Royaume de Taralevian – 21 Novimbreïs de l'An 2001 de l'Âge d'Acier.

Eïrn... une contrée sauvage s'il en était, où les monstres n'avaient jamais été véritablement domptés, du moins le semblait-il à Nesahor. Il arrivait souvent à celui-ci d'effectuer diverses missions dans la région pour neutraliser une créature particulièrement dangereuse, et ainsi renforcer les liens entre Akkaton et la communauté menacée par ladite créature, mais aujourd'hui pourtant il n'était pas dans la région pour cela ! Mais cette fois-ci, c'était une toute autre raison qui amenait le Juge Impérial, ainsi que sa troupe, dans la province au septentrion de la leur, à savoir les manœuvres de l'Engrenage, cette secte de fanatiques qui, en prétendant faire triompher le modèle technologique, causaient bien du soucis à la diplomatie impériale, qu'on associait forcément à ce genre de causes ! Raison de plus, outre la « simple » lutte élémentaire contre le terrorisme, qui était forcément toujours une préoccupation pour les akkatoniens, pour agir contre ceux-ci !

Pour l'heure toutefois, la menace n'avait pas encore été clairement identifiée, même si des rumeurs sur plusieurs actions possibles de l'Engrenage à venir étaient parvenues jusqu'à son camp... néanmoins, en attendant de clarifier un peu plus directement les choses de ce côté, Nesahor avait eut une nouvelle plus préoccupante sur les bras : un problème de politique interne dans le royaume voisin de Taralevian. C'était une de ces petites entités politiques eïriniennes qui se paraient d'un titre royal, et leur problème portait sur la disparition de leur princesse, sur fond d'accusations contraires des différents groupes influents dans le pays : on accusait des rebelles, des bandits, son propre frère et même un amant en puissance ! Un sac de nœud qui menaçait de dégénérer en potentiels troubles civils, ce qui n'aurait guère servit Akkaton, qui entretenait de bonnes relations avec le roi actuel. La meilleure chose à faire semblait donc d'intervenir – d'autant que permettre au monarque de retrouver sa fille ne ferait certainement que renforcer les liens entre celui-ci et l'Empire, forcément.

Mais évidemment, débarquer là-bas avec une armée n'était pas l'idéal... Nesahor s'était approché de la capitale avec une petite troupe seulement, laissant le gros de ses forces entre les mains de son officier en second, et d'ailleurs il laissa ladite troupe, et la garde de son Goliath – amené à proximité au cas où à un moment donné il y aurait un problème en vue – pour ne pas risquer de mettre les éventuels ravisseurs en branle, s'ils étaient encore dans les parages ou bien s'ils avaient des espions sur place. Il ne parti néanmoins pas seul vers le palais royal de Taralevian, puisque sa trouve avait avec elle une élément de choc, une championne magicienne qui avait accepté de l'accompagner pour cette mission. De fait, elle semblait faite sur mesure pour elle, comme Nesahor le fit remarquer, avec un fin sourire, alors qu'ils entraient dans le palais.

« J'avoue qu'il est rare de partir à la recherche d'une princesse... mais plus encore de le faire avec comme équipier une autre princesse, ahah ! Au moins on peut dire que j'ai une experte du sujet sous la main, je suppose ? »

Bien sûr, Nesahor savait que Lilyneska n'était pas une princesse comparable à celle qu'ils étaient venus chercher – elle ne l'était que depuis peu, et c'était un statut temporaire – mais le fait était que la coïncidence avait de quoi faire sourire ! Vêtu de son armure enchantée, le Naga aux écailles de sang souriant doucement, sans montrer ses crocs. Il aborderait une mine plus grave quand ils parleraient au roi, évidemment, mais pour l'heure relever cette idée lui avait du moins semblé amusant.

« La subtilité risque d'être plus utile encore que la force dans cette affaire, et qui sait de qui nous devrons nous méfier... en tous cas, retrouver cette jeune fille apaiserait beaucoup les tensions ici, et renforcerait notre position... »

La jeune femme savait sans doute cela, mais reposer les bases de ce qui les amenait ne faisait jamais de mal. Les deux akkatoniens avançaient donc dans le palais, sans savoir qu'avant de parler au roi lui-même, le hasard placerait sur leur route un autre émissaire étranger...

Lilyneska avait commencé à faire sa marque à Akkaton. Certes, elle l’avait déjà entamé en tant que princesse Akkatonnienne, mais là, il était plutôt question de son rôle de championne. Elle avait su faire ses preuves comme soldate et magicienne. Elle était heureuse qu’on la prenne en sérieux.

Lorsque la présence des disciples de l’Engrenage se fit remarquer à Eïrn et qu’Akkaton décida d’envoyer une présence militaire, la jeune hybride s’était proposé pour en faire partie. C’était l’occasion de visiter l’endroit! Et de faire comprendre aux radicalistes que leurs méthodes n’étaient pas les bienvenues et qu’Akkaton n’endossait pas leurs actions.

Donc, grâce à la route parcourue ensemble, elle avait fait la connaissance de Nesahor, un juge Akkatonien. Elle avait aussi réalisé pourquoi on surnommait Eïrn la terre des bêtes et des monstres. En effet, ils avaient dû se protéger de quelques créatures sur leur chemin jusqu’à ce que la petite troupe arrive au royaume de Taralevian. « Enfin! » S’exclama la jeune femme. « Allons là, ça a l’air bon! » Dit-elle en pointant un restaurant. À quoi goûtait la nourriture Eïrnienne? La petite hybride avait dévoré tout ce qu’il y avait et c’était à ce demander comment elle parvenait à tout manger.

L’exploration de la ville au fil des jours les avait renseigné sur un problème du royaume : la disparition de leur princesse. Sans trop savoir pourquoi, Lily se sentit interpellée par cette quête. Peut-être parce qu’elle était une princesse elle-même? Elle fut néanmoins heureuse que Nesahor soit sur la même longueur d’onde qu’elle : ils allaient investiguer la situation.

« J'avoue qu'il est rare de partir à la recherche d'une princesse... mais plus encore de le faire avec comme équipier une autre princesse, ahah ! Au moins on peut dire que j'ai une experte du sujet sous la main, je suppose ? »

Lilyneska avait joint son rire au sien. Elle avait également haussé les épaules. Elle était princesse de titre, temporairement certes le temps que son père soit au pouvoir, mais elle n’avait rien des princesses des contes de fées!

« La subtilité risque d'être plus utile encore que la force dans cette affaire, et qui sait de qui nous devrons nous méfier... en tous cas, retrouver cette jeune fille apaiserait beaucoup les tensions ici, et renforcerait notre position... »

« Ouais, bien d’accord… Voyons ce qu’on peut obtenir comme information. Et si on peut la sauver, je pense que le royaume nous sera redevable. Ce n’est pas rien! » Dit-elle. Elle était d’accord que d’un point de vue politique, ça nouerait les liens entre Akkaton s’ils réussissaient. « Je me demande combien de gens ils ont mandaté sur cette mission. Ça n’a pas été trop long avoir une audience en tout cas. » Poursuivit-elle.

Les deux Akkatoniens s’avançaient dans le palais jusqu’à deux grandes portes fermées. Un autre homme se tenait là également. Lily supposa qu’il était là pour l’audience pour le roi pour la même raison qu’eux. Elle le salua d’un signe de tête, observant par le fait même ses traits. Quant à la championne Akkatonnienne, elle avait sa véritable apparence avec ses oreilles félines dépassant sa chevelure prune et sa petite carrure. Elle portait des bottes hautes, un pantalon noir moulant, une chemise grise et par-dessus la veste de l’uniforme militaire d’Akkaton. L'Erlich avait assumé qu'ils n'étaient pas là pour cacher leur provenance.

Richard pouvait se faire remarquer assez facilement. D'une stature pouvant faire deviner une constitution assumée, une taille suffisante et vêtu d'une armure lourde de plaques de la tête aux pieds ; son visage était couvert de son casque. L'armure était bien entretenue, brillante même mais il était évident qu'elle avait servi à bien des batailles et n'était pas là pour de l'apparat. Son modèle et sa forme n'avait tout autant rien de connu, et pourrait même paraître ancien, ou fantaisiste, alors que le chevalier ne semblait pas armé pour l'heure, se présentant de toute évidence dans la demeure d'un roi avec respect.

Cet individu était dans le hall d'entrée, face aux portes et aux gardes en conséquence. Il semblait communiquer avec eux dans un certain calme, la conversation semblait porter sur certains sujets d'actualité et fut conclue par l'un des gardes qui, poliment, ne souhaitait pas faire ami ami avec le chevalier. Il était difficile de donner bonne impression, et l'armure vivante ne devait sûrement pas y parvenir bien souvent. C'est donc avec acceptation et humilité qu'il se détourna, pour faire face à deux Akkatoniens. Il prit alors un instant pour les observer au travers de son casque, et s'inclina légèrement à leur encontre, en politesse.

Bonjour.

Il marqua un instant après s'être redressé, alors que le salut de Lilyneska semblait l'inciter à se présenter.

Je suis le chevalier Richard Goswin Ivo Guilbert, pour vous servir. Je me suis porté volontaire au service du roi de ces contrées. Je suppose que vous de même.

Puis un autre temps. Le chevalier n'était ni lent, ni pressé, et faisait preuve d'une certaine sagesse d'esprit, sain.

Je ne peux que saluer deux membres de l'Empire. La diversité de compétences est une force.

Après qu’ils aient légèrement pu discuter ou se présenter, notre trio ne manquera pas d’être rapidement abordé, non pas par le roi évidemment, mais un membre de sa garde personnelle qui portait une armure de plates d’acier bleutée, ce au dessus de ce qui semblait être une gilet d’écailles. Probablement pas de dragons, mais sans doute provenant d’une ou l’autre bête qui infestaient le territoire d’Eïrn et qui avaient l’avantage de fournir des matériaux abondants pour fabriquer armes et armures avec au moins.

« Salutations à vous honorables invités, le roi vous attend pour une entrevue en privé dans son salon personnel. » Sans doute que le dit roi préférait cela à une audience dans sa salle du trône pour éviter d’être écouté par des oreilles indiscrètes notamment. Sur ce le chevalier attendra que tout le monde soit prêt et il les mènerait donc vers le salon concerné, en empruntant une porte un peu dérobée.

Le trajet serait assez rapide, mais permettrait de contempler un peu architecture alentours qui était agréable à l’œil et de pierre, mais aussi quelques décorations agrémentant le palais. Que ce soit quelques œuvres d’arts habituelles et une présence assez notables de trophées de chasses ou de biens luxueux faits avec des matériaux issues de bêtes ou monstres. Ce qui à Eïrn dans les faits, n’était guère surprenant…

Puis ils arrivèrent devant une porte, surveillée par quelques gardes, qu’ils purent rapidement passer pour se retrouver face au roi qui avait besoin d’aide, du moins après que leur escorte ait toqué à la porte pour prévenir le souverain.


Un souverain humain qui avait l’air légèrement nerveux, mais en forme pour quelqu’un de son âge. Ce dernier dira alors poliment en désignant des fauteuils de bois sur lesquels étaient disposés des coussins et assez confortables… Ainsi qu’un petit tas de coussin qui visiblement avait été improvisé pour un invité naga.

« Salutations à vous mes amis, je suis content de votre prompte venue. Je ne m’attendais pas néanmoins à ce que l’empire m’envoie un juge, ainsi qu’une princesse impériale, une telle considération me touche… Je suppose que le sieur Richard s’est présenté ? Je gage que c’est un homme de valeur... » Le roi fera alors signe à un servant bien habillé de proposer à boire aux invités, ce avant d’ajouter avec lassitude.

« Je crois que vous êtes assez au fait de la situation ? Je vous avouerai que tout cela est un tel guêpier que je suis obligé de davantage gérer les conséquences de l’enlèvement de ma famille, que de me consacrer au fait de la retrouver... » Ce avant de reprendre ensuite aimablement et avec plus d’assurance. « Mais vous êtes là et je ne doute pas qu’avec vous trois les choses s’amélioreront rapidement. Et heureusement je ne vous ais pas fait venir sans quelques pistes à vous offrir, cela et je suis tout à fait disponible pour répondre à vos questions. » Ils en avaient sans doute après tout ?

Quoiqu’il en soit, après un temps il ajouterait évidemment concernant les dîtes pistes, d’un air gêné. « Ma fille avait quelques fréquentations discutables dira t-on, et pas qu’un amant contrairement à ce que beaucoup pensent, ce qui n’aurait pas gêné s’ils avaient été du genre fréquentables... » Avant de reprendre ensuite avec plus d’assurance. « C’est certainement l’un d’entre-eux qui l’a enlevé, après tout nous n’avons pas eu de demande de rançon, aucun des membres de notre famille ne la déteste à ce point là et… » Il conclurait alors.

« Il y en a deux notamment qui se démarquent, le premier est un semi orc chef d’une bande de brigands duchéens qui viennent de temps en temps ici écouler leur argent ou se faire oublier dans les environs. Ils sont assez peu nombreux, mais bien armés. Ils ne posent guère de problème par ici en général donc je les tolères, mais ce n’est guère le genre de personne qu’une dame de son statut devrait fréquenter. » Et à son agacé, on sentait en effet qu’il ne pensait pas beaucoup de bien de ce bandit… Puis il conclurait blasé.

« Le second un dompteur de la tribu thérianthrope des Lamoïa, des nomades qui voyagent entre Eïrn et les contrées sauvages, il est plus fréquentable que le premier, mais à peine, cela et si on apprend que l’héritière du royaume est en escapade amoureuse avec un nomade des contrées sauvages… » Il soupira, avant de conclure pensif.

« Vous avez de la chance, les deux canailles se trouvent dans les environs donc les approcher ne devrait pas être trop difficile. Et si jamais l’une des deux pistes s’avère concluante, je vous fais confiance pour les "convaincre" de me rendre ma fille... »

Nombreux étaient les officiers de l'armée Akkatonienne à tenter une carrière politique, sous une forme ou une autre. Ce n'était pas si étonnant, quant on songeait que les deux voies – militaires et politiques – revenaient dans l'esprit de beaucoup de ses pairs à deux manières de servir au mieux le peuple akkatonien, et que souvent ceux qui faisaient carrière dans l'armée de métier de l'Empire avaient à la fois de grandes compétences, un certain charisme en tant qu'officier et, évidemment, la volonté de se dévouer au service de leurs compatriotes. C'était une chose que Nesahor pouvait bien entendu aisément comprendre, et pourtant le guerrier-serpent aux écailles carmines ne s'était jamais vraiment projeté dans cette optique, notamment parce qu'il ne se voyait pas forcément avec l'âme d'un diplomate, quand il fallait faire face à différentes nuances de gens détestables...

De fait, s'il avait sourit et hoché la tête aux propos de Lilyneska, avant de saluer le nouveau venu qu'ils avaient croisés devant la salle du trône locale, quelque peu surpris de découvrir un chevalier sans affiliation en ces lieux, mais pas non plus forcément plus que cela, étant donné que les chevaliers et chasseurs de monstre de toutes sortes n'étaient pas rares à Eïrn, cela ne fut plus forcément le cas devant le souverain... avant d'arriver à celui-ci, cependant, à l'extérieur de ladite salle du trône, il avait rendu un salut donc tout militaire au guerrier en armure complète.

« Enchanté, messire Richard. Je suis le Juge impériale Nesahor Khaemt, et c'est toujours un plaisir de collaborer avec un guerrier de bonne volonté, évidemment. Même si je ne sers que le peuple akkatonien, disons qu'au nom de celui-ci, moi et ma compagne de mission sommes venus proposer notre aide, en tous cas. »

Il n'avait pas présenté la Princesse impériale, considérant que celle-ci était bien capable de le faire seul, et après donc éventuellement les paroles de celle-ci et la réponse du chevalier casqué, ils furent introduits par un fonctionnaire au près du monarque lui-même.

« Enchanté également, Majesté. Et ma foi, moi et Son Altesse étions en mission dans la région quand nous avons entendu parler de votre problème, hors comme vous le savez, Akkaton n'est pas du genre à laisser ses amis en difficulté quand il est possible de fournir une aide, quelque soit le rang du serviteur du peuple akkatonien qui la fournis. »

Le guerrier-serpent aux écailles sanguines avait utilisé le vocable d'usage pour une princesse envers Lilyneska, non parce qu'il aurait pensé qu'elle le réclamerait, mais disons pour mieux coller aux standards de leur hôte, et mieux souligner la générosité akkatonienne. Néanmoins, en dépit de ces premiers efforts, Nesahor se rappela bien vite, donc, pourquoi il n'ambitionnait certes pas de devenir politicien ou diplomate, se félicitant toutefois de pouvoir se retrancher derrière la neutralité coutumière des Nagas pour écouter la façon dont le roi présentait les choses. S'il avait pu parler sincèrement, sans doute l'aurait-il qualifié d'adjectifs guère flatteurs, mais en l'état il ne pouvait guère se le permettre, sauf à vouloir annihiler toute conséquence diplomatique positive à long terme. Il garda donc la silence quelques temps, comme pour intégrer toutes les informations, même si à vrai dire il cherchait surtout comment rebondir sans créer un éventuel incident.

« Hmmmm hé bien... merci pour toutes ces précisions, Majesté. »

Pour tout dire, Nesahor ne voyait pas pour quelle raison sa fille aurait spécialement été enlevée par un soupirant, et sa manière de les considérer lui semblait... hé bien plus que douteuse. Clairement, il aurait pu comprendre que la princesse cherche à fuir son père avec un prince charmant, après cette brève conversation, mais il doutait quelque peu que ce soit ce scénario qui soit à privilégier... il se demandait plutôt pourquoi le monarque tenait à les pousser dans cette direction-là entre toutes, mais il ne pourrait en discuter avec ses compagnons qu'une fois qu'ils auraient quitté la compagnie du roi, de toute façon...

« Je pense que nous en savons assez pour nous mettre à l’œuvre, même si j'aimerais, avec votre permission, mener également une petite enquête dans le palais et dans la ville, après tout nous trouverons peut être des témoins... enfin sauf si l'un de vous a des questions à poser ? »

Il avait adressé cette dernière interrogation à Lilyneska et Richard, qui après tout avaient peut-être des choses à dire ou demander au roi... pour sa part, après une telle introduction il préférait largement se consacrer à d'autres témoins que de l'écouter continuer de déblatérer ce genre de bêtises, mais en soit il était ici en collaboration avec les deux autres, il ne souhaitait pas spécialement donner d'ordres, même s'il aurait sans doute à discuter avec eux ensuite si possible !

Richard, Nesahor et Lilyneska avaient suivi le garde jusqu’au salon personnel du roi. La jeune hybride gardait une attention particulière à ce qui l’entourait juste au cas où il y aurait des oreilles indiscrètes ou des gens tentant d’écouter leurs dires. Il semblerait qu’ils allaient avoir droit à toute la discrétion nécessaire pour discuter de la disparition de la princesse.

Face à sa souveraineté, la jeune femme s’inclina poliment lorsqu’il la désigna. Elle laissa le roi parler sans l’interrompre, guettant dans le timbre de sa voix des dissimulations ou des incohérences. Car oui, dans son livre à elle, son enquête commençait par le roi lui-même. Qui sait si ce n’était pas lui-même qui avait vendu sa fille et qu’il tentait de cacher son acte par cette demande de recherche? Après sa première analyse, le souverain humain avait l’air sincère… et il éplorait réellement l’absence de sa fille.

Le roi n’avait pas eu de demandes de rançon. C’était un élément important à considérer. Le père croyait dur comme fer que c’était un amant de la princesse qui avait enlevé sa fille, soit un brigand demi-orc ou un thérianthrope nomade. Lily resta impassible tandis qu’elle se faisait la réflexion que l’héritière était peut-être partie de son plein gré par amour et qu’elle avait voulu se délaisser de tous ses devoirs royaux.

Le juge Akkatonnien fut le premier à prendre la parole. Elle comprit ce qu’il était en train de faire en la nommant altesse. Or, n’importe quel proche saurait que les politesses d’usure n’étaient pas nécessaires envers elle. Mais face à un autre roi, son statut avait un poids et permettait d’ouvrir des portes qui, normalement, seraient restées fermées.

« Merci de votre confiance, votre altesse. » Débuta-t-elle en posant sa main sur son cœur et ajoutant une nouvelle référence. « Mon père, l’empereur Akkatonnien, serait tout aussi dévasté s’il m’arrivait une telle situation. Il m'apparaît normal de vous aider.  » Poursuivit-elle doucement. Comme Nesahor avait mis la table concernant son titre, elle en profitait pour placer ses cartes et s’assurer qu’il leur soit plus enclin à collaborer. « Pardonnez-moi mon ignorance. Quel est le nom complet de votre précieuse fille, Majesté? Seriez-vous en mesure de fournir sa description la plus précise possible? J’ignore si vous possédez des peintures ou des statues la représentant. Possède-t-elle un trait unique comme une tache de naissance, un grain de beauté ou une cicatrice? » S’enquit-elle. Savoir reconnaître ce qu’on recherche lui semblait essentiel.  « J’aimerais également connaître qui rapporte être la dernière personne l’ayant vue et quand cela était-ce? » Enchaîna-t-elle. « De plus, nous permettez-vous de visiter ses appartements? Je me demande s’il n’y aurait pas quelconques indices. »

Lilyneska fit une courte pause tout en réfléchissant à la formulation de ses prochaines paroles. « Votre altesse, vous risquez de ne pas aimer ma prochaine demande… » Dit-elle pour préparer le terrain à sa requête. « Pourrais-je avoir une robe ou un habit qu’elle a récemment porté? Je ne vous cacherai pas mes intentions : je risque de me déguiser en votre fille durant l’investigation. » Dit-elle. Se déguiser était une litote concernant la mage transformiste. Lily avait cette idée en tête que de se faire passer pour la princesse permettrait de voir la véritable réaction des gens. Elle pourrait également reconnaître son odeur.

Le chevalier suivit le groupe d'un pas militaire, assuré. Il était certain que paraître devant le roi était une épreuve qui ne semblait pas intimider Richard, seulement l'animer de respect et de considération. A la vue du roi il s'inclina en guise de salut et, sans jamais ôter son casque, il se redressa. Tant que l'on ne lui fit pas la remarque, il était bien aise de ne pas devoir à se justifier, et conserva son armure sans détours.

Il écouta les dires du roi avec attention, attentif, ainsi que tous les indices qui pourraient les aider à trouver la dite princesse. Ses collègues du moment étaient de toute évidence des enquêteurs aguerris car, à l'écoute de leurs interrogations et leur action d'approfondir le sujet et la situation ne fit que confirmer qu'ils étaient en tout cas volontaires et avisés. Les questions étaient posées, et les réponses sûrement données ; Richard quant à lui n'avait pas grand chose de plus à ajouter. Les informations qui seront fournies par le roi seront sûrement plus que suffisantes, grâce à la perspicacité de Nesahor et de la petite dame Lily. C'est sur la conclusion de leurs interrogations que le chevalier se permit d'ajouter, au groupe et au roi.

Quant aux moyens que nous possédons, mon compagnon Geoffroy nous permettront d'effectuer une reconnaissance aérienne. Une aide de poids pour la récolte d'informations et la recherche active. Je vous prierai cependant de l'excuser, il n'a pas pu se présenter à l'audience en personne et nous le retrouverons plus tard. Je parle ici en son nom en plus du mien.

Des paroles dignes et simples, instaurant les termes avec respect et humilité quant à son compagnon, que le groupe rencontrera sûrement plus tard.

Le roi Eïrnien faisant face aux trois aventuriers était sans doute à l’image de ce que l’on pourrait s’imaginer d’un roi traditionnel, d’un pays ayant encore conservé diverses mentalités ou traditions qu’une nation moderne comme Akkaton trouverait passéiste et rétrograde. Ce qui avait sans doute de quoi déplaire ou surprendre pour quiconque n’étant pas habitué à la mentalité d’une noblesse de terre féodale traditionnelle comme on pouvait le trouver moindrement en Ikhyld notamment. Une mentalité qui impliquait que les fils et filles du roi ne soient pas totalement « maîtres de leur destin » par exemple, que ce soit pour des raisons dynastiques ou la considération qu'ils devaient dédier leur vie à servir le royaume et son peuple.

On pouvait alors se dire, sans que ce soit certain ou confirmé, que sa fille aurait pu vouloir disparaître car elle était peu inspirée par les projets « éventuels » de son père. Surtout que si ce royaume avait des liens diplomatiques avec Akkaton, ils devaient êtres au courant que d’autres manières de fonctionner étaient possibles… Néanmoins c’était là une supposition possible, guère une certitude, car d'un autre côté la vie de palais devait être bien plus agréable que celle de chasseur de bêtes ou mineur.

Après, peut-être le roi avait-il des choses à cacher ? Après tout les souverains des nations qu’elles soient grandes ou petites étaient souvent dotés d’un minimum de compréhension de la notion d’intrigue et ruse. Mais il serait bien difficile de dire quoi, en tout cas le roi d’Eïrn ne semblait pas se dire qu’il avait l’air soupçonnable si tel était le cas et écoutera attentivement ce qu’avait à dire les trois aventuriers.

« Si vous désirez mener une enquête dans le palais et en ville, faîtes, je peux même vous assigner une guide si vous le désirez, sauf si vous préférez faire sans. » Glissera donc le roi pensif aux paroles de Nesahor, ne semblant pas contrarié de cette idée. Sans doute devait-il se dire au contraire que c’était professionnel et adéquat, voir que c’était même la première chose à faire en vérité.

Et le roi répondit à la nouvelle révérence de Lilyneska en inclinant la tête, ce avant de sembler légèrement surpris par la proposition et d’y réfléchir… Avant ensuite de récupérer des amulettes frappées de l’emblème du royaume, une licorne au regard dressées vers le ciel, qu’il tendra poliment aux aventuriers.

« Ces amulettes, que vous n’avez pas nécessités à arborer en tout temps, indiqueront que vous travaillez dans l’intérêt du royaume. Elles vous serviront si jamais la garde de la cité ou la garde du palais se montre soupçonneuse à votre égard... » Une manière confortable en somme, d’éviter de devoir se justifier auprès des autorités. Ce avant qu’il n’ajoute avec une pointe de tristesse.

« Ma fille se nomme Lirandra Lamoä. » Cela sonnait légèrement elficisé, même si pas purement elfique, sans doute que la culture elfique ancienne fort présente en Eïrn pouvait avoir une influence même sur les familles royales d’autres races… « Il y a un portrait de ma fille « réaliste » se trouvant dans ses appartements, que je vous autorise évidemment à visiter et qui est fort récent. Elle avait demandée à un peintre Akkatonien connu pour peindre ses modèles sans sublimer ou enlaidir leurs traits de lui en faire un. Il a fait un excellent travail et on voit les quelques grains de beauté qu’elle possède dessus. Ainsi que sa cicatrice au niveau du visage… Causée par les griffes d’une salamandre. Elle a décidée de la garder car la cicatrice peut être assez esthétique d’une certaine manière. » Finira t-il avec une légère amertume, dû au fait que sa fille ait été ainsi blessée par une bête par le passé ? Ou qu’elle arbore avec une certaine fierté une cicatrice dû à cela car la cicatrice n’était pas très disgracieuse ?

« La dernière personne prétendant l’avoir vue est le maître des écuries royales, Isacco, un vieil azurien qui s’entendait bien avec ma fille et qui est tout autant inquiet de sa disparition que moi. Il vous aidera certainement de son mieux, même si je dois vous prévenir qu’il est assez fatigué à cause de l’âge. »

Puis le roi finira par ajouter en semblant en partie gêné, en partie surpris et en partie curieux à la dernière proposition de Lilyneska… En effet c'était un plan assez audacieux, mais intéressant ?

« Votre idée est atypique, mais intéressante… Si vous pensez que cela peut faire avancer l’enquête, n’hésitez pas, je tâcherai de prévenir quelques personnes discrètes de votre idée, pour que vous n’ayez pas la garde sur le dos au cours de vos investigations... » En somme, elle aurait le "champ libre" à ce niveau...

Ceci dit, le souverain préciserait à l’égard de Richard, avec politesse. « Nul besoin de vous excuser champion, c’est plutôt à moi de m’excuser que vous n’ayez pas pu entrer ici aux côtés de votre fidèle compagnon, pour des raisons de sécurité évidemment. Néanmoins, je ne doute ni de votre compétence, ni des siennes. Et que s’il devait y avoir affrontement au cours de votre enquête, vous seriez un atout essentiel à vous deux pour une résolution idéale des évènements. » Ceci fait, après avoir répondus à leur question le souverain ajouta à l’égard de tous.

« Avez vous besoin de quoique ce soit sinon au niveau d’éventuelles dotations sinon ? Je doute pouvoir vous fournir quoique ce soit que vous n’auriez pas pu obtenir dans vos contrées concernant l’équipement, mais le minimum que je puisse faire et de vous prêter les clés du palais notamment… » Ce qui évidemment éviterait beaucoup de déconvenues...

Au-delà de l'idée, en effet, que la Princesse royale aurait pu partir d'elle-même en compagnie de l'un de ses soupirants, sans avoir à être enlevé, Nesahor se demandait surtout si cette fixation sur lesdits soupirants ne cachait pas de potentiels motifs moins avouables, politiques notamment, sur l’enlèvement en question, et surtout se demandait pourquoi le monarque, animal à priori politique par nature du fait de son éducation et de son expérience, ne l’évoquait même pas... mais encore une fois, ce ne serait un élément qu'il ne pourrait mettre en relief qu'une fois seul à seul avec ses compagnons d'enquêtes, et puisque ceux-ci, Lilyneska notamment, avaient encore d'autres questions à poser au monarque, fort intéressantes d'ailleurs puisqu'elles apportèrent de nouvelles précisions, ce ne fut pas un point qu'il pu mettre en relief tout de suite, se contentant de s'incliner respectueusement en acceptant le symbole proposé par le roi, qu'il empocha sans l’arborer pour le moment, étant donné que pour l'heure il ne semblait guère nécessaire, préférant sans doute se garder la possibilité de le sortir en cas de besoin plutôt que de mettre en avant un symbole qui n'était pas celui de l'Empire qu'il serait avec fidélité.

« Merci pour ce gage de confiance, Majesté. Nous ferons assurément tout notre possible pour retrouver la princesse Lirandra, et ce quelque soit la raison de sa disparition. »

Nesahor n'insista pas particulièrement sur ces derniers mots, même s'il comptait bien creuser les choses si nécessaire en cas de problème, notamment si les choses, comme il le pressentait, étaient plus complexes que la présentation du monarque ne le laissait entrevoir. Quoiqu'il en soit, il écouta encore les dernières questions et propositions de ses compagnons, ainsi que les réponses du souverain, notant au passage l'idée d'une reconnaissance aérienne si nécessaire, ce qui en effet n'était pas forcément un mauvais angle d'approche, que du contraire même, avant d'incliner la tête une fois que tout fut dit, synthétisant mentalement et assez rapidement les divers éléments qui avaient été présentés pour déterminer ce qui serait, à ses yeux, une bonne façon d'approcher les choses.

« Hmmmm hé bien... si cela convient à mes compagnons, je propose que nous nous rendions d'abord dans les appartements de Son Altesse. Nous pourrons ainsi voir ce fameux tableau, et également parler aux servants de la princesse, et voir si nous ne repérons pas un quelconque indice qui aurait échappé à vos gens, Majesté. »

En soit, inspecter les lieux de vie de la personne disparue semblait de toute façon une bonne base, de manière générale, pour ce genre de recherches, même si, en effet, avoir une image globalement réaliste de la jeune femme à retrouver serait également une bonne base de départ.

« De là, nous pourrons aller rencontrer ce fameux maître des écuries, et voir ce qu'il a à nous apprendre, et sur la base de ce que nous aurons déjà pu apprendre nous pourrons alors lancer le reste de notre enquête dans la cité. »

Cela leur laisserait le temps, entre ces deux escales, de faire des recherches dans le palais... et une fois hors de la présence du roi, ils auraient aussi toute latitude de pouvoir discuter plus librement des autres pistes, en dehors d'une simple histoire d’enlèvement amoureux, volontaire ou non...

« Majesté. » Prit-elle la parole d’une voix sérieuse. « Je comprends que vous ayez le désir d’aviser votre cercle, aussi discret qu’il soit. Néanmoins, pour le bien de la mission de retrouver demoiselle Lamoä et ce, je l’espère, le plus rapidement possible, il est impératif que mon potentiel déguisement reste secret. » Poursuivit l’hybride dans l’espoir que le roi change d’avis pour le sien. Elle ne savait pas exactement si se déguiser en la jeune princesse allait être utile, mais si elle employait cette carte dans son jeu, elle voulait voir l’authentique réaction des gens autour d’elle. « Je saurai me tirer d’une mauvaise situation, s’il y a lieu, et en plus, j’ai cette amulette. Merci pour votre confiance. » Ajouta-t-elle en rangeant précieusement le bijou offert par sa seigneurie. « Je suppose que cela attirera l’attention sur nous si nous nous promenons sans surveillance dans votre palais? Si tel est le cas, puis-je vous suggérer d’assigner comme guide la dame de compagnie de votre fille? J’aimerais m’entretenir avec elle, si possible. » Dit-elle poliment.

Suivant les paroles de Nesahor, Lilyneska acquiesça d’un signe de tête comme quoi ça lui convenait. De son côté, elle avait obtenu du roi tout ce qu’elle avait voulu savoir et ne croyait pas qu’il puisse apporter quoique ce soit de plus. Elle fit une dernière révérence au Roi puis sortit de la salle en même temps que les autres.

Quelques minutes après qu’ils furent sortis, c’est sans surprise qu’une jeune femme vint les rejoindre. En effet, le roi avait acquiescé à la demande de Lily de faire venir l’amie de Liranda. « Je m’appelle Valérie Manta, la dame de compagnie de la princesse. Veuillez me suivre jusqu’à ses appartements, je vous prie. » Dit-elle. Elle était une jolie humaine à la chevelure brune et à la peau claire. Bien que simples, ses vêtements transpiraient la richesse par les fibres utilisées. Comme le voulait la coutume , elle était clairement de famille noble. À quel point était-elle la confidente de la disparue, l’Ehrlich se questionnait.


La dame d’honneur les conduisit jusqu’à la chambre de Liranda. « Entrez et fermez la porte derrière vous, s'il vous plaît. » Demanda-t-elle après qu’ils soient tous entrés. « Je me présence : Lilyneska. Voici Richard et Nesahor. » Fit-elle brièvement les présentations. La jeune hybride espérait avoir une relation de confiance avec elle et souhaitait sa collaboration. Ainsi, elle crut bon d’augmenter ses chances en clignant des yeux et en activant un sort de magie lumineuse qui permettait d’inspirer la confiance.


« Nous sommes mandatés de retrouver la princesse Liranda Lamoä. Pouvons-nous vous faire confiance? » Expliqua-t-elle en la regardant droit dans les yeux. L’amie de la princesse ressentait-elle le pouvoir de la lumière la draper d’un manteau de vérité? « D’après vous, qu’est-il arrivé à la princesse? » Lui demanda-t-elle. Avait-elle des ennemis? Ou son cœur battait-il en cachette pour quelqu’un? Sa dame avait sûrement entendu quelque chose… Ou peut-être que Liranda s’était confiée à elle directement? « Tenait-elle un journal intime? » Demanda-t-elle.

« Tout ce qui se passe ici doit rester entre ces murs, saurez-vous garder le secret? » S’enquit-elle, maintenant toujours le sort “Vérité absolue”. Lilyneska comptait lui demander son aide pour avoir des vêtements récemment portés par l’enlevée; oui, elle désirait en bonus avoir l’odeur de Liranda. Elle se fierait au portrait et aux conseils de Valérie pour être une Liranda la plus crédible possible.

« Je pense que ressembler à la princesse pourra être utile éventuellement dans notre enquête. Mais ça risque d’être long tout ceci. Et je vais profiter de la tranquillité des lieux pour lancer un sort qui me prend une dizaine de minutes à lancer. Désirez-vous rendre visite à ce “Isacco” en attendant? Je prendrai contact via collier de communication quand j’aurai fini. » Dit-elle en remettant le collier jumeau à Nesahor. « Après, on pourra se réunir en privé pour discuter de ce qu’on a trouvé et de la prochaine phase du plan. » Proposa-t-elle.

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Spoiler:

Richard écouta en silence et laissa la situation se dérouler sans grand mal, observateur et patient comme la montagne. Il se saisit du médaillon offert par le roi pour le conserver précieusement dans une de ces sacoches. Puis il porta plus d'attention aux agissements de Lilyneska, agréablement intrigué par ses initiatives. Sans opposer de résistance, Richard suivit ses compagnons jusqu'à la chambre de la princesse non sans manquer de saluer poliment Valérie, d'une courbette sobre mais élégante.

Le chevalier pénétra dans la pièce avec la troupe, et se contenta d'observer. Lilyneska menait le tout d'une main de maître ; elle ordonna de fermer les portes de la pièce, et planta les conditions de l'accord. En plus de vouloir ressembler à la princesse, Richard fini par s'exprimer avec un ton encourageant dans sa voix.

Eh bien, je vous vois agir comme une professionnelle qui n'en est pas à sa première enquête. Je pourrais me contenter de jouer un rôle, peut-être de celui qui a retrouvé la princesse. Nous pourrions nous pavaner ainsi, le roi demander une audience probablement pour jouer le jeu avec les suspects. Sans nul doute que le traître sera frappé d'affliction sans comprendre pourquoi la princesse lui a échappé alors qu'il pensait tout avoir sous contrôle. Notre ami Nesahor pourra en profiter pour pister celui qui semble avoir des choses à se reprocher, avec un peu de chance il cherchera à rejoindre son repère pour vérifier où peut elle dont être. Cela dit, je ne dis pas non à davantage d'indices pour être certains du coupable avant de mettre en place cette comédie, afin de ne se baser que sur des preuves concrètes plus que l'espérance peu avisée d'une réaction.

Le chevalier conclut donc ses observations, se taisant sous son casque masquant les traits de son visage.

Le groupe pu donc quitter la salle du trône et, rejoint par une dame de compagnie, se diriger vers les appartements de la princesse disparue. Nesahor avait quelques points à relever qu'il n'aurait guère pu aborder devant le roi lui-même, puisqu'ils concernaient notamment les doutes qu'il avait justement sur la façon dont le monarque présentait les choses, mais il n'eut guère l'occasion de les énoncer que, très proactive, Lilyneska commençait déjà à mettre en place son plan sans perdre un instant, non sans avoir d'ailleurs questionnée la dame de compagnie, visiblement en usant de magie. Le Juge eut un léger sourire devant le dynamisme de son binôme, même s'il souhaitait également poser quelques éléments avant de partir.

« Hmmm... je salue votre esprit d'initiative, Lilyneska, mais si vous le permettez j'aimerais que nous discutions un peu des informations fournies par le roi... je dois dire que j'ai trouvé qu'il avait un angle de fixation très précis, si je peux le formuler ainsi. »

On parlait après tout d'un allié, et ils étaient malgré tout en présence d'une des sujettes du monarque, donc Nesahor ne dit pas non plus tout à fait le fond de sa pensée, mais il était clair que cette façon de réduire sa fille à un simple enjeux pour des amants qu'il désapprouvait n'était guère du goût du guerrier-serpent aux écailles sanguines, qui du reste, maintenant qu'ils étaient seuls, avait abandonner certains formalismes, comme de servir à la jeune hybride un titre qui n'avait guère de sens à ses propres yeux.

« Notamment, je trouve étrange qu'il n'ait même pas abordé la possibilité d'un enlèvement pour des raisons politiques, que ce soit pour faire du chantage ou simplement pour faire disparaître l'héritière directe au profit d'autres personnes, ou même l'idée que ce soit pour l'échanger contre quelque chose à plus long terme. Sans compter que les jugements royaux m'ont semblé plus que largement... à l'emporte-pièce. »

Et franchement méprisants et sexistes, aussi, même si le formuler ainsi n'aurait guère été diplomatique... quoiqu'il en soit, il n'en revint pas moins sur le plan de la princesse akkatonienne pour retrouver sa consœur, qui, il était vrai, ne manquait pas forcément d'intérêts.

« Ceci dit, cela n'invalide en rien votre plan, évidemment, mais il faudra faire attention, je pense, à plus qu'un prétendant déçu... il vous faudra également faire attention à vos défenses, mais je ne doute pas de vos capacités sur ce point. »

Fini-t-il avec un mince sourire. Sans doute Nesahor aurait-il procédé autrement si on lui en avait laissé l'occasion, mais l'approche magique de Lilyneska avait son charme, et il avait confiance en la jeune femme pour faire face à toute difficulté imprévu.

Le roi pour une raison ou une autre, peut-être simplement par bonne volonté concéda aux demandes et suggestions de Lilyneska. Concernant aussi bien le fait de n’informer personne de sa ruse, parce qu’elle saurait se débrouiller, mais aussi de lui assigner la dame de compagnie de la princesse comme « escorte » en quelque sorte… Ceci accordé, l’entrevue se termina assez rapidement et le petit groupe d’enquête put donc commencer sa mission sans avoir de garde royal à leurs côtés pour les surveiller.

Ils eurent simplement le droit à la dame de compagnie de la princesse qui en effet semblait de noble extraction, bien entendu rien ne disait qu’elle n’était pas mêlée de près ou de loin à l’enlèvement de son amie, mais si on partait du principe qu’on devait se méfier à l’extrême de toute le monde, il risquait d’être difficile d’avancer dans l’enquête. Une jeune noble qui entreprit donc de mener le groupe aux appartements de la princesse et de fermer la porte derrière eux une fois là-bas, ce alors que les couloirs du palais étaient plutôt calmes sans que ce soit étrange. Après tout un petit roi comme celui régnant ici ne devait pas avoir une horde de courtisans ou nobles plus ou moins piques assiettes cherchant surtout à lui plaire, donc on croisait surtout dans le couloir du personnel du palais, des serviteurs ou quelques nobles qui avaient des tâches à faire.

Le groupe se rendit donc aux appartements de la princesse et put se rendre compte une fois là-bas, que ces derniers étaient assez bien ordonnés ou rangés, avaient-ils été rangés après le départ de la princesse ou celle-ci n’avait eut de toute façon aucune raison de mettre le tout en désordre ? Difficile à dire, mais en tout cas l’ensemble n’était pas surprenant de ce qu’on pourrait attendre des appartements de l’héritière d’une petite dynastie Eïrnienne, le tout était confortable et assez luxueux sans être aussi exubérant ou exagéré que les appartements d’un riche comte duchéen, avec des meubles surtout en bois, une bibliothèque fort garnie et quelques petits babioles enchantées diverses qui devaient aider au confort de la pièce.

Et en plus de quelques décorations non surprenantes, il y avait le fameux tableau dont avait parlé le roi, le tableau était en effet d’un style très réaliste et d’un style qu’on ne voyait pas en Eïrn normalement, typique de ce courant artistique Akkatonien récent qui visait à représenter la réalité crue sans l’embellir ou l’enlaidir. Peut-être y avait-il des différences très subtiles d’apparences entre la peinture et la réelle princesse certes, mais ce ne serait pas le genre de différences que ceux qui n’étaient pas intimes avec elle remarqueraient aisément… En somme, Lilyneska pourrait sans mal changer de forme aidée de ce tableau… Comme la dame de compagnie confirmera aussi d’un hochement de tête peu après qu’elle garderait le secret concernant tout ce qui se dirait ici.


En dehors de cela, la dame de compagnie de la princesse saluera avec une certaine grâce chaque membre du groupe suite aux présentations de Lilyneska et dira assez charmante et aimable.

« J’espère que votre enquête sera couronnée de succès, normalement nous ne sommes pas habituées à de telles intrigues, et… Oui, vous pouvez me faire confiance. » Elle avait articulé ces dernières paroles comme l’aurait dit n’importe quel noble à qui on l’aurait demandé de front, mais le sort de Lilyneska permettait d’être à peu près sûr que ce n’était pas un mensonge… Puis elle ajoutera ensuite avec réflexion.

« La princesse pas de journal intime, elle avait tendance à garder pour elle ses secrets quand elle ne m’en parlait pas. Et je n’en suis pas sûr, mais je dirais que… La princesse a quelques inimités et suscite quelques jalousies… Il y a notamment son frère aîné, le prince Aïnir qui devait être l’héritier avant elle qui a été disons, débouté par le roi il y a plusieurs années, car ce dernier le jugeait… Inadéquat. » On sentait à la manière dont elle le dit, probablement à cause du sort de Lilyneska qui rendait la femme un peu plus honnête qu’elle l’aurait peut-être été, que le terme inadéquat englobait toute une série de défauts, mais qu'elle n'irait pas citer lesquels...

« Néanmoins je ne pense pas que le prince aurait pu la faire enlever, ou du moins lui qui aurait pu y penser et élaborer le stratagème nécessaire pour. » Avant d’ajouter sinon avec réflexion… « Je pense qu’elle a été enlevée pour des raisons politiques pour ma part, le roi commence à se faire vieux et l’âge prend peu à peu sa marque sur son âme…  Il lui reste encore quelques années, mais certains ne veulent sans doute pas qu’il ait le temps de davantage légitimer son héritière avant de devoir passer le flambeau. » Après rien ne disait que sa théorie était la bonne, mais elle abordait un angle plus politique et qui tournait moins autour de prétendants indésirables aux yeux du souverain… Puis elle ajouterait pensive.

« Il y a sinon un lieu abandonné non loin de la ville où la princesse aimait à se rendre en toute discrétion. Je ne sais pas si cela a un lien direct avec votre enquête, mais elle s’y rendait de plus en plus souvent ces derniers temps. C’est un vieux temple en ruine dédié aux esprits que la plupart évitent par superstition… Je ne sais pas ce qu’elle faisait là-bas, mais ses allées et retours vers celui-ci se faisaient de plus en plus fréquents avant qu’elle ne disparaisse. » Une piste potentielle donc, surtout qu’en vérité ce serait probablement aussi un bon endroit pour détenir quelqu’un qu’un vieux temple abandonné où le commun hésitait à se rendre…

Quant à ce qu'avait donné la clairvoyance de Lilyneska ? Il semblerait que quelqu'un prenne la peine d'user de magie ou d'un moyen technologique pour brouiller les pistes, car la jeune hybride ne put pas détecter précisément où se trouvait la princesse, mais ce n'était pas une manière de brouiller les pistes très puissantes qui était employé, car elle put sentir que l'héritière était dans les environs, du moins dans un rayon de de vingt kilomètres aux alentours... Ce n'était pas plus précis que cela, mais ç avait l'avantage de permettre de savoir qu'elle n'avait pas quittée le royaume heureusement...