Le 23 Novembre 2000 de l’Âge d’Acier

L’automne avait laissé place à l’hiver. L’air frais de la période hivernale à venir picota la peau de la moniale, droite et impartiale. Elle ne bougeait pas. Insensible à la morsure du froid, du moins résistante, elle ne se laissa pas perturber. Elle attendait, là, seule. Un mois après ses découvertes aux Duchés, son enquête l’avait menée ici en plein Ikhyld. Elle avait rencontré cet homme, l’Elfe majordome, plus vieux qu’on ne le pensais et sur la fin de sa vie. Mais il a parlé, et lancé la moniale sur une autre piste. L’homme qui l’avait recueillie n’était en aucun cas un esclavagiste ou un mercenaire, mais un moine Ikhyldien en pèlerinage. Pourquoi ? Elle le saurait bien assez tôt.

Ses recherches l’ont menée à une très vieille bâtisse, le monastère autrefois habité par le moine qui l’a sauvée d’une vie très probablement malheureuse. C’était donc dans le brouillard formé en ce matin hivernal que, aussi patiente que la vampire, la silhouette du bâtiment se dessinait. Vittoria aurait souhaité s’avancer, et en apprendre davantage tout de suite, mais elle savait qu’elle n’en aurait pas la force. Alors, elle attendait. Elle avait donné rendez vous à son compagnon de route à l’époque, Amset, devenu aujourd’hui un proche ami pour la vampire qui se sentait soutenue de se confronter au point final, ou pas, de cette intrigue, ensemble.

Après de longues minutes sans bouger, droite et fière de posture avec sa capuche sur la tête et son bâton en main, elle sentit la présence de son compagnon. Alors, elle brisa le silence et se défigea pour se tourner vers lui. Par briser le silence, elle n’employa pas un mot. Simplement que son mouvement suffisait pour indiquer que, finalement, la femme était plus vivante qu’une simple statue de glace, et elle croisa son regard de soufre dans celui du Naga, en silence, évocateur d’une grande reconnaissance de le voir à ses côtés.

Amset devait donc retrouver un mois plus tard la moniale après leur dernière aventure ensemble, du temps était passé depuis et quelques péripéties, mais le faux mercenaire avait trouvé moyen de pouvoir être là pour elle. Après tout c’était important pour son amie et lui était curieux de connaître le fin mot de l’histoire, même si celle-ci le concernait peu dans les faits. De plus, c’était une bonne raison pour se rendre dans les terres de la province Ikhyldienne, territoire qu’il avait peu fréquenté au cours de son existence pour diverses raisons, notamment que la vie de mercenaire n’y était pas forcément aussi rentable ou facile à justifier que dans les duchés. Même si, la carrière de duelliste errant elle, pouvait pleinement s’y pratiquer...

C’est donc en une matinée marquée par un petit brouillard qu’Amset retrouva son amie non loin du fameux monastère, celle-ci l’attendait seule, avec une habitude qui dénotait que la chose ne la dérangeait point. Le naga qui de toute façon n’était pas discret et avait dû être assez vite repéré s’approcha donc calmement d’elle et dit amical.

« Heureux de vous retrouver mon amie, alors comme ça nous approchons de la fin de cette enquête ? » Ou bien d’un autre embranchement pensa t-il, mais cela il verrait bien, après tout ce genre de quête du passé pouvait être compliqué supposa t-il. Quoiqu’il en soit, il avait bien vu qu’elle était contente de le voir à ses côtés, le contraire l’aurait étonné évidemment, mais c’était toujours agréable à observer. Il se permit donc d’ajouter avec une petite dose d’amabilité en désignant le monastère au loin.

« Je suppose en tout cas que nous avons là l’explication parfaite quant au fait que vous êtes, eh bien une moniale. Je suppose d’ailleurs que vous ne comptez pas changer de cette habitude par la suite. » Après tout cela semblait bien lui aller.

La présence du Naga n’était pas déplaisante, et Vittoria ressentait même un certain apaisement. Elle qui était d’habitude calme et maître d’elle même, elle semblait malgré tout préoccupée par la situation, comme si subitement attendre dans le suspens de savoir ce qui l’attends la met dans cet état. Elle frottait son pouce contre le bois de son bâton, nerveusement, ne tenant presque même plus sur place. Elle croisa le regard de l’individu qui l’a rejointe, lui adressant un sourire qu’elle réserve à certains de ses proches.

Oui, il semblerait que la solution soit en ces lieux. J’ai très probablement appris ici, mais nous en aurons le coeur net quand nous nous avancerons en ces ruines. Le temps se veut taquin, la rosée du matin rend les lieux d’autant plus terrifiants et mélancoliques, ne pensez vous pas ?

Elle lui laissa un temps de répondre avant de faire un pas vers l’avant. Elle commença à se diriger vers le vieux monastère qui avait difficilement résisté au temps mais restait en partie debout. Le bâtiment se trouvait au beau milieu d’une plaine jonchée de quelques bois, et plus spécifiquement dans une cuvette : le lieu a spécifiquement été choisi pour être dans le creu des collines, protégeant très sûrement les lieux du vent et autres dangers, mais attirant tout autant la brume. A moins que cette brume soit de nature magique pour camoufler le bâtiment dans le paysage ? Il n’était pas encore possible de le déterminer.

Une fois suffisamment avancée, elle s’arrêta face à une grande porte en pierre, dont quelques blocs du sommet reposent au pied de cette dernière, enfoncés dans le sol. Les portes, s’il y en avait, son introuvable. Si ce n’est des restes de planches si bien abîmées qu’il en était difficile de les remarquer du premier coup d’oeil. Cette grand porte, entrée principale permettant de pénétrer dans l’enceinte de l’établissement, menait à une énorme cour envahie par la végétation. Au centre se tenait un arbre, très probablement centenaire, qui devait faire la beauté des jardins du lieu… Les chemins n’existent plus, et il est à peine facile de percevoir le lieu où l’on entretenait le jardin. Il y avait bien des pistes pour explorer le monastère entre les escaliers de pierre descendant et montant et les entrées dénuées de portes. La pierre, quant à elle, était recouverte de lierre et de mousse, donnant un aspect assez ancien au bâtiment.

Vittoria, quant à elle, semblait particulièrement plongée dans son esprit. Les lieux devaient probablement lui faire un choc, et il revenait au Naga de prendre une décision de visite. Il y avait un escalier en pierre s’enfonçant dans le sol pour mener à une cave, très probablement, un escalier en bois permettant d’accéder à l’unique entrée du clocher, faisant sûrement office de grenier, dont un pan s’est effondré, mais le sommet semble tenir bon en brandissant fièrement la lourde cloche qui grince aux mouvements de la douce brise. Quant au reste, il y avait un bâtiment plus proche du sol et tout en longueur, sûrement les chambres et la salle de vie, avec quelques petites maisons dispersées dans le grand domaine, dont un moulin à eau ayant arrêté d’exploité la rivière depuis un bon moment.

Amset s’il n’était pas un fin psychologue, pouvait tout de même deviner la nervosité certaine de Vittoria à l’attitude que celle-ci avait. Une attitude qui pouvait se comprendre, après tout ils approchaient d’un lieu qui avait eut une grande importance pour elle à bien des égards et qui semblait à bien le regarder… Un peu désolé, mais sans doute était-ce le cas pour certains monastères ou lieux du genre lorsque le temps faisait son œuvre.

« Il est bien que nous soyons deux dans ce cas. » Glissera t-il donc d’un ton reptilien se voulant rassurant et prévenant quand la moniale dit que la rosée du matin et les circonstances rendaient le lieu encore plus effrayant et mélancolique qu’il ne l’était. Il pouvait le comprendre, il avait vu pire en soit, elle aussi et certainement bien plus dangereux, mais conjugué à une certaine appréhension, ça devait tout de même avoir son effet.

Quoiqu’il en soit, ils pénétrèrent ensuite dans le monastère qui était sans un lieu assez isolé, était-il inconnu des gens des environs ? Probablement pas pensa t-il même si la brume semblait du genre à le dissimuler, il doutait que depuis le temps quelqu’un n’ait pas rôder dans les environs. Est-ce qu’il avait été pillé ? C’était une autre question intéressante, mais peut-être pas en vérité s’il n’avait pas été si connu que cela.

Et en effet les lieux étaient déserts depuis un long moment, probablement pas juste quelques années, mais au moins des décennies si ce n’est plus. Amset imaginait bien que l’endroit avait été fort peuplé et actif il y a un temps, mais aujourd’hui ? Il se demandait dans les faits ce qui avait pu arrivé aux gens vivant dans les lieux. Il doutait qu’ils soient partit pour des raisons de violence, il n’y avait pas de trace de telle chose, mais dans ce cas pourquoi ? Désintérêt ? Manque de recrues ?

« Allons voir les chambres et la salle de vie, ou une bibliothèque s’il y en a une, nous aurons ainsi des informations sur les lieux. J’aimerai savoir aussi, pourquoi ils sont déserts. » Finit donc par dire le naga calmement en devinant que c’était à lui de prendre l’initiative, il prit alors avec douceur la main de Vittoria et dit en l’encourageait à le suivre ainsi. « Ce n’est pas trop dur ? » Ce demandé d’un ton doux et prévenant évidemment.

Le fait que son ami prenne les devants soulagea la moniale qui, plantée là, pouvait le rester telle une statue de marbre. Mais l’initiative du Naga la sortit de sa torpeur, et elle put faire un pas en avant pour se mettre à le suivre. Elle acquiesça faiblement, sans pour autant avoir perdu de sa rigueur, rassemblant ses esprits et ses forces pour mener la marche.

Oui, c’est une bonne idée.

Elle s’avança vers le bâtiment pour y pénétrer, s’assurant que son compagnon la suive de prêt. Elle détailla l’architecture toute en longueur de la bâtisse en y évoluant d’un pas simple. Les lieux semblent avoir été simplement abandonnés, le toit relativement intact mais bien trop vieux pour le rester. Quoi que, une tempête d’autrefois semble en avoir emporté une partie, laissant la lumière blafarde du jour rayonner dans les lieux. Il y faisait froid, aussi, et les pavés laissaient passer de la végétation par ci par là. C’était une très grande pièce, toute en longueur, sûrement la salle à manger. Vidée de ses meubles, il devait sûrement y avoir une table en cet endroit, et autres meubles pour les couverts et la vaisselle.

Vittoria ne s’attarda pas davantage ici et avança directement vers les dortoirs. Des pièces sans intérêt, là aussi, sobres et simples. L’intérêt de ce bâtiment est bien l’escalier qui menait au sous sol. Un sous sol assez étriqué, étant qu’un simple couloir étroit assez bas de plafond. Vittoria ne pensa pas à allumer de lumière, n’en ayant pas besoin, et poursuivit plus loin.

Le couloir menait à plusieurs pièces. Une chambre froide, un lieu de stockage, quelques cellules aux portes de bois… Mais surtout une large porte renforcée qui ne semble pas vouloir bouger de là, extrêmement bien conservée et ayant toute son intégrité. Un ouvrage simple dans l’esprit, la porte remplissant sa condition de porte forte, mais qui peut avoir un certain charme dans l’esthétique que ce genre de porte renforcée au fer peut avoir. Quoi qu’il en soit, elle était verrouillée, mais l’ouvrir n’était pas un problème. Après quelques secondes de recherche simple, il s’avèrerait que la clef était dissimulée sur le support d’une torche. Un moyen pour décourager les simples voleurs aveuglés par leur soif de richesses, probablement, alors qu’une simple personne à la recherche du savoir a la patience de retrouver l’objet.

Quoi qu’il en soit, la moniale enfonça la clef dans la serrure et, après l’enclenchement d’un complexe système de verrouillage un peu bloqué, la porte s’ouvrit sur une nouvelle pièce. Un lieu très précieux qu’est la salle des archives, une pièce étrangement bien aérée, à l’abri de l’humidité et des intempéries qui pourraient détruire ce qu’il s’y trouve. Vittoria s’avança vers la multitude de documents rassemblés sur les étagères de plusieurs meubles et dans quelques boîtes au sol, la pièce ne laissant à ceux qui y entrent que la place d’y rentrer à deux.

Le bâtiment était grand, pas immense, mais grand, sans doute les moines avaient été nombreux à y vivre aussi, l’avaient-ils fait en quelque sorte en autarcie ? Exploitant les terres alentours pour subvenir à leur besoins ? Peut-être, difficile à dire car de la présence des moines en ces lieux, le monastère et ce qu’ils y trouveraient, seraient sans doute les seuls indices qu’ils auraient pour cela. Peut-être qu’un archéologue aurait plus d’aisance à trouver d’autres choses, mais telle n’était pas leur profession, cela et c’était surtout le monastère qui les intéressaient.

Il n’y avait rien de particuliers dans les dortoirs, sauf peut-être un détail, est-ce que ça avait été des chambres individuelles ou en effet un dortoir commun où les moines avaient dormis dans la même pièce ? Après tout selon les monastères et leurs mentalités, les deux pouvaient se faire.

Quoiqu’il en soit une fois qu’ils descendirent, ils purent trouver ce qui semblait être une chambre forte dans le sous sol, Amset ne s’attendait évidemment pas à ce qu’il y ait derrière un véritable trésor, ça ne semblait pas après tout être un de ces monastères qui accumulait les biens financiers et dons pour diverses raisons. Par contre, qu’il y avait derrière ? La salle des archives… Sans doute devaient-elles êtres écrites dans des langues qu’Amset maîtrisaient moyennement au contraire de Vittoria, mais rien de bien insurmontable.

« Je suppose que nous allons passer un certain temps à consulter les ouvrages présents ici, voulez-vous que nous nous y attelions maintenant ou que nous poursuivions la visite avant ? » Demanda alors le naga avec réflexion, n’osant pas toucher les documents pour le moment car il n’était pas sûr que ces derniers soient en très bon états. Peut-être la magie avait-elle été employée pour aider à la conversation, mais pouvait-on s’y fier vu le délabrement des lieux, quoiqu’il en soit le naga glissa d’un air pensif.

« C’est étrange, pourquoi n’ont-ils pas emportés ces ouvrages ? » Au sujet des dîtes archives justement, quoique peut-être avaient-ils considérés cela comme inutile ?

Vittoria commençait à manipuler quelques documents avec précaution pour les lire à la volée, comme pour les détailler un temps sans vraiment s’atteler à les éplucher. Elle finit par relever la tête, pensive, avant de détailler la salle du regard en se redressant de tout son long. Elle vient ensuite croiser le regard du Naga, un léger sourire s’étant dessiné sur ses lèvres, comme si elle avait finalement remarqué sa présence et que celle ci l’apaisait.

Elle hocha de la tête en prenant son temps, redirigeant son regard vers la porte de la salle des archives avant de s’y diriger tout en ajoutant.

Nous les lirons plus tard, j’imagine. C’est un bien précieux, ici est stockée toute la mémoire du monastère, depuis sa création. Du moins, dans l’idéal ou rien n’a été perdu ou détruit. Quoi qu’il en soit, refermons la porte, il ne faudrait pas que ces documents se mettent à partir en poussières.

Elle s’enquit de poursuivre l’exploration des souterrains. Après le couloir menant aux principales pièces nécessaires à la vie du monastère, un passage plus exigu s’enfonçait dans la terre pour mener à une vieille bâtisse en pierre, à la marge du monastère. Une jolie vue, car ici était le moulin à eau. Il devait y avoir une multitude de sous-terrains pour faciliter le déplacement de nuit, par exemple, ou bien assurer quelques fonctions tactiques. Quoi qu’il en soit, le moulin était délabré et la roue effondrée couverte de mousse barrait la rivière qui, avec le temps, avait trouvé le moyen de passer outre malgré tout.

La vampire contempla le paysage avec un certain silence, laissant l’ambiance étrange l’imprégner, avant de finalement ajouter.

Ils ne les ont pas emportés car ils ne sont jamais partis. Ils ont préféré les enterrer avec le monastère plutôt que de laisser un homme seul s’en aller avec. Ils ne comptaient pas s’en aller, après tout. Ce qui nous mène à nous demander où est-ce qu’ils sont.

Amset supposait qu’il n’y avait rien de vraiment « sensible » dans ces documents ou qui pourrait intéressait un espion Eïlynsterien tel que lui, donc il s’intéressait en vérité peu au fait de les consulter lui-même. Ou d’en dérober un, sauf éventuellement pour rendre service à son amie. Après tout, à part un rapport sur l’existence d’un monastère ici qui intéresserait bien peu ses supérieurs, il n’y aurait pas grand-chose à tirer de cette journée à ce niveau, mais bon toutes les journées ne pouvaient pas êtres productives...

Cela et puis, maintenant qu’il était sur le territoire Ikhyldien, il en profiterait sans doute dans moult autres domaines. Quant à savoir ce que deviendrait cette ruine ? Il ne saurait dire, Vittoria envisageait-elle de rester un certain temps fouiller ici avant de repartir ? Laissant ce passé derrière elle ? Ne lisant pas dans ses pensées, cela il ne pouvait guère le prédire.

Quoiqu’il en soit ces ruines étaient vides et dépeuplées, mais elles n’avaient pas l’air d’avoir été victimes de violence et de pillage, donc Amset doutait en vérité que des évènements tragiques ait eut lieu ici, ou alors ils devaient êtres du genre qui ne chamboulaient pas le décor.

« Cela fait des décennies si ce n’est un bon siècle qu’ils s’en sont allés, où ? Difficile à dire, mais s’il y a des indices, ce sera soit des documents, soit rien, sauf si vous êtes dotée de capacités nécromantiques. » Il sembla alors noter cette idée là dans sa tête et ajouter.

« Au pire, si nous ne trouvons rien, nous sommes en Ikhyld après tout, nous pourrons sans doute trouver dans les alentours un nécromancien blanc qui contre rémunération accepterait de fouiller le passé de ces ruines grâce à sa magie, qu’en dîtes vous ? » Une idée qui lui semblait intéressante, surtout pour avoir des indices solides à ce sujet.

Pour la première fois depuis le début de cette journée, Vittoria se surprit à rire. Pas nerveusement, mais naturellement, à la réponse du Naga. Il n’y avait peut-être rien de drôle dans l’idée, mais la vampire rit tout de même, et ne se voulait pas offensante pour son ami malgré tout. Elle lui répondit en acquiesçant avec un regard amusé, ayant repris en “couleurs” émotionnelles.

Non, je ne suis pas nécromancienne. Et embaucher un nécromancien blanc serait une bonne idée, mais pas maintenant. Je pense savoir où les trouver, après pour les détails des événement, oui, je demanderai à un mage de m’aider. Quoi qu’il en soit, suivez moi. Nous avons des moines à saluer.

Sur ces mots, Vittoria se dirigea dans la plaine comme instinctivement, s’assurant que le Naga la suive, afin de le mener à une petite clairière dans le creu d’une colline. Entourés de pierres et d’arbres, créant une sorte de zone isolée et mystique, plusieurs stèles modestes étaient là, ajoutant à la clairière une dimension morbide. Il y avait des tombeaux destinés à récolter les cendres, d’autres, plus rares, étant de simples pierres modestes plantées dans le sol et marquées de quelques inscriptions. Parmi ces pierres se trouvait un nom pour le peu singulier : Vittoria Benedetti.

A cela, Vittoria prit le temps de saluer les âmes des moines d’un hochement de chef avant de s’approcher de sa propre tombe pour y passer une main sur le sol. Alors, commençant à creuser à la main, elle s’adressa à son ami.

Trouvez moi une pelle, je vous prie. Ou quoi que ce soit qui m’aide à creuser.

Cet acte pouvait paraître surprenant, mais peut-être avait-elle vu juste. Après tout, est-ce vraiment profaner une sépulture si c'est la sienne ? Vittoria espérait bien qu'il n'y ait pas de cadavre là dessous, ce qui serait aberrant, puisqu'elle est bien vivante.

Amset ne comprit pas trop pourquoi son amie éclata de rire, mais prit la chose avec calme, après tout en tant que naga ayant beaucoup fréquenté les sang chauds… La façon dont ces derniers pouvaient êtres impulsifs au niveau de leurs émotions, ne l’étonnait plus forcément. Quoiqu’il en soit, elle considérait donc son idée, même si ce ne serait pas pour tout de suite.

Soit, de toute façon ils n’étaient pas pressés, cela faisait longtemps après tout que ce monastère devait être dans cet état et il le serait encore longtemps si rien n’était fait pour changer la situation. Même si ce ne serait pas éternel, viendrait bien un moment après tout où quelqu’un voudra vraiment piller les lieux ou bien où des gens voudront remplacer cette construction ou faire des fouilles archéologiques.

Puis, ils sortirent du bâtiment, pour se rendre vers ce qui semblait être un lieu où l’on appliquait les funérailles et le respect aux défunts. Intéressant… Par contre, il y avait quelque chose adressé à la vampire ? Le naga imita la vampire quoiqu’il en soit dans l’hommage qu’elle rendit aux défunt, avant de glisser.

« Je vais aller en chercher une. » Au sujet de la pelle, après tout ce serait mieux que de le faire à main nue, surtout sans être un mage de terre ou une créature vraiment imposante. Il alla donc chercher au niveau du monastère.

Et en trouva deux dans ce qui semblait être une remise, sans doute pour pratiquer un peu d’agriculture, comme tous ces monastères censés se suffire à eux-mêmes à ce niveau…

Une pour lui, une pour elle. Il donna donc une pelle à la moniale et sans un mot, aida cette dernière à creuser, se demandant bien ce qu’ils allaient finir par trouver en insistant un peu...

La vampire ne s’acharna pas pour autant sur la terre. Le temps l’avait durcie, et y aller à la main nue se présentait être tout de même une mauvaise idée. Elle s’arrêta donc en attendant le retour de son ami en prenant le temps d’observer les lieux et d’en apprécier l’atmosphère. Elle fit même un rapide tour du lieu, apposant la main aux pierres délabrées avant de finalement s’asseoir à même le sol en silence.

Enfin revint le Naga avec deux pelles. La vampire lui étira un sourire serein avant de se lever pour s’emparer de l’outil. Alors, s’y mettant de choeur, elle entama à creuser la terre afin de voir ce qu’elle pouvait y trouver. Pelletée après pelletée, un trou se creusa pour laisser place à une boîte en bois compacte et en bon état, sûrement conçue pour résister au temps.

Toujours dans le silence, la moniale se saisit de la boîte avec un calme indéniable, pour s’asseoir tranquillement au sol et l’ouvrir, sans empêcher son partenaire d’en aviser le contenu. Il y avait une étoffe, simple, enveloppant ce qu’il semblerait être un objet. Lorsqu’elle retira le tissu, elle découvrit un sablier magnifique de sa sobriété, fait d’une armature de noyer et d’un coeur de verre contenant du sable. Dénué de quelconque symboles ou pictogrammes indiquant son appartenance à un ordre ou un groupe, le sablier était au final modeste.

Vittoria avisa l’objet silencieusement, l’observant sous toutes les coutures avant de finalement le reposer. Alors qu’elle releva le nez vers l’intérieur du couvercle de la boîte, elle découvrit une discrète inscription, une gravure de la façade du monastère et une année, sûrement celle de sa création. Laissant paraître une émotion, la vampire sembla particulièrement émue, mais contrôlée, reposant l’objet pour s’allonger simplement au sol en joignant ses mains sur son ventre, finissant par lâcher ces quelques mots vers le Naga qui l’accompagne.

J’ai hérité du monastère.

Spoiler:

Amset avait rarement employé une pelle, cela se voyait un peu même s’il n’éyait pas non plus maladroit dans le geste. Disons juste, qu’il ne devait pas beaucoup ce travail manuel ci que ce soit en tant que mercenaire ou sa « passion » pour la joaillerie.

Néanmoins, don ou pas pour creuser la terre avec un outil, à eux deux ils arrivèrent à mettre un jour quelque chose d’intéressant, une sorte de boîte qui visiblement, à en croire le nom de la tombe. Était destinée à son amie. Le naga devait sans doute se demander ce qu’elle renfermait, mais n’eut de toute façon pas à attendre très longtemps, car son amie s’occupa rapidement d’ouvrir la dite boîte.

Pour y découvrir un sablier notamment et une gravure, beaucoup de symbolique, dont son amie lui expliqua rapidement le sens. Elle avait héritée des ruines de ce monastère ? Pensa t-il, en avisant alors silencieusement celui-ci du regard. Il ne saurait pas ce qu’il aurait fait d’un tel cadeau pour sa part, mais après tout contrairement à elle il n’avait pas été formé ici... C’est donc qu’il posa évidemment une question, d’un ton calme et curieux.

« Et, que comptez vous faire de ce cadeau ? » Il s’approcha d’elle et posa alors une main sur une épaule de la moniale comme pour la soutenir alors qu’elle était assez émue. Visiblement elle était touchée, donc il doutait après tout qu’elle se contente de partir d’ici suite à cela, ce sans demander son reste... Quoiqu'il en soit, par sa gestuelle et son attitude, il soulignait bien qu'il était là pour la soutenir moralement si besoin.

Vittoria restait immobile dans sa position, se reposant simplement comme pour prendre le temps de reprendre ses esprits. Elle ne savait pas vraiment ce qui l’attendait sous cette terre, mais ce qu’elle y avait trouvé l’avait particulièrement secouée. Faut dire, vu l’ampleur de la chose…

Elle finit par cligner doucement des yeux, se redressant légèrement pour finir en position assise. Elle releva le nez vers le Naga à ses douces paroles qui la sortit de sa torpeur. Elle marqua quelques secondes de silence supplémentaires, auxquelles elle prit le temps de placer timidement sa main sur celle de son ami, avant de lui répondre.

C’est quelque chose de conséquent, et qui dégoûterait plus d’un de se retrouver avec des ruines… Enfin, c’est un instant intense, mais je pense bien que je vais reconstruire le monastère.

Elle retira sa main de là où elle était pour finalement se mettre debout, tout en refermant soigneusement la boîte et la conservant contre elle.

Je vais le reconstruire, pierre après pierre, indépendamment du temps que cela me prendra. Et, lorsque ce sera terminé, j’en ferai un établissement prêt à accueillir les âmes perdues et pourvues de la volonté d’aller de l’avant. J’étudierai comment les anciens moines s’y prenaient et j’aviserai, j’imagine. Tout comme mon maître m’a achetée pour préserver mon avenir de l’esclavage, je m’engagerai à offrir de nouveaux horizons à qui le souhaite, sans obligations. Enfin, je verrai pour les détails. Mais voilà ce que je ferai.

Elle pris une légère inspiration avant de reprendre.

Même si je décide de rester ici, je serai sûrement menée à voyager au travers du continent, et puis ta présence sera la bienvenue ici. Enfin, avant ça, tu restes avec moi jusqu’à ce soir ou demain ? J’ai envie de passer du temps avec mon toi, nous devrions pouvoir rejoindre la ville la plus proche d’ici à pieds avec juste de quoi pour avoir une auberge et ne pas s’ennuyer, qu’en penses tu ?

Amset réfléchit aux paroles de son amie concernant les ruines, ce avant de glisser avec une certaine bienveillance.

« D’autres trouveraient que c’est l’occasion de bâtir quelque chose de nouveau ou refaire vivre un héritage passé. Des ruines c’est une base pour de nouvelles constructions, des matériaux et d’une certaine façon une preuve que quelque chose a fonctionné ici. » Même si évidemment cela voulait aussi dire que c’était devenu des ruines pour certaines raisons aussi. Mais bon, aucune raison que cela recommence, surtout si la nouvelle maîtresse du monastère était immortelle en quelque sorte ?

Quoiqu’il en soit quand Vittoria présenta ses projets au sujet du monastère, le naga écouta silencieusement, pour finir par dire avec empathie et compréhension.

« C’est un bon projet, ce sera long et difficile, mais ça vaut le coup de se battre et œuvrer pour. Je suppose que c’est l’un des buts que vous aimeriez donner à votre existence mon amie ? » Oui, sans doute, après tout quand on pouvait vivre aussi longtemps qu’un vampire, finissait des fois par se poser la question de quoi faire d’une existence qui pourrait être éternelle. Dans les faits Amset savait que peu de vampires dépassaient les 1000 ans, encore moins les 2000, que ce soit pour des raisons diverses ou car l’existence finissait à terme par devenir face pour eux, d’une manière ou d’une autre. Puis aux dernières paroles de son amie, il eut un doux sourire et glissa amusé.

« Ainsi j’aurais encore le plaisir de vous croiser quelques fois sur les routes ? Bien, car vous êtes une excellente compagne d’aventure… En attendant. » Il lui donna la main pour l’aider à se relever avant d’ajouter.

« Je comptai en effet rester un peu à vos côtés très chère. De toute façon, soyez sûre que je viendrais de temps en temps vous rendre visite. » Sur ce il supposa qu’ils pourraient y aller et clore cet épisode émouvant pour le moment en se rendant dans la ville la plus proche. Il faudrait bien qu’il reprenne la route prochainement et elle avait des projets à réaliser, mais en attendant ils pouvaient profiter de leur compagnie mutuelle….






[Hrp : Je suppose qu’on s’oriente vers une conclusion .]

Son ami était bienveillant, et c’était quelque chose qui apportait beaucoup à la vampire. Elle avait besoin de sa présence pour la soutenir dans cette étape, et c’était quelque chose qu’il faisait à merveilles. Il était plutôt sage dans ses paroles, pour un mercenaire, et dévoué à ce qu’elle s’en sorte en pareil moment. Un bon ami, en somme. Elle accepta sa main pour se relever, ainsi équipée de ce nouveau coffret, coffret qu’elle s’arrangea d’accrocher au détour d’un lacet ou autre de son attirail pour ne pas avoir à ne pas le transporter.

Oui, en effet, l’avenir d’un héritage dépend de celui qui en bénéficie. S’en débarrasser pour créer quelque chose de nouveau, ou bien l’exploiter pour alimenter autre chose comme dans le cas du besoin matériel. D’autres feront, à mon humble avis, l’erreur de se restreindre à reproduire la chose telle qu’elle était à l’origine. Je pense reconstruire ce monastère et m’inspirer de ses idéologies et principes d’époque pour en faire quelque chose de nouveau, propre à moi même. J’ignore encore comment ce sera, mais en jouant de ma personnalité pour diriger ce projet, ce sera définitivement loin d’être ce que c’était à l’origine, ce sera quelque chose de nouveau à partir de quelque chose d’ancien et vénérable.

Elle se tourna alors vers lui, ne lâchant pas sa main après s’être relevée, comme souhaitant la garder encore un peu dans la sienne. Elle se laissa guider par le Naga pour quitter les lieux, prévoyant sûrement de revenir le lendemain pour visiter le fief et notamment reboucher le trou qu’elle eut fait dans sa tombe, et autres détails. Quoi qu’il en soit, elle n’y pensa plus davantage, et se concentra sur ce qui allait venir dans l’instant : une balade à pieds avec ce Naga qu’elle apprécie fortement et une soirée des plus agréables en sa compagnie.