Inlassablement, je tourne en rond dans le box. Par pitié, faites que ce ou cette mercenaire se dépêche ! Je soupire bassement, alors que Rin flotte autour de moi, l'air de vouloir m'aider. Pour autant, actuellement, la seule chose qui pourrait me détendre serait de voir enfin cette personne !

Comment en suis-je arrivé là, déjà ? Ah oui, ça a commencé il y a trois heures, alors que je reprenais la route. Et que cette mère est venue demander à l'aubergiste s'il y avait un mercenaire de libre, quelqu'un qui pouvait l'aider. Inquiet, j'ai écouté la conversation. Et j'ai appris que son gamin était très malade, que le médecin de la ville ne pouvait pas aller chercher les ingrédients à cause de la difficulté. Et il fallait également quelqu'un qui s'y connaissait en plantes pour aider à trouver ces rares végétaux. Et devant l'incapacité de l'aubergiste, je n'ai pas pu me résoudre à abandonner cette famille sans raison. Je me suis proposé, la femme m'a donné une liste d'ingrédients à rapporter au plus frais, que le médecin lui avait fournie. Et nous nous sommes divisés. Sëra'Ely est partie avec Yuno, Anyammis avec Kaazoth et Kraä, et je suis resté avec Willow et Rin, pour aider la dame. Nous avons également déterminé un trajet pour faire gagner du temps aux deux groupes, et ils sont partis.

Jusqu'à ce que la femme m'annonce que le médecin avait oublié une plante. Et que je me retrouve comme un con. La dame m'a demandé de partir moi-même mais j'ai un petit souci, qu'elle ne connaît pas. Et ni Willow ni Rin ne pouvait le faire pour moi. Alors je suis retourné voir l'aubergiste, en lui demandant un mercenaire au plus vite. Et depuis, j'attends dans le box qu'il m'a désigné, tournant en rond.

« Gee, calme-toi, ça ne sert à rien de t'énerver...
— Je suis pas énervé ! Je suis pressé ! Frais, Rin, il nous les faut frais ! Tu-... Tu te rends compte ?!
— Je sais, mais tourner en rond ne sert à rien ! »

Oui mais... Je suis stressé aussi, d'accord ! Arg... Bon sang, faites que ce mercenaire se dépêche ! L'aubergiste avait pourtant dit qu'il avait un nom en tête ! Eynéra, ou je ne sais plus trop quoi, je-... J'étais un peu trop agité pour vraiment faire attention à ce nom !

« Euh, Gee... Derrière toi... »

Je me retourne brusquement, certain que Rin m'avertit parce que mon mercenaire est justement là. Et en voyant la chevelure blonde, la peau mate et les yeux vermillon... Mon sang ne fait qu'un tour et je sens une horrible chaleur monter dans mes joues. Je-... C'est une blague ?! Je-... Ce n'est pas tant que sa vue me déplaît mais... Après tout ce qu'il s'est passé, je ne suis pas sûr que l'embaucher ici soit la meilleure solution... Elle doit sûrement encore m'en vouloir à mort, après ce qu'elle a cru que j'avais fait ! Mais je n'ai pas le temps de trouver quelqu'un d'autre ! J'ai déjà attendu bien longtemps ! Et... Peut-être que je pourrai m'expliquer et qu'on laissera ce quiproquo derrière nous... Non Gee, tu rêve.

Quoiqu'il en soit, au lieu de tenter de m'assassiner, comme j'ai cru qu'elle voudrait le faire, suite au malheureux épisode de la transformation en or, l'elfe se met à se moquer de moi. Et si le rouge ne quitte pas mes joues, je sens un poids disparaître de mes épaules. Je-... Ne sais pas ce qu'il s'est passé depuis, mais peut-être que ce n'est pas si mal, comme début de conversation, finalement ? L'elfe s'installe en face de moi et je l'observe avec un air surpris, mais rassuré.

« Ahah, je... Ne savais pas que c'était vous, la mercenaire qui allait m'accompagner... Et je-... Ce n'est pas ce pourquoi vous êtes là ! »

Le rouge agrémente encore un peu mes joues, alors qu'elle ricane et se présente, avant de me proposer de garder "lapinou pervers" comme nom de code. Je secoue énergiquement la tête à cette proposition.

« Je-... Enchanté Eirina... Je... Vous pouvez m'appeler Gee ! C'est mon prénom ahah... Pas un... nom de code. »

Je prends une longue inspiration, pour me calmer. Je ne m'attendais pas à la revoir. Et... Je n'arrive pas à savoir si c'est bien. Quelque part... J'espère pouvoir repartir sur de bonnes bases avec elle. Après tout, elle croit que je l'ai espionné, menti, que je l'ai volontairement changée en or pour un fantasme débile... Et c'est un peu trop pour mon égo en miettes. Enfin, on verra si elle n'essaie pas de m'étrangler en cours de route...

L'elfe continue à se moquer de moi, l'air ravie que je ne l'aie pas appelée pour un strip-tease. Je baisse les oreilles en arrière en fuyant son regard, les joues toujours aussi rouges, terriblement gêné à cette idée. Je-... Je suis pas comme ça ! M'enfin, c'est sûr qu'elle me croit du genre à espionner les dames dans leur bain, et de... Enfin bref. C'est sûr que cette idée ne doit pas la surprendre plus que ça, du coup...

Je retourne les yeux vers elle, et malgré ma gêne, son sourire chaleureux parvient à m'en tirer un. Sans doute un peu gêné, comme sourire, sûrement un peu plus petit que le sien mais... un sourire tout de même. Le patron vient alors déposer une bière, qu'Eirina paye de suite, avant de se retourner vers moi. Elle me pose alors quelques questions sur la fleur et la mission, puis... Sa demande si cette fleur servira à draguer l'élue de mon cœur pour éviter d'aller en reluquer d'autres me fait rougir vivement et dresser les oreilles.

« Non, non, c'est as du tout ça ! »

Néanmoins, le fait que l'elfe se mette à boire sa bière me stoppe vaguement avant que je n'explique quoi que ce soit. Elle se penche ensuite vers moi, ce qui ne fait pas réduire la couleur de mes joues. J'observe son visage de plus près, alors qu'elle me demande ce qu'est... Oh, Rin. Je souris.

« Oh, ça c'est ce qu'il reste de mon meilleur ami, Rin.
— C'pas gentil ce que tu dis, Gee, j'suis vexé !
— Cherche pas les embrouilles, Rin, j'ai des dossiers sur toi qui risquent d'intéresser Eirina.
— Hé ! »

Suite à ce court échange, mes joues ont diminué de teinte, et je me retourne vers Eirina. De toute manière, je n'ai même pas besoin de menacer Rin, je sais parfaitement qu'il se fera avoir de lui-même et qu'il va s'auto-balancer au cours de cette mission. Je le connais depuis le temps, il l'a déjà fait en moins de temps.

« Sinon, pour la mission, oui..., mes oreilles se baissent à ces mots et mon visage devient triste, alors que je reprends : Je-... C'est pour faire une potion, pour aider un petit garçon malade. Les ingrédients sont rares et dans des endroits dangereux. Il n'y a pas grand monde qui sait reconnaître ces plantes et qui sait bien se défendre actuellement. Et moi, je pourrais mais... Je ne peux pas prendre le risque de faire une erreur avec cette fleur. Il faut rapporter les ingrédients tous au plus frais pour que la potion ait un maximum de chances de faire effet. »

Je l'observe dans les yeux, notant pour la première fois ce bel éclat.

« Je... Pourrais vous en dire un peu plus sur... Hm... Certaines choses. Mais pas ici. Vous acceptez le contrat ? Je-... »

Je me retiens d'ajouter que c'est urgent et que tout dépend de son choix actuellement, pour ne pas l'influencer. De toute manière, je ne pense pas qu'elle va refuser, auquel cas elle ne serait même pas venue ici, je pense.

Je vois Eirina qui cligne des yeux, l'air surprise, lors de mon échange avec Rin. C'est vrai que ça fait tellement de temps qu'il est sous cette forme que j'en oublie que ça peut être surprenant pour quelqu'un qui ne connait pas. Mais bon, je ne vais peut-être pas lui expliquer toute l'histoire ! Ou pas maintenant, dans tous les cas. Elle me demande alors s'il me hante et comment nous avons fait pour en arriver là. Quelque chose passe alors dans son regard, comme une ombre triste ou quelque chose du genre, avant de disparaître. Elle m'explique qu'elle aimerait éviter qu'une armée de fantômes la suive, et je penche la tête, un air inquiet sur le visage. Rin est mon ami et un fantôme. Elle parle d'une armée de fantômes. Je me demande si elle a gardé le lien d'amitié qui nous unit, et qu'elle a autant d'amis décédés, ou si elle parle juste du nombre de morts qu'elle traîne. Je... Je ne sais même pas si j'oserai lui poser la question.

« Oh non, t'inquiète, tu devrais pas être embêtée. On est pas passés par la légalité pour en arriver là. Mais Gee n'a pas eu le temps de trouver un mage de lumière assez puissant pour me sauver, donc bon. »

Lorsque la voix de Rin atteint mon cerveau et que j'entends qu'il assume pleinement que je n'ai pas agit légalement, mes oreilles se dressent et j'agite la main à travers l'ectoplasme.

« Rin ! »

L'autre se plaint alors, agacé par la présence de ma main dans son absence de corps. Quel abruti celui-là ! La conversation continue cependant ensuite sur les raisons de la mission, ce à quoi la duchéenne répond... comme une duchéenne. La remarque me fait rougir légèrement. C'est vrai qu'elle a pas tort, dans le fond. Mieux vaut leur parler avec le porte-monnaie. Mais est-ce préjudiciable ? Pas vraiment, c'est leur boulot, finalement. M'enfin. Le sourire de l'elfette me fait lui en rendre un avant qu'elle... ne vide sa bière, d'une traite. Ah oui, quand même. Je l'observe en penchant la tête, surpris par sa descente. C'est drôle quand même. C'est pas moi qui irait vider une pinte aussi vite ! Et c'est pas moi non plus qui resterait à poil alors que... Je sens mes joues se réchauffer à ces pensées. Non Gee ! À cet instant, Eirina repose son verre et me sourit, comme si elle était prête à en découdre. Elle me fait part alors de ses conclusions et de ses suppositions, avant de me proposer de me mettre en route, puisque la vie du gamin est en jeu. Je hoche la tête à ses propos, et nous nous levons de concert. Ce n'est qu'une fois dehors que je reprends la parole :

« Il y a des risques en effet. La dendromera meloïna est une fleur rare, mais pas moins utile et avec son lot d'avantages, pour qui sait comment l'utiliser. Enfin, heureusement que c'est rare. Mais voilà, il y a un souci. Sa présence a tendance à attirer des monstres, plus ou moins gros. En vous attendant, j'ai commencé à chercher des pistes d'un remue-ménage de monstres dans la zone où il y a le plus de chances d'en trouver une et... J'en ai effectivement trouvé un. Nous sommes en plein dans la période de floraison, ce qui la rend particulièrement facile à repérer. »

Je tourne la tête vers elle alors que nous marchons dans les rues, avant de lui offrir un grand sourire désolé.

« Mais si encore le problème ne venait que des bêtes, ce ne serait pas dérangeant... Mais la fleur semble avoir poussé dans les environs d'un campement de bandits. Pas le plus gros, mais pas tout petit non plus. Donc il est possible que nous ayons à gérer tout ce beau monde, en cherchant une plante rare parmi toutes ses sœurs. »

J'offre un nouveau sourire désolé à l'elfe. J'ai l'impression que cette mission va être mouvementée.

« Il faut savoir que la dendromera meloïna est très similaire à l'une des plantes de la même famille : la dendromera piteorea. Elles n'ont que quelques différences, que l'on ne voit pas forcément directement, si l'on est pas habitués. Et malheureusement, même si elles sont physiquement différentes, il me faut du pistil frais de meloïna. Et comme je vous l'ai dit, c'est une plante rare. Enfin, rien n'est impossible, bien sûr ! »

Je lui souris une nouvelle fois, d'un air rassurant cette fois. J'espère que mes explications ne lui ont pas fait peur. Quant à Rin, il virevolte autour de nous, l'air de rien. Enfin, ça ne durera pas.

Lorsque j'explique les différents problèmes que nous pourrions affronter lors de cette mission, j'entends l'elfe qui lâche un petit rire amusé. Je me tourne vers elle, me demandant si elle rigole parce qu'elle trouve ces problèmes dérisoires mais... Avant même que je ne puisse poser ma question, sa voix me répond. Elle me fait alors un état des lieux de notre aventure prochaine, et je souris en hochant la tête pour lui répondre.

« Euh oui, c'est tout à fait ça, ahah. »

Eirina, qui semble plus amusée qu'autre chose, me conseille alors, la prochaine fois, de révéler cela avant de partir, pour éviter que les mercenaires puissent croire que je leur fait à l'envers. Oh. Un sourire désolé se peint sur mon visage, alors que je baisse les oreilles d'un air gêné.

« Ah oui, en fait j'aurais dû dire ça au lieu d'expliquer pourquoi j'ai besoin de la plante, c'est ça ? Ahah, je vois, désolé... Et merci pour le conseil, je tâcherai de m'en souvenir. Mais je fais bien peu appel à des mercenaires, et je ne suis pas venu aux duchés depuis bien longtemps, ahah. Certaines choses... ont été oubliées, si je puis dire ! »

Suite à cela, je me permets d'expliquer le souci que l'on a avec la fleur en question, sans préciser, pour le moment, qu'on aura le droit à une jolie floraison de piteoreas. Enfin, de toute manière, c'est sous-entendu. Ma mercenaire me révèle alors qu'elle n'est pas très douée en noms scientifiques, mais que si elle la voit une fois, elle pourra la reconnaître. Tout en rappelant que le problème est justement de la voir. Je souris à cette mention, alors qu'elle me propose de gérer la partie baston, et de me laisser la cueillette. Je risque un rire nerveux.

« Hé bien voyez-vous... Mon véritable souci est là. Je sais apaiser les monstres et ne pas être une menace à leurs yeux, s'ils veulent bien arriver à le comprendre. Pour les bandits, je ne me faisais pas tant d'illusions, je comptais juste rester discret mais... »

Je tourne la tête vers Rin, avant de laisser Willow sortir. Le petit renard tourne autour de moi, observant l'elfe.

« Willow, Eirina. Eirina, Willow.
— Enchanté Eirina !
— Il n'est pas très à l'aise en lieux clos, alors j'ai attendu un peu avant de vous le présenter. J'espère que ça ne vous dérange pas.
— Mais les amis de mes amis sont mes amis ! »

Je fais la moue, alors que Willow lâche un petit ricanement joyeux, alors que ses mots me font monter un peu de rose aux joues. Pas sûr qu'on puisse être considérés comme des amis, même si elle a l'air de ne plus m'en vouloir pour ce qu'il s'est passé la dernière fois... Surtout que je vais devoir relancer le sujet. Je prends une inspiration, avant de reprendre la parole.

« Disons qu'il y a un autre véritable problème qui m'a poussé à faire appel à un mercenaire... Et d'un côté je suis heureux que ce soit vous, parce que vous le connaissez déjà un peu... Vous-... Vous rappelez de ce sort de pétrification modifié, j'imagine... »

Je fais la moue. Je n'aime pas vraiment ce que je fais. Mais j'imagine que si elle avait voulu me causer du souci avec ça, je le saurai déjà ? Enfin bref. J'inspire une nouvelle fois, détournant les yeux, un peu de gêne, un peu vexé de ce que je vais dire.

« Quand je vous disais que je n'avais pas fait exprès, c'était véridique. Je ne contrôle absolument pas ce-... Enfin... Je ne sais pas quand il va s'activer, ni sur quoi, ni pourquoi. Une fois qu'il est lancé, je ne peux qu'attendre que ça finisse. J'ai essayé d'apprendre à le contrôler, j'ai vu des spécialistes, mais pour le moment je ne peux rien en faire, juste attendre. »

Je soupire, jouant avec mes gants, un peu stressé à cette idée.

« Je vous ai dit qu'il me fallait les ingrédients frais. Mais si cette fleur est touchée par ce pouvoir et qu'il n'y en a plus d'autres... Hé bien les autres ingrédients que mes compagnons doivent ramener ne seront plus frais lorsque la meloïna redeviendra à son stade originel. Je ne peux pas prendre le risque de la toucher mais... Rin est inutile et Willow n'a pas de mains. Et si je porte des gants pour la manipuler et que ce pouvoir s'active à ce moment, je risque de la broyer. En plus de ne plus pouvoir bouger mes doigts. »

Je souffle, tentant d'évacuer tout le stress en moi. Chose non facile, mais au moins, je retrouve suffisamment de contenance pour tourner le nez et oser regarder Eirina.

L'elfe me conseille de ne pas passer mon temps à m'excuser, et qu'elle comprend ce qui m'a tracassé en priorité. Surtout si je ne suis pas duchéen, ce qu'elle aurait cru. Ah oui ? Parce que je fantasme devant une statue d'or ? Ahah. M'enfin, de toute manière, elle en saura plus sur ça bientôt, si elle veut bien me croire. Elle me demande ensuite d'où je viens, avant de dire que, tant que je ne suis pas teïderien, elle ne rompra pas notre contrat. Elle ajoute même, pour montrer son dédain de la nation de Teïder, un joli crachat. Tiens, ça fait pas très elfique ça. Ou au moins pas très elfe ikhyldien. M'enfin, elle doit avoir ses raisons. Quoiqu'il en soit, je lui réponds alors :

« En effet, je ne suis qu'un hérétique à leurs yeux. J'ai vécu à Teïder pendant longtemps et j'ai un peu participé aux rébellions, mais je suis ikhyldien de naissance. »

Je lui souris doucement, avant d'enchaîner sur de nouvelles explications, puis sur la présentation de Willow. La jeune elfe semble apprécier l'apparence de mon esprit, puisqu'elle arbore un magnifique sourire, qui me fait oublier temporairement la raison derrière nos retrouvailles. Elle complimente ensuite Willow, qui ricane d'un air charmant, le visage tout souriant. Il remercie l'elfe flottant gaiement dans les airs, semblant danser. Eirina me demande alors si c'est encore le fantôme d'un ami décédé, et je vois Rin qui semble bouder derrière elle, l'air visiblement jaloux de l'intérêt porté pour Willow. Je souris, avant de répondre :

« Non, ce n'est pas un fantôme d'ami mort, Willow est né ainsi, ahah. Rin est le seul dans son cas. Enfin, au moins de mes compagnons, peut-être que quelqu'un d'autre à réussi à ramener des morts dans cet état. »

Elle câline ensuite la tête de Willow, qui semble bien apprécier cela. Voilà qui va rendre Rin encore plus jaloux ! Je souris d'un air amusé à cette remarque, avant de me rappeler soudainement les raisons de notre présence ici. Et même si ça ne me plaît pas, je demande à l'elfe si elle se rappelle de mon pouvoir de statufication, ce à quoi elle répond que je peux rêver qu'un Duchéenne ait pu oublier ce genre de pouvoir. Je souris d'un air à moitié las, à moitié amusé, avant qu'elle ne me demande le rapport avec la fleur, rapport que je ne tarde pas à lui expliquer, l'air extrêmement gêné et surveillant tout autour de nous que personne n'ait entendu cette discussion. Quand je relève la tête vers la mercenaire, elle semble pensive, bien que pendant peu de temps. Je vois ses doigts jouer avec une sorte de gantelet dont je ressens la puissance magique. Je pense la tête sur le côté. C'est drôle, je n'avais presque pas fait attention à lui, avant maintenant, alors qu'il sent la magie de manière bien trop forte pour être naturelle… Quoiqu'il en soit, elle se met alors à parler, constatant que, de ma bouche, ce pouvoir qui pourrait en intéresser beaucoup ressemble davantage à une malédiction. Je souris d'un air las, le regard fuyant. Oui, c'est tout à fait ça. Une malédiction. Elle explique alors qu'elle comprend mieux pourquoi je suis resté, avant de s'excuser de s'être fait des scènes, expliquant toutefois qu'elle avait de bonnes raisons de les croire. Mon sourire se fait désolé, et j'opine du chef, avant de répondre :

« Disons que je m'en serais voulu de voir dans le journal qu'une statue d'elfe en or a été trouvée et vendue aux enchères… Ou pire, ahah. Mais je comprends ahah… Même si… Non, laissez tomber. »

Oui, j'ai temporairement envisagé l'idée de lui réexpliquer que je ne l'avais pas reluquée au bain. Mais à quoi bon ? J'attendrai que Rin se trahisse lui-même. Ou une autre occasion. Quoiqu'il en soit, je croise le regard de l'elfe, plein de compassion à mon égard, et je lui souris gentiment.

« Cela dit, j'avoue que ce n'est clairement pas le genre de pouvoir que je pouvais demander, alors oui, même s'il pourrait rendre des duchéens heureux… Et même si ça peut paraître égoïste, si j'avais le moyen de l'effacer complètement, je le ferai. »

Enfin, l'elfe me rassure en me disant qu'elle possède encore une main assez délicate pour prendre la fleur, et je me demande si ce n'est qu'une expression ou si le gantelet joue un rôle dans cette phrase. Elle me demande juste de lui dire quelle fleur est à prendre, avant d'ajouter que sa discrétion n'est pas assez grande pour pouvoir passer discrètement. Je penche la tête, surpris. Soit les elfes ikhyldiens sont vraiment différents soit... Je ne sais pas, peut-être qu'elle a été élevée par des nains ! Je souris à cette idée. Nan, elle est pas assez ronchon et de trop bonne humeur pour ça. Je ricane, avant de demander :

« Il est donc possible de croiser des elfes dont la spécialité n'est pas la discrétion ? Quoique, vu votre épée, c'est vrai que ça ne doit pas être très pratique, ahah. »

Je souris, avant d'ajouter :

« En tout cas, merci pour votre aide. J'espère que vous êtes prête alors, on risque de devoir se battre ! »

Je remarque le regard de l'elfe qui s'assombrit temporairement lorsque je lui révèle avoir vécu à Teïder, mais je ne saurai dire pour quelle raison exactement. Cependant, comme elle semble ne pas vouloir continuer à parler de cela, je ne lui pose pas de questions et nous enchaînons ensuite sur Willow, puis sur mon pouvoir et la discussion qui s'ensuit. Et alors que je lui explique les raisons derrière le fait que je sois resté sur place tandis qu'elle était statufiée, Eirina répond avec un certain entrain que celui qui l'aurait achetée aurait eu une belle surprise. Je souris, c'est vrai qu'elle n'a pas l'air du genre à se laisser faire, j'imagine qu'elle lui aurait bien fait regretter son achat. Elle ajoute que le fait de l'avoir attendue était tout de même gentil, et je me retiens de dire que ce n'est qu'une question honnêteté, ce qu'il manque souvent aux duchéens. Et pour preuve, puisque ça devrait être un acte naturel d'attendre ou de réparer — selon le cas — ses bêtises. Bref.

Le sujet part donc sur mon pouvoir — ou ma malédiction, selon le point de vue — et elle fait remarquer que c'est souvent bien difficile de s'en séparer. Je hoche lamentablement la tête, bien que je le sache parfaitement… puisque c'est pour ça que je suis là. Elle me propose de me couper les mains et les faire remplacer par des prothèses akkatoniennes, et je dois avouer que je n'ai pas pu retenir un petit rire amusé. Oui c'est radical, je vous le fais pas dire. Elle termine en disant que ce serait tout de même dommage, et elle n'a pas tort, bien qu'il doive y avoir un moyen de faire avec. Je fais la moue. Ouais, en ne touchant rien, par exemple ?

« Sans doute, mais reste encore à savoir quoi… Et sans passer par les prothèses, ça m'arrangerait, ahah. »

Je lui ai répondu simplement, avant de continuer sur la discrétion de la dame, qui rit doucement à ma boutade. Elle me répond de me méfier car l'on pourrait croire que j'ai voisiné trop longtemps les teïderiens et je ricane. Je les ai eu comme voisins pendant cinquante années, alors c'est un peu le cas. Même si je n'ai rien de raciste, contrairement à eux. Elle me cite alors un exemple d'elfe non discret et je penche la tête avant de rire.

« C'est vrai que vu comme ça… Dans ce cas, j'en ai croisé aussi, je vous assure. »

Je lui souris, mon regard passant davantage sur les traits élégants de son visage. Je ne peux pas le nier, elle fait partie de ces elfes charmantes, mais c'est amusant qu'elle ne le fasse pas remarquer. J'aurai tendance à croire qu'elle ne se considère pas spécialement comme telle, ou au moins qu'elle s'en fiche un peu. Mais c'est amusant, d'autant qu'elle est vraiment charm-… Je me rends compte que je la dévisage peut-être un peu trop et je détourne les yeux, me reconcentrant sur le point vers lequel nous marchons. J'essaie également de retenir un peu de rouge tout en changeant de sujet, en la remerciant de son aide et en lui demandant si elle est prête. Ce à quoi elle me répond de manière enthousiaste, tout en glissant une note concernant la facturation de cueillage de fleur. Je souris d'un air amusé alors que son regard se pose sur moi lorsqu'elle constate que nous ne devrions plus être très loin. J'opine du chef, et elle m'explique son plan, tout en précisant que c'est à moi de le valider, comme c'est moi qui paye. Sa remarque concernant le fait qu'on ne l'empêche pas d'avancer lorsqu'elle s'y prend ainsi, et celle qui précise qu'elle n'a pas besoin de l'expliquer à un voyeur me font rosir alors que je repense à la scène dans le bois. Je détourne rapidement les yeux et ne les repose que quelques secondes plus tard, après qu'elle soit passée à la suite. Je réfléchis alors à son plan, avant de répondre :

« J'imagine que je peux valider le plan, mais est-ce qu'on vous laissera entrer de manière avenante si un… Euh… Si vous êtes accompagnée ? De toute manière, comme il faudra se battre, j'imagine que ça n'a pas d'importance. Il faut juste faire attention où l'on met les pieds. Elles ressemblent à de petites fleurs blanches, donc évitez d'en écraser si vous en voyez. »

Je me tourne vers notre cible, avant d'enchaîner :

« De toute manière, j'imagine que la meilleure idée qu'on puisse avoir serait de foncer dans le tas ! »