L’aube pointait, annonciatrice d’une nouvelle journée ensoleillée. Quelques petites brumes paresseuses demeuraient ici et là, sous le couvert des ombres des petites collines et bosquets des environs de la plaine d’Ardath. La visibilité était bonne et permettait à tout voyageur très matinale de contempler ce petit coin de Duché avec un certain plaisir. D’ailleurs, en parlant de voyageur, on pouvait apercevoir sur une des routes principales de ce Duché une petite équipée à cheval, qui semblait patrouiller.

En fait, ce petit groupe de trois cavaliers ne patrouillait pas. Il fallait voir cela plus comme une inspection. Encadré par deux cavaliers en cotte de maille, un cavalier plus âgé observait les lieux, comme pour essayer de voir s’il reconnaissait quelque chose durant le parcours qu’ils empruntaient. Etaient-ils perdus ? Cet énième cavalier était lui en tenue de mercenaire, comme s’il était paré pour accomplir un contrat. Sa coiffure en ordre et sa barbe de plusieurs jours parfaitement taillé laissait deviner qu’il n’était pas qu’un simple mercenaire. Surtout qu’un mercenaire à un âge aussi ‘’avancé’’ comme le sien n’était pas courant. Et il était loin d’être affaibli. A sa façon de se tenir en selle, à sa large carrure… il était encore physiquement capable de se battre.

Le regard porté au lieu, Peddyr étudiait en effet les lieux. Il peinait encore à se souvenir de bien des choses.il faut dire que cela faisait si longtemps et que sa mémoire fragmentée ne pourrait pas se rappeler de tout. Et en ce début matin de cette journée, il avait entrepris de faire une sorte de tournée dans son Duché nouvellement sien ; qui est redevenu sien, pour faire le point de ce qu’il faudrait reconstruire après ces vingt années d’usurpation. Le Duché d’Ardath n’était pas bien grand, en comparaison des autres, mais il avait un certain potentiel économique, de par la fourniture de certaines matières premières de qualité. En faisant le point, Peddyr pourrait voir comment il pourrait entretenir ses possibles nouvelles alliances avec quelques Duchés environnants. Consolider sa nouvelle position était la première chose à faire, avant d’entrevoir la suite de l’avenir et du plan totalement fou qu’il s’était fixé, qui avait manqué de le tuer autrefois. Et qui sait si on ne tenterait pas de réitérer l’acte, car son ambition ne plaisait pas forcément à tout le monde….

Les trois cavaliers marchaient ; à dos de leur cheval respectif, pour aller rejoindre la première bourgade du Duché et faire un premier état des lieux…

En cette délicieuse matinée, la moniale itinérante ne put que contempler la beauté des duchés sous le soleil levant. Armée de son inséparable bâton, elle marchait inlassablement dans ces plaines au paysage plaisant. Elle prenait la direction du village le plus proche.

Au loin se dessinaient les silhouettes des collines dans la brume, et les pieds de la vampire raflaient à leur passage la rosée reposant sur l’herbe. Paisiblement. Elle gardait sa tête sous sa capuche, sûrement dû à l’humidité présente, avant de s’arrêter quelque instants. La femme leva le nez vers le ciel, puis consulta l’intérieur de sa besace avant d’aviser les alentours.

Pour sûr, elle avait faim. Intérieurement, elle remerciait grandement le système Akkatonien, et se para d’une des poches de sang achetées spécifiquement pour cet usage tout en glissant discrètement la paille dans sa bouche. La femme reprit donc sa marche, poche sous le manteau. Elle en vida le contenu puis, s’essuyant la bouche d’un mouchoir en tissu, elle rangea l’objet de son intérêt à sa place initiale.

Ce n’est que peu après cela qu’elle remarquait la présence de trois cavaliers arpentant la plaine. Elle ne fit pas mine de fuir ni de se détourner de leur passage et s’en approcha pour les aborder sur le flanc, gardant une distance conventionnelle de sécurité de deux mètres. Elle observa les trois hommes, visiblement doués au combat et incroyablement sérieux. C’est donc de sa voix au calme infini et au ton poli qu’elle leur adressa ces mots ;

Salutations, cavaliers. Où vous rendez vous ainsi ? Vous semblez bien alertes pour de simples voyageurs. Est-ce qu’un événement fâcheux a eu lieu ?

Elle les avisa donc de son visage neutre, attendant patiemment sa réponse tout en restant non loin de cette troupe. Elle restait néanmoins prudente, ne connaissant pas ces gens là, elle ne souhaiterait tomber sur des bandits sanguinaires qui venaient de rafler un village de ses richesses.

Peddyr aperçut une silhouette au lointain de la route, qui prenait le chemin inverse de la leur. Il était certain que lui et son escorte rejoindrait cette personne dans peu de temps. Le nouveau Duc avait déjà hâte de savoir si c’était un habitant du coin et de converser avec lu pour avoir un début d’informations sur l’état d’Ardath. Sans forcer l’allure de leurs montures, les trois cavaliers rejoignirent donc l’inconnu, qui s’avérait être une inconnue. A voir sa démarche légère et gracieuse, malgré le port de sa tenue, il était aisé pour un regard averti de devenir l’approche d’une femme

Peddyr stoppa son cheval, immédiatement imité de ses deux hommes. A voir la personne au visage encapuchonné, à sa tenue moniale et à son bâton, il redoutait de tomber sur une voyageuse ou une pélerine, qui ne serait pas à même d’apporter toutes les réponses qu’il espérait avoir déjà. Mais si elle voyageait, elle devait connaître les environs. Et donc, elle avait dû voir et entendre bien des choses. Et ce qui le confortait dans cette idée était son interrogation quand à la présence de trois cavaliers sur cette route, bien alertes comme elle l’avait souligné.

« Bien le bonjour, noble voyageuse. J’espère que nous vous avons pas effrayé par notre présence. A ce que je crois comprendre, vous venez à peine d’arriver au sein du Duché d’Ardath. »

Autant faire une entrée en matière, mais en douceur.

« Un nouveau Duc vient de prendre les rênes de la dirigeance de ces terres. Une bataille a eu lieu tout récemment pour destituer le précédent. Les choses risquent de changer…Et je suis en quête d’informations sur comment le précédent Duc dirigeant le Duché d’Ardath. Auriez-vous des réponses à m’apporter quand à ce que je recherche ? Je ne vous tiendrai pas rigueur si vous n’avez guère de choses à me dire ou si vous portez une forte loyauté au duc nouvellement déchu »

Il ne préférait pas dévoiler que le nouveau Duc en question, était lui en personne. Il avait besoin de savoir bien des détails, surtout la position de cette femme vis à vis de la politique ducale et de ce qui se tramait dans la région avant de se présenter convenablement.

La vampire garda les trois hommes dans sa vision tout en écoutant celui qui semblait diriger les deux autres attentivement. Elle analysait de son regard de soufre, captant le moindre détail composant ce personnage. La barbe grisonnante, les traits marqués et les sourcils courbés tel un arc bandé. Elle maintint son expression neutre, et acquiesça aux dires de l’homme somme toutes interrogateur.

Nous pouvons dire cela, oui. Je traverse la contrée simplement.

Elle resta droite, bâton en main, d’allure mesurée et régie.

J’ai entendu quelques rumeurs à ce sujet, il est vrai, et vous me voyez égayée d’être à l’actualité du lieu. Je crains néanmoins ne pas pouvoir répondre à votre question, mais… Si vous recherchez des informations, je peux m’en occuper pour vous. Voyez vous, je voyage mais je vis aussi des services que je rend.

Une agréable manière que de s’annoncer en tant que mercenaire, bien que ce mot reste vulgaire. La femme au bâton redressa fièrement le menton sans pour autant modifier son expression. Elle ajouta par ailleurs, le plus naturellement possible.

Quant à cet ancien duc, je n’y prête pas spécifiquement d’allégeance. Je ne suis qu’une simple voyageuse, et la politique locale ne m’intéresse guère. Il ne manquerait plus que je sois née dans ce pays !

Ajouta-t-elle avec une légère pointe d’humour avant de reprendre son sérieux.

Quoi qu’il en soit, je saurais me rendre utile. Si vous acceptez de discuter argent, et objectif. Je me permet le droit de refuser une mission si son objectif est à mes yeux inéligible. Mais n’ayez crainte, je ne refuse que rarement ce que l’on me propose.

Chose plus ou moins vrai. La vampire acceptait de travailler pour ce qui lui paraissait honnête, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Mais il y a toujours un degré d'adaption.

L’attitude de la voyageuse était l’état d’esprit typique des Duchés, à savoir de travail pour de l’argent. Peddyr ne savait que trop penser. Engager quelqu’un alors qu’il venait à peine de retrouver ses terres. Bon, il n’était pas obligé de se dévoiler aux yeux de cette étrangère, mais vu qu’elle paraissait connaître les environs, traînant ses oreilles un peu ici et là. Car, selon ses dires, elle avait entendu quelques rumeurs, mais elle n’avait été dans les détails, se réservant judicieusement le contenu véritable de ce qu’elle avait entendu… de quoi marchander un possible emploi d’informateur. En tout cas, elle avait un état d’esprit qui plaisait au nouveau Duc. Elle ne se laissait pas vraiment impressionnée par la présence de trois cavaliers en face d’elle. Son brin d’humour aidait, il était vrai, à détendre l’atmosphère.

« Rien ne vaut la liberté de ne pas avoir d’allégeance. Cela permet de pas être pris dans le jeu des disputes entre les Ducs. Mais je m’égare. Vous me voyez intéressé par un petit échange de bons procédés. Moyennement finances, bien entendu. Comme vous ne vous êtes pas montrée très détaillante sur les possibles rumeurs que vous avez pu entendre durant votre traversée de ce duché, je présume qu’il y aura un petit prix à négocier… »

Tout se marchandait pour tout Duchéen qui se respectait. Peddyr, avec ses années de mercenariat, n’avait pas échappé à cette règle, quand à certaines missions à accomplir, après avoir acheté des informations nécessaires pour leur accomplissement. Mais désormais qu’il avait retrouvé sa place d’autan….

« Peut-être que vous souhaitez qu’on discuter affaire dans un lieu plus adéquat ? »

Il sentait le regard de ses deux cavaliers d'escorte lui lancer un drôle de regard. Peddyr leur adressa un signe de tête pour les rassurer. Décidément, même à cela, il devra s'y faire, d'avoir des chiens de garde soucieux d'être utile à le défendre. Il ne pouvait pas leur en vouloir en même temps, il les payait pour cela et surtout, ils espéraient voir le Duché d'Arnath devenir plus prospère que ces vingt dernières années

La vampire n’avait pas été par quatre détours et avait de suite mentionné le prix de sa prestation. Après tout, même si elle se voyait un peu plus que ça, elle restait une mercenaire comme d’autres, et tout se devait d’avoir un prix dans ce domaine. Malgré cela, elle resta de son allure impartiale et forte, cherchant à maintenir son image de femme robuste d’esprit et minutieuse dans ses actes. Deux qualités qu’une professionnelle se devait d’avoir, et de maintenir pour conserver sa notoriété.

C’est donc après que l’homme le plus important des trois eu fini d’exposer l’introduction aux négociations, que la vampire, répondant de sa voix sereine, ajouta ;

Je saurais vous apporter les informations dont vous aurez besoin. Et même si je ne les possède pas moi même, j’irais les chercher en usant de mes moyens, moyennant ce que vous serez prêt à donner. En échange, je voudrais des informations concernant ladite mission, et je vous conseille de ne pas être avare si vous souhaitez que cette dernière réussisse. Enfin, j’imagine que nous aurons tout le temps d’approfondir tout cela plus tard. Je suit votre proposition, allons trouver un endroit moins découvert. Je vous parlerais de mes compétences pouvant vous intéresser.

La vampire se recula d’un pas pour indiquer sa capacité à suivre les trois cavaliers et pivote afin de les seconder jusqu’au lieu dit. Elle garde son bâton en main, tranquillement, tout en faisant attention aux alentours.

Durant le chemin, la femme semble tenir aisément le rythme de marche des chevaux et semble par ailleurs habituée aux voyages, comme peut l’indiquer probablement son bâton et son manteau. Elle garda sa capuche sur sa tête, laissant simplement son nez dépasser de cette dernière, sûrement pour éviter de se faire reconnaître ou pour se préserver de l’humidité du matin. Une chose est sûre, c’est qu’elle ne fléchira pas de suite et maintiendra la marche jusqu’à leur arrivée.

Peddyr ne pouvait s’empêcher de sourire légèrement. Il reconnaissait à travers les mots de la voyageuse tout l’esprit d’une mercenaire. Même si elle n’avait pas les airs, elle en avait l’attitude. Quand on vivait sur la route -comme elle sans doute-, on devait être à même de se trouver des rentrées d’argent régulières. Que de mieux alors de commencer à négocier indirectement sur le possible travail qu’elle effectuerait pour Peddyr. Et elle exposait en même temps ses conditions. Quoi de plus normal, forcément

« Cela va de soi. Je ne vais pas vous envoyer partir à la pêche aux informations si vous ne savez pas ce que vous devez chercher et écouter. Pour le prix, ce sera le dernier point que nous aborderons. »

Puis, ils se remirent tous en route. La jeune femme avait bien fait comprendre par sa posture qu’elle ne serait nullement gênée de faire la marche à pied au rythme des chevaux. Peddyr veillera à imposer une marche plus légère à sa monture. Autant qu’il apporte lui aussi un effort, au vue de l’importance de ce qu’il recherchait. Et donc, ce petit groupe hétéroclite reprit leur chemin, les cavaliers dans leur même formation que tout à l’heure, et la jeune femme sous ses habits de voyageuse et encapuchonnée.

Ils ne mirent pas longtemps à apercevoir un petit bois qui bordait la voie. Peddyr l’observait, pendant que le groupe s’en rapprochait. Il lui suffirait de s’enfoncer plus en son sein pour être à l’abri des regards indiscrets. Et il n’y avait ni voyageurs ni paysans ou ouvriers travaillant à ses abords. Parfait, songea-t-il.

« Ce bosquet sera parfait. Rendons nous-y. Messieurs, poursuivez la route, je vous retrouverai aux abords du prochain village »

Les deux gardes hésitaient pour le coup et obéirent, abandonnant le Duc en présence d’une inconnue. Puis, Peddyr descendit de son cheval et le mena vers l’intérieur du bosquet, jetant de temps à autre un regard derrière lui pour s’ assurer que la voyageuse le suivait. Cela fait, il s’arrêta, attacha son cheval et s’assit sur un rocher tout proche. Un autre, un pue plus arrondie, était parfait pour servir d’assise à son interlocutrice.

« Bien, nous voilà seuls. Alors, puisque vous désiriez avoir des informations, et sans faire d’avarice, je vais vous apporter les éléments pour mener à bien vos recherches. Dans ce Duché, il y a eu une guerre, qui fut brève, mais qui a permis à l’ancien Duc de récupérer ses terres. Mais ce Duc a été absent durant bien des années et il est fort possible qu’il ne puisse compter que sur peu de sujets loyaux, pour reconstruire le territoire, et pour le rendre prospère. C’est pour cela que je suis mandaté. Je dois savoir ce que ressent le peuple du changement de pouvoir, et de ce qu’il en attends. Est-ce que cela est suffisant ? Pour la rémunération, je peux vous offrir le prix qu’on offre à des mercenaires de bonnes compétences, plus une prime….Reste à voir déjà ce que sont vos compétences. »

L’homme aux cheveux gris conclua leur début de contrat en quelques mots. Certes il n’y avait rien de signé ni de promis, mais la procédure de négociation était lancée. C’était pour cela que la moniale a été invitée à le suivre jusqu’à un lieu pour en discuter plus amplement, chose qu’elle fit sans hésiter, en toute sobriété d’attitude. Elle marchait aux côtés des trois cavaliers, ne se laissant pas distancer par ces derniers en maintenant une allure rythmée et robuste. C’est qu’elle était assez habituée de la marche et cela ne lui posait pas de problèmes de se déplacer ainsi, bien au contraire (il faut avouer d’autre part que se retrouver sur un cheval aurait tôt fait de la clouer au sol, par manque d’équilibre.)

Au loin apparut le relief remarquable d’un petit bois sans grande prétention. Un regroupement d’arbres somme toute charmant ainsi planté là. Quoi qu’il en soit, le groupe s’en rapprocha assez rapidement, avant de s’arrêter à son orée. L’homme congédia ses gardes, chose qui interloqua la vampire, bien que cela ne se vit point sur son visage. Pour un professionnel, il en était un. Il ne souhaitait sûrement pas que la conversation entre lui et Vittoria ne soit connue de quiconque d’autre, et c’était un point qui permis à la moniale de se sentir davantage concernée par la mission qui va lui être attribuée ; elle ne ratera pas.

Bien, je comprend votre besoin. J’imagine que cela ne devrait pas être spécifiquement compliqué. Je dois dire que je ne suis pas des plus charismatiques, mais je saurais me renseigner sur le sujet et questionner les habitants, s’il ne tient qu’à ça. Bien évidemment, je ferais en sorte de ne pas éveiller trop les soupçons, je me ferais passer pour une voyageuse curieuse de savoir ce qu’il se passe, ce qui n’est pas totalement faux.

Quant à mes compétences, disons que je suis davantage meilleure au combat et à la capture vivante d’individus recherchés. Mais récolter les informations ne devraient pas être d’une quelconque difficulté pour moi. Je maîtrise aussi la magie du vent, je peux vous transmettre en direct les informations que je récolte par les murmures du zéphyr.

Être à l’abri de toute oreille indiscrète était vital pour le nouveau Duc. Bien des choses restaient à reconstruire et la méfiance perdurait encore sur ses terres retrouvées. Qui sait ce que l’usurpateur de son domaine avait pu faire comme sales méfaits, ce qu’il pouvait être en train de préparer pour le faire assassiner, cette méthode si classique et utilisée au sein des Duchés… Et il avait besoin d’avoir des informations. Sous les nombreux conseils de ses alliés, il avait débuté à créer son réseau. Ce n’était que les balbutiements et il faudra encore bien des semaines de travail avant de savoir sur qui ou qui il pouvait se reposer. Et avoir une tête inconnue et expérimentée au sein de son Duché pourrait y convenir.

Il écouta avec attention les paroles de la jeune femme, se rappelant sa propre manière à lui de se vendre du temps où il était mercenaire ; ce qui le fit légèrement sourire. Et quand elle eut fini d’exposer ses diverses compétences, il ne put que sourire plus largement encore.
’’Je vais finir par penser que c’est le ciel qui vous envoie. Vous avez tout ce qu’il faut à mes yeux pour accomplir la mission que je vous confie donc…’’

Il porta sa main à sa ceinture, attrapa dans une petite besace de ceinture une petite bourse de cuir, qu’il lança habilement vers la jeune femme.

’’Voici une avance de prime, en vue de la tâche qui vous attend. Ne prenez pas de risque inutile, je ne tiens pas à ce que vous vous fassiez blesser ou tuer pour ce que je vous demande. S’il y a un risque potentiel, ne prenez pas pas les devants. J’estime que la vie a plus de valeurs qu’une recherche de primes supplémentaires. Et comme vous êtes capables de m’envoyer des informations par le biais de votre magie, je saurai comment agir en fonction de certaines… et éventuellement de vous apporter de l’aide si jamais vous êtes en mauvaise posture. «  

Il avait été mercenaire durant tellement d’années qu’il savait ce qu’on pouvait ressentir quand on n’avait aucune aide promise qui arrivait pour un soutien armée, des renforts ect… la vie de mercenaire était bien assez difficile comme cela pour sacrifier des gens compétents comme cette femme là. D’ailleurs, il révéla sa propre expérience.

’’J’ai été moi-même mercenaire dans ma jeunesse et des commanditaires qui veulent des mercenaires fiables ne les sacrifient pas. ‘’

[hrp : souhaites tu qu’on fasse intervenir un MJ pour la suite de tes tâches commandées ou je m’en charge ? :p]

La moniale était donc partie en ville récolter des informations. Elle ne se fit passer que pour une simple voyageuse -ce qui n’était pas totalement faux- afin de simplement flâner en ville et en tavernes pour prendre des renseignements. Une tâche somme toutes simple et sans dangers dans l’idée qui prit bien la journée à la vampire pour la mettre en oeuvre.

Elle alla principalement dans les lieux de fréquentation, places et tavernes s’il y en eut, pour s’approcher des populations et en apprendre davantage sur la ville et ce que pensaient les habitants du nouveau duc. Ledit Duc avait autant de partisans que de contrevenants. Certains voyaient en la reprise du Duché un acte héroïque de délivrance ayant servit à bouter les imposteurs en dehors de la ville et de redresser la barre de la part du Duc Légitime. Mais que de telles guerres attireraient les mauvaises intentions, sans compter les plaintes régulières concernant les taxes et autres désagréments, notamment par le manque d’entretien des infrastructures et des zones boisées mal gérées.

Bref, du bon et du mal comme bien des lieux. C’est donc le soir, à la nuit noire, que Vittoria revint auprès de son employeur pour lui transmettre les informations. Comme elle eut convenu, elle avait envoyé régulièrement une partie des informations qu’elle avait à l’homme via sa magie du vent. C’est donc en se retrouvant face à lui, à la fin de sa mission, qu’elle énonça.

Eh bien, voilà qui est fait. Donc des retours positifs sur les dernières actions et l’ambition que les choses se redressent dans un avenir proche. Mais des plaintes concernant une surtaxe, une mauvaise gérance du domaine et autres plaintes minimales. Cependant, une vague rumeur déformée de par les bouches circule comme quoi le Duc Légitime souhaiterait unifier les Duchés, bien que ça ne fasse pas l’unanimité des habitants. En voilà un sacré Pedigree, Peddyr Thelrand.

Le vieux mercenaire avait profité de la longue attente durant la journée pour poser un petit campement. Sa petite escorte avait fait de même, ne pouvant que patienter quand à la suite de leurs missions. Peddyr ne discuta pas avec eux, les laissant tranquillement dans leur petit coin, les fixant de temps à autre pendant qu'il se contentait d'entretenir soigneusement ses effets. Il n'avait techniquement plus besoin de le faire, vu qu'il avait retrouvé sa place comme Duc, mais il aimait faire certaines choses élémentaires par lui-même. Après tout, un Duc comme lui, avec un souhait presque irréaliste quand à l'avenir des Duchés.

Et la journée s'écoula paisiblement, au rythme des rapports réguliers envoyés par la jeune femme dont il avait louée les services. La magie du Vent aidait à transmettre des informations régulièrement. L'efficacité était indéniable, ainsi, elle ne prenait pas le risque de passer à côté d'un détail qu'elle pourrait omettre et le tout en toute sécurité. Pas de papier, pas de gribouillage sur un parchemin... de cette sorte, sa mission demeurait discrète. Le Duc appréciait ce professionnalisme et avait bien fait croiser sa route.

Le soir vint, et après un bref repas partagé avec ses deux membres d'escorte, il prit le premier tour de garde. A juste titre qu'ils étaient en pleine campagne et qu'on n'était jamais trop prudent. De plus, il attendait le retour de la jeune femme, qui vint une fois la nuit totalement tombée. Une fois en face de lui, elle termina ses différents rapports par un dernier, qui conclut toute la recherche. Peddyr était satisfait et n'avait pas manqué de sourire quand au léger sous-entendu qu'elle avait lâché d'entre ses lèvres.

''Un beau palmarès en effet. La majorité de ce que vous m'apprenez, qui est du fait de la précédence gouvernance corrompue, me permettra d'agir en conséquence. Quand à l'unification des Duchés, ce n'est pas une folie, c'est bien un choix que j'aimerai bien voir naître un jour, pour nous éviter la possible annexion sous la bannière de l'Empire ou de se faire envahir par les Teïderiens. Une nation divisée ne peut que se faire dévorer par ses voisins et sans efforts. Mais je laisse là ces détails. Merci en tout cas de votre travail''

Il prit une bourse qu'il avait encore à sa ceinture et la tendit vers l'informatrice.

''Tenez, pour votre peine. Vous avez bien mérité votre salaire avec un petit complément non négligeable. Et si je puis me permettre, étais-je si facile à cerner que cela pour que vous ayez deviné qui j'étais ? ''

La vampire était donc revenue le soir même faire son rapport oral au Duc qui l’avait embauchée. Elle restait calme, comme à son habitude, et impartiale, ne laissant passer aucune position morale concernant les choix du Duc. Après tout, elle était une mercenaire, et dans ce cas de politique, elle n’avait pas d’avis à émettre ou de justice à défendre. Son travail au final servait à espionner les sujets du Duc en question, mais en terme d’immoral, la moniale avait bien fait pire…

Elle se contenta d’esquisser un léger sourire aux compliments de l’homme quant à sa prestation, chose à laquelle elle répondit de vive voix, le ton posé teinté d’un petit amusement.

Eh bien, je n’ai fait que mon travail. Et puis, je suis une enquêtrice après tout, comprendre que vous étiez le Duc en question m’est arrivé dans les mains lors de ma chasse à l’information. Entre les actes, les descriptions… Tant d’indices qui convergent vers votre personnalité.

Elle s’empara de la bourse en levant un regard aimable vers son employeur, acceptant sa paie humblement. Elle la rangea dans un pan de son manteau avec tranquilité.

Vos décisions politiques ne concernent que vous. Je ne suis pas citoyenne des lieux, alors je ne pense pas être des plus désignées pour en discuter. Cela dit, pourquoi me faire enquêter sur ce que pensent les habitants de vous ? Vous craignez ne pas être bien accueillit par les populations ? Êtes vous en cavale ou considéré comme paria dans certains domaines ?

La vampire dirigea son regard vers l’horizon, semblant discerner ce qui est indiscernable dans la nuit tombante. En simple contemplation, elle revint vers le Duc en attendant sa réponse. Elle garda sa position habituelle, droite et fière, semblant apprécier cette petite discussion toute autant intéressante avec l'homme en face d'elle.

Peddyr ne manquait pas de sourire sur les éléments qui avaient fini par trahir qui il était. Forcément, comment avait-il pu négliger l'aspect physique ? Bien qu'il avait une allure des plus classiques pour un mercenaire, il avait oublié la base des enquêtes menés : la description des personnes. Preuve qu'il avait encore bien des choses à revoir. Décidément, le retour à une vie ducale, après autant de temps d'absence, tout en demeurant dans le flou de son existence passé...

Et il en souriait, malgré une négligence qui aurait pu se retourner aujourd'hui contre lui. Même à son âge, on n'avait pas fini d'apprendre.

''Forcément....''

Il n'allait pas avouer son manque de ''jugeote''. Et puis, il avait affaire à une professionnelle. Comme elle l'avait souligné, et le confirmant encore par son désintéressement vis à vis des trames politiques et des choix que pouvaient prendre le Duc au titre retrouvé, elle ne faisait que son travail. C'était là le genre de personne qui ne posait pas de question et restait loyale à ses convictions ; une bonne chose. Néanmoins, elle s'interrogeait sur les motivations de cette enquête menée pour laquelle elle avait été payée.

"ce n'est pas cela. En réalité, je cherchais à savoir ce que les gens attendent réellement d'une nouvelle dirigeance, ce qu'ils veulent voir améliorer. Savoir le pour ou le contre d'un nouveau Duc à la tête du Duché peut m'aider à améliorer la gestion du domaine. Par exemple, si vous prenez les paysans à la gorge pour leur faire payer plus de taxes, jamais ils ne pourront prétendre à améliorer leur vie...C'est là un point comme tant d'autres...''

Il disait cela dans le sens où on permettait à des gens de consommer des biens qui les aidaient à améliorer leur vie et bien d'autres choses encore, ils encourageraient le commerce intérieur comme extérieur, ce qui pourrait être gratifiant sur le long terme. Mais comme c'était plus ou moins dévoilé par le nouveau Duc, nous n'allons pas rentrer dans les détails.

''Si jamais j'ai besoin de vos services, comment peut-on vous contacter ? ''

[HRP : Je pense qu'on peut conclure sur ce point là, qu'en dis tu ? ]

La vampire avait percé la fausse identité de l’homme qui se trouvait face à elle pour découvrir la véritable : celle d’un Duc soucieux de son peuple et des décisions à prendre pour celui ci. Une méthode comme une autre, probablement, d’aider ce dernier en l’espionnant et écoutant ce qu’il a à en dire sans être sous la pression de l’entité politique ou autre représentants. Quoi qu’il en soit, la moniale avait accompli sa mission et pouvait désormais partir avec la bourse pleine. Aux paroles du Duchéen, elle répondit de la manière la plus simple possible, comme non concernée par les décisions de cet homme somme toutes bien loin d’être dangereux aux yeux de la moniale.

J’imagine que cela est une bonne chose, en effet. Au moins, vous avez les réponses à votre question, si j’ai bien fait mon travail. Quoi qu’il en soit, je vous souhaite de prendre les décisions qui vous semblent être le meilleur compromis entre vos exigences et vos attentes. Quoi qu’il en soit, nous nous reverrons peut-être, qui sait. Le monde est si petit.

Elle fit mine de se détourner avant de reprendre la parole. Le Duchéen souhaitant garder contact avec elle, il fallait lui donner un moyen d’y parvenir.

En temps normal, j’applique une marque d’ombre aux personnes que j’apprécie et que je ne veux pas perdre. Mais peu de personnes acceptent, et puis vous n’êtes probablement pas capable de le faire, vous ne semblez pas avoir l’étoffe d’un mage. Mais je me trompe, sûrement. Quoi qu’il en soit, vous pourrez demander à une taverne de mercenaires réputée dans le coin, il y aura forcément un client ou un tenancier pour s’occuper de m’envoyer une missive magique. Quoi qu’il en soit, c’était un plaisir d’avoir travaillé avec vous, encore plus d’avoir reçu une somme raisonnable pour un travail bien fait. En vous souhaitant bon vent.

Sur ce, elle s’en alla, laissant seul l’homme dans la clairière avec ses hommes, alors que la vampire s’enfonça dans les limbes de la nuit tombante.

[FIN]