La diplomatie... c'était après tout pour cela que Hansing s'était avant tout engagé au service de l'Empire d'Ikhyld, à l'origine ! Et même si forger sa réputation de diplomate, et obtenir l'accès à certains endroits, avait demandé des efforts auxquels il ne s'attendait pas à l'origine – comme chasser des monstres et des criminels aux quatre coins d'Orzian, par exemple ! – il n'en restait pas moins avant tout et surtout un diplomate, et c'était donc avec plaisir qu'il se rendait dans cette cité d'Eïrn pour y porter la voix d'Ikhyld et de l'Impératrice-Phénix jusqu'aux confins du continent. La bourgade dont il approcha par la voie des airs – ce qui était en soit assez logique pour un Azurien, au fond – était peut-être d'allure assez modeste, quelque peu ordinaire, mais elle semblait solide et bien défendue, îlot de civilisation au milieu des forêts sauvages d'Eïrn, et quoiqu'il en soit aucun lieu n'aurait été trop modeste pour que le diplomate ailé accepte de s'y rendre dans le cadre de ses fonctions, de toute façon.

Plus impressionnant était le grand dragon qui l'attendait devant la cité en question. Il était immense, et devait donc être également immensément vieux, un de ces êtres à longue vie qui hantait le monde bien avant que le père du père d'Hansing ne sorte de son œuf. Il y avait toujours une sensation particulière à rencontrer un être d'un tel âge, surtout un être magique, mais c'était aussi une chose dont il avait prit l'habitude, avec le temps, lui permettant malgré tout de garder un certain aplomb... le contraire aurait certes été un peu gênant pour un diplomate, de toute façon ! Ce fut donc en douceur qu'il vint se poser devant le gigantesque dragon aux écailles argentés, ne semblant guère différent des petites silhouettes qu'il avait pu voir jouer sur lui depuis le ciel, et qui prouvait sans doute les liens de confiance et d'amitié qui liaient la créature draconique aux autres habitants de la communauté qu'il représenterait dans cet échange.

« Maître Slenlodwiin, je présume ? Je suis Hansing Liuxian, diplomate représentant l'Empire d'Ikhyld... c'est un plaisir et un honneur pour moi que d'être accueillit à Assana pour discuter de l'amitié et de la coopération entre nos deux peuples. »

Certes, on ne pouvait pas dire que les deux peuples en question soient de même taille, de même importance ou de même puissance, mais ce n'était guère le genre de détail à soulever dans une entrevue diplomatique, après tout... de manière générale, si le fait de faire sentir la supériorité – indéniable – de l'Empire pouvait parfois être utile, c'était un levier qu'Hansing n'actionnait que dans certaines situations bien précises, préférant toujours mettre en avant la coopération entre les peuples, sans pour autant rabaisser en quoi que ce soit le prestige d'Ikhyld, bien entendu.

« Je dois dire qu'il est rare de se retrouver lors de négociations face à un émissaire aussi noble et aussi imposant qu'un grand dragon ! Mais je ne doute pas de la sagesse qu'ont dû vous apporter les années, ni des bienfaits que cette sagesse pourra apporter dans nos négociations ! »

Le grand dragon semblait plutôt ouvert à la discussion, ce qui était sans doute assez évident pour quelqu'un qui avait été choisi par sa communauté pour servir de diplomate, certes, même si sa nature avait sans doute joué également, pour impressionner l'envoyé Ikhyldien qu'il était. Hansing ne fut guère surpris d'apprendre que son interlocuteur était également un protecteur de la cité eïrinienne. Un dragon de cette taille était, non seulement par la force que sa taille lui conférait, mais aussi par la sagesse que les années nécessaires pour atteindre une telle taille, et la maîtrise que cela entraînait également – dans les arts de la magie, par exemple – une menace terrible pour qui aurait l'idée de venir s'en prendre à cette petite communauté. Peu de monstres devaient aussi être de taille à faire face à un tel ennemi, ce qui n'était sans doute pas à négliger dans une telle contrée, où les créatures monstrueuses de toutes sortes étaient monnaies courantes, de ce qu'Hansing avait pu entendre et constater par lui-même jusque là.

Quoiqu'il en soit, la créature ne tarda pas à diminuer de taille, visiblement grâce à un bijou qui dégagea une certaine aura magique, pour s'arrêter tout de même à celle d'un éléphant, lui permettant donc de s'aventurer plus facilement dans les rues de sa ville sans pour autant renoncer totalement à l'effet que donnait le fait d'arborer une taille imposante face au visiteur lointain qu'était l'Azurien. Lequel inclina poliment la tête à la proposition du Dragon, bien entendu prêt à suivre le mode de négociation proposé par ceux qu'il venait rencontrer.

« Vous pouvez simplement m'appeler Hansing, et je serai bien entendu ravi de visiter votre ville. Toute visite n'a pas pour but après tout d'impressionner les visiteurs par des dorures et de vastes palais, et les villes ont encore moins pour vocation de produire cet effet... enfin, sauf peut-être les capitales impériales. »

Le mage ailé s'était permis une pointe d'humour sur cette dernière phrase, mais il voulait avant tout rassurer son interlocuteur, si l'on pouvait dire. Ce n'était pas parce qu'il représentait l'Empire Ikhyldien, qui avait bel et bien aménagé sa capitale et certaines de ses capitales régionales, la Cité de Jade en tête, pour impressionner les visiteurs, qu'il attendait forcément ce genre de choses des cités dans lesquelles il venait faire de la diplomatie. Après tout, offrir un cadre agréable et sûr à ses habitants lui semblait un but bien plus louable, surtout pour une communauté sertie dans un écrin comme celui des territoires sauvages dépendant de la République d'Eïrn.

« Je vous suis donc volontiers ! Je dois dire que même si j'y ai déjà visité quelques bourgades, je n'ai jamais encore eut la chance de pénétrer dans une cité d'Eïrn proprement dites... ce sera donc certainement une découverte intéressante ! »

Il était vrai qu'Hansing avait déjà vu la plupart des grandes cités d'Orzian, la capitale teïderienne faisant exception, ainsi que plusieurs autres en dehors du continent, tout comme il était vrai aussi qu'il vivait lui-même – quoique à présent il ne soit plus guère sédentaire, à vrai dire – dans l'une des plus grandes cités du continent, la Cité de Jade, conçue spécifiquement pour offrir une vitrine de la grandeur ikhyldienne. Mais ce n'était pas pour autant qu'il aurait conçu quelque bizarre expression snobinarde lui faisant dédaigner les places de moins d'envergure, comme un citadin blasé et imbu de sa propre citadinité, ce qui ne correspondait guère à son caractère. Il se contenta donc d'une légère mimique tenant lieu de sourire à ceux de sa race sans s'aventurer à répondre à la remarque du Dragon, et préféra plutôt s'aventurer avec lui dans les rues de la ville en question, observant avec une attention polie la cité autour d'eux.

En fait, si elle avait un style architectural très différent de l'ikhyldien classique, la ville ne lui semblait pas si éloignée d'une ville ikhyldienne de la Province Orzanienne, qui aurait été un territoire elfique avant la conquête et où auraient survécu encore de nombreux éléments de cette culture. Il ne fit toutefois pas de commentaire tout de suite et écouta plutôt ce que son hôte draconique avait à dire, ne pouvant s'empêcher toutefois de hausser un sourcil interloqué quand il lui posa la question de ses origines.

« Je dois dire que je trouve votre questionnement quelque peu étrange... songeriez-vous à demander à tout Nain s'il est né dans son continent ancestral ou non ? Enfin, pour vous répondre, oui, je suis citoyen ikhyldien de naissance. »

Bien que sa propre lignée soit purement orzanienne par le sang, Hansing avait à vrai dire du mal à cerner ce trait qui lui semblait tout orzanien de vouloir à tout prix lier la race à une appartenance nationale ou géographique... les teïderiens étaient ceux qui poussaient la chose le plus loin, mais visiblement les germes de la même attitude se pouvaient trouver jusque chez les sages dragons du continent, ce qui avait de quoi déconcerter. Parce que sa race était née dans les Duchés plus de trois milles ans au part avant, il ne pouvait être originaire que de là ou de l'Empire, plutôt que de n'importe où dans le continent ? Mais bon, il ne s'y attarda pas plus que cela, préférant revenir à d'autres sujets.

« Votre ville me semble être un endroit bien agréable ou vivre, en tous cas. Par bien des aspects je dirais qu'on pourrait presque la prendre pour une ville ikhyldienne d'Occident, aussi ne suis-je pas si dépaysé que cela. Je n'en suis donc que plus certain de voir nos deux nations capables de coopérer et d'échanger pour leur plus grand bénéfice mutuel. »

Après tout si le commerce et les échanges étaient toujours possibles, et pouvaient même parfois être plus enrichissant avec des gens très différents, notamment pour les échanges culturels, il était par contre plus facile d'échanger et surtout de commercer avec quelqu'un de proche. Pour prendre le plus évident, on avait plus de chance de vendre un objet enchanté à un habitant de cette cité qu'à un Akkatonien chez qui il se détraquerait possiblement au milieu d'une pléthore d'objets technologiques...

« Ceci dit, pardonnez-moi d'avance si c'est mon ignorance qui parle, comme je l'ai dit j'ai effectué bien peu encore de voyage en Eïrn, mais j'avais cru comprendre que la plupart des communautés y étaient assez ethniquement homogènes... me serais-je mépris, ou bien est-ce votre cité qui est exceptionnelle de ce point de vue ? »

Hansing se contenta d'une aimable mimique, qu'on aurait pu chez une race dotée de lèvres apparenter à un léger sourire, devant les explications du dragon, ne souhaitant pas outre mesure relancer le débat de ce côté-là, se doutant assez facilement que cela ne serait probablement pas très diplomatiquement fructueux... il préféra simplement poursuivre la discussion sur les autres sujets, celui-là étant du reste assez annexe à ce qui les intéressait vraiment, préférant donc se concentrer sur la ville et ce qu'elle avait à offrir, raison principale de sa visite, après tout.

« Hmmm il est certain que venir ici depuis les côtes ou depuis Akkaton demandera des efforts, surtout dans un premier temps, mais d'un autre côté un commerce de qualité est souvent à ce prix ! Du reste l'Empire a l'espoir qu'avec le temps et la multiplication des contacts diplomatiques et commerciaux, de plus vastes ensembles de correspondances se créent, ainsi sans doute que des moyens de transports plus standardisés. »

Au début – et même si Ikhyld était présent depuis plusieurs siècles à la lente et patiente échelle de l'intégration impériale ils étaient sans doute encore au début du processus global – relier une seule ville était coûteux, certes, mais plus avec le temps le nombre d'escales augmentait et plus cela se rentabilisait, voir participait à sécuriser le trajet. Assana serait ainsi une étape de plus dans ce vaste projet à long terme de l'Empire.

« Je vois vous formez donc un peuple plus cosmopolite que la moyenne... ma foi cela ne peut qu'aider aux relations avec l'Empire, je suppose, puisque nos deux états sont donc articulés autour de la coopération et non de la domination d'une seule race ! »

Après tout, il était en soit plus facile de dialoguer avec des gens dont la composition de la population était proche de la vôtre que l'inverse, non ? Non pas que les ikhyldiens aient des problèmes avec les communautés centrées sur une race, quand du moins cela n'était pas un prélude au racisme fanatique comme à Teïder, mais disons que les choses n'en étaient que d'autant plus facilitées quand ce n'était pas le cas, notamment en évitant de devoir choisir de préférence des marchands de la race correspondante pour profiter du meilleur accueil, par exemple !

« Les merveilles du continent ikhyldien, hum ? Hé bien je ne suis sans doute pas le mieux placer pour vous les décrire, hélas ! Je suis moi-même né en Orzian et j'y ai passer la plus grande partie de ma vie ! Même si j'ai déjà vécu quelques temps dans la Cité d'Ikhyld, et vu quelques fragments de l'Empire, ma vie ne m'a pas vraiment laissé le loisir de la parcourir en tous sens. Ceci dit je ne doute pas que vous receviez bon accueil si vous vous décider à visiter un jour notre continent, après tout de nombreux dragons y vivent depuis longtemps, et de manière générale l'Empire est toujours ouvert à qui vient en paix le visiter ! »

La discussion se poursuivait donc entre les deux diplomates, sur un ton en soit plutôt agréable. Comme le confirmait le Dragon, la petit cité eïrinienne avait elle aussi une forte tradition magique après tout, ce qui en soit la rapprochait naturellement des ikhyldiens, même si bien entendu cela ne voulait pas dire que les accords étaient validés d'avance, bien entendu. Cependant, le terrain était certainement plus favorable que si cela avait été l'inverse, ce dont l'Azurien n'allait certainement pas se plaindre, bien entendu, répondant plutôt sur le même ton aux questions et remarques de son interlocuteur.

« Vous n'êtes certes pas nos premiers interlocuteurs, mais nous considérons volontiers que chaque partenaire est important et peut aider à développer ce genre de circuits commerciaux, autant qu'une toile de discussions diplomatiques et d'échanges culturels. »

La réponse pouvait paraître assez convenue, mais n'en était pas moins sincère, car la stratégie ikhyldienne, d'extension lente par le rayonnement diplomatique et culturel, reposait bel et bien sur la multiplication de ce genre d'accords, chaque nation nouant de tels partenariats devenant au final, quand tout se passait bien, un petit phare montrant aux voisins les atouts qu'apportaient les échanges avec l'Empire.

« En effet, même si ce n'est en rien une religion d'état, le culte de la magie est très répandu en Ikhyld. Disons qu'il s'harmonise bien avec notre façon de voir le monde, avec l'idée que ceux que la magie favorise se doivent d'aider les autres, que ce soit le mage usant de sa magie pour aider les autres ou l'Empire aidant les autres nations grâce aux bienfaits magiques dont il a pu profiter. »

Hansing lui-même, d'ailleurs, était entré au service de l'état en partie habité par cette idée qu'en échange des grands dons magiques qu'il avait reçu à la naissance et de l'éducation magique dont l'état lui avait permis de bénéficier, il se devait d'aider à son tour ses concitoyens à son échelle.

« Ma foi je ne suis pas expert en voyages ikhyldiens mais à ma connaissance il suffit de se signaler à la frontière, comme pour se rendre dans la province orzanienne. Quant à moi hé bien... je ne suis qu'un modeste diplomate, je ne dirais donc pas que je suis particulièrement apprécié ou non. Mais oui, notre Arcane en charge de la diplomatie est très appréciée, d'autant qu'elle a aussi en charge les arts ! »

Tout en répondant aux propos du grand Dragon, qui ne l'était plus tant en taille entre ses divers rétrécissements, Hansing avait bien entendu accepté avec plaisir de rencontrer les responsables locaux, ce qui semblait une étape assez naturelle dans ce genre de négociation.

La conversation se poursuivait donc sur un mode plutôt agréable alors que les deux mages progressaient vers la salle du conseil de la cité eïrinienne, tous les deux semblant avoir, du moins dans les grandes lignes, des visions assez proches pour bien s'entendre assez naturellement, si l'on pouvait dire. C'était en soit toujours de bonnes bases pour des négociations, même si bien entendu la proximité de point de vue entre les deux entités politiques était le plus important... ce qui n'empêchait pas que la façon dont les négociateurs communiquaient entre eux jouait également, c'était indéniable.

« Je trouve en effet que cette façon de voir les choses est des plus saines, puisqu'elle profite à tous et évite aux mages de développer un sentiment de supériorité ou d'arrogance, dans un système qui valorise leurs talents. Mais bien sûr, faisant moi-même partie dudit système je suis peut-être biaisé dans cette évaluation, cela va de soit. »

On avait après tout tendance à plus facilement accepter et soutenir les systèmes et les schémas mentaux qu'on avait intégré depuis l'enfance, c'était même pour ça que des systèmes aussi manifestement problématiques que ceux de Teïder, par exemple, pouvaient se maintenir sur la durée une fois qu'ils avaient commencé à s'ancrer dans les consciences. Mais, biaisé ou non, Hansing était en tous cas sincèrement convaincu des bienfaits du système et de l'approche qui étaient valorisés par l'Empire ikhyldien. Il se garda d'ailleurs de répondre sur le cas d'Akkaton, préférant se contenter de cette mimique du bec et du visage qui tenait lieu de sourire chez les Azuriens et d'un léger hochement de tête, validant les propos du Dragon largement rétrécit sans pour autant vouloir en rajouter, au risque de paraître par trop arrogant en soulignant les défauts de l'approche akkatonienne par rapport à celle de son propre pays.

Quoiqu'il en soit, ils arrivèrent donc devant le conseil de la cité qui, à l'image de la population de celle-ci, était varié ethniquement parlant, ce qui n'étonna donc pas énormément Hansing, vu ce qu'il avait déjà vu jusqu'ici. Alors que le Dragon prenait place au près de ses collègues, il s'inclina à l'Ikhyldienne, en marquant un haut degré de respect, puisqu'il avait affaire à l'organe dirigeant d'une cité indépendante.

« Je ne peux que remercier votre cité de m'honorer d'un si bon accueil. Ma visite se passe au mieux en effet et de ce que j'ai vu autant qu'entendu je pense que les échanges renforcés entre nos deux peuples ne pourront qu'être une excellente chose, pour le plus grand bénéfice des deux parties. »

Comme souvent, Hansing disait la vérité, en dépit du langage quelque peu formel, d'aucuns auraient pu dire fleurit, qui était le sien. Après tout, la ville était largement tolérante, tournée vers la magie, soucieuse de paix, elle semblait donc très proche au final des valeurs ikhyldiennes.

« L'Empire se porte bien, comme toujours. La soie est toujours une valeur commerciale sûre bien entendu, de même que nos œuvres d'art et nos productions culturelles, entre autres choses. Bien sûr, les potentiels troubles en Orzian nous inquiètent, comme tous les habitants du continent je pense, mais faire face à ceux-ci aux côtés d'amis fiables est encore une autre bonne raison de nouer de bons accords, n'est-ce pas ? »

C'était visiblement le conseiller Nain qui semblait diriger le conseil ou du moins parler en son nom, puisque ce fut une fois encore le seul à reprendre la parole... à moins que ce ne soit simplement car il s'agissait d'une matière qu'il maîtrisait ou que ses pairs lui avaient délégués la discussion diplomatique cette fois-ci ? Difficile à dire en connaissant encore aussi peu la politique de la cité et les rouages de son fonctionnement. En tous cas, cela ne dérangeait bien entendu pas Hansing de dialoguer avec celui-ci, évidemment, et il écouta ce qu'il avait à dire tout en veillant à maintenir son attention assez largement ouverte pour ne pas avoir l'air de dédaigner les autres notables présents dans la pièce.

« Ma foi il va de soit que nous n'en sommes pas encore à dresser un inventaire exhaustif de tout ce que nos peuples ont à s'échanger, même si nous pourrons régler ce genre de détails plus tard. Il ne fait aucun doute en tous cas que nous avons à échanger, cela du moins me semble assez certain, sans parler des échanges d'idées qui me semblent, souvent, aussi sinon plus intéressants que les échanges de biens. »

C'était une façon très ikhyldienne de voir les choses, sans doute, mais Hansing n'était-il pas là pour représenter justement Ikhyld et ses vues, après tout ? La question suivante ceci dit ce fit plus personnelle, et l'Azurien prit quelques temps pour y réfléchir posément, étant du genre à préférer les réponses sincères aux langues de bois, du moins quand il en avait la possibilité, et prenant donc quelques instants pour livrer une réponse qui soit plus que de convenance.

« Je ne pense pas pouvoir m'honorer de représenter parfaitement la noblesse ikhyldienne, mais si vous voulez mon avis personnel hé bien... je regrette de ne pas être très original, mais je n'en serai pas moins sincère en vous répondant que je partirai à la recherche d'objets d'arts locaux, ou peut-être d'un instrument que je ne connaîtrais pas mais dont je pourrais jouer... après tout, le fait même d'être dans un environnement si hostile doit je suppose stimuler une certaine forme de créativité. »

Après tout, lui-même possédait un instrument enchanté taillé dans une écaille de dragon, il ne doutait pas que les objets tirés des divers monstres locaux devaient aussi pouvoir être source de créativité, autant pour les instruments que pour l'art, non ? C'était sans doute une réponse très proche de ce qu'on pouvait attendre du cliché de l'ikhyldien type, ceci dit, mais Hansing n'en avait pas moins été sincère, étant assez représentatif de l'ikhyldien type sur certains points, apparemment.

« Ceci dit je ne doute pas que les composants alchimiques et les supports monstrueux pour l'enchantement intéresseraient aussi nombre de mes collègues, même si c'est moins, pour ma part, mon domaine de compétence... »

Cette fois, le conseil fut plus varié dans ses réponses, divers interlocuteurs répondant à Hansing en fonction des sujets. Le diplomate se tournait tour à tour vers chacun des conseillers, pivotant légèrement vers celui ou celle qui parlait tout d'abord, sans ignorer le reste de l'assistance pour autant. Il commença donc par répondre aux premiers propos adressés, ceux d'une conseillère Humaine aux cheveux de feux.

« Oh, je suis fermement convaincu que toute nation a des choses à offrir en matière de commerce, et que même une grande nation comme Ikhyld a tout intérêt à développer un approvisionnement diversifié pour ses échanges. Et en effet, Eïrn est une terre riche d'histoire, et je ne doute pas que votre propre cité a également ses grandes richesses propres... je ne suis pas le plus grand expert de la chose commerciale, la diplomatie proprement dites étant plus mon domaine, mais je n'ai jamais vu aucune nation dont l'Empire aurait déclaré le manque d'intérêt... »

Certes, la volonté d'Ikhyld de s'agrandir par son influence, ses liens diplomatiques et ses échanges commerciaux jouait aussi un rôle dans cette réalité,mais bon, la réponse n'en restait pas moins vraie pour autant. Et de ce qu'il avait vu de la cité, il doutait fortement que l'Empire doive se « forcer » pour trouver de quoi dialoguer et échanger avec eux. Quoiqu'il en soit, il écouta ensuite les paroles d'une charmante damoiselle elfique, admirant l'instrument qu'elle désignait à son regard.

« Vous voyez, nous trouvons déjà rien qu'en quelques instants discussions des sujets d'intérêts potentiels pour les Ikhyldiens dans votre nation ! Je dois dire que ces instruments me rendent très curieux, mais il n'est ma foi guère le temps d'expérimenter et de vous faire un récital, ahah ! Mais donc je ne doute pas que nous trouverons moult éléments à échanger, donc. »

Hansing, en tant que musicien, était forcément curieux de la chose musicale, mais il savait réprimer cette curiosité devant son plus important devoir de diplomate. Notamment en en venant finalement à répondre à son dernier interlocuteur, un militaire humain en armure sans doute chargé de la défense de la cité, supposait-il.

« Hé bien nous ne sommes sûrement pas les plus grands marchands d'armes du monde, mais nous sommes toujours prêts à échanger armes et matériaux également, du moins tant que nous sommes convaincus que ce n'est pas pour faire la guerre à des tiers innocents. Mais dans votre cas cela ne semble clairement pas être l'idée, il me semble, donc cela ne devrait pas poser problèmes, ma foi. D'autant que comme nous l'avons dit vous aussi pourrez échanger des matériaux intéressants, ceux tirés des monstres notamment, donc c'est assez équitable... »

Hansing répondait de son mieux aux questions et remarques des différents membres du conseil de la cité, parlant comme toujours avec sincérité, même si cela ne l'empêchait pas de présenter les choses sous le meilleur angle, bien entendu. Mais il n'était pas partisan des mensonges diplomatiques, partant du principe que le mensonge finissait toujours, tôt ou tard, par s'éventer, et fâcher celui à qui il avait été adressé. Pour lui, une relation diplomatique saine ne pouvait se baser que sur une certaine confiance mutuelle à long terme, et c'était bien ce genre de relations qu'il s'efforçait de bâtir pour Ikhyld ! Il hocha donc la tête à la réponse rassurée de la première conseillère, avant de sembler hésiter un instant à celle de la seconde.

« Hé bien je dois vous avouer que je n'ai aucun cadeau à offrir en retour cette fois, mais Ikhyld ne manquera pas de rendre tout bienfait qui lui sera offert, cela va de soit. Je serai de fait très heureux d'accepter des présents qui seront remis à notre Impératrice-Phénix et à travers elle à tout l'Empire. »

Il ne serait évidemment jamais venu à l'idée d'Hansing de garder pour lui un présent reçu dans sa fonction de diplomate, même si c'était de façon quelque peu impromptue. Il se considérait avant tout comme un représentant de l'Impératrice-Phénix et de l'Empire, une extension de leur commune volonté en quelques sortes. De fait, la question qui sembla finalement le décontenancé quelque peu fut celle sur ses exploits et sur la grande hydre que, en compagnie d'une troupe de mercenaires, il avait abattu dans ce pays quelques temps plus tôt. Il marqua quelques signes de troubles mais se repris bien vite, cependant.

« Ahem... si je ne peux pas dire qu'Ikhyld et la République partagent les mêmes vues sur tout, cet interdiction de faire la guerre est une chose sur laquelle nous pouvons certainement nous accorder en effet. Quant à moi hé bien... oui en effet, il est bien possible que ce soit de moi dont vous ayez entendu parler à ce propos, en effet. »

Après tout, même s'il n'aimait pas se mettre en avant à outrance, Hansing n'aimait pas non plus dissimuler la vérité, et après tout l'intérêt de la manœuvre avait justement été de donner une bonne image de l'Empire à travers cela, alors il n'allait certainement pas nier celle-ci.

« Pour en être diplomate je n'en suis pas moins mage, et une amie à moi m'a demander de l'aide pour protéger des membres de sa communauté de naissance, menacés, donc, par une Hydre. La conception ikhyldienne de la magie nous enseigne que ceux qui possèdent de puissants pouvoirs doivent les mettre au service des autres, et c'est donc ce que j'ai fais. De plus, c'est aussi une façon de montrer que l'Empire est là pour aider ses amis, fut-ce au travers d'humbles agents comme moi.. bien que... musclée pourrait-on dire j'aime à croire que c'est donc aussi une œuvre de diplomate, dans un sens. »

Hansing écoutait comme toujours les diverses réponses avec politesse, se tournant chaque fois légèrement vers celui qui parlait ou à qui il répondait, sans jamais tourner le dos aux autres non plus ceci dit. C'était en soit un étrange exercice que d'avoir une discussion diplomatique seul devant tout un groupe, mais ce n'était pas la première situation diplomatique un peu singulière qu'il vivait, et il gérait donc les choses avec fluidité, du moins, autant que possible. Il commença par clore la question du cadeau diplomatique avec une de ces mimiques qui, chez les Azuriens, tenaient lieu de sourire.

« Je suis certain que le cadeau lui plaira... offrir de l'art ou un instrument de musique est toujours un bon moyen de plaire à l'Empire d'Ikhyld, après tout, surtout quand il s'agit comme ici d'une création original. L'art après tout, ne perd rien de sa valeur par la quantité, tant que la qualité est toujours présente. »

De fait il ignorait si, personnellement, ce serait un cadeau qui comblerait l'Impératrice-Phénix, et à vrai dire probablement pas, mais ce serait un cadeau diplomatiquement apprécié, qui pourrait enrichir les collections impériales ou être confiées par exemple à un artiste patronné de talents, ce genre de choses. Il revint ensuite au militaire pour rebondir sur la question de l'aide que pouvait apporter l'Empire et celle qu'il pouvait apporter personnellement.

« Je serai bien entendu toujours heureux d'aider une communauté aussi amicale que la vôtre, cela va de soit. Et au-delà comme je l'ai dit Ikhyld prend toujours soin de ses amis et alliés. Quant une menace passerait les forces de votre protecteur, quoique cela ne semble pas chose aisée, et si la République ne peut vous aider, nous ne manquerions pas de vous apportez de l'aide pour peu que vous en demandiez. Cela arrive régulièrement que de puissants mages ikhyldiens viennent en aide à de plus petites nations... Sa Majesté elle-même est par exemple venue détruire un dragon-squelette qui menaçait un groupe de vos compatriotes il y a quelques mois, par exemple. »

On ne pouvait pas dire que l'Empire rechignait à aider ceux qui le lui demandaient... tout simplement parce que cela servait sa politique, si l'on voulait être honnête, mais Hansing aimait à considérer que le respect des valeurs ikhyldiennes était aussi pour beaucoup dans cette attitude. C'était le cas quand il se faisait le bras magiquement armé de son pays dans ce genre de circonstances, en tous cas. Il en revint finalement au puissant dragon qui s'était miniaturisé.

« La situation actuelle préoccupe l'Empire, évidemment, comme tout le monde je pense. Les teïderiens sont une menace générale, et Césario semble pouvoir ranimer des soldats un peu partout... nous les combattons chaque fois que c'est possible. Quant aux anciens dieux nagas, si leurs sévices se cantonnent à Akkaton pour le moment nous sommes aussi prêts à agir contre eux si les akkatoniens nous demandent de l'aide. Hélas ces menaces sont soit insaisissables soit bien protégées mais nous ne ménagerons pas nos efforts pour en venir à bout. »

Une fois encore, Hansing parlait avec sincérité, et sa désapprobation était visible quand il parlait de toutes ces menaces. Il était visiblement personnellement décidé à agir s'il le pouvait, et il y avait peu de doute que l'état qu'il représentait soit d'un autre avis.

« Quant à déployer des troupes en Eïrn hé bien... tant que Teïder ne marche pas dans cette direction nous préférons ne pas offenser la République en faisant des manœuvres militaires sur son territoire mais si nécessaire ou si notre aide était demandée nous ne manquerions pas de l'accorder, bien entendu. À la fois dans le respect de nos valeurs et parce que personne en Orzian, je pense, ne peut se payer le luxe de voir l'une ou l'autre de ces menaces se renforcer, voir pire qu'elles convergent ou que l'une absorbe l'autre. La seule voie est de nous unir pour les stopper, ce pourquoi nous avons tenu une grande conférence internationale la semaine dernière... mais je suppose que vous en avez entendu parlé, bien entendu ? »

Hansing n'en était de toute façon pas à sa première discussion diplomatique quelque peu chorale, et n'avait donc pas spécialement de mal à gérer les spécificités que cela demandait, d'autant que le conseil local était bien organisé par ailleurs, chacun parlant à son tour, lui permettant de répondre dans l'ordre sans trop de problèmes.

« Hé bien... je ne peux pas dire que considérer le territoire qui dépend de soit comme une sorte de zone tampon est quelque chose que j'approuve, mais nous composeront avec les contraintes locales, bien entendu. En tous cas, en matière d'aide ponctuelle, nous serons bien entendu ravis de vous aider, cela va de soit. »

En soit ce n'était pas si rare d'ailleurs de voir un ou deux puissants mages ikhyldiens se rendre en Eïrn pour régler un problème avec un monstre sauvage, une créature mort-vivante ou une autre menace divers, renforçant ainsi les liens avec les communautés concernés. Akkaton ne manquait pas de faire pareil d'ailleurs, ne fut-ce que pour faire pièce à l'influence diplomatique d'Ikhyld, sans doute. Quant à savoir les conséquences que tout cela aurait à terme hé bien... ce serait une autre question, et pour le futur, sans doute.

« Je ne pense pas que ce serait bon signe de voir Akkaton faire appel à de l'aide vu leurs moyens, certes, si cela voulait dire qu'ils étaient dépassés... ceci dit je veux croire que s'ils se rendaient compte que notre collaboration pourrait être essentielle pour contrer la menace des anciennes déités nagates ils n'auraient pas l’orgueil de se refuser à la demander. »

Ce n'était bien entendu qu'un espoir de sa part, basé sur l'estime relative qu'il avait pour Akkaton et son appréciation de l'empereur-élu en place, entre autres. Mais bon, il n'était même pas certains qu'ils en viennent jamais là, de toute façon.

« Eïrn était représenté par un émissaire de la République, en effet, et Eïlynster était en effet présent... j'ai dû partir trop vite après la conférence pour pouvoir connaître tous les détails mais je sais que tout le monde s'est engagé à agir contre la menace de Césario, et que même Eïlynster s'est déclaré prête à fournir de l'aide, notamment contre Teïder. »

Après tout, cela faisait des siècles et des siècles qu'Eïlynster était en guerre contre Teïder. Une guerre plus ou moins aiguë selon les moments, mais il n'était guère étonnant que la nation aux hautes murailles soit prête à combattre ses ennemis sans trop hésiter.

« Enfin... je ne pense toutefois pas que les teïderiens auront la folie d'ouvrir un autre front en vous attaquant. Pour obtenir un résultat il faudrait qu'ils déploient tellement de force qu'ils se rendraient vulnérables sur les fronts déjà existants. Après tout, la puissance défensive d'Eïrn n'est pas à négliger. »

L'interlocuteur principal de l'Azurien semblait être redevenu le grand dragon – quoique en cet instant il ne soit plus si grand, mais bien entendu le mage ailé savait à quoi s'en tenir après l'avoir vu à l'extérieur de la ville – peut-être tout simplement parce qu'il avait été désigné comme négociateur à la base et que, ayant posé leurs diverses questions, les autres membres du conseil lui laissait la main pour poursuivre lesdites négociations, ainsi que la discussion les accompagnant.

« Nous avons évidemment des problèmes, comme le reste d'Orzian... nous sommes relativement tranquilles vis-à-vis de Teïder vu leur capacité navale quasiment inexistante mais nous avons à gérer pas mal de problèmes liés aux morts-vivants de Césario, notamment. Ceci dit, rien que l'Empire ne puisse gérer, bien évidemment. »

Après tout, contrairement peut-être à Akkaton ou à Eïlynster, qui pouvaient être dans le focus direct de certaines des menaces actuellement déchaînées sur le continent, Ikhyld n'avait pas à subir une telle charge, et ses moyens ainsi que ses mages d'élite lui permettaient largement de gérer les choses... quoiqu'il en soit, Hansing écouta les divers propos du grand dragon en hochant plusieurs fois la tête, avant que ne vienne la question finale, devant laquelle il écarte ses mains terminées par des serres en signe évident de manque de réponses claires.

« Vous me demandez là de me prononcer sur des choses dont j'ignore tout et que je ma courte vie ne me permettra peut-être guère de voir. Je ne vous ferai pas la grossièreté de ne pas répondre, mais je vous prie de considérer ces paroles comme les miennes et non, en cela, comme celle de l'Empire. »

On pouvait considérer cela comme une mesure de précaution oratoire, mais, comme souvent à vrai dire, l'Azurien n'en paraissait pas moins sincère. Il pouvait donner un avis dans ce genre de matière, mais guère plus, n'ayant après tout pas le don de discerner l'avenir.

« Je dirais que cela dépendra beaucoup de comment ces menaces seront vaincues, que l'on parle de Teïder ou des autres... nous pouvons espérer que si les nations d'Orzian parviennent à s'unir, nous pourrons connaître une certaine paix dans la victoire. Mais il ne fait aucun doute que, à plus ou moins long terme, le cas de Teïder finira par devoir être réglé, d'une façon ou d'une autre, en effet. »

Si les Ikhyldiens avaient été seuls à la manœuvre peut-être auraient-ils pu tenter, après avoir trouvé un moyen de tuer ou de bannir définitivement leur dieu, de fléchir lentement les teïderiens, sur le temps long. Mais il était peu probable qu'Akkaton ait cette patience, et à un moment ou à un autre, il déploierait les forces nécessaires pour vaincre le grand royaume central, entraînant probablement d'autres à devoir agir également.

« J'espère que d'ici à cette lointaine échéance, et peut-être grâce à la coopération qu'elle amènera, les peuples présents en Orzian pourront trouver à cohabiter. Et si ce n'est pas le cas ma foi... chacun sait pourquoi Ikhyld s'est avancé sur ce continent à la base. Nous pourrons aider Akkaton à vaincre Teïder mais nous ne les laisseront pas conquérir le reste du continent, si nous en venons là. J'espère que ce ne sera jamais le cas mais, si cela se produit, je soulignerai humblement que l'amitié avec Ikhyld n'en sera que plus précieuse. »

Oh bien sûr les ikhyldiens tenteraient sans doute aussi avec le temps d'unifier le continent sous leur protection, s'ils en venaient à devoir chasser Akkaton, mais plus probablement, hors du cas de Teïder, en douceur, en laissant chacun décider quand rallier l'Empire. La conquête akkatonienne, elle, serait comme elle l'avait toujours été, bien plus brutale, mais cela, il jugea peu diplomatique de le souligner.

« Personnellement, j'espère qu'Ikhyld et Akkaton finiront par trouver un équilibre, qui garantira des provinces prospères aux deux empires sur ce continent et laissera libres ceux qui veulent l'être, faisant d'Orzian une terre d'échange par excellence. J'ai conscience que c'est là un vœu bien pieu, sans doute, mais je consacre modestement ma vie et mes efforts à faire pencher la balance de ce côté, d'où mon service en tant que diplomate. »