir la sublime demeure métaphorique qu’est l'étendue de mes connaissances, elle doit avoir été bâtit par la patience et mains années de labeur. » Glissa t-il d’ailleurs avec humour et une exagération comique pour faire une métaphorique quand au fait que beaucoup et compétences que maîtrisent chacun viennent davantage de l’acquis que de l’innée. Otmar ne croyait après tout que peu au fait que quelqu’un se révélerait immédiatement extrêmement doué dans un domaine, comme si c’était presque instinctif, sauf peut-être des choses basiques et simples.

Puis au sujet du désert, il reprit.

« La nuit est particulièrement belle au sein du grand désert, la manière dont les dunes et reliefs arides sont mit en valeur par la pénombre. J’espère que tu as déjà pu contempler ce spectacle. » Avant de reprendre amusé. « Je ne sais pas toi sinon, mais je ne pense pas tenir des heures à ce rythme. Peut-être est-ce l'âge ou bien le fait que je n'ai plus trop l'habitude... » Ce alors qu'il finissait de prendre une bouffée d'opium, en effet celui-ci commençait à faire doucement effet. Il conclut alors avec douce taquinerie. « Sauf si toi aussi tu commence à te sentir divaguée ? »

La Nagate resta contre l’empereur qu’elle appréciait tant, gardant une certaine proximité dans pour autant y mettre tout son poids -ce qui serait bien dommage de casser l’empereur en deux-. Elle leva le regard au plafond en écoutant les paroles de son ami, pensive, alors que ses pensées petit à petit embrumées tâchent de modéliser ses paroles pour mieux les comprendre.

Tu as bien raison, les mots pour expliquer le monde ne te manquent pas. Il est vrai que commencer sans les bases mène très souvent à un effondrement, après tout l’expérience ne fait que s’entasser petit à petit pour se reposer sur ses propres fondations…
Enfin, comme tu dis, je ne répèterai pas, je n’ai plus trop la tête à ça...

Elle ria doucement, comme elle savait rire de manière soutenue et sincère, reposant sa tête contre l’épaule de l’homme. Elle reprit sa pipe pour tirer dessus à nouveau avant de la poser à côté, expirant la fumée avec un panache propre à elle.

Voudrais-tu que l’on perde son regard dans les dunes nocturnes ? A moins que tu ne sois si fatigué… Enfin, tu as raison, je vais m’arrêter là pour le moment, lentement mais sûrement vient le moment où la lourdeur de la réalité est aussi légère qu’une plume… En tous cas, c’est une soirée merveilleuse que je passe.

Elle n’en ajouta pas plus, sûrement car cela devenait inutile. Elle sentait ses sens s'alourdir doucement, ayant progressivement envie de s'assoupir doucement sur l'épaule de son partenaire, bien qu'encore capable de tenir la discussion un temps. Elle se sentait juste bien, son esprit fulgurant enrayé par les effets de la drogue, les mots ne devinrent plus suffisants pour transmettre les émotions Nagate, passant un instant des plus agréables avec son ami depuis si longtemps éloigné.

Otmar était assez solide pour son âge, mais il est vrai qu’une lamia pesait son poids, la queue en écaille qu’elle avait héritée de son parent naga faisait sans doute qu’il serait compliqué pour lui par exemple de tenter de la porter dans ses bras. Même s’il en avait eut deux mécaniques et pas un seul. Un bras qui quand il y pensait, depuis le temps, était devenu totalement une partie de lui-même.

« Moi non plus, moi non plus... » Glissait-il sinon songeur concernant le fait qu’ils n’avaient plus trop la tête à se plonger dans des réflexions complexes. L’opium, il était arrivé à ne jamais être accroc, mais en même temps c’est peut-être parce qu’il n’en consommait pas non plus très fréquemment, sinon il aurait sans doute une meilleure résistance à la chose.

Comme l’alcool, paraît-il qu’on tenait mieux la bouteille en buvant, ou la cigarette… Quoique la cigarette ne l’avait jamais intéressé spécialement, il avait par contre dû tester au cours de sa jeunesse certaines drogues tribales diverses, dont chamaniques, ça avait été plutôt particulier.

« Hum, je ne sais pas, pas ce soir je dirais. Je n’ai pas envie de me frotter aux vents froids et nocturne du désert sur l’instant. Toi non plus je suppose ? Et je ne sais même pas si j’ai l’énergie pour cela. En vérité... » Il prit une dernière bouffée, avant de glisser avec amusement. « Je pense que nous pourrions nous retirer dans, chacun de notre côté ou ta chambre si cela te vas. » La proposition était claire, mais sous entendait aussi qu’elle pourrait refuser, après tout il était plus âgé qu’à l’époque, même si encore charmant. Donc il pourrait comprendre.