Encore une journée de passée, encore une journée de perdue. Depuis une semaine, Lydie zonait dans la même taverne et depuis une semaine, elle se nourrissait essentiellement de liquide dont la teneur en alcool variée au cours de la journée. Une seule constante, son état d’ébriété. Le tavernier la connaissait car elle était une cliente plus que régulière. Il s’était méfié au début de cette jeune femme blonde en armure au regard froid et méchant qui lui avait réclamé à boire et avait ingurgité plus d’alcool que bien des hommes. Il s’était encore plus inquiété en la voyant prendre part aux duels stupides de forces et lorsqu’elle avait commencé quelque bagarre. Mais finalement, il avait accepté le fait qu’elle n’était pas différente de ses ivrognes habituels. A la différence qu’elle payait content et qu’elle était polie. Pas sympathique mais polie.

Le deuxième soir après son retour, elle avait mis un client de passage à la porte sous le prétexte qu’il était à sa place et qu’il ne voulait pas lui céder. Tu vas me faire perdre des clients Lydie si tu te mets à faire ça. Tu n’as pas besoin d’autres clients que tes ivrognes habituels et moi. Je te fais bien ton chiffre. Oui, mais tu n’es pas toujours là. Il avait éclaté seul de rire, Lydie ne l’ayant pas accompagné. De sa vie, il ne l’avait jamais entendu rire. Enfin, si bien sûr, mais ce n’était pas les rire de joie, mais plutôt des rire mauvais, de genre de celui qu’on fait au moment de casser un bras. C’était en cette occasion qu’il avait entendu ce rire sortir de la gorge de Lydie pour la première.

Ce soir-là, la Chasseresse était dans un état encore plus pitoyable que d’habitude. Un bleu de la veille marquait sa pommette. La jeune femme n’était pas très résistante mais même saoul elle avait une agilité certaine pour éviter les coups et les distribuer. Il était rare qu’elle s’en prenne un. Elle avait failli déclencher une bagarre car pendant qu’elle rejoignait sa place, un homme avait brutalement reculé sa chaise ce qui avait reversé de la bière du verre de la blonde. L’homme avait commencé à râler avant de reconnaitre la femme. Son discours s’était transformé en plates excuses, puis après un verre écrasé sur la tête, ces compagnons avaient tenu à lui offrir une consommation chacun. Lydie était donc allée s’installait à sa table dans le coin de la salle commune non sans moquer de peu de rater sa chaise. Après ses verres gratuits, elle avait commencé à somnoler sur la table, la tête dans ses bras, comme cela lui arriver souvent. Le tavernier avait pris l’habitude de ne plus l’amener dans sa chambre et de lui offrir la nuit dans ces cas-là. Ce n’était pas une perte pour lui.

Ses talents de chasseuse étaient pourtant indubitables. Même dans cet état et même endormant ivre morte, ces réflexes et son instinct restaient aussi aiguisés que sa hache. Il y a quelque temps, des gredins avait eu l’envie de lui faire payer les fractures et les coups qu’elle leur avait infligés. Alors qu’elle semblait dormir, elle s’était relevée au premier contact et avait distribué des bonbons et des châtaignes à ses agresseurs et à une partie des clients alentours. De même quand on essayait de lui voler son équipement. Elle restait éveillée même endormie, disaient les gens. Et c’était ce qui les terrifiait le plus.

Cela faisait presque plusieurs mois que la mission du demi-dragon avait débutée. D’apparence anodine, ou, tout du moins, plutôt banale compte tenu de son métier, cette dernière s’était révélée bien plus ardue une fois les détails dévoilés. L’empereur Draenor semblait nourrir de précieux espoirs dans le jeune homme, ou il était inconscient, tout simplement. Toutefois, Lähm gardait en tête le contexte actuel. Les noyaux de rébellions contre l’empire, qu’ils soient une menace interne ou externe, s’étaient drastiquement développés ces derniers mois, et il ne fallait pas oublier que l’unité Prétoris, bien que redoutablement efficace, était particulièrement limitée en nombre. Aussi, au lieu d’allier trois agents pour une même mission, ces derniers étaient obligés de jouer la carte des loups solitaires, prenant ainsi plus de risques, et surtout plus de temps, à accomplir leur devoir.

Et, dans le cas de Lähm, c’était encore plus particulier. Une cellule de l’esprit s’était formée quelque part sur le continent, et était une menace directe pour l’empire. Jusque-là, rien d’impossible, sauf que la neutraliser exigeait de la part du Prétoris d’également abattre un dragon, ce qui n’était, même pour un membre de l’unité d’élite, pas une mince affaire. Il avait donc passé quelques mois en compagnie de son père, dragon de son état, pour qu’il lui enseigne les meilleures manières de se débarrasser de ses semblables. Il en avait également profité pour fabriquer une petite série de balles anti-magie à haute pénétration, pour palier à l’éventualité que les dignitaires qu’il pourchassait soit des mages. Certes, l’entreprise était folle, mais ce n’était pas le problème de Lähm. Il avait ses ordres, ses consignes, et carte blanche, si ce n’était pour l’utilisation d’autres membres de son unité.

Grâce à ses informateurs dissimulés dans tout le royaume, le jeune dragon découvrit rapidement qu’un petit comité comprenant tous les commandants de la cellule devait se réunir dans les montagnes d’Eïrn. Ces réunions trimestrielles allaient lui permettre de prévoir et d’intervenir plus facilement. Un problème subsistait toutefois, et un problème de taille. Personne n’avait jamais réussi à trouver la vallée dans laquelle le groupuscule se réunissait. Malgré sa formation militaire, le jeune homme n’était pas un pisteur exceptionnel. D’ordinaire, il travaillait pour ce genre d’affaires avec deux autres membres du Prétoris, mais, aujourd’hui, c’était parfaitement exclu. Il fallait donc improviser.

Ces recherches le ramenèrent à la cité d’Airain. On lui avait indiqué qu’une mercenaire offrait ses services à qui voulait bien payer, et que sa renommée de chasseresse était hors du commun. Autrement dit, une candidate idéale, même si sa réputation était légèrement ternie par d’autres rumeurs la concernant. Une alcoolique, violente de surcroit, et particulièrement grossière. Mais ça lui était égale. Si elle était capable de l’amener là où il le souhaitait, elle pouvait bien avoir tous les vices de la terre que ça n’y changerait rien.

Voulant rester discret, le Prétoris enfila alors sa longue cape qui masquait presque totalement son corps, ainsi que son visage. Non pas que le fait d’entrer dans une taverne soit un tant soit peu gênant, car il avait l’habitude, mais ses deux grandes ailes draconiques le rendait beaucoup trop reconnaissable lorsqu’il ne les cachait pas. Bien sûr, il y avait d’autres signes qui pouvaient le trahir. Ses canines légèrement plus acérées, quelques écailles noires sur ses avant-bras… Autant d’indice que le Prétoris préférait dissimuler.

Trouver l’auberge ne fut toutefois pas trop difficile, et, fort heureusement, elle semblait assez peu animée pour une soirée. Lähm était en mission, et, ainsi, il portait tout ses équipements avec lui, armes y compris. Si Milaïm, son Brombas, était dissimulé dans sa cape, Sagïel, son fusil, était bien trop imposant pour ça. Aussi, il le transportait dans un immense sac qui dépassait de son épaule, et cachait la vraie nature de son contenant. Arrivé au bar, il s’installa, déposant le dit-sac contre le bois, et commandant une bière afin d’attendre de localiser sa cible. Quelqu’un qui ne consommait pas dans un établissement comme celui-ci était tout de suite suspect, et le dragon préférait rester discret. Lorsque le tenancier s’approcha avec sa commande, Lähm lui glissa une question.

« Dites. Je cherche celle que l’on nomme la Chasseresse. On m’a dit que je pouvais la trouver ici. » Lui demanda-t-il simplement. L’homme marqua un temps d’arrêt, fronçant les sourcils.

« Lydie ? Qu’est-ce que vous lui voulez ? » Son ton n’avait rien d’amical, ni de commerçant. Il s’inquiétait surement pour elle, aussi, je dissipais tout malentendu.

« Rien de grave, rassurez-vous. J’ai un travail à lui proposer. » Répondit-il, ne lâchant pas l’homme du regard. Autour de nous, les conversations s’étaient tues peu à peu, la clientèle visiblement intéressée par cet échange.

« Dans ce cas, il faudra attendre qu’elle se réveille. Je me méfierais quand même si j’étais vous. Elle n’est jamais de bonne humeur après une gueule de bois. Ou jamais de bonne humeur tout court d’ailleurs. » Lança-t-il, un peu plus détendu, déclenchant quelques rires dans la taverne.

« Ne vous en faites pas. Je ne paye pas pour sa compagnie. » Dit Lähm avant de me lever, récupérer son « colis » et se diriger vers une table dans le fond, où dormait, avachie dans ses bras, une jeune femme.

Ladite Lydie aurait pu être séduisante sans son accoutrement austère et l’état d’ébriété avancé dans lequel elle se trouvait. Suivi par des regards inquisiteurs et malavisés, le Prétoris s’installa alors à la table de la jeune femme, sans gêne, avec sa consommation, la capuche cachant toujours une bonne partie de son visage. Il avait conscience de ne pas inspirer la confiance, mais ça lui était égal. Il était ici pour travailler après tout.

Dégage. L’inconnu ne s’était même pas encore assis que la voix enrouée par l’alcool de Lydie avait résonné à travers ses bras. Elle l’avait senti approcher, elle n’était pas une chasseuse pour rien. Sa vie l’avait forcée à ne dormir jamais profondément et même en sécurité ses sens restaient en alerte. Or ici, elle n’était pas en sécurité. Elle connaissait pas mal de personnes qui avaient une dent contre elle. D’un autre côté, elle avait fait tomber pas mal de dents aussi. Toujours était-il qu’elle ne pouvait pas permettre, même ivre morte, à ses talents de pisteuse de se mettre en veille. Et le bouquin que faisait l’équipement de cet inconnu n’était pas facile à rater.

Toutefois, il s’installait quand même. Lydie poussa un profond soupir. Si c’est pour me casser la figure ou me tuer, il faut prendre un ticket et faire la queue, y a déjà assez de monde comme ça. Alors attends ton tour. Et dégage de ma table. Son ton était énervé. Elle n’aimait pas être dérangée encore moins à sa table et surtout pas quand elle se reposait. Mais manifestement, elle avait un emmerdeur de première devant elle. Elle releva péniblement la tête et se redressa, jaugeant froidement l’homme en face d’elle. Il avait beau essayé de se dissimuler, même ivre, elle était la meilleur dans son domaine. Bon, monsieur le demi-dragon. J’espère que tu as une bonne raison de venir m’ennuyer, pour rester poli. Sinon, tu finiras dans le caniveau avec des dents en moins. Et puis qu’est-ce que t’essaye de dissimuler aussi mal ? Je dirai un pistolet et un fusil. J’ai tort ? Non, je ne crois. Alors je te lance cinq secondes pour te justifier.

La jeune femme cachait très bien son jeu, et derrière son regard froid et agressif, la tête lui tournait et son estomac faisait des nœuds étranges. Elle n’allait pas tarder à vomir si elle restait dans cette position mais bouger était au-delà de ses forces et allait la faire vomir tout pareil. Ce n’était vraiment pas le moment pour l’ennuyer, ni même lui parler. Repasse dans 10h pour voir. Juste avant que je ne recommence à boire. Je serai bien mieux. Mais elle garda cela pour elle.

Lähm avait parfaitement ignoré le ton cassant de la jeune femme, et s’était tout de même assis, l’observant et la détaillant un peu plus profondément. D’aucun pourrait dire qu’il était, dans cet état, bien difficile de croire les prouesses qui lui étaient allouées, mais le demi-dragon avait déjà bien vécu, et cette apparence débauchée ne revêtait pas vraiment d’importance. Si elle était aussi douée que ce que les rumeurs dont il avait était témoins pouvaient laisser croire, peut lui importait le visuel. Toujours était-il que la jeune femme s’était relevée, le toisant à présent du regard. Mais le jeune dragon n’était tout de même pas dupe. Au ressenti de l’odeur forte d’alcool qui émanait d’elle, il était évident qu’elle n’était pas en si bonne forme qu’elle ne le laissait paraitre.

Le prétoris la laissa donc continuer tranquillement son monologue, un léger sourire aux lèvres. Il fallait dire que les menaces, ou encore simplement le discours même de la jeune femme revêtait à ses yeux un caractère assez comique. Pourquoi aurait-il bien prit le temps de discuter avec elle s’il avait voulu la tuer ? Une perte de temps et un risque idiot, même pour quelqu’un comme lui. Cela dit, il comprenait tout de même que la vie de la jeune femme ne devait pas vraiment être faite de fleurs et de rose sur les murs. Il lui semblait évident qu’elle devait, avec une attitude naturelle si véhémente, s’attirer beaucoup d’ennuis. Mais, encore une fois, ça n’avait aucune importance aux yeux du dragon.

Toutefois, il haussa un sourcil en entendant ses menaces finales. Ainsi, elle avait décelé sa race et ses armes sans même les apercevoir directement ce qui, inconsciemment, rassura Lähm. Elle était au moins à la hauteur de sa réputation, c’était déjà ça. Il entendit alors des sièges racler le sol derrière lui, mais ne s’en formalisa pas. Certains clients, peu désireux de voir un individu armer perturber leur taverne, commençaient à se lever et à avancer progressivement vers leur table, se méfiant toutefois suffisamment pour prendre leur temps. Le Dragon ne s’y intéressa pas le moins du monde, se contentant de répondre avec un léger sourire qui dévoila ses crocs.

« Vous casser la figure ? Vous tuer ? Me dissimuler ? Je crois que vous vous trompez lourdement. Je ne suis là que pour vous proposer un travail, en réalité, et, puisque je dois vous avouer être assez pressé, je n’ai pas eu le luxe de laisser mon équipement en attendant de vous recruter. Vous comprendrez également que je ne puis attendre jusqu’à demain pour avoir votre réponse. » Répondit-il simplement, rabaissant alors sa capuche pour dévoiler son visage bien plus jeune que pouvait le laisser penser son âge réel.

« En revanche, non pas que je n’ai pas confiance en ces citoyens modèles qui se lèvent derrière moi, mais je souhaiterais m’entretenir avec vous des modalités d’un tel contrat en privé. » Dit-il avec un petit sourire amusé.

L’homme n’était pas décidé à partir. Et ça ne plaisait pas à l’alcoolique. Son plan de la soirée ne prévoyait pas de devoir parler avec d’autres êtres vivants. Pas même de saisir un gigolo de passage. Elle voulait juste boire et s’endormir d’avoir trop bu pour ne pas avoir à réfléchir. Pourtant cet inconnu c’était assis à sa table, et n’avait pas envie de partir. Son sourire énerva encore plus Lydie, comme si le fait d’être là lui apporter du plaisir. C’était ça son plaisir. Aller dans le bar pour voir les gens saouls puis les importunés sans raison jusqu’à ce qu’il craque. Si c’était ce qu’il voulait, il allait le regretter.

Voilà les justifications. Et les autres demeurés commençaient à s’approcher pour libérer leur taverne d’un inconnu armé. Lydie avait peut-être trop bu, mais elle savait au moins qu’ils n’avaient aucune chance. Elle peut-être, en jouant de vitesse et de son talent mais ça risquait d’être complexe. Quiconque avec un demi-cerveau pouvait voir que le demi-dragon assis en face d’elle était dangereux. Plus ou moins autant que Lydie lorsqu’elle est sobre.

Au moins, l’homme ne venait pas spécialement pour l’attaquer, d’après ses dires. Lydie n’était pas prête à lui faire confiance. Mais il était venu lui proposer un emploi, pas qu’elle en ait besoin en ce moment mais c’était de l’avance sur sa boisson. Une affaire privée en plus, voilà qui promettait une bonne dose d’argent.

Vous avez entendu les toquards. Barrez-vous, sinon c’est moi qui vous mets à la porte. Il y eut une légère hésitation parmi les hommes. S’ils ne doutaient pas de pouvoir se débarrasser de Lydie grâce à leur nombre, ils savaient que dans l’état de la jeune femme, beaucoup d’entre eux auront des coups et des blessures fort douloureuses. Et aucun ne voulait être volontaire pour les endurer. Mais d’un autre côté, ils n’allaient pas se laisser faire.

Ce fut le tavernier qui intervint pour sauver son établissement et son chiffre d’affaire. Lydie. Peut-être que vous seriez mieux dans ta chambre. Je t’ai gardé la même que d’habitude et je te montrai quelque chose à boire et à manger si tu veux. Vous serez plus tranquille ainsi. Lydie jeta un coup d’œil au tavernier, puis à chaque homme debout avant de se lever et regarder l’inconnu. Un sourire malicieux flottait sur son visage alors qu’elle dévisageait le demi-dragon. Mouai, pourquoi pas ? Ce ne sera pas déplaisant d’être dans une chambre.

Elle eut quelques pas hésitant en arrière, le temps de retrouver l’équilibre. Puis elle ramassa son arbalète et sa hache. Puis elle se dirigea vers les escaliers en titubant. Bon alors vous venez ou non ? J’ai peut-être tout mon temps mais je ne compte pas le gâcher inutilement. Elle s’engagea dans l’escalier qui menait aux chambres. La montée fut laborieuse, tant la jeune femme tanguait, mais en s’appuyant alternativement sur la rambarde et sur le mur, elle réussit à atteindre le sommet en un temps relativement court. Elle s’arrêta en haut et se retourna en jurant. [color=#FF9933]La clé. (/color]

Le tenancier lui lança et elle attrapa avec une dextérité surprenante pour une femme qui avait des difficultés à rester debout. Elle se dirigea en titubant légèrement vers une porte à mi couloir dont elle ouvrit la porte en grand. La pièce était simple mais possédait un certain luxe qu’on ne retrouvait pas normalement dans pareils établissement. Un poêle chauffait la pièce et lui donnait un éclairage diffus et tamisé. Un lit se dressait immédiatement à la gauche en entrant et ne pouvait accueillir qu’une personne. Une table s’appuyer contre le mur de droite, juste devant la porte et ne possédait qu’une chaise. Un fauteuil en cuir trônait dans le coin face au poêle et à côté de la fenêtre dont les volets étaient fermés

Lydie s’affala dans le fauteuil en poussant un soupir ou un renvoie, ce n’était pas très clair. Elle regarda l’inconnu entrer à son tour. Allez-y, installez-vous, prenez la chaise. Il parait que vous avez besoin de mes compétences. Mais d’abord, j’aimerai avoir votre nom puisque manifestement vous me connaissez. J’aime bien savoir qui me doit de l’argent. Et deuxièmement, je veux savoir ce que vous voulez que je chasse ou que je trouve et si je dois le ramener, puis combien vous êtes prêt à mettre pour l’obtenir. Je ne suis pas donnée, car je ne suis pas n’importe qui.

La main droite de Lähm avait beau être posée sur la table, elle n’était en rien inoffensive. Le demi-dragon avait l’habitude de ce genre de situations, et, bien qu’il conservât toujours un calme serein, il n’hésiterait aucunement à agir si les hommes debout derrière lui passaient à l’action. Il ne lui faudrait qu’un instant, et quatre pressions, pour régler rapidement le problème. C’était certes un peu exagéré, car ils n’étaient que des ivrognes dans une taverne, mais le demi-dragon n’avait pas pour habitude de tergiverser. Sa tâche était urgente, bien plus que quelques soiffards dans une taverne, et ça n’aurait surement pas été la première fois qu’il se montrerait expéditif. Mais, ce faisant, il n’en n’eu cette fois pas besoin. La jeune femme ivre fut la plus prompte à réagir.

Sa menace ne parut toutefois pas très bien fonctionner malgré une hésitation naissante parmi les hommes qui se dressaient dans mon dos. Le tavernier intervint alors à son tour, proposant la chambre de la jeune femme pour notre petite réunion. Il soutenait alors le regard de cette dernière, un court instant de surprise arquant l’un de ses sourcils devant son air qui semblait avoir radicalement changé. Visiblement, l’idée lui plaisait particulièrement sans qu’il ne comprenne réellement pourquoi. Il grimpa alors les escaliers à la suite de la Chasseresse, la laissant aller à son rythme pour franchir cet obstacle qui semblait paraitre si complexe pour la jeune femme, arrachant un léger sourire au demi-dragon. Sa réputation n’était décidément en rien usurpée et elle était en tout point conforme au portrait qu’on en dépeignait. Aussi, Lähm n’était pas suffisamment stupide pour ne pas s’en méfier légèrement, ou pour sous-estimer ses compétences au regard de son état. Le réflexe qu’eut Lydie pour attraper les clefs au vol pouvait en attester : Même ivre, la jeune femme restait dangereuse.

Une fois dans la chambre curieusement confortable de la jeune femme, Lähm déposa son paquetage au sol. Il observa alors son interlocutrice s’installer dans son fauteuil. Lui, fit plus simple, s’asseyant simplement sur le lit à l’entrée. Ensuite, il plongea à nouveau son regard inquisiteur dans celui de la jeune femme, l’écoutant parler. A la fin, il se redressa légèrement et pris une inspiration, réfléchissant à la tournure de ses phrases, puis il répondit.

« Je me nomme Lähm, et je pense que le tutoiement est de rigueur si nous devons travailler ensemble. Pour ce qui est du paiement, je m’attendais à ce que tu fasses une proposition de prix au vu de la tâche à accomplir. Tout ce que je vais dire maintenant n’est connu que de moi, et de moi seul, aussi, j’imagine que tu comprends que tu ne peux en rien divulguer ces informations. Mais rentrons dans le vif du sujet. Je cherche un groupe de personne, car je dois les mettre hors d’état de nuire. Selon mes informations, ils se cachent, une fois tous les trois mois dans les montagnes d’Eïrn. Sauf que, jusqu’à présent, personne ne sait où exactement. J’ai donc besoin de tes talents de traqueuse pour me conduire jusqu’à eux, afin que j’abatte les responsables et décideurs, ainsi que le dragon qui se trouve à leur côté. Tu n’as pas à te soucier ni des mages qui dirigent cette assemblée, ni du dragon, car j’en fais mon affaire. En revanche, tu seras surement amenée à protéger ma position en cas de combat. Voici, en définitive, ce que j’attends de toi. » Dit-il, sans sourciller, exposant sans gêne les quelques détails de la mission à son éventuelle future partenaire.

La façon d’être de l’inconnu plaisait et agaçait Lydie. Il était sûr de lui et transpirait la puissance, peut-être un peu trop. Il avait l’air franc et, contrairement aux autres employeurs, il semblait avoir une vraie préoccupation et un vrai défi à la chausseuse. Toutefois, sa façon d’imposer les choses et de considérer que tout devait se faire rapidement sur sa volonté déplaisait profondément à Lydie, en grande partie à cause de l’alcool mais aussi parce que le temps et la chasse avait appris à Lydie à prendre son temps pour analyser une situation, adapter sa stratégie et attendre le bon moment. Mais elle avait aussi appris à réagir à l’instinct et avec rapidité. Mais ce soir, dans son état, elle ne voulait pas brusquer les choses et prendra un malin plaisir à prendre son temps. Il était maintenant temps d’entrer dans le vif du sujet.

Toujours avachi dans le fauteuil, la femme avait du mal à garder son esprit fixé sur la conversation et les paroles de ce Lähm. Mais elle saisit l’essentiel bien que les détails étaient complètement absent. Pas qu’elle veuille connaitre les raisons de cette chasse à l’homme, mais plutôt tout ce que ne disais pas Lähm et qu’il devait savoir sans aucun doute. Elle était un peu agacée par sa manière trop directe d’être passé au tutoiement mais d’un autre côté, c’était plus simple. Bien, Lähm c’est ça ? Si j’ai bien compris, tu as besoin d’une pisteuse pour trouver un groupe de personne, dans les montagnes et sans savoir où exactement. Connais-tu au moins leur nombre ? Ca c’est le premier point. Le deuxième, pas des moindre, est que tu veux après que je me batte à tes côtés ? On m’appelle la Chasseresse, pas la Machine de Guerre. Toutefois, tu es assez mignon, je veux bien te l’accorder, avec bien sûr le supplément qui va avec. Sache une chose par contre, je ne suis pas une mercenaire, je suis une chasseuse. Je ne tue pas sans raison suffisante et évidente. Et exterminer un groupe dissident pour des raisons politiques n’en est pas une. Donc pour le moment, je suis d’accord pour te trouver ton groupe, son lieu de rassemblement et même la couleur de leur chien et leur plat préféré si tu veux. J’accepte aussi de t’aider si on se fait attaquer. Bien sûr, il me semble évident que les informations que tu me donnes restent entre nous, le fait que tu me le demandes est un motif de vexation. Mais je passerai sur cette menue insulte. Ca ce sont les termes du contrats de mon côté. De ton côté, il va falloir me payer, me fournir en matériel de réparation et d’expédition. Comme j’imagine que tu vas me suivre pendant la traque, sur le terrain, il n’y a qu’un seul maître après les dieux, c’est moi. On mange, on dort, on boit, on pisse, on respire quand je le décide et où je le décide. Une fois qu’on les a trouvés, tu fais comme bon te semble. Pour la seconde partie de la mission, je tiens à ma vie. Dès que j’estime que ça sent le roussie, je me barre et tant pis pour toi et ta mission.

Elle marqua une pause. La tête lui tournait quelque peu et elle avait soif. Que foutait ce tavernier avec cette bouteille ? La même chose que d’habitude quand elle avait un client. Comme elle arrêtait de boire à l’instant du contrat, il ne se fatiguait plus à lui monter une bouteille. Pour ce qui est du paiement… La traque sera faîte et réussie quoi qu’il arrive donc je vais demander le paiement immédiatement. Pour la seconde partie, ç sera au retour. Pour le prix, la traque te coutera… Disons Dix mille pièces d’or et la couverture, disons le double. Donc trente mille pièces d’or dont dix mille de suite. Je serai parée à partir dans une semaine.

L’attitude de la jeune femme plaisait au demi-dragon. Non pas que travailler avec elle serait simple, ni une partie de plaisir, mais, au moins, elle était fidèle à sa réputation et avait du répondant. Deux qualités essentielles aux yeux du jeune homme. Quant à ses conditions, bien qu’il tiquât légèrement sur le fait qu’elle le trouvait mignon et qu’à se titre un supplément était de rigueur, il ne s’appesantit par sur la nature de cette offre, trop concentré sur le reste des exigences plutôt définies de la chasseuse. En soit, rien ne le dérangeait vraiment, car il s’était attendu à de telles consignes. Le centre de sa vie militaire consistait à suivre les ordres de quelqu’un supposément plus compétent que lui pour les donner et, pour ce qui était de la traque, la Chasseresse était indéniablement dans ce cas de figure, il aurait été stupide de ne pas l’admettre.

Il attendit alors patiemment qu’elle lui donne son prix, et, lorsqu’elle le fut, Lähm, surprit, éclata de rire. Que ses services soient chers, c’était une chose, mais là, ce n’était même pas une somme ne serait-ce qu’envisageable. Elle avait prononcé son prix à la manière d’un enfant qui parie de l’argent qu’il n’a pas, de grotesques sommes qui n’avaient ni queue, ni tête. Le demi-dragon ne voulait pas la vexer, mais il n’avait pas le moins du monde pu se retenir. Pour une excentrique, elle se tenait là. Lorsqu’il eut fini de rire, il reporta son attention sur la jeune femme.

« Pardonnez-moi, mais je t’avouerais avoir été un peu surprit. Tu te doutes bien que ce n’est pas le moins du monde une somme dont nous pouvons discuter. Je doute fort que le conseil accepte de débourser le budget d’une ville pour payer une jeune femme enivrée, si talentueuse soit elle, afin d’éradiquer une pauvre cellule de l’esprit. » Répondit le jeune dragon, visiblement assez amusé. « Pour ce qui est des autres conditions, en revanche, ça ne pose aucun problème. Tu auras le matériel et tout l’équipement dont tu as besoin. De la même manière, je me plierais à tes consignes durant l’ensemble de la traque. Pour ce qui est de tuer, ne t’inquiète pas, tu n’as pas à t’en faire. Il s’agit de ma mission aussi, dès que nous les avons trouvés, je prendrais à mon tour le commandement de l’opération. L’élimination est ma spécialité comme la traque l’est pour toi. Tu n’auras normalement pas à te battre directement, sauf si les troupes ennemies tentent de contre-attaquer. Je table plutôt sur le fait qu’ils abandonnent après l’élimination de leurs leaders, mais, sait-on jamais. Et si jamais tu crains pour ta vie, alors tu es en droit de t’éclipser. Je ne t’en tiendrais pas rigueur et tu seras tout de même payée. Ce qui m’intéresse est surtout de trouver le lieu de rencontre, et ce sera ton travail. Pour ce qui est du reste, je m’en occupe personnellement. » Répondit-il simplement, beaucoup plus sérieusement.

« En revanche, nous allons avoir un problème d’entente sur le prix. Il y a quelques zéros en trop je crois, et je n’ai pas plus de temps à perdre que toi. Plus sérieusement, donc, quel est le prix que tu exiges pour cette mission ? »

L’éclat de rire de Lähm à l’annonce du prix était naturel. Une partie de l’esprit de Lydie s’y attendait et acquiesça intérieurement devant cette réaction. L’énoncé de ce prix était une vaste blague, juste pour voir ce qu’il avait dans le ventre Par contre, la partie embrumée par l’alcool s’offusqua de cela, malgré l’absurdité de ses dires C’était ce qui apparut sur son visage, un froncement de sourcil, un regard et une mâchoire que se contracte. Il lui fallut un bon moment avant de se reprendre un peu, au lieu de cracher son venin, à la figure du demi-dragon. Elle respira un peu bruyamment pendant quelques secondes pour éviter d’envoyer promener son interlocuteur. Pas besoin qu’il lui raconte sa vie. Il était d’accord ou il se barrait, c’était aussi simple que ça. Quoi, non, il pouvait rester, mais plus pour les affaires. Cela faisait longtemps que la jeune femme n’avait pas connu d’homme, et encore plus longtemps d’homme de la classe de Lähm.

Après s’être repris, elle put discuter de son prix. Je t’aime bien, tu n’es pas comme ses idiots qui prennent peur dès qu’il faut me contrarier ou qui ont de l’argent à perdre. Que dirais-tu de plutôt cent pièces d’or pour la traque et deux cents de plus pour le combat ? Ils négocièrent quelques instants pour convenir d’un prix plus que convenable pour Lydie. Elle ne connaissait pas de traque impossible, le prix qu’elle en tirait surtout pour être nourrie et équipée pendant cette période, lui était plus que convenable. C’était même une arnaque. Quant à celui de ses dons guerriers, c’était clairement du vol. Elle fera en sorte de ne pas être vu, et de faire le strict minimum. Avec cette mission, elle pourra s’oublier pendant longtemps.

Comme je te l’ai dit, je ne pars pas avant une semaine, le temps pour moi de me préparer. Alors soit tu restes, soit tu vaques à tes affaires. On peut se retrouver où tu veux, cela ne me pose aucun problème. Bien sûr, avant de partir, l’argent qui m’ai dû en début de mission sera versé, à cette adresse. Elle lui indiqua l’adresse d’un de ses rares amis, un riche marchand que gardait son argent et le faisait fructifier sans risque. Il avait eu un jour le malheur de perdre plus d’argent que Lydie ne lui en avait confié et maintenant, il n’était pas prêt à recommencer. Il n’avait pas à se plaindre car, la Chasseresse lui amenait toujours des sommes plus importantes qu’elle n’en dépensait, malgré son train de vie dispendieux. D’un autre côté, elle n’avait pas vraiment le temps pour son loisir alcoolisé en ce moment.

Visiblement, le rire de Lähm avait légèrement vexé la jeune femme, et le demi-dragon l’avait effectivement senti. Il suffisait de quelques indices : une mâchoire légèrement serrée, tout comme son poing, et il était facile de définir que la Chasseresse n’avait pas apprécié la réaction amusée du jeune homme. Pourtant, ce dernier ne s’en inquiétait pas outre mesure. Le paraitre était quelque chose qui le laissait indifférent, et il savait que l’appât du gain, faute de la sympathie qu’il n’inspirait pas, suffirait surement à convaincre Lydie de l’accompagner. Du moins, si elle avait conscience des prix exorbitants qu’elle lui demandait de payer pour ses services.

Ce qui était visiblement le cas et la réaction de la jeune femme fût sans doute plus douce que celle qu’il avait escomptée. Le deuxième prix lui convenait déjà beaucoup plus, et était au niveau de ce à quoi il s’était attendu en venant voir la mercenaire. Cher, pour certain hors de prix, mais parfaitement jouable au vu des moyens plutôt conséquents mis à la disposition du Prétoris. Il hocha donc la tête en direction de la jeune femme.

« Le prix me convient. De toute façon, ce n’est pas non plus comme si c’était moi qui payait tes services de ma propre poche, et optimiser les rendements monétaires d’Akkaton n’est pas vraiment ma préoccupation première. » Lähm savait qu’il ne serait jamais critiqué pour avoir dépensé quelques centaines de pièce d’or si, au final, sa mission était remplie avec succès. Et, pour ça, il n’avait besoin que d’une chose : Que Lydie trouve l’emplacement qu’il recherchait. En un sens, tout ce qui se déroulerait après ne serait qu’une formalité pour le soldat. Il récolta alors l’adresse et les dernières consignes de Lydie avant de lui répondre.

« Ce sera fait rapidement. Pour ce qui est de l’équipement que tu as demandé, un soldat restera devant la taverne pour prendre tes demandes en compte et te les rapporter selon ton bon vouloir. Il te fournira aussi l’adresse de l’auberge dans laquelle nous nous retrouverons, directement au pied des montagnes d’Eïrn, cela sera plus simple pour moi. » A ces mots, Lähm se leva de son assise, et se dirigea vers la porte. « Je te laisse donc ici. Dans une semaine, à l’adresse indiquée, et nous commenceront la traque. » Lança-t-il simplement, avant de sortir de la chambre de la Chasseresse, puis de l’auberge, sans prêter attention aux regards qui pesaient sur lui.

Lähm avait une façon de voir les choses, pour le moins… intéressante. Négocier avec lui n’avait pas été très difficile car ce n’est pas lui qui payait et pour le bien de l’empire, il considérait que quelques menues dépenses supplémentaires ne se verraient pas. Lydie aimait ce genre de patriotisme ou sens du devoir, celui aveugle, qui n’impose aucune limite. Elle l’appréciait parce qu’elle faisait de bonnes affaires avec eux, ou sinon, elle finissait par se battre, mais de toute manière, elle se battait souvent alors que ce soit avec des nationalistes ou avec des ivrognes, elle s’en moquait pas mal.

Un accord sur les prix rapidement trouvé, des conditions acceptées, un salaire qui sera versé et même un aide de camp. C’était trop beau, il y avait une arnaque. Ou alors c’était un pigeon. Mieux, il avait vraiment besoin d’elle. Ce dernier point était le plus probable. Il aurait pu demander à n’importe quels chasseurs de renom, mais il était venu la voir tout de suite, venu voir la meilleure. Il avait besoin de ses services.

La Chasseresse regarda le demi-dragon sortir. Seule dans sa chambre, elle regarde le feu brûler dans le poêle. Sa chaleur ne la réchauffe pas, les vapeurs de l’alcool s’évapore et libère son esprit de la brume dans laquelle il s’enveloppe pour échapper à la réalité, à sa vie et à ses souvenirs. La femme frissonne, en imaginant la période à venir, la semaine avant le début de sa chance. Une semaine durant laquelle, elle sera confrontée à elle-même et à ses fantômes. On regard se posa sur son couteau de chasse, posé sur la table. Ce serait si simple. Elle pourrait rejoindre ses sœurs, son père et sa mère et tout recommencer à zéro. Peut-être l’attendent-ils. Pourquoi ne se libérait-elle pas de ce fardeau ? La peur. La peur de l’inconnu, la peur de la mort. La peur de manquer quelque chose ici.

La jeune femme se sentit seule et pleine de tristesse. Elle ne voulait pas se donner la mort parce qu’elle voulait donner la vie. Mais avec qui ? Et pourquoi ? Plus le temps passait et plus elle s’enfermait dans sa solitude. Elle était envahie par la tristesse mais incapable de pleurer. Elle se battrait au côté de Lähm, elle en avait la conviction. Non pas pour ses beaux yeux, mais parce que peut-être qu’un coup porté par l’ennemi aura le courage de faire ce qu’elle n’osait pas. Dans son équipement et assise dans son fauteuil, la Chasseresse s’endormit et rêva. Elle rêva d’une chasse avec Julie, les deux jumelles de nouveaux réunis. Dans son sommeil, elle sourit de joie.

La négociation n’avait pas pris trop de temps, et c’était bien ce qui important le jeune Dragon. Déjà qu’il devait attendre une semaine, il n’aurait pu se permettre davantage de discussions futiles en son sens. Réajustant sa cape pour qu’elle lui cache à nouveau le visage, il ignora purement et simplement les ricanements des hommes qu’il croisa dans l’auberge en se dirigeant vers la sortie. Il ne comprenait pas les ivrognes, et ne les comprendrait surement jamais. Du moins, il n’essaierait en aucun cas de faire des efforts à des fins aussi inutiles. En tout cas, une telle dépense allait surement l’obliger à rédiger un rapport pour la comptabilité des Prétoris. Cette dernière ne regarderait surement même pas la donnée, mais le fait de rédiger un document n’était pas vraiment les priorités du demi-dragon. Mais il devait s’y plier après tout, c’était le protocole.

Quoiqu’il en était, ce laps de temps à attendre ne serait pas mis à profit pour se reposer. Des cibles proches de l’empire, il y en avait beaucoup, tout comme de la surveillance. Aussi, son métier n’attendait généralement pas. Les Prétoris étaient mobilisés souvent sur des missions de longue haleine, aussi, la moindre tâche plus courte était souvent passée à l’As. Mais Lähm allait pouvoir se rendre utile et il le savait. Autant mettre la dernière semaine avant son départ à profit. Enfin, les quelques jours, puisqu’il fallait aussi compter le temps du voyage.

Ses pensées se posèrent quelques instants sur Lydie. Une rencontre plutôt atypique dans la vie du demi-dragon qui n’en avait, pour la première fois, pas maitrisé tous les aspects. A ses yeux, ils n’avaient été que deux prédateurs se tournant autour afin de définir comment collaborer et partager la proie, sans qu’aucun n’essaye, par crainte ou par respect, de se ruer à l’attaque. Il y avait eu, non, il y avait une tension palpable d’une nature étrange entre les deux protagonistes. Cette collaboration allait surement être plus intéressante que prévu.