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Orzian, engrenages et arcanes
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Orzian, engrenages et arcanes


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Déjà, la nuit. [libre]
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MessageSujet: Déjà, la nuit. [libre] Déjà, la nuit. [libre] EmptyDim 17 Nov - 1:13
Dans une fumerie de Nephtys, automne 2000

Déjà, la nuit. Hagarde, bleutée, brûlante encore. À demi rongée des songes et des poussières de la ville, encore tout envahie, secouée, malmenée, presque. On criait dans les ruelles, on s’apostrophait au seuil du jour mort, déjà la nuit, déjà le repos.

Le ciel bleu encore s’abîmait dans le noir, sous les yeux de Sahar. L’azur tournait à l’outremer, au lapis-lazuli, comme la voûte de ces tombeaux antiques qu’on recouvrait du précieux pigment, piqueté d’or et d’électrum pour feindre l’éclat de la voûte céleste et du bienheureux séjour des ancêtres. Enchâssé par le cadre rigide de la colonnade, le voile vaporeux du firmament ressemblait à quelque draperie d’une cotonnade poudreuse et veloutée ; l’air très pur semblait immobile, mais on y percevait des vibrations, des murmures, un scintillement fiévreux des étoiles qui étincelaient comme une myriade de diamants en poussière, jetés comme une écharpe à travers le paysage. Les lampes bariolées, dansantes et fugaces derrières leurs verres colorés, jetaient parfois de brefs éclats et faisaient un halo de lueurs mêlées qui se reflétaient avec grâce sur les eaux du grand bassin central, près duquel les dormeurs et les clients reposaient comme de grands navires de soie et de brocards étendus sur des lits de bois ciselé. Les volutes, les vapeurs, les encens et les drogues s’élevaient en brouillards, en fumerolles, en arabesques grises et blanches et faisaient comme une brume fragile à la surface des bassins. Tout était immobile.

Sahar regardait le ciel, Sahar s’y noyait. Les yeux grands ouverts, repus et extasiés, et les sens alourdis ; le monde s’était soudain comme renversé, et elle éprouvait un vertige sans pareil, comme étendue face à un gouffre, comme à un pas de tomber, de sombrer, de chuter dans l’infini qui s’ouvrait devant elle. Boire l’azur et se repaître de son ombre.

Les feux rampaient sur les dalles brillantes. Des ombres longues, des reflets infinis. Miroitements d’or, de sombres joyaux, d’argent pur et de fumée. Les flammèches immobiles ondoyaient parfois, et soudain tout s’animait d’éclats vifs quand la lueur douce accrochait les ornements et les bijoux, les broderies et les soieries. Indiscrète, parfois, la lumière révélait quelques détails, se glissait à travers les plis, jouait de transparence dans les voiles qui cherchaient à l’occulter. Elle s’infiltrait, rasante, creusait l’ombre d’un pan du caftan, traversait la légèreté d’un col de gaze et de broderies, faisait chatoyer les perles et se glissait dans l’onde vive d’une chevelure ruisselante sous le long écoulement d’un voile couleur de sable. Un naga déploya les anneaux de sa silhouette qui oscilla comme un pendule, et ses écailles luisantes se reflétèrent sur un pan de carrelage lisse comme un miroir. Le sifflement du cuir de sa peau fit comme un son très doux alors qu'il s'éloignait, et on entendit le froissement d'un rideau de perles soulevé.

Silence. Déjà, l’ombre. Le ciel n’était jamais vraiment noir, jamais vraiment vide, toujours habité. Toujours vivant. Si pur, si grand...

Encore le vertige. Sahar écoutait le silence, les respirations et le murmure des conversations. C’était à se perdre, un peu, dans les fulgurances des sensations. Du coin de l’œil, elle voyait l’eau miroiter sans bruit, lisse comme un miroir, à peine troublé par quelques remous. Quelqu’un passa, indistinct. Le vent de son vêtement fit un pli sur le bassin, qui se propagea, se répercuta, troubla un instant sa surface, plissée comme un rideau dans la brise. Avec peine, Sahar se redressa. La résine brûlait encore un peu dans le narguilé, l’environnant de quelques fumerolles dissipées par ses mouvements lents, pris dans l’ampleur de ses vêtements. Voiles, remous, replis. Noir et or, et blanc en dedans, et ombre ici et là. Ses mains trempées d'ocre et de henné tâtonnèrent, cherchèrent le manche du luth couché près d’elle, puis coururent sur ses cordes, d’abord errantes et hésitantes, comme si elles prenaient leur temps pour se poser.

Un, deux trois.

Le pas du chat noir, et l’ombre de la nuit. Le bleu, l’outremer, ses accents profonds, la pureté du ciel dont on pouvait presque saisir et mesurer la profondeur. Quelques notes résonnèrent, s’envolèrent, résidus d’immensité. Âpres, profondes, chaudes. Des évocations de désert et d’aridité, avec au-dedans la saveur d’un chant sourd, et la douceur du miel.

Sahar s'accordait rarement du repos. C'était presque un miracle de la voir s'alanguir ainsi dans la solitude fugace de ce soir où elle s'attardait entre les murs du fumoir, après avoir conclus quelques affaires rondement plaisamment menées autour d'un plateau de vins fins et un narguilé d'herbe parfumée. Alors, elle en profitait pleinement, toute sereine, toute paisible, en écoutant sans bruit les gens aller et venir autour d'elle dans l'ombre ouatée du patio. L'écho d'une présence persistante, quelque part hors de son champ de vision, promena son murmure à peine perceptible et elle sourit.

- Eh bien, fit-elle à celui ou celle qu'elle sentait s'attarder là, sans oser peut-être dire un mot. Qui que tu sois, présente-toi. Ne reste donc pas là comme un fantôme. Approche ! Que me veux-tu ?
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