3 Juillet de l’An 2000 de l’Âge d’Acier

Slenlodwiin comme souvent quand il ne voyageait pas, rôdait non loin de son « domaine » en quelque sorte ou de son grand jardin où il passait une bonne partie de son temps quand son train train était sédentaire, ou quand il n’était pas à Assana pour donner des conseils à la communauté ou aider les habitants de celle-ci. Là il était dans son grand jardin où poussait des plantes sans commune mesure en taille avec celles que cultivaient les bipèdes. Des plantes qui nécessitaient évidemment beaucoup de magie pour pousser et qui n’étaient pas forcément plus rentables au change que de cultiver de façon normale, néanmoins pour un dragon comme lui... Des fruits faisant si possible un demi mètre, voir un mètre de haut, si ce n’était plus, étaient plus agréables à manger s’il voulait respecter son régime végétarien.

Quoiqu’il en soit, le dragon connut aussi comme un vieux sage et une sorte de guide paternel pour ceux qu’il assistait d’une façon ou d’une autre, était occupé à dormir, roulé en boule comme un chat presque, mais à l’aspect bien plus intimidant étant donné sa taille imposante qui le rendait plus grand que bien des maisons. Quoique, aux airs angéliques à cause de ses plumes et de ses écailles azurs, pouvaient rendre le portrait rassurant pour ceux qui l’observaient d’une certaine façon…

En tout cas si le membre de sa famille décidé à le voir aujourd’hui pour possiblement prendre conseil, arrivait, il verrait un Slenlodwiin encore profondément endormi, l’accueillir, quoique peut-être ce dernier commencerait t-il à se réveiller si son petit fils adoptif faisait beaucoup de bruit. Pourquoi d’ailleurs le jeune dragon était-il venu prendre conseil ? Avait-il certains conseils à prendre ? Ou demande au vieux sage presque deux fois millénaire.

Slenlodwiin, ouvrait ses yeux reptiliens quand un dragon atterrit non loin de lui, ce qui suffit naturellement à le pousser, probablement une histoire d’instinct, à se réveiller lui aussi. Après tout, étrangement ou non, les sauriens célestes étaient probablement l’un des peuples du continent, encore le plus soumit à ces choses animales qu’on nommait l’instinct par exemple, même si pas du tout à un point critique. Peut-être car les dragons n’avaient que rarement abandonnés leur mode de vie à l’ancienne, ou parce que leur corps n’était pas tant fait que cela sans l’aide de la magie, pour interagir avec les civilisations d’êtres aux pouces opposables ?

« Zei’lius ? Je connais ce nom en effet. » Dit alors Slenlodwiin qui s’extirpait calmement des limbes du sommeil, son corps massif presque dix fois plus gros que celui de son petit fils se remit alors peu à peu dans une position plus pratique pour converser, assise elle aussi. Et au vu de la grandeur de son être, il y avait un petit côté intimidant dans cela sans que ce soit le moins volontaire du monde, comme si vous voyiez une énorme maison bouger tout à coup. Il était probable qu’elle ne se préoccupe pas spécialement de vous, mais voir quelque chose d’aussi gros se mouvoir ça marquait.

Quoiqu’il en soit une fois assit calmement, Slenlodwiin lança un paisible regarde au dragon nuage qui était pour le coup assez étrange par rapport à beaucoup de dragons qu’il avait vu, mais il n’était point à sa première excentricité après tout. Puis il reprit aimable et accueillant.

« Mon petit fils adoptif ? Je ne t’ai pas souvent vu, voir jamais, je suis content de te rencontrer pour la première fois, comment te porte tu ? Es tu venu pour des conseils par hasard ? » Visiblement il était content de le voir en tout cas, même s’il se demandait pourquoi il là en effet, son petit fils adoptif ne s’étant pas montré comme un dragon du genre à faire des visites purement pour le voir.

Slenlodwiin écouta avec patience et bienveillance son petit fils adoptif qui lui expliqua la raison de sa venue tout en restant très poli. Ce dernier était sincère dans sa demande et le dragon apprécia la chose, même si évidemment il aurait aussi apprécié le rencontrer plus tôt, mais bon... En tant que vieux dracosire, il savait parfaitement après tout que sa propre race n’était pas forcément des plus sociable ou famille selon les spécimens. Sa petite fille du nord et son petit clan étant plus une exception en dehors d’un pays vraiment civilisés, qu’une norme pour des dragons dits « libres ». Quoiqu’il en soit, il répondit avec un ton paisible, mais teinté d’amusement au jeune nuage.

« Je vois, tu désires donc une discussion ? Soit, je ne suis jamais fermé au fait de rendre service ou partager éventuellement mes lumières avec ceux disposés à cela. J’espère juste que tu ne t’attends pas forcément à ce que cela soit rapide, après tout les choses bien faîtes demandant du temps. Cela et puis nous ne sommes pas des humains, autant ne pas nous presser. » Conclut-il à ce sujet avec un peu d’humour taquin au sujet des bipèdes. Sans mépris, mais plutôt de l’air du dragon qui envisageait la chose avec bienveillance, mais aussi un petit amusement apitoyé. Ce avant de reprendre solennel.

« De quoi désire tu donc parler mon enfant ? Ne t’inquiète pas, quoique tu dises, cela restera entre nous, si éventuellement tu préfères que ta sœur n’en apprenne rien, j’ai appris après tout avec le temps à être la gardien de nombreux secrets. » Beaucoup d’êtres avaient dû se confier à lui après tout depuis qu’il s’amusait à offrir ces services à travers Orzian par altruisme. Des secrets qui pour certains devaient certainement être des plus croustillants.

Slenlodwiin hocha un peu de la tête quand le jeune dragon accepta de prendre son temps. Il faisait bien, après tout rien ne pressait et l’ancien pour sa part estimait qu’en tant que dragon il fallait justement profiter du fait de vivre deux milles ans pour ne pas vivre dans l’urgence ou décider dans la précipitation, même si évidemment ce n’était pas une excuser pour l’inverse. Il était conscient en tout cas que la jeunesse quelque soit la race pouvait être fougueuse et même pressée, alors autant être honnête au sujet du fait que ça allait durer.

Quoiqu’il en soit, le jeune nuage lui avoue son hésitation par rapport au sujet par lequel il allait commencer par parler, mais aussi le fait que sa vie débutait une phase compliquée. Cela Slenlodwiin pouvait le comprendre, après tout lui-même l’avait vécu et s’on souvenait même. Cette partie de notre existence où l’on était encore assez jeune et il fallait justement décider de quoi serait fait la suite de cette dernière. Après l’avantage quand on est un dragon c’est qu’on avait deux millénaires pour faire ce qu’on voulait, cela laissait une belle marge d’erreur. Même si dans le cas d’un dragon comme son petit fils, son appartenance à une communauté et une famille faisait certainement qu’il voulait faire les bons choix.

« Le présent est souvent bâtit sur les fondations du passé, si tu désires au mieux solidifier ces dernières, il faut t’assurer de la solidité de ces dîtes fondations, les examiner. Du moins, c’est ce que dirait un philosophe nain. Je te propose quoiqu’il en soit de commencer par parler du passé, ainsi moi aussi saurait mieux à quoi m’en tenir et comprendrait j’espère, mieux les doutes qui te tirailles. » Oui, il valait mieux y aller pas à pas, surtout qu’il se disait que la situation devait sans doute être compliquée à sa façon à expliquer, alors autant ne pas être trop pressé...

Slenlodwiin écouta le discours du jeune dragon et comprit la peine de ce dernier. Il comprit aussi que montrer de la compassion pour cela serait une bonne chose, mais à dose acceptable. Quoiqu’il en soit, quand le jeune nuage finit de parler de cela, le dragon ancien reprit calmement.

« Je vois, je peux comprendra ta douleur et compatir. Il faut néanmoins réfléchir à une chose, je ne pense pas que le côté opposé soit parfaitement mauvais. Je pense qu’au cours de cette guerre si c’est celle dont tu parles, les deux camps avaient leurs torts. Il en est souvent ainsi des guerres et combats. Chaque camp a ses raisons et pense avoir raison justement et se bat pour cela. Il n’y a jamais de guerre ou presque faîte au nom du mal. Souvent au nom d’intérêts géopolitiques, voir d’idéaux, certains se battent dans un camp, d’autres dans le camp d’en face. Des personnes des deux camps souffrent… Je doute que les Akkatoniens étaient ravis par exemple de voir les leurs réduits en esclavage par Balthazar, privés de la liberté pour laquelle ta mère se battait. Certains sont morts à Ikhyld pour cette liberté, certains étaient des dragons. La situation est complexe, si tu veux au mieux l’appréhender, il va sans doute falloir s’intéresser plus avant aux tenants et aboutissants de cette guerre pour les deus camps. » Il ne savait pas si le jeune nuage allait apprécier ces paroles, mais Slenlodwiin ne faisait que relativiser, il ne disait pas que les Akkatoniens avaient eut raison de faire cette guerre, mais qu’ils ne l’avaient pas fait pour le plaisir de faire couler le sang. Quoiqu’il en soit il reprit calmement pour dire.

« Concernant la technologie, c’est un camp comme un autre qui se constitue et qui risque d’entrer en conflit avec celui de la magie et les deux ont leurs raisons. Néanmoins, de quelle nature sera ce conflit ? Et est-ce qu’il doit être ? Toi qui a beaucoup perdu à la guerre, qu’est tu prêt à perdre ou faire perdre aux autres ? Ou veux tu juste vivre isolé de cela ? Contribuer à une lutte d’influence plus pacifique ? » Beaucoup de questions en sommes, combien de réponses ?

Et enfin il conclut pensif.

« Oublie Night et ta nouvelle famille le temps de cette discussion, du moins la pression que tu t'imposes par rapport à eux, ils sont importants pour toi, mais je pense que là nous devons surtout discuter de toi. Comment pourrais-tu après tout rester éternellement en paix avec eux si tu n’es pas en paix avec toi-même ? L’important c’est de savoir à quoi tu aspires pour toi-même aussi. Nous sommes dragons, nous devons aussi vivre pour nous-mêmes. » Oui, après tout par nature les dragons étaient un peu plus individualistes que les autres races, comme une panthère serait plus individualiste qu’un loup.

Slenlodwiin sembla réfléchir aux paroles de son petit fils, puis finit par dire après un certain temps de réflexion, un temps de réflexion sans doute nécessaire pour chercher ses mots.

« Il existe bien des pays différents manipulant la magie et la technologie. Et, malheureusement il va sans doute falloir dans l’optique de ta lutte qu’elle soit pacifique ou non que tu t’intéresses notamment à leur idéologie ou façon de faire. Il ne faut pas se leurrer après tout, certes la technologie et la magie sont en dualités, mais ce sont les états qui choisissent ou non d’adhérer à une de ceux voies, ou un peu des deux, qui dominent ce monde, imposent leur idéologie et peuvent changer ce dernier. Nous pouvons évidemment aider à changer les choses en tant qu’individus, surtout que nous sommes des dragons, mais même par rapport à nous les nations sont des titans ayant une portée plus conséquentes. » Après tout, la technologie aurait-elle une telle légitimité malgré sa jeune existence si elle n’était pas notamment soutenue par l’empire le plus étendu sur ce monde ? Akkaton ? Et ferait-elle moins peur si ce dernier n’était pas en plus militariste et impérialiste ? Dans les faits, c’était au niveau des nations au final que ce genre de choses se décidaient.

« Et c’est aussi au niveau des sensibilités ou mentalités que cela se décide, chaque population selon son pays ou sa race a sa vision des choses après tout. Certaines sont plus dures à convaincre que d’autres et cherchent dans la magie ou la technologie des choses différentes. Et évidemment, sauf si tu as une puissance brute immense derrière toi, imposer est presque impossible à long terme et ne se fera pas sans ressentiment. Dans un tel cas, est-ce que la violence paraît être forcément la seule solution ? » Il sembla alors réfléchir et conclut.

« Quoiqu’il en soit, je te conseilles de te créer une seconde identité si tu ne veux pas nuire aux tiens avec toutes ces histoires, que cela reste modéré ou non… Et j’espère que cela restera modéré. Je suppose que cela inquiéterait plus Night qu’autre chose ? » Cela et pour sa part il avait promis de le garder pour lui après tout...

« La technologie est l’objet de plusieurs idéologies en sa faveur, tout comme la magie en soit. Sans vouloir critiquer ceux aspirant à un domaine ou l’autre, la magie aussi a des adeptes virulents, voir très virulents, bien entendu si l’on est sympathique à leur cause cela peut paraître plus acceptable, mais... La virulence d’un côté attire la virulence de l’autre, l’extrémisme et la mauvaise foi. Il y a des technologistes qui veulent que la technologie soit considérée à égalité voir supérieure autant par rancune que par crainte que leur mode de vie soit menacé, mais aussi pour se défendre, pas que par désir suprémasiste. Sauf si tu aspires à tous les exterminer ou les mater, ce qui risque de demander beaucoup de moyens et d’être complexe, cela est voué à perdurer sur le long terme. Si tu aspires à juguler l’influence technologiste donc, il va falloir être subtil. » Il ajouta même amusé. « La plume est plus forte que l’épée des fois, même si cela dépend des situations. L’argument de la supériorité et de la naturalité de la magie n’est peut-être pas le meilleur pour convaincre d’ailleurs, car il peut paraître prétentieux et trop facile. Ce qui intéresse beaucoup de bipèdes dans un pays matérialiste comme Akkaton, c’est le confort offert par la technologie, la puissance, l’égalité entre les êtres ou les promesses de lendemains meilleurs. Ils ne seront pas très réceptifs à des arguments religieux ou spirituels. » Pour souligner évidemment qu’il fallait savoir quel public viser et comment, tous ne seront pas sensibles aux mêmes arguments.

Quant au sujet de sa petite fille, Slenlodwiin glissa avec amusement. Visiblement il s'était un peu attendu à cette réaction.

« Je voulais justement aborder ce sujet. Sache qu’il y a trois types courants de dragons mon enfant, ceux ne vivant que pour eux, ceux vivant pour un petit groupe familial et ceux vivant pour un grand ensemble. Néanmoins, quel que soit le type de dragon que tu es, nous somme une espèce particulièrement individualiste, cela est un fait, car nous sommes à la base de farouches prédateurs, ainsi tu verras rarement un dragon oublier sa propre personne au profit d’autres ou considérer qu’il n’est qu’un petit élément dans un ensemble plus vaste. Ce n’est pas de l’égoïsme sache le, beaucoup parmi les bipèdes confondent le fait de penser à soit aussi avec l’égoïsme, comme si ne pas être égoïste consistait à se laisser marcher sur les pieds et ne pas avoir d’identité propre. Mais je me demandais, si tu dois te mettre des limites, est-ce que ce sera pour toi aussi ou seulement pour Night ? Car aussi aimant que tu sois à son égard, je doute que tu arrives à te sacrifier toute ta vie pour elle sans le regretter ou devenir amer. » Il ajouta alors avec sérieux. « Je ne dis pas qu’il ne faut pas penser à elle évidemment, surtout si tu l’aimes, mais serais tu du genre à céder du terrain systématiquement pour ne pas la peiner ou lui faire plaisir ? J’ai l’impression que non, peu de dragons le feraient, ou que même si tu le dirais, tu n’y croira pas vraiment. Par contre, faut-il dans ce cas trouver un entre deux ? Autant penser à toi qu'à eux ? » Oui, après tout un dragon était un dragon et peu de dragons s’oublieraient totalement pour toujours. Il se permit même de conclure. « C'est en cela que je t'ai conseillé de faire abstraction un temps de cette pression familiale que tu t'imposes, un dragon n'est pas fait pour vivre pressurisé. Si tu dois t'imposer des limites on t'interdire certaines choses, tu dois aussi les accepter et les apprécier, non pas y obéir purement par devoir filial. Réfléchir à leurs justesses, voir leur avantage et surtout être en paix avec. Sinon un jour, tu risques de développer de la rancœur envers ta famille et alors les choses empireraient vraiment. » Oui, en somme il lui conseillait certes de rester proche de sa famille et de les inclure dans son jugement certes, mais aussi de voir quel distance mettre avec celle-ci pour rester serein et ne pas risquer de prendre cette famille pour une prison justement...

« Je vois. » Glissa le vieux dragon pensif quand le jeune avoua qu’en effet pas mal de ses doutes devaient venir du fait qu’il se privait sans doute trop au nom de sa famille, même s’il aimait cette dernière et que les membres de celle-ci n’abusaient guère de lui. Tels étaient les dragons après tout, des êtres fiers et puissants qui avaient leur petit égo, mais aussi désir de briller ou exister pour eux-mêmes aussi à un degré ou l’autre. Un dragon un peu désobligeant dirait qu’ils ne se comportaient pas comme un troupeau, comme beaucoup de bipèdes le feraient notamment, mais ce n’était pas aussi simple, déjà car les bipèdes eux-mêmes avaient beaucoup de variétés de caractères malgré les différentes tendance qui se dégageaient d’eux évidemment.

Au moins le jeune dragon avait une idée de où commencer à orienter ses réflexion dorénavant. Rien ne disait après quelles conclusions il tirerait de ces dernières, mais ce serait ses choix. Car si Slenlodwiin savait bien une chose, c’est qu’il n’y avait pas beaucoup de choses qu’un dragon ne s’imposait pas lui-même, qui pouvait le pressuriser dans un sens ou l’autre, tel était la nature de leur auguste et céleste peuple après tout. Il se permit néanmoins d’abord tout de même avec une dose de sérieux et de réflexion certaine.

« Peut-être serait-il aussi bon quand j’y pense, que tu rencontres ton père de sang ? Tu es adulte maintenant après tout, même si tu as été séparé de lui pour certaines raisons, c’est à toi de te faire tes propres opinions et créer ton destin. Mais aussi ton pays natal, Ikhyld, après tout tu es un Ikhyldien de naissance, peut-être que cela n’a que peu d’importance à tes yeux, mais il y a peu de terres où la magie a acquit autant ses lettres de noblesses que là-bas. » Oui, ce pourrait être un voyage très instructif en soit.

Slenlodwiin écouta à nouveau calmement son petit fils, puis sembla un temps réfléchir, avant d’ajouter tout simplement.

« Oui, un dragon peut avoir des liens de ce genre. Cela dépend de comment il a été éduqué et comment il a vécu sa vie, si tu as eu des frustrations, si on t’as appris à te prendre d’affection pour les autres. Même si nous avons certaines tendances par notre statut, comme tout être pensant notre vie peut changer notre personnalité ou nous pousser à adopter certains comportements. Certains peuvent êtres aussi plus sociables que d’autres. Un dragon restera toujours un dragon, mais une partie de son caractère est comme l’argile mou qui peut être altéré comme le dirait un bipède... »

En somme oui, après Slenlodwiin n’était pas un psychologue spécialisé en mentalité dragonique, mais on pouvait donc deviner qu’il avait tout de même quelques connaissances et intuitions précieuses dans le domaine. Quoiqu’il en soit, il regarde un temps calmement se petit fils, comme s’il se demandait quel serait le devenir de ce dernier, puis ajouta d’un ton paisible.

« D’une certaine façon, ton éducation au sein d’une tribu et famille assez inclusive et peu compétitive, t’as probablement rendu plus sociable et probablement plus doux qu’un dragon qui aurait vécut en solitaire ou selon des façons plus farouches. Je ne suis pas dans ta tête après, je ne saurais pas dire tout ce qui a généré ces conflits en toi, mais aller voir la source du problème t’apaisera sans doute. Après… Je dois te prévenir d’une chose. » Il leva alors la patte et un doigt de celle-ci en l’air avant de dire distinguement.

« Attend toi à être potentiellement déçu. Je ne dis pas que ce sera le cas, mais peut-être t’es tu imaginé certaines choses une fois que tu retrouveras ton père ou ira en Ikhyld. Peut-être auras tu ce que tu désires, que tout se passera merveilleusement bien ou que tu tomberas amoureux de l’empire d’Ikhyld, mais. Tu pourrais aussi être déçu selon tes attentes originelles. Sache le. Après il vaut mieux être possiblement déçu par quelque chose que d’être frustré de ne pas se confronter à celle-ci... »

« De toute manière, si tu fais un choix il vaut mieux que ce soit en connaissance de cause, que sans savoir ce qui aurait pu se présenter à toi. La liberté c’est avant tout d’avoir le choix, qu’importe si tu aurais forcément fais un choix plutôt que l’autre. Te priver de la possibilité de changer de vie, même si tu le redoutes actuellement, même si tu ne comptes pas le faire, c’est te priver d’une liberté à laquelle tu tiens j’ai l’impression dans ce cas précis. » Dit le vieux dragon avec réflexion, après tous les siens n’étaient pas fait pour vivre en cage que ce soit littéralement ou métaphoriquement, cela et son petit fils adoptif était encore bien jeune. Il serait donc malsain sans doute pour ce dernier qu’il s’impose une trop grande frustration au risque que sinon elle biaise cette dite liberté, après tous les jeunes âmes ne prenaient pas les choix les plus réfléchis du monde des fois, surtout sous le coup de l’émotion.

« Et je suppose que rien ne t’empêche vraiment d’avoir deux responsabilités ? Je veux dire, tu es un membre de la tribu de Night, mais changer en partie de vie n’impliquera pas forcément que tu coupes les liens selon tes choix. Night elle-même voyage assez et puis peu de monde s’attend à ce qu’un dragon reste éternellement à un endroit si ses ailes l’appellent ailleurs. Après, as tu des ambitions particulières par rapport à la tribu de Night ? En as tu parlé avec elle ? » Oui, après tout s’il désirait s’accomplir dans le dernier cas, il y avait peut-être moyen de s’arranger pour avoir un rôle permettant de voyager pas mal ou de ne pas avoir à tout le temps être présent, n’est-ce pas ?

« Il n’est pas un crime de simplement penser, même si l’on pense surtout à soi, ce sont les actes ou ce que nous faisons qui peuvent êtes jugés ou non. Beaucoup d’altruistes proclamés ou êtres bons font de bonnes actions aussi pour qu’on les apprécie, se faire bien voir ou pour savoir qu’ils sont bons. Ce n’est pas pour autant qu’ils auraient envie de faire le mal si on leur laissait la possibilité, juste que pour eux faire le bien n’est pas non plus un acte totalement désintéressé, selon leur conception du bien évidemment. » Slenlodwiin sembla réfléchir et ajouta. « Quand je fais le bien ou rend service pour ma part, c’est surtout car je veux faire le bien et parce que j’estime ça assez naturel, mais aussi parce que j’apprécie l’estime et le respect que l’on m’adresse en retour, mais aussi l’image de dragon sage et bienveillant que je peux dégager. Beaucoup d’ailleurs n’assument pas cela au fond d’eux, le fait qu’ils agissent au mieux partiellement car ils veulent bien paraître. » Même si l’égoïsme était sans doute moins un tabou chez la race dragonique en général, ça pouvait après varier selon les individus et communautés, que chez certains bipèdes en général. Après Slenlodwiin ne parlait pas spécialement d’égoïsme.

« Je pense quoiqu’il en soit que Night t’estimes et apprécie beaucoup aussi, je ne saurais pas dire après quelle est la nature véritable de votre relation, je ne suis pas dans vos têtes. J’aurais juste tendance à dire que tu trouveras au moins un refuge dans la tribu quand tu désireras te ressourcer, mais aussi des objectifs. J’avais cru comprendre d’ailleurs qu’elle avait possiblement certains ambitions pour sa tribu ? Peut-être qu’à ton retour d’Ikhyld, tu pourrais y participer ? Tu pourrais ainsi autant rendre service aux tiens, que possiblement te démarquer et en profiter pour acquérir une meilleure position. » Après tout loyauté et mérites sont les deux façons souvent d’obtenir quelque chose de ses supérieurs ou aînés.

« Il est difficile de savoir quelles sont les motivations de quelqu'un, après tout personne ou presque ne lit dans les pensées des autres. De plus, les motivations pour un même acte peuvent être multiples, et souvent le réel désir d'aider son prochain n'est pas absent, c'est mon cas notamment quand j'offre conseils et assistance. Car si seul le fait de caresser mon ego me suffisait, j'aurais eu des solutions plus aisées et efficaces pour cela. » Oui, après tout il était presque impossible de connaître quelqu’un parfaitement soyons sincère, et encore moins plusieurs personnes, donc aucun être vivant ne pouvait prétendre deviner le fond de la pensée de chacun.

Sur ce il s’inclina lui aussi, du moins du cou et de la tête à l’égard de son petit fils adoptif qui se montrait respectueux et dit avec amabilité et bienveillance.

« Prend le temps qu’il te faut pour réfléchir et décider de ton avenir, mais aussi découvrir et apprendre ce qu’il t’es nécessaire de savoir. Après tout, il serait dommage de vivre deux milles ans et de ne pas en profiter pour prendre le temps de réfléchir à la meilleure façon de faire les choses. » Ce souligné d’un ton légèrement amusé, avant de reprendre un peu taquin.

« Je suppose que ça te feras une bonne excuse pour revenir me voir à un moment ou à un autre ? Si c’est le cas n’hésite pas, sache bien entendu que je ne compte me mêler d’aucune querelle de faction, mais que je reste à l’écoute et disposé à converser avec toi si tu en ressens le besoin. Enfin, n’attend pas non plus plusieurs siècles pour cela, je me fais vieux après tout, même pour notre honorable et ancienne race... » Oui, après tout le terme ancien désignait bien Slenlodwiin sous tous ses aspects, aussi bien pour sa sagesse et sa respectabilité, que finalement aussi pour son grand âge...

L’ancien dragon hocha la tête d'un air amusé et bienveillant à l’égard de son petit fils qui promit de revenir si possible avec de bonnes nouvelles. Soit, il ne s’attendait pas après à ce qu’il revienne très bientôt, mais pour le coup au moins il n’attendrait pas un bon siècle, littéralement, avant la prochaine visite. Quant au reste, il espérait évidemment que tout ira au mieux pour son petit fils adoptif, mais aussi pour Night par extension, même dans le cas où les deux finiraient d’une façon ou d’une autre par prendre des chemins différents. Après tout de bien des façons et mêmes pour eux les dragons, peuple bien singulier, la vie pouvait s’avérer surprenante de bien des façons.

Quoiqu’il en soit, le jeune saurien prit donc congé et laissa l’ancien au calme environnant, ancien qui se demanda certainement s’il allait à nouveau dormir, s’occuper du jardin étrange et géant qui l’entourait, ou aller rendre visite à la communauté dont il était l’un des dirigeants. Bonne question, quoiqu’il en soit rien n’était spécialement pressant pour lui actuellement, après tout de ses deux millénaires d’existence, du moins presque, il avait largement sut apprendre quand la situation pouvait être pressante ou non pour lui. Et en ces belles mais sauvages terres d’Eïrn c’était heureusement plus souvent paisible que l’inverse.

Ainsi débuta sa journée d’une certain façon pour lui et une nouvelle vie pour quelqu’un de sa famille, où la destinée mènerait-elle le jeune saurien brumeux ? Difficile à dire, mais reste qu’il ne manquerait sans doute pas d’opportunités en ces terres vastes qu’étaient Orzian. Mais est-ce la gloire ou l’infamie qui se trouveront au bout du chemin ? Marquera t-il son nom dans l’histoire du continent ? Tout cela ne dépendra que de lui, comme beaucoup de choses d’ailleurs.